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21/12/2021 | FRANCE | N°19MA05240

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 21 décembre 2021, 19MA05240


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler " la décision du 19 février 2015 notifiée le 9 novembre 2016 " par laquelle le Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) lui a interdit d'exercer les activités prévues à l'article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure pour une durée de 5 ans et lui a infligé une pénalité financière de 50 000 euros, et d'enjoindre au CNAPS de procéder au réexamen de sa situation.

Par un jugement n° 1609820 du

30 septembre 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes.

Procédu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler " la décision du 19 février 2015 notifiée le 9 novembre 2016 " par laquelle le Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) lui a interdit d'exercer les activités prévues à l'article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure pour une durée de 5 ans et lui a infligé une pénalité financière de 50 000 euros, et d'enjoindre au CNAPS de procéder au réexamen de sa situation.

Par un jugement n° 1609820 du 30 septembre 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 novembre 2019 et le 1er avril 2020, Mme B... A..., représentée par Me Pelgrin, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 30 septembre 2019 ;

2°) d'annuler " la décision du 19 février 2015 notifiée le 9 novembre 2016 " par laquelle le Conseil national des activités privées de sécurité lui a interdit d'exercer les activités prévues à l'article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure pour une durée de 5 ans et lui a infligé une pénalité financière de 50 000 euros ;

3°) d'enjoindre au Conseil national des activités privées de sécurité de procéder au réexamen de sa situation à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge du Conseil national des activités privées de sécurité une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision attaquée a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors qu'elle n'a pas été avisée du contrôle de la société, qu'elle n'était pas présente à ce contrôle, qu'elle n'a pas reçu le compte rendu de ce contrôle et qu'elle n'a pas reçu la convocation à la séance de la commission interrégionale d'agrément et de contrôle Sud (CIAC) ;

- elle n'avait pas à transmettre ses changements d'adresse à l'administration en 2014 et 2015 ;

- la décision attaquée est entachée d'erreurs de fait dès lors qu'elle disposait d'un agrément en qualité de dirigeant en application de l'article L. 612-6 du code de la sécurité intérieure, que la CIAC n'a précisé ni l'objet, ni la date, ni la nature de la facture à laquelle elle a eu accès et qui ne mentionnait pas la contribution due par la société en application de l'article 1609 quintricies du code général des impôts, que la société était assurée au titre de la responsabilité civile des sociétés de sécurité et que le changement de gérance a fait l'objet des formalités légales requises ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'elle n'est plus gérante de la société depuis le 1er juin 2013 et que, par suite, elle n'avait plus d'obligation à remplir s'agissant de la société ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mars 2020, le Conseil national des activités privées de sécurité conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme B... A... une somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- à titre principal, la requête est irrecevable, faute pour la requérante d'avoir exercé devant la commission nationale d'agrément et de contrôle (CNAC) du Conseil national des activités privées de sécurité, à l'encontre de la décision de la CIAC du 19 février 2015, le recours administratif préalable obligatoire à l'exercice d'un recours contentieux, dans le délai requis ;

- la demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet de son recours gracieux contre la décision du Conseil national des activités privées de sécurité daté du 12 décembre 2016 est irrecevable car nouvelle en appel ;

- les moyens de légalité externe soulevés à l'encontre des décisions attaquées sont irrecevables car présentés postérieurement à l'expiration du délai de recours ;

- les moyens soulevés à l'encontre des décisions attaquées ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Renault,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

