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15/07/2021 | FRANCE | N°21MA01643

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 15 juillet 2021, 21MA01643


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Belcodène a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille de prescrire une expertise aux fins de déterminer l'intensité du risque de feu de forêt prévalant sur certaines zones de son territoire et les préconisations en matière de construction qui pourraient diminuer ce risque.

Par une ordonnance n° 2009128 du 30 mars 2021, il n'a pas été fait droit à sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 30 avril 2021, la comm

une de Belcodène, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 30 m...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Belcodène a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille de prescrire une expertise aux fins de déterminer l'intensité du risque de feu de forêt prévalant sur certaines zones de son territoire et les préconisations en matière de construction qui pourraient diminuer ce risque.

Par une ordonnance n° 2009128 du 30 mars 2021, il n'a pas été fait droit à sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 30 avril 2021, la commune de Belcodène, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 30 mars 2021 ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande de première instance.

Elle soutient que, sous la contrainte du préfet, elle a été obligée de classer, dans le cadre de son plan local d'urbanisme, en zone rouge inconstructible, certaines parties de son territoire qu'elle estime, pour sa part, ne pas relever d'un niveau d'aléa moyen à exceptionnel, au regard du risque de feu de forêt ; que, tenue néanmoins de ne pas appliquer un règlement illégal, elle a délivré plusieurs permis de construire dans cette zone dont l'exécution a été suspendue par le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, l'un d'entre eux ayant même été annulé eu égard notamment " à l'absence d'éléments de nature à contredire l'analyse faite par le préfet quant à la particulière vulnérabilité de la zone aux feux de forêts " ; qu'il est donc nécessaire qu'un expert judiciaire dise si le risque a été, fût-ce pour partie, surévalué, et s'il existe, ou non, un risque d'une intensité telle que tout ou partie des terrains inclus dans cette zone doivent bien être inconstructibles ; que cette mesure présente un caractère d'utilité différent de celui de la mesure que les juges du fond pourront décider, le cas échéant, dans l'exercice de leurs pouvoirs de direction de l'instruction des différentes affaires dont ils sont saisis car il pourrait être ainsi procédé conjointement à une seule et même expertise ; que cette mesure d'expertise pourra également être utile pour le litige qui est susceptible de ressurgir dans le cadre de l'élaboration en cours du plan local d'urbanisme intercommunal du Pays d'Aubagne et de l'Etoile, plan qui se substituera au plan local d'urbanisme de Belcodène actuellement en vigueur ; que l'ordonnance du juge des référés est irrégulière dès lors qu'il a omis de répondre au moyen tiré de ce que l'instruction de toute demande d'autorisation d'urbanisme dans cette zone nécessite que la réelle intensité du risque en cause soit enfin identifiée, alors que la commune ne dispose pas des moyens techniques nécessaires pour régler la contrariété des données techniques à disposition.

Par un mémoire, enregistré le 31 mai 2021, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que l'affirmation selon laquelle la commune ne dispose pas des moyens techniques nécessaires pour régler la contrariété des données techniques à disposition n'était assortie d'aucun élément précis permettant au juge d'en apprécier le bien-fondé de sorte que le juge des référés pouvait l'écarter sans avoir à justifier d'une motivation particulière ; qu'il est incontestable que, dans le cadre des instances actuellement pendantes sur la légalité des permis de construire délivrés, le juge administratif aura à se prononcer sur le caractère pertinent du classement en zone rouge des terrains d'assiette de ces permis de construire ainsi que sur leur constructibilité et pourra, le cas échéant, ordonner, dans l'exercice de ses pouvoirs de direction de l'instruction, une mesure d'expertise visant à évaluer les risques afférents à ces terrains ; que, de même, si un litige naissait suite à l'élaboration du plan local d'urbanisme intercommunal du Pays d'Aubagne et de l'Etoile, plan qui a vocation à se substituer au plan local d'urbanisme de Belcodène, le juge, saisi d'un recours au fond, pourra ordonner en vertu de son pouvoir général de direction de l'instruction une mesure d'expertise visant à déterminer la pertinence du classement des zones opéré par ce plan ; que, dès lors, c'est sans commettre d'erreur de droit que le juge des référés a considéré que la mesure d'expertise demandée ne présentait pas le caractère d'utilité requis par l'article R. 532-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête (...) prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction ". En vertu de l'article L. 555-1 du même code, le président de la cour administrative d'appel est compétent pour statuer sur les appels formés contre les décisions rendues par le juge des référés.

