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14/12/2021 | FRANCE | N°19MA02844

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 14 décembre 2021, 19MA02844


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat à lui verser une somme de 169 123,19 euros en réparation du préjudice né du défaut de l'Etat de l'affilier au régime général de sécurité sociale et au régime complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques, et du défaut de paiement de l'indemnité compensatrice de congés payés, assortie des intérêts au taux légal à compter du 2 avril 2012, et de condamner l'Etat à lui verser la s

omme de 10 000 euros à titre d'indemnisation pour la résistance abusive opposée à ses...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat à lui verser une somme de 169 123,19 euros en réparation du préjudice né du défaut de l'Etat de l'affilier au régime général de sécurité sociale et au régime complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques, et du défaut de paiement de l'indemnité compensatrice de congés payés, assortie des intérêts au taux légal à compter du 2 avril 2012, et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 000 euros à titre d'indemnisation pour la résistance abusive opposée à ses demandes, outre d'enjoindre au ministre chargé de l'agriculture de procéder à son affiliation auprès des organismes IRCANTEC et CARSAT sous astreinte.

Par un jugement n° 1702124 du 29 avril 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 25 juin 2019 et le 20 juillet 2020,

M. C..., représenté par Me Fromenteze, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 avril 2019 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 153 748,36 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 2 avril 2012 pour défaut de l'Etat de l'affilier au régime général de sécurité sociale et au régime complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 15 374,83 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 2 avril 2012 pour défaut de paiement de l'indemnité compensatrice de congés payés ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 10 000 euros à titre d'indemnisation pour résistance abusive opposée à ses demandes ;

5°) d'enjoindre au ministre chargé de l'agriculture de procéder à son affiliation auprès des organismes IRCANTEC et CARSAT, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la faute commise par l'Etat en ne l'affiliant pas aux organismes de retraite en raison de son mandat sanitaire emporte un droit à réparation intégrale de son préjudice ;

- les revenus qu'il a tirés de l'exercice de son mandat sanitaire, pour lesquels il ne peut produire de justificatifs, doivent être évalués forfaitairement dans la même proportion de revenus que ceux de son associé avec lequel il était associé pour moitié dans une société de fait ;

- il est fondé à réclamer également une indemnisation au titre du bénéfice des avantages liés à la qualité de salarié relatifs aux congés payés dont il a été irrégulièrement privé ;

- l'administration s'est abusivement opposée à ses demandes de paiement.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 août 2020, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête.

Il soutient à titre principal que la requête est irrecevable parce que tardive, et à titre subsidiaire, que les moyens du requérant ne sont pas fondés.

Une ordonnance du 6 août 2020 a clos l'instruction de la requête au 7 septembre 2020 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'Etat pris pour l'application de l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Ury, rapporteur,

- et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., qui exerçait la profession de vétérinaire libéral, a pris sa retraite le

1er janvier 2009. Il a demandé à l'Etat, le 2 avril 2012, à être indemnisé du préjudice résultant de l'absence de versement par ce dernier des cotisations au régime général et au régime complémentaire de retraite liées à l'activité exercée dans le cadre d'un mandat sanitaire, depuis l'année 1974, date de l'arrêté préfectoral du 30 avril 1974 qui le nomme vétérinaire sanitaire dans le département du Lot, jusqu'à l'année 1986, date à laquelle il a cessé sa participation avec le docteur A... dans une société de fait où ils étaient associés à hauteur de 50% chacun.

Par un courrier du 22 juin 2016, l'administration a rejeté la demande indemnitaire de M. C.... M. C... relève appel du jugement du 29 avril 2019 qui rejette sa requête tendant à condamner l'Etat à lui verser une somme de 153 748,36 euros pour défaut d'affiliation au régime général de sécurité sociale et au régime complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques, à condamner l'administration à lui verser une somme de 15 374,83 euros pour défaut de paiement de l'indemnité compensatrice de congés payés, ainsi qu' à condamner l'Etat à lui verser une somme de 10 000 euros à titre d'indemnisation pour résistance abusive opposée à ses demandes

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le défaut d'affiliation aux caisses de retraite et la minoration du droit à pension :

2. Le montant des rémunérations perçues par les vétérinaires libéraux au titre

d'un mandat sanitaire ne saurait se déduire de la seule existence de ce mandat, détenu par la quasi-totalité des vétérinaires à raison d'une activité qui ne revêtirait au demeurant qu'un caractère accessoire et complémentaire, en sus de leur activité libérale.

