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16/12/2021 | FRANCE | N°20MA03395

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 16 décembre 2021, 20MA03395


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... Amiel a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté rectoral du 27 novembre 2018 l'autorisant à reprendre ses fonctions de conseillère principale d'éducation au collège Jean Giono à Nice en tant qu'il a fixé la date de cette reprise à compter du 28 novembre 2018 au lieu du 1er novembre 2018, de condamner en conséquence le rectorat de l'académie de Nice au paiement de la somme de 1 348,33 euros du fait du versement erroné d'un demi-traitement du 2 au 27 novembre 2018 au lieu

d'un traitement complet et de condamner le rectorat de l'académie de Nice a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... Amiel a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté rectoral du 27 novembre 2018 l'autorisant à reprendre ses fonctions de conseillère principale d'éducation au collège Jean Giono à Nice en tant qu'il a fixé la date de cette reprise à compter du 28 novembre 2018 au lieu du 1er novembre 2018, de condamner en conséquence le rectorat de l'académie de Nice au paiement de la somme de 1 348,33 euros du fait du versement erroné d'un demi-traitement du 2 au 27 novembre 2018 au lieu d'un traitement complet et de condamner le rectorat de l'académie de Nice au paiement de la somme de 900 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi qu'aux entiers dépens.

Par un jugement n° 1902364 du 6 juillet 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires en réplique enregistrés les 7 septembre 2020, 14 et 15 octobre 2021, Mme Amiel, représentée par Me Padovani, demande à la Cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté rectoral du 27 novembre 2018 l'autorisant à reprendre ses fonctions de conseillère principale d'éducation au collège Jean Giono à Nice en tant qu'il a fixé la date de cette reprise à compter du 28 novembre 2018 au lieu du 1er novembre 2018 ;

3°) de condamner en conséquence le rectorat de l'académie de Nice au paiement de la somme de 1 348,33 euros du fait du versement erroné d'un demi-traitement du 2 au 27 novembre 2018 au lieu d'un traitement complet ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête est recevable, exposant les moyens de fait et de droit sur lesquels elle s'appuie ;

- sa réintégration tardive à compter du 28 novembre 2018 résulte de l'inaction de l'administration, l'expertise médicale sollicitée par le recteur n'ayant eu lieu que le 12 novembre 2018 par convocation par courrier du 27 septembre 2018, de sorte qu'elle est en droit de demander à ce que sa réintégration dans ses fonctions de conseillère principale d'éducation au collège Jean Giono à Nice prenne effet de manière rétroactive à compter du 2 novembre 2018, alors qu'elle avait demandé cette réintégration à mi-temps thérapeutique par courrier du 11 septembre 2018 ;

- l'inertie fautive de l'administration lui cause un préjudice dont elle est fondée à demander réparation, ses droits à plein traitement ayant pris fin le 1er novembre 2018 ;

- n'ayant été rémunérée au mois de novembre 2018 qu'à demi traitement, elle est en droit de demander, par compensation avec le plein traitement, une somme de 1 348,33 euros en réparation de son manque à gagner du 1er au 27 novembre 2018 ;

- le mémoire en défense du recteur est irrecevable, faute de comporter sa signature et faute de récapituler les moyens de 1ère instance, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative ;

- sa réintégration aurait dû intervenir de manière rétroactive.

Par des mémoires en défense enregistrés le 23 septembre 2021 et le 18 octobre 2021, le recteur de l'académie de Nice conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- à titre principal, la requête est irrecevable, en application de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, faute d'indiquer les moyens de fait et de droit sur lesquels elle est fondée ;

- à titre subsidiaire, la requête n'est pas fondée, les décisions de l'administration ne disposant que pour l'avenir et l'administration n'ayant fait preuve d'aucune inertie fautive, la requérante n'ayant saisi le rectorat d'une demande de reprise à mi-temps thérapeutique que par courrier du 11 septembre 2018.

Par ordonnance du 20 octobre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 novembre 2021 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... Taormina, rapporteur,

- et les conclusions de M. B... Thielé, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme Amiel relève appel du jugement n° 1902364 du 6 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête.

