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11/06/2021 | FRANCE | N°18MA05442

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7eme chambre - formation a 3, 11 juin 2021, 18MA05442


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de la défense suite à son recours préalable devant la commission des recours des militaires du 26 février 2015 et de condamner l'Etat à lui verser les sommes de 148 956 euros et de 50 000 euros au titre de ses préjudices financier et moral, assorties des intérêts au taux légal à compter de sa demande d'indemnisation préalable.

Par un jugement n° 1502893 du 2

2 octobre 2018, le tribunal administratif de Toulon a, à l'article 1er, condamné l'E...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de la défense suite à son recours préalable devant la commission des recours des militaires du 26 février 2015 et de condamner l'Etat à lui verser les sommes de 148 956 euros et de 50 000 euros au titre de ses préjudices financier et moral, assorties des intérêts au taux légal à compter de sa demande d'indemnisation préalable.

Par un jugement n° 1502893 du 22 octobre 2018, le tribunal administratif de Toulon a, à l'article 1er, condamné l'Etat à lui verser la somme de 158 956 euros assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la demande préalable du 1er décembre 2014, à l'article 2, mis à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et à l'article 3, rejeté le surplus des conclusions de la requête de M. B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 décembre 2018 sous le n° 18MA05442, la ministre des armées demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 22 octobre 2018 ;

2°) et de rejeter la demande de M. B....

Elle soutient que :

- la perte de revenu de M. B... ayant été entièrement réparée par le versement d'une pension militaire d'invalidité (PMI), aucune somme ne saurait lui être allouée à ce titre ;

- aucune somme ne saurait lui être versée au titre de sa perte de retraite ;

- la somme de 10 000 euros accordée par le jugement attaqué au titre du préjudice moral est excessive.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 avril 2019, M. B... représenté par Me C... conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 158 794,13 euros au titre de ses préjudices financier et moral, assortie des intérêts à compter du 1er décembre 2014, date de la demande d'indemnisation préalable et de mettre à la charge de ce dernier la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- à titre principal, les moyens soulevés par la ministre des armées ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, son préjudice financier est évalué à la somme de 143 838,13 euros résultant de l'absence de reconnaissance du lien d'imputabilité au service de l'affection et de l'absence de liquidation des droits à congés de longue durée pour maladie définis à l'article L. 4138-12 du code de la défense ;

- il n'y a pas lieu de déduire le montant accordé au titre de la pension d'invalidité miliaire ;

- il justifie d'une perte de retraite évaluée à 4 956 euros ;

- le tribunal a estimé à juste titre son préjudice moral à la somme de 10 000 euros.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrégularité du jugement attaqué dès lors que le tribunal n'a pas appelé à l'instance le ministre du budget en charge du paiement des pensions militaires et a ainsi méconnu les dispositions de l'article R. 66 du code des pensions civiles et militaires de retraite.

Par un mémoire, enregistré le 8 février 2021, M. B... a présenté des observations sur le moyen susceptible d'être relevé d'office.

Il soutient que :

- compte tenu de la nature indemnitaire du contentieux, le ministre de l'économie est étranger à la présente procédure ;

- la ministre des armées n'a pas contesté le montant de l'indemnisation demandée ;

- le service de retraite du ministre de l'économie et des finances a déjà été consulté et n'a pas jugé utile d'intervenir.

Par un mémoire, enregistré le 23 février 2021, la ministre des armées a présenté des observations sur le moyen susceptible d'être relevé d'office.

Elle soutient que le jugement est irrégulier dès lors qu'il a été rendu sans que le ministre des finances n'ait été appelé à la cause.

Par un mémoire, enregistré le 7 avril 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance a présenté des observations sur le moyen susceptible d'être relevé d'office.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il n'a pas respecté les dispositions de l'article R. 66 du code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- la demande de M. B... concernant sa perte de retraite est prescrite en application de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite.

Le mémoire présenté pour M. B..., enregistré le 20 avril 2020, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public ;

- et les observations de Me C... représentant M. B....