3. Il résulte de l'instruction que M. C... n'apporte pas davantage en appel qu'en première instance, s'agissant des années 1974 à 1986, d'éléments de nature à justifier de la réalité de l'exercice de son mandat sanitaire et des rémunérations qu'il en aurait tirées. Il ne peut, en conséquence, réclamer pour ces années le bénéfice d'une indemnisation au titre de la faute de l'Etat résultant du défaut de versement des cotisations sociales dues par l'employeur au titre du régime général d'assurance vieillesse et au titre du régime de retraite complémentaire.

En ce qui concerne les indemnités de congés payés :

4. Aux termes de l'article 10 du décret du 17 janvier 1986 : " I.- L'agent non titulaire en activité a droit, compte tenu de la durée de service effectué, à un congé annuel dont la durée et les conditions d'attribution sont identiques à celles du congé annuel des fonctionnaires titulaires prévu par le décret n° 84-972 du 26 octobre 1984 susvisé. / II.- (...) à la fin d'un contrat à durée déterminée, l'agent qui, du fait de l'administration, n'a pu bénéficier de tout ou partie de ses congés annuels a droit à une indemnité compensatrice de congés annuels. /L'indemnité compensatrice de congés annuels est égale au 1 / 10 de la rémunération totale brute perçue par l'agent au cours de sa période d'emploi, entre le 1er janvier et le 31 décembre de l'année en cours. L'indemnité est proportionnelle au nombre de jours de congés annuels dus non pris. (...) ".

5. Aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. (...) ".

6. La créance dont se prévaut M. C..., titulaire d'un mandat sanitaire de 1974 à 1989, qui tend à l'indemnisation du préjudice résultant de la faute de l'administration pour ne pas lui avoir versé d'indemnités de congés payés, ne se rattache pas à chaque année au titre de laquelle ces indemnités étaient dues, mais à l'année au cours de laquelle le préjudice a été connu dans toute son étendue. En l'espèce, M. C... était en mesure de quantifier les indemnités qui lui étaient dues au titre des années antérieures dès la date d'entrée en vigueur de la loi du

22 juin 1989, dont l'article 10 prévoit qu'à compter du 1er janvier 1990, les tarifs des rémunérations perçues par les vétérinaires au titre des opérations de prophylaxie collective sont fixés conventionnellement et forfaitairement et sont assimilés à des revenus tirés d'une profession libérale alors qu'elles étaient auparavant considérées comme des salaires. Or, il est constant que M. C... n'a pour la première fois demandé une indemnité compensatrice de congés payés que le 2 avril 2012, à une date où sa créance était prescrite. Ainsi, doit être accueillie l'exception de prescription opposée par le ministre et les conclusions de M. C... relatives à l'indemnité compensatrice de congés payés doivent être rejetées.

En ce qui concerne l'indemnité pour résistance abusive :

7. Le ministère chargé de l'agriculture a eu connaissance de la nécessité d'indemniser les vétérinaires chargés d'un mandat sanitaire avant le 1er janvier 1990 en raison du défaut d'affiliation aux régimes de sécurité sociale et complémentaire à compter de la date de la décision en ce sens du Conseil d'Etat le 14 novembre 2011. La circulaire organisant la marche à suivre pour cette indemnisation a été prise le 24 avril 2012. M. C... quant à lui, a formé sa première demande de régularisation de ses cotisations le 2 avril 2012. Il a reçu des courriers les 23 avril 2012, 23 avril 2014 et 29 juillet 2014, l'informant du caractère incomplet des informations transmises permettant l'examen de son dossier. Dans ces conditions, alors que, comme il vient d'être dit au point 3, M. C... ne justifie d'aucune rémunération au titre d'un mandat sanitaire, la commission compétente ne pouvait que rejeter sa demande. Ainsi,

M. C... n'est pas fondé à soutenir que le ministère de l'agriculture lui a opposé une résistance abusive dans la régularisation de sa situation au regard du régime général de sécurité sociale et du régime de retraite complémentaire. Il n'est donc pas fondé à solliciter l'indemnisation d'un quelconque préjudice à ce titre.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Le présent arrêt n'implique pas que l'administration procède à l'affiliation du requérant aux régimes général et complémentaire de sécurité sociale. Les conclusions qu'il présente à ce titre doivent donc être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. C... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Délibéré après l'audience du 9 novembre 2021, où siégeaient :

- M. Badie, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Ury, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 décembre 2021.

N° 19MA028444


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA02844
Date de la décision : 14/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Professions - charges et offices - Conditions d'exercice des professions.

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Préjudice.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Didier URY
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : SELARL FROMENTEZE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-12-14;19ma02844 ?
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