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27/12/2021 | FRANCE | N°20MA03599

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 27 décembre 2021, 20MA03599


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... et M. D... A... ont demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 12 octobre 2018 par lequel le maire de Peymeinade a refusé l'ouverture au public de l'établissement " la Tonnelle d'Honoré " et leur a ordonné d'en cesser l'exploitation.

Par un jugement n° 1805497 du 17 juillet 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 septembre 2020 et le 10 septembre 202

1, Mme A..., représentée par Me Aonzo, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 17 j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... et M. D... A... ont demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 12 octobre 2018 par lequel le maire de Peymeinade a refusé l'ouverture au public de l'établissement " la Tonnelle d'Honoré " et leur a ordonné d'en cesser l'exploitation.

Par un jugement n° 1805497 du 17 juillet 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 septembre 2020 et le 10 septembre 2021, Mme A..., représentée par Me Aonzo, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 17 juillet 2020 du tribunal administratif de Nice ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 octobre 2018 du maire de Peymeinade ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Peymeinade la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a intérêt à agir en première instance et en appel ;

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- il ne répond pas à l'ensemble des moyens soulevés ;

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- la maison qu'elle sous-louait ne constitue pas un établissement recevant du public ;

- elle ne pouvait être destinataire de l'arrêté de fermeture ;

- l'injonction prononcée porte une atteinte illégale à la protection du domicile, à la liberté dans l'usage de ses biens et à la liberté de réunion, ainsi qu'aux articles 8 et 11 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les établissements recevant du public ne s'étendent pas aux locaux à usage d'habitation ;

- l'existence de troubles à la tranquillité publique n'est pas établie ;

- il en va de même pour les risques pour la sécurité publique ;

- le motif tenant à la violation du règlement de la zone UC du plan local d'urbanisme est erroné.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juin 2021, la commune de Peymeinade, représentée par Me Orlandini, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête présentée par Mme A... ;

2°) de mettre à sa charge la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- Mme A... n'a pas intérêt à agir en première instance et en appel, car l'établissement est exploité de manière irrégulière ;

- les moyens qu'elle soulève ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la cour a désigné M. Marcovici, président assesseur de la 5ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de M. Mérenne,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- et les observations de Me Gadd, substituant Me Orlandini, avocat de la commune de Peymeinade.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A... et M. D... A... étaient locataires d'une maison individuelle située 46 avenue des Jaïsous à Peymeinade, qu'ils mettaient occasionnellement en sous-location sous l'enseigne " la Tonnelle d'Honoré ". Par un arrêté du 12 octobre 2018, le maire de Peymeinade a refusé l'ouverture au public de cet établissement et leur a ordonné d'en cesser l'exploitation.

2. Mme A... fait appel du jugement du 17 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

3. D'une part, le jugement attaqué écarte à son point 2 le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté par des motifs qui ne sont pas eux-mêmes entachés d'insuffisance de motivation.

4. D'autre part, le tribunal administratif, en jugeant au point 3 que l'absence d'autorisation d'ouverture au public en tant qu'établissement recevant du public suffisait à justifier l'arrêté contesté, a implicitement mais nécessairement écarté les moyens contestant les autres motifs de ce dernier.

Sur le bien-fondé du jugement :

5. En premier lieu, l'arrêté contesté, quand bien même il " procède par voie d'affirmation " et ne comporte pas les précisions dont l'absence est contestée par Mme A..., cite les textes applicables, décrit la nature et l'activité de l'établissement, et expose de façon détaillée les manquements qu'il retient à la réglementation relative aux établissements recevant du public. Il comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est ainsi suffisamment motivé, conformément aux articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.