Une note en délibéré présentée pour M. B... a été enregistrée le 4 juin 2021.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., lieutenant-colonel au sein de l'Armée de terre, a développé, à compter de l'année 2007, des troubles anxieux et dépressifs. Par une décision du 1er décembre 2009, le ministre de la défense lui a refusé l'octroi d'une pension militaire d'invalidité au motif que sa maladie n'était pas imputable au service. M. B... a alors contesté cette décision devant le tribunal des pensions militaires du Var et la Cour régionale des pensions militaires, qui ont rejeté sa demande. Toutefois, par une décision du 22 septembre 2014, le Conseil d'Etat a reconnu sa maladie comme imputable au service. L'intéressé a formé une demande préalable d'indemnisation des préjudices consécutifs à l'absence de reconnaissance de l'imputabilité de sa maladie au service le 1er décembre 2014, implicitement rejetée par le ministre de la défense. Il a formé un recours préalable obligatoire à l'encontre de cette décision de rejet devant la commission des recours des militaires le 26 février 2015. Par le jugement du 22 octobre 2018, le tribunal a, à l'article 1er, condamné l'Etat à verser à M. B... la somme de 158 956 euros assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la demande préalable du 1er décembre 2014, à l'article 2, mis à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et à l'article 3, rejeté le surplus des conclusions de la requête de M. B.... La ministre des armées doit être regardée comme relevant appel de l'article 1er de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la responsabilité de l'Etat :

2. Il résulte de l'instruction que par une décision n° 366628 du 22 septembre 2014, le Conseil d'Etat a annulé la décision du 1er décembre 2009 par laquelle le ministre de la défense a refusé à M. B... le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité en estimant que la preuve de l'imputabilité au service de sa pathologie devait être regardée comme établie. Dans ces conditions, l'administration, en refusant la prise en compte de l'imputabilité au service de la pathologie de M. B... au titre du calcul de sa retraite et de ses droits à congés, a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, au demeurant non contestée par la ministre des armées.

En ce qui concerne l'application du forfait de pension opposée par la ministre des armées :

3. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; / 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service (...) ".

4. Eu égard à la finalité qui lui est assignée par les dispositions de l'article L. 1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et aux éléments entrant dans la détermination de son montant, tels qu'ils résultent des dispositions des articles L. 8 bis à L. 40 du même code, la pension militaire d'invalidité doit être regardée comme ayant pour objet de réparer, d'une part, les pertes de revenus et l'incidence professionnelle de l'incapacité physique et, d'autre part, le déficit fonctionnel, entendu comme l'ensemble des préjudices à caractère personnel liés à la perte de la qualité de la vie, aux douleurs permanentes et aux troubles ressentis par la victime dans ses conditions d'existence personnelles, familiales et sociales, à l'exclusion des souffrances éprouvées avant la consolidation, du préjudice esthétique, du préjudice sexuel, du préjudice d'agrément lié à l'impossibilité de continuer à pratiquer une activité spécifique, sportive ou de loisirs, et du préjudice d'établissement lié à l'impossibilité de fonder une famille. Lorsqu'elle est assortie de la majoration prévue à l'article L. 18 du code, la pension a également pour objet la prise en charge des frais afférents à l'assistance par une tierce personne.

5. En instituant la pension militaire d'invalidité, le législateur a entendu déterminer forfaitairement la réparation à laquelle les militaires peuvent prétendre, au titre des préjudices mentionnés ci-dessus, dans le cadre de l'obligation qui incombe à l'Etat de les garantir contre les risques qu'ils courent dans l'exercice de leur mission. Cependant, si le titulaire d'une pension a subi, du fait de l'infirmité imputable au service, d'autres préjudices que ceux que cette prestation a pour objet de réparer, il peut prétendre à une indemnité complémentaire égale au montant de ces préjudices. En outre, dans l'hypothèse où le dommage engage la responsabilité de l'Etat à un autre titre que la garantie contre les risques courus dans l'exercice des fonctions, et notamment lorsqu'il trouve sa cause dans des soins défectueux dispensés dans un hôpital militaire, l'intéressé peut prétendre à une indemnité complémentaire au titre des préjudices que la pension a pour objet de réparer, si elle n'en assure pas une réparation intégrale. Lorsqu'il est saisi de conclusions en ce sens, il incombe au juge administratif de déterminer le montant total des préjudices que la pension a pour objet de réparer, avant toute compensation par cette prestation, d'en déduire le capital représentatif de la pension et d'accorder à l'intéressé une indemnité égale au solde, s'il est positif.

6. La ministre des armées soutient que M. B... a perçu une pension militaire d'invalidité pour la période du 23 juin 2008 au 22 juin 2017 qui répare les pertes de revenus et l'incidence professionnelle de l'incapacité physique, ainsi que le déficit fonctionnel, qui doit s'imputer sur l'indemnisation de ses préjudices économiques. Toutefois, M. B... n'a pas demandé l'indemnisation de préjudices non réparés par une pension militaire d'invalidité, sur le fondement de la responsabilité sans faute ou de la responsabilité pour faute de droit commun, mais des préjudices résultant de l'illégalité fautive du refus d'octroi d'une pension militaire d'invalidité mentionnée au point 2. Par suite, la ministre des armées n'est pas fondée à opposer à l'intimé la règle du forfait de pension.