- et les observations de Me Pelgrin, représentant Mme B... A... et Me Briere, représentant le Conseil national des activités privées de sécurité.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'un contrôle de la société " Protection et sécurité " dont Mme B... A... était la gérante, réalisé le 6 novembre 2013, la commission interrégionale d'agrément et de contrôle Sud (CIAC) a, par une décision du 19 février 2015, interdit à celle-ci d'exercer toute activité prévue à l'article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure pour une durée de 5 ans et lui a infligé une pénalité financière de 50 000 euros. Un titre de perception a été émis le 22 avril 2016 par la direction régionale des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur pour le recouvrement de cette pénalité. Par une décision du 9 novembre 2016, le Conseil national des activités privées de sécurité a informé Mme B... A... qu'il rejetait sa demande, en date du 27 juillet 2016, adressée à la direction générale des finances publiques de la région Provence Alpes-Côte d'Azur et que cette dernière lui avait transmise, par laquelle elle sollicitait " une régularisation de [son] dossier ". Par un courrier daté du 12 décembre 2016, à laquelle il n'a pas été apporté de réponse, Mme B... A... a contesté devant la commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité la décision prise à son encontre d'interdiction d'exercer toute activité prévue à l'article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure pour une durée de 5 ans et lui infligeant une pénalité financière de 50 000 euros. Mme B... A... relève appel du jugement du 30 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de " la décision du 19 février 2015 notifiée le 9 novembre 2016 " et demande l'annulation, d'une part, de la décision lui interdisant d'exercer toute activité prévue à l'article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure pour une durée de 5 ans et lui infligeant une pénalité financière de 50 000 euros et, d'autre part, de la décision implicite de rejet de son recours du 12 décembre 2016 contre cette décision.

Sur la recevabilité des demandes :

En ce qui concerne la décision du 19 février 2015 :

2. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure, dans sa rédaction applicable au litige : " Sont soumises aux dispositions du présent titre, dès lors qu'elles ne sont pas exercées par un service public administratif, les activités qui consistent : / 1° A fournir des services ayant pour objet la surveillance humaine ou la surveillance par des systèmes électroniques de sécurité ou le gardiennage de biens meubles ou immeubles ainsi que la sécurité des personnes se trouvant dans ces immeubles ; (...) ". Aux termes de l'article L. 633-1 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Dans chaque région, une commission régionale d'agrément et de contrôle est chargée, au nom du Conseil national des activités privées de sécurité : / (...) / 3° De prononcer les sanctions disciplinaires prévues à l'article L. 634-4 (...) ". Aux termes de l'article L. 634-4 de ce code, dans sa rédaction applicable au litige : " Tout manquement aux lois, règlements et obligations professionnelles et déontologiques applicables aux activités privées de sécurité peut donner lieu à sanction disciplinaire. Le Conseil national des activités privées de sécurité ne peut être saisi de faits remontant à plus de trois ans s'il n'a été fait aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction. / Les sanctions disciplinaires applicables aux personnes physiques et morales exerçant les activités définies aux titres Ier et II sont, compte tenu de la gravité des faits reprochés : l'avertissement, le blâme et l'interdiction d'exercice de l'activité privée de sécurité à titre temporaire pour une durée qui ne peut excéder cinq ans. En outre, les personnes morales et les personnes physiques non salariées peuvent se voir infliger des pénalités financières. Le montant des pénalités financières est fonction de la gravité des manquements commis et, le cas échéant, en relation avec les avantages tirés du manquement, sans pouvoir excéder 150 000 €. Ces pénalités sont prononcées dans le respect des droits de la défense ". Aux termes de l'article L. 633-3 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Tout recours contentieux formé par une personne physique ou morale à l'encontre d'actes pris par une commission régionale d'agrément et de contrôle est précédé d'un recours administratif préalable devant la Commission nationale d'agrément et de contrôle, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux ". Aux termes de l'article R. 633-9 de ce code enfin : " Le recours administratif préalable obligatoire devant la Commission nationale d'agrément et de contrôle prévu à l'article L. 633-3 peut être exercé dans les deux mois de la notification, par la commission locale d'agrément et de contrôle, de la décision contestée. Cette notification précise les délais et les voies de ce recours. / Toute décision de la Commission nationale d'agrément et de contrôle se substitue à la décision initiale de la commission locale d'agrément et de contrôle (...) ".

