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25/11/2021 | FRANCE | N°20MA03240

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 25 novembre 2021, 20MA03240


Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mahmouti,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,

- et les observations de Me Castagnino, représentant M. A... et de Me Lalubie, représentant le CHRU de Montpellier.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... demande à la cour de réformer le jugement du 2 juillet

2020 du tribunal administratif de Montpellier en ce qu'il a limité à la somme de 3 000 euros le montant de l'indemnité a...

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mahmouti,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,

- et les observations de Me Castagnino, représentant M. A... et de Me Lalubie, représentant le CHRU de Montpellier.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... demande à la cour de réformer le jugement du 2 juillet 2020 du tribunal administratif de Montpellier en ce qu'il a limité à la somme de 3 000 euros le montant de l'indemnité au versement de laquelle il a condamné le centre hospitalier universitaire de Montpellier en réparation des préjudices résultant de la décision du 28 novembre 2013 refusant de le réintégrer sur un poste adapté et de porter le montant de cette indemnité à 38 824,10 euros. Par la voie de l'appel incident, le centre hospitalier universitaire de Montpellier demande à la cour d'annuler ce jugement en tant qu'il l'a condamné à verser à M. A... la somme de 3 000 euros.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. M. A... avait demandé au tribunal administratif de Montpellier d'assortir des intérêts légaux et leur capitalisation la somme à laquelle il condamnerait le CHU de Montpellier. Le tribunal administratif a omis de se prononcer sur ces conclusions. Il y a lieu, dès lors, d'annuler son jugement en date du 2 juillet 2020 en tant qu'il n'a pas statué sur ces conclusions et de statuer sur celles-ci par la voie de l'évocation.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la faute commise par le centre hospitalier universitaire de Montpellier :

3. L'illégalité de la décision du 28 novembre 2013 par laquelle le centre hospitalier universitaire de Montpellier a refusé de procéder à la réintégration de M. A... et a maintenu son placement en disponibilité d'office a été constatée par un jugement du tribunal administratif de Montpellier du 28 mai 2014, confirmé par un arrêt de la cour du 29 janvier 2016.

4. Il résulte en outre de l'instruction que, comme l'ont retenu les premiers juges, l'état de santé de M. A... permettait sa réintégration sur un poste adapté dans des conditions qui n'apparaissent pas excéder celles que le gestionnaire des ressources humaines d'un établissement public administratif de l'importance du centre hospitalier régional de Montpellier est à même de prendre en charge dans le cadre du reclassement d'un agent appartenant à la catégorie C. Il y a par conséquent lieu de retenir, par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal aux points 4 et 5 de son jugement, l'existence d'une faute commise par le CHU de Montpellier en se refusant, par sa décision du 28 novembre 2013, à affecter M. A... à un poste adapté à son état de santé et en choisissant d'initier deux procédures de mise à la retraite d'office pour invalidité. Ainsi, et contrairement à ce que fait valoir le CHU en défense, M. A... est en droit d'obtenir réparation des conséquences préjudiciables directement liées à cette décision illégale.

En ce qui concerne l'exception de prescription quadriennale pour les préjudices subis avant le 25 janvier 2012 :

5. Lorsqu'un litige oppose un agent public à son administration sur le montant des rémunérations auxquelles il a droit et que le fait générateur de la créance se trouve ainsi dans les services accomplis par l'intéressé, la prescription est acquise au début de la quatrième année suivant chacune de celles au titre desquelles ses services auraient dû être rémunérés. Il en va cependant différemment lorsque la créance de l'agent porte sur la réparation d'une mesure illégalement prise à son encontre et qui a eu pour effet de le priver de fonctions. En pareille hypothèse, comme dans tous les autres cas où est demandée l'indemnisation du préjudice résultant de l'illégalité d'une décision administrative, le fait générateur de la créance doit être rattaché, non à l'exercice au cours duquel la décision a été prise mais à celui au cours duquel elle a été régulièrement notifiée.

S'agissant de la période allant du 4 juillet 2008 au 14 septembre 2009 :

6. M. A... n'apporte aucun élément de nature à démontrer qu'il n'aurait pas, à tout le moins, accusé réception dans son courrier du 23 avril 2013 de la décision du 7 juin 2012, prise après le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 23 mai 2012 annulant la décision du 7 janvier 2010 le plaçant en disponibilité office, par laquelle le CHU l'a réintégré en position d'activité à compter du 4 juillet 2008. Dès lors, et comme l'a jugé à bon droit le tribunal, la créance qu'il invoque était prescrite au plus tard à compter du 1er janvier 2018. Sa réclamation préalable ayant été formée le 6 septembre 2018, M. A... n'est, ainsi que le fait valoir le CHU de Montpellier, pas fondé à demander réparation des préjudices subis antérieurement au 14 septembre 2009.