2. La commune de Belcodène a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille de prescrire une expertise aux fins de déterminer l'intensité du risque de feu de forêts prévalant sur certaines zones de son territoire et les préconisations en matière de construction qui pourraient diminuer ce risque. Par l'ordonnance attaquée du 30 mars 2021, la juge des référés a refusé de faire droit à sa demande, au motif que la commune requérante ne justifie d'aucune circonstance particulière qui confèrerait à la mesure qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner une utilité distincte de celle que les juges du fond saisis de recours formés contre les permis de construire délivrés par le maire de la commune dans ces zones seront eux-mêmes en mesure d'ordonner, en vertu de leur pouvoir général de direction de l'instruction, s'ils ne trouvent pas au dossier les éléments leur permettant de trancher la contestation dont ils sont saisis.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

3. En indiquant, dans les termes qui viennent d'être rappelés, les motifs pour lesquels elle estimait que la mesure d'expertise demandée ne présentait pas le caractère d'utilité requis par l'article R. 532-1 du code de justice administrative, la juge des référés a suffisamment motivé l'ordonnance attaquée, quand bien même la commune avait fait valoir, sans que cela soit mentionné, qu'elle ne disposait pas des moyens techniques nécessaires pour régler la contrariété des données techniques en présence.

Sur le bien-fondé de l'ordonnance attaquée :

4. L'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. S'il résulte de l'article R. 625-1 du code de justice administrative qu'il peut être fait application des dispositions de l'article R. 532-1, alors même qu'une requête au fond est en cours d'instruction, il appartient au juge des référés d'apprécier l'utilité de la mesure demandée sur ce fondement (cf. CE, 27.11.2014, n° 385843 et 385844).

5. En premier lieu, la circonstance que l'appréciation de l'intensité du risque de feu de forêts prévalant sur certaines zones du territoire de la commune de Belcodène se pose dans plusieurs instances actuellement pendantes sur la légalité de permis de construire délivrés par le maire de la commune, en méconnaissance du plan local d'urbanisme qu'elle a elle-même adopté, ne saurait, à elle seule, caractériser un caractère d'utilité différent de celui des mesures que les juges saisis des recours dirigés contre ces permis, pourraient, le cas échéant, décider dans l'exercice de leurs pouvoirs de direction de l'instruction, avec la possibilité de recourir au même expert. La commune est, du reste, malvenue de se prévaloir de l'obligation dans laquelle elle se trouverait de devoir écarter l'application d'un règlement illégal, alors qu'elle a manifestement fait le choix de ne pas s'opposer, dans le cadre de l'adoption de son plan local d'urbanisme, à l'avis émis par le préfet sur le classement des zones litigieuses mais de méconnaître ensuite les règles d'urbanisme ainsi adoptées. Au demeurant, s'agissant de l'affaire déjà jugée au fond par le tribunal administratif de Marseille aux termes du jugement n° 1806892 du 4 juillet 2019 dont l'appel formé par la commune a été rejeté par un arrêt de la Cour n° 19MA04175 du 8 juillet 2021, les juges du fond ont fait droit au déféré préfectoral dirigé à l'encontre du permis de construire délivré par le maire de la commune, en retenant l'erreur manifeste d'appréciation commise par celui-ci, au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, s'agissant du risque d'incendie, sans recourir à une mesure d'expertise.

6. En second lieu, si la commune fait également valoir que la mesure d'expertise présente un caractère d'utilité au regard du litige susceptible de naître à l'occasion de l'élaboration du plan local d'urbanisme intercommunal du Pays d'Aubagne et de l'Etoile prescrit par délibération du 28 février 2019 du conseil de la métropole, qui a vocation à se substituer au plan local d'urbanisme de Belcodène, la perspective d'un tel litige ne peut, en l'état de l'instruction, être regardée comme de nature à justifier, à elle seule, le prononcé d'une mesure d'expertise, dès lors qu'en vertu de l'article L. 153-8 du code d'urbanisme, l'élaboration d'un plan local d'urbanisme par un établissement public de coopération intercommunal est conduite " en collaboration avec les communes membres " et que la commune requérante n'apporte, du reste, aucune précision ni sur l'état d'avancement de cette élaboration, ni sur les termes des oppositions qu'elle rencontrerait, dans le cadre de cette élaboration.

7. Il résulte de ce qui précède que la commune de Belcodène n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, la juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de la commune de Belcodène est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la commune de Belcodène et à la ministre de la transition écologique.

Fait à Marseille, le 15 juillet 2021

N° 21MA01643

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LH


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro d'arrêt : 21MA01643
Date de la décision : 15/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SELARL ANDREANI-HUMBERT-COLLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-07-15;21ma01643 ?
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