6. En deuxième lieu, il résulte du premier alinéa de l'article R. 123-2 du code de la construction et de l'habitation, devenu l'article R. 143-2 du même code, que " constituent des établissements recevant du public tous bâtiments, locaux et enceintes dans lesquels des personnes sont admises, soit librement, soit moyennant une rétribution ou une participation quelconque, ou dans lesquels sont tenues des réunions ouvertes à tout venant ou sur invitation, payantes ou non. "

7. Il ressort des pièces du dossier que M. et Mme A... mettaient habituellement en location les lieux en sous-location, par la voie d'annonces et d'un site internet dédié, pour l'organisation d'évènements privés tels que " des cérémonies laïques, des animations culinaires, des mariages, des séminaires, des réceptions, des soirées à thème ... " A la supposer établie, la circonstance que ces évènements aient été uniquement organisés " sur invitation " répond aux termes de la définition des établissements recevant du public citée au point 6. L'absence " d'un minimum d'équipements et de services communs " et de " la fourniture d'un quelconque service ", au demeurant contredite par les pièces du dossier, est indifférente à la qualification d'un établissement recevant du public de cette nature. L'activité de chambres d'hôtes, déclarée par les locataires postérieurement à l'arrêté contesté, a été prise en compte par la sous-commission départementale pour la sécurité contre les risques d'incendie et de panique, qui, après sa visite du 27 août 2018, a considéré que les lieux constituaient un établissement recevant du public de quatrième catégorie de type L (salles à usage d'audition, de conférences, de réunions, de spectacles ou à usages multiples) et a tenu compte de la capacité de vingt couchages pour le classer également en type O (hôtels et autres établissements d'hébergement). Cette activité n'exclut pas davantage la qualification d'établissement recevant du public. Enfin, la circonstance que les locataires aient élu leur domicile dans une partie du bâtiment ne fait pas non plus obstacle à la qualification d'établissement recevant du public, dès lors qu'il répond à la définition citée au point 6.

8. En troisième lieu, la circonstance que Mme A... se soit bornée à mettre les lieux en sous-location, sans être elle-même l'organisatrice des évènements, ne faisait pas obstacle à l'exercice, par le maire, des pouvoirs qui lui sont confiés pour assurer la protection contre les risques d'incendie et de panique dans les immeubles recevant du public.

9. En quatrième lieu, il résulte de l'instruction que le maire de Peymeinade aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur les seuls motifs tirés de ce que les lieux constituaient un établissement recevant du public fonctionnant sans autorisation et en infraction avec la législation afférente. Il n'est dès lors pas nécessaire de se prononcer sur la légalité des autres motifs de l'arrêté contesté.

10. En cinquième lieu, Mme A... indique elle-même se borner à mettre les lieux en sous-location sans organiser d'évènements. L'arrêté contesté ne porte donc pas atteinte à sa liberté de réunion et d'association protégée, par l'article 11 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

11. En sixième lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 1er de son premier protocole additionnel admettent chacun, au second paragraphe, que les autorités publiques puissent limiter les droits qu'ils protègent dans l'intérêt de la sécurité publique. La législation relative aux établissements recevant du public a notamment pour objet de protéger les personnes présentes contre les risques d'incendie et de panique. En l'espèce, la sous-commission a relevé de multiples manquements aux règles de sécurité applicables à l'établissement, d'ailleurs non contestés, qui sont de nature à placer les personnes présentes en danger. Par suite, ni la législation relative aux établissements recevant du public, ni l'arrêté contesté, n'ont porté une atteinte disproportionnée aux droits de la requérante au respect de son domicile et au respect des biens.

12. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

13. Il n'est dès lors pas nécessaire de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée en défense par la commune de Peymeinade.

Sur les frais liés au litige :

14. Il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de Mme A... le versement de la somme de 1 000 euros à la commune de Peymeinade au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens. Les dispositions de cet article font en revanche obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par Mme A... sur le même fondement.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Mme A... versera à la commune de Peymeinade la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Peymeinade.

Délibéré après l'audience du 20 décembre 2021, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Mérenne et Mme C..., premiers conseillers.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 décembre 2021.

3

No 20MA03599


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA03599
Date de la décision : 27/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-05-003 Police. - Polices spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Sylvain MERENNE
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : AONZO

Origine de la décision
Date de l'import : 11/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-12-27;20ma03599 ?
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