S'agissant de la période allant du 15 septembre 2009 au 25 janvier 2012 :

7. Le CHU de Montpellier fait valoir que la créance relevant de la période débutant le 15 septembre 2009, date à laquelle M. A... a été rétroactivement réintégré par un arrêté du 7 janvier 2010, jusqu'au 25 janvier 2012, date à laquelle l'intéressé a été placé en disponibilité d'office de façon rétroactive par la décision du 29 janvier 2014, serait, elle aussi prescrite, en se prévalant du caractère définitif de la décision du 7 janvier 2010. M. A... a toutefois, par un courrier du 15 novembre 2013, contesté la réalité de sa réintégration puis, par un recours contentieux formé devant le tribunal administratif de Montpellier, attaqué la décision du 28 novembre 2013 par laquelle le directeur du CHU de Montpellier a refusé de le réintégrer dans un poste correspondant à son grade. Le jugement et l'arrêt des 28 mai 2014 et 29 janvier 2016 ayant statué sur ce recours constituent autant de décisions juridictionnelles ayant reporté le nouveau point de départ de la prescription interrompue, qui ne pourrait, dans ces conditions, être acquise avant le 31 décembre 2021. Le centre hospitalier universitaire n'est, par suite, pas fondé à opposer la prescription quadriennale aux créances dont se prévaut M. A... sur cette période.

En ce qui concerne les préjudices subis par M. A... :

8. En premier lieu, M. A... ne démontre pas, par la production en appel de sa notation pour les années 2016, 2017 et 2018, qu'il avait une chance sérieuse de prétendre, de 2009 à 2014, au versement de la prime de service. Il ne démontre pas non plus le lien de causalité entre la faute commise par le CHU de Montpellier et les trois prêts qu'il expose avoir contractés. Il y a par conséquent lieu, par adoption des motifs suffisamment précis et circonstanciés retenus par le tribunal aux points 10 à 12 de son jugement, d'écarter ses demandes formées au titre de ces chefs de préjudice.

9. En second lieu, le tribunal n'a pas fait une insuffisante évaluation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence de M. A... qui sont, contrairement à ce que fait valoir le CHU en défense, en lien direct et certain avec son refus illégal de réintégrer l'intéressé sur un poste adapté à son état de santé.

10. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit utile d'ordonner une expertise, d'une part, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a limité à la somme de 3 000 euros le montant de l'indemnité au versement de laquelle il a condamné le centre hospitalier universitaire de Montpellier et, d'autre part, que ce dernier n'est pas fondé à demander, à titre incident, que soient rejetées les conclusions de la demande de M. A... tendant à l'indemnisation de tels préjudices.

Sur les intérêts et la capitalisation :

11. M. A... a droit aux intérêts de la somme de 3 000 euros à compter du 6 septembre 2018, la date de réception de sa réclamation préalable.

12. La capitalisation des intérêts a été demandée le 19 décembre 2018, date d'enregistrement de la demande de M. A... au tribunal administratif de Montpellier. Il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 6 septembre 2019, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Sur les frais liés à l'instance :

13. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à chacune des parties la charge de ses frais.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1806232 du 2 juillet 2020 du tribunal administratif de Montpellier est annulé en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions de M. A... tendant à assortir des intérêts légaux et leur capitalisation l'indemnité mise à la charge du centre hospitalier universitaire de Montpellier.

Article 2 : La somme de 3 000 euros à laquelle le tribunal administratif de Montpellier a condamné le centre hospitalier universitaire de Montpellier portera intérêts à compter du 6 septembre 2018. Les intérêts échus le 6 septembre 2019 seront capitalisés à cette date, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date, pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... et les conclusions d'appel incident du CHU de Montpellier sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au centre hospitalier universitaire de Montpellier.

Délibéré après l'audience du 10 novembre 2021 où siégeaient :

- M. Alfonsi, président de chambre,

- Mme Massé-Degois, présidente-assesseure,

- M. Mahmouti, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 novembre 2021.

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N° 20MA03240


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Comptabilité publique et budget - Dettes des collectivités publiques - Prescription quadriennale - Régime de la loi du 31 décembre 1968.

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Évaluation du préjudice - Préjudice matériel.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: M. Jérôme MAHMOUTI
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : SCP VINSONNEAU-PALIES NOY GAUER et ASSOCIES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Date de la décision : 25/11/2021
Date de l'import : 07/12/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 20MA03240
Numéro NOR : CETATEXT000044377532 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-11-25;20ma03240 ?
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