Sur la recevabilité des conclusions des parties :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 811-13 du code de justice administrative : " Sauf dispositions contraires prévues par le présent titre, l'introduction de l'instance devant le juge d'appel suit les règles relatives à l'introduction de l'instance de premier ressort... ". Aux termes de l'article R. 411-1 du même code : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge... ". La requête d'appel de Mme Amiel contient l'exposé des faits et moyens ainsi que l'énoncé de ses conclusions. Dès lors, le recteur de l'académie de Nice n'est pas fondé à soutenir que sa requête est irrecevable pour ne pas avoir exposé les faits et moyens d'appel à l'appui de ses conclusions. Par suite, la fin de non-recevoir opposée à ce titre doit être écartée.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 811-7 du code de justice administrative : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 774-8 (relatif aux contraventions de grande voirie), les appels ainsi que les mémoires déposés devant la cour administrative d'appel doivent être présentés, à peine d'irrecevabilité, par l'un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2... ". Aux termes de l'article R. 431-2 du même code : " Les requêtes et les mémoires doivent, à peine d'irrecevabilité, être présentés soit par un avocat, soit par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, lorsque les conclusions de la demande tendent au paiement d'une somme d'argent, à la décharge ou à la réduction de sommes dont le paiement est réclamé au requérant ou à la solution d'un litige né de l'exécution d'un contrat. / La signature des requêtes et mémoires par l'un de ces mandataires vaut constitution et élection de domicile chez lui ". Aux termes de l'article R. 431-4 du même code : " Dans les affaires où ne s'appliquent pas les dispositions de l'article R. 431-2, les requêtes et les mémoires doivent être signés par leur auteur et, dans le cas d'une personne morale, par une personne justifiant de sa qualité pour agir ". Il résulte de ces dispositions que devant la cour d'appel, à peine d'irrecevabilité, les requêtes et mémoires doivent être signés par le mandataire ou, lorsqu'il n'est pas nécessaire de constituer un avocat ou un avocat aux Conseils, par la personne physique ou le représentant de la personne morale partie à la procédure. En l'espèce, le mémoire en défense du recteur de l'académie de Nice comporte la signature du secrétaire général du rectorat de l'académie de Nice. Il est, dès lors, recevable. Par suite, la fin de non-recevoir opposée à ce titre par Mme Amiel doit être écartée.

4. En troisième lieu, en l'espèce, il n'a pas été demandé aux parties de déposer des conclusions récapitulatives et aucune disposition législative ou règlementaire ni aucun principe général du droit n'impose aux parties de déposer d'office de telles conclusions, ni de reprendre expressément tous les moyens développés en première instance. Dès lors, les fins de non-recevoir que Mme Amiel prétend opposer à ces différents titres ne sont pas fondées et doivent, par suite, être écartées.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

5. Aux termes de l'article 41 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires : " Le bénéficiaire d'un congé de longue maladie ou de longue durée ne peut reprendre ses fonctions à l'expiration ou au cours dudit congé que s'il est reconnu apte, après examen par un spécialiste agréé et avis favorable du comité médical compétent. / Cet examen peut être demandé soit par le fonctionnaire, soit par l'administration dont il relève... ". Aux termes de l'article 42 du même décret : " Si, au vu de l'avis du comité médical compétent... le fonctionnaire est reconnu apte à exercer ses fonctions, il reprend son activité... ". Aux termes de l'article 47 dudit décret : " Le fonctionnaire ne pouvant, à l'expiration de la dernière période de congé... de longue durée, reprendre son service est soit reclassé dans un autre emploi, en application du décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 pris en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat en vue de faciliter le reclassement des fonctionnaires de l'Etat reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions, soit mis en disponibilité, soit admis à la retraite après avis de la commission de réforme. / Pendant toute la durée de la procédure requérant soit l'avis du comité médical, soit l'avis de la commission de réforme, soit l'avis de ces deux instances, le paiement du demi-traitement est maintenu jusqu'à la date de la décision de reprise de service ou de réintégration, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite ".