3. L'institution d'un recours administratif préalable obligatoire à la saisine du juge, vise à laisser à l'autorité compétente pour en connaître le soin d'arrêter définitivement la position de l'administration. Pour autant, dès lors que le recours administratif obligatoire a été adressé à l'administration préalablement au dépôt de la demande contentieuse, la circonstance que cette dernière demande ait été présentée de façon prématurée, avant que l'autorité administrative ait statué sur le recours administratif, ne permet pas au juge administratif de la rejeter comme irrecevable si, à la date à laquelle il statue, est intervenue une décision, expresse ou implicite, se prononçant sur le recours administratif. Il appartient alors au juge administratif, statuant après que l'autorité compétente a définitivement arrêté sa position, de regarder les conclusions dirigées formellement contre la décision initiale comme tendant à l'annulation de la décision, née de l'exercice du recours administratif préalable, qui s'y est substituée.

4. Il résulte de l'instruction que Mme B... A... a saisi le président de la commission interrégionale d'agrément et de contrôle Sud, par courrier adressé au CIAC le 12 décembre 2016 et enregistré par les services de la commission le 14 décembre 2016, d'une demande qui doit être regardée comme un recours administratif préalable au sens des dispositions précitées de l'article L. 633-3 du code de sécurité intérieure. Ainsi, Mme B... A... avait bien adressé à l'autorité compétente un recours administratif préalable obligatoire contre la décision du 19 février 2015 antérieurement à la date d'enregistrement de la requête de l'intéressée devant le tribunal administratif de Marseille, le 14 décembre 2016. Dans ces conditions, les conclusions dirigées contre la décision du 19 février 2015, irrecevables, doivent être regardées comme dirigées contre la décision implicite née, en cours d'instance, du silence gardé sur le recours présenté contre cette décision.

En ce qui concerne la décision implicite de rejet de la demande du 12 décembre 2016 :

5. Il résulte de l'instruction que la décision du 19 février 2015 a été présentée, pour la seconde fois, le 7 mars 2015, à l'adresse personnelle de Mme B... A..., au 159, bd Henri Barnier, Marseille 15ème et que le pli a été retourné au service avec la mention " pli avisé non réclamé ". Cette adresse est celle qui avait été communiquée aux services du CNAPS et qui figure encore sur le dépôt de plainte qu'elle a déposée le 17 février 2014 contre le nouveau gérant de la société. Mme B... A... a certes loué un logement à Draguignan, au 62 rue Antoine Lombard, en janvier 2014, mais sans justifier avoir cessé d'occuper le logement situé boulevard Henri Barnier à Marseille. En tout état de cause, Mme B... A... n'indique pas avoir fait de quelconques démarches pour signaler son changement d'adresse et ne peut se prévaloir de la circonstance qu'elle n'était plus gérante de la société depuis le 1er juin 2013, date à laquelle elle a cédé ses parts et transmis la gérance, dès lors qu'en application de l'article L. 634-4 du code de sécurité intérieure, sa responsabilité pouvait être recherchée pour des irrégularités commises dans les trois années précédant la fin de son activité de gérante de la société. Dans ces conditions, le pli contenant la décision du 19 février attaqué, qui comportait la mention des voies et délais de recours, doit être regardé comme lui ayant été régulièrement notifié le 7 mars 2015. Le recours préalable formé contre cette décision, le 12 décembre 2016, a été introduit postérieurement au délai de deux mois prévu par l'article R. 633-9 de ce code. Il est, ainsi, tardif, et, par suite, irrecevable.

6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... A... n'est pas fondée à se plaindre que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le Conseil national des activités privées de sécurité, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à Mme B... A... la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de cette dernière la somme demandée par le Conseil national des activités privées de sécurité au titre des mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête du Mme B... A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le Conseil national des activités privées de sécurité au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme E... B... A... et au Conseil national des activités privées de sécurité.

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2021, où siégeaient :

- M. Badie, président,

- M. Revert, président assesseur,

- Mme Renault, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition du greffe, le 21 décembre 2021.

6

N° 19MA05240


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-01-02-01 Procédure. - Introduction de l'instance. - Liaison de l'instance. - Recours administratif préalable.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: Mme Thérèse RENAULT
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : PELGRIN

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Date de la décision : 21/12/2021
Date de l'import : 11/01/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19MA05240
Numéro NOR : CETATEXT000044841075 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-12-21;19ma05240 ?
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