S'agissant des conclusions à fin d'annulation de l'arrêté rectoral du 27 novembre 2018 :

6. Il résulte de ces dispositions qu'un agent public ne peut être réintégré dans ses fonction sans qu'ait été rendu, préalablement à cette réintégration, un avis favorable du comité médical départemental. Dès lors, Mme Amiel n'est pas fondée à soutenir que le recteur de l'académie de Nice aurait entaché d'illégalité son arrêté du 27 novembre 2018 en tant qu'il n'a fixé la date de sa réintégration qu'à compter du 28 novembre 2018 dès lors qu'au 1er novembre 2018, aucun avis médical n'avait encore été émis. Par suite, le tribunal administratif de Nice était fondé à rejeter ses conclusions à fin d'annulation de cet arrêté.

S'agissant des conclusions indemnitaires :

7. Si, lorsqu'un agent public a, avant la fin d'un congé de maladie, formé une demande de réintégration et obtenu un avis favorable du comité médical départemental, l'agent est, en cas d'inaction de l'administration, réputé être réintégré dès le lendemain du dernier jour de son congé de maladie, cette inaction est fautive et de nature à engager la responsabilité de l'administration qui ne le réintègre pas avant cette date lorsque cet agent a sollicité cette réintégration anticipée suffisamment à l'avance et que l'administration a, sans motif légitime, tardé à organiser cette réintégration.

8. Mme Amiel, conseillère principale d'éducation au collège Jean Giono à Nice, a été placée en congé de longue durée du 2 novembre 2015 au 1er novembre 2018. Ayant, par courrier du 11 septembre 2018, demandé sa réintégration à mi-temps thérapeutique pour le 1er novembre 2018, elle a été convoquée par courrier du 27 septembre 2018 à une expertise médicale pour le 12 novembre 2018 et n'a été effectivement réintégrée à son poste qu'à compter du 28 novembre 2018, en application de l'arrêté rectoral du 27 novembre 2018. Par courrier du 22 janvier 2019, Mme Amiel a formé un recours gracieux contre cet arrêté en tant qu'il n'a pas fixé au 1er novembre 2018 la date de sa réintégration, en demandant le versement du plein traitement sur la période du 1er au 27 novembre 2018, qui a fait l'objet d'une décision implicite de rejet.

9. Il résulte de ce qui précède que Mme Amiel a sollicité suffisamment à l'avance, dès le 11 septembre 2018, sa réintégration au 1er novembre 2018. Le recteur de l'académie de Nice ne pouvait, sans engager sa responsabilité, faute de motif légitime de nature à expliquer le retard pris dans l'organisation de l'expertise médicale nécessaire à cette reprise, ne pas veiller à ce que celle-ci ait lieu dans des conditions permettant que la réintégration de Mme Amiel ait effectivement lieu à la date du 1er novembre 2018. Dès lors, Mme Amiel est fondée à demander la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 1 348,33 euros en réparation de son manque à gagner du fait du versement erroné d'un demi-traitement du 2 au 27 novembre 2018.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie... perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens... ".

11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme Amiel et non compris dans les dépens, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1902364 du 6 juillet 2020 rendu par le tribunal administratif de Nice est annulé.

Article 2 : L'Etat est condamné à payer à Mme Amiel une somme de 1 348,33 euros.

Article 3 : Il est mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... Amiel et au recteur de l'académie de Nice.

Délibéré après l'audience du 13 décembre 2021, où siégeaient :

- M. Guy Fédou, président,

- M. A... Taormina, président assesseur,

- M. Olivier Guillaumont, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 décembre 2021.

N° 20MA03395 6


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA03395
Date de la décision : 16/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-12-03-02 Fonctionnaires et agents publics. - Agents contractuels et temporaires. - Fin du contrat. - Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : M. FEDOU
Rapporteur ?: M. Gilles TAORMINA
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : PADOVANI

Origine de la décision
Date de l'import : 28/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-12-16;20ma03395 ?
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