En ce qui concerne les préjudices :

S'agissant du préjudice financier lié à la perte de rémunération pendant le congé de longue durée pour maladie :

7. L'article L. 4138-12 du code de la défense prévoit que : " Le congé de longue durée pour maladie est attribué, après épuisement des droits de congé de maladie ou des droits du congé du blessé prévus aux articles L. 4138-3 et L. 4138-3-1, pour les affections dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat. / Lorsque l'affection survient du fait ou à l'occasion de l'exercice des fonctions ou à la suite de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, ce congé est d'une durée maximale de huit ans. Le militaire perçoit, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, sa rémunération pendant cinq ans, puis une rémunération réduite de moitié les trois années qui suivent. / Dans les autres cas, ce congé est d'une durée maximale de cinq ans et le militaire de carrière perçoit, dans les conditions définies par décret en Conseil d'Etat, sa rémunération pendant trois ans, puis une rémunération réduite de moitié les deux années qui suivent. (...) / Le militaire placé en congé de longue durée pour maladie continue à figurer sur la liste d'ancienneté, concourt pour l'avancement à l'ancienneté et, dans les cas visés au deuxième alinéa du présent article, pour l'avancement au choix. Le temps passé en congé est pris en compte pour l'avancement et pour les droits à pension de retraite. (...) ". Aux termes de l'article R. 4138-56 du même code : " Le militaire ayant bénéficié de la totalité de ses droits à congés de longue durée pour maladie est, s'il demeure dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, radié des cadres ou rayé des contrôles pour réforme définitive après avis de la commission mentionnée au 4° de l'article L. 4139-14. (...) ".

8. En premier lieu, il résulte de l'instruction qu'en application de l'article L. 4138-12 du code de la défense visé au point 7, M. B... a été placé en congé de longue durée pour maladie du 7 mai 2008 au 6 mai 2013. Pendant cette période, il a perçu un plein traitement pendant trois ans puis un demi traitement pendant deux ans. Toutefois, du fait de la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie par la décision du Conseil d'Etat du 22 décembre 2014 mentionnée au point 2, l'intimé aurait dû bénéficier, en application du 2ème alinéa de l'article L. 4138-12 du code de la défense précité, d'une solde complète pendant cinq ans de mai 2008 à mai 2013 et d'une solde diminuée de moitié pendant trois ans, de juin 2013 à juin 2016. Par suite, la faute de l'administration reconnue au point 2 est à l'origine, pour M. B..., d'un préjudice financier.

9. En deuxième lieu, concernant la période indemnisable allant du 7 mai 2011 au 6 mai 2013 pendant laquelle M. B... a perçu une demi-traitement au lieu d'un plein traitement, il résulte de l'instruction que son préjudice financier s'établit à la somme de 40 300,33 euros, calculée à partir d'une solde moyenne mensuelle de 4 441,85 euros, résultant de la moyenne des soldes versées de juillet 2010, date à laquelle l'intéressé a bénéficié d'un avancement d'indice, à avril 2011 après déduction des sommes réellement perçues par lui durant cette période.

10. En troisième lieu, M. B... ayant épuisé ses droits à congé maladie en l'absence d'imputabilité au service, il a été radié des cadres d'office à compter du 6 juin 2013. Cependant, comme il a été dit au point 8, il avait encore droit à un congé à demi-traitement jusqu'au 7 mai 2016. Si le préjudice pour la période de trois mois à demi-traitement jusqu'en 2016 doit être évalué à la somme de 103 537,80 euros, comme le fait valoir l'intimé, soit 36 mois à 2 876,05 euros, il convient de déduire de ce montant celui de 91 479,96 euros, correspondant à la pension de retraite dont il a bénéficié pendant la même période, d'un montant de 2 541,11 euros mensuel selon le titre de pension produit par la ministre des armées. La somme totale due pour cette seconde période doit ainsi être fixée à 12 057,84 euros.

11. Par suite, il sera fait une juste appréciation de la perte de rémunération de M. B... pendant son congé de longue durée pour maladie à 40 300, 33 euros et 12 057,84 euros, soit un total de 52 358,17 euros.

12. Si la ministre des armées soutient que la pension militaire d'invalidité à un taux d'invalidité de 50 %, dont a bénéficié M. B... du 23 juin 2008 au 22 juin 2017, d'un montant total de 40 042,01 euros doit être déduite de la somme mentionnée au point 11, cette pension était due à l'intéressé indépendamment de ses droits à congé de maladie et de traitement correspondant. Par ailleurs, cette somme est étrangère à un quelconque déficit fonctionnel et ne répare pas une perte de revenus, ni l'incidence professionnelle de l'incapacité physique que M. B... a également subie, mais seulement une erreur dans l'attribution de ses congés de longue durée pour maladie en raison de la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie. Il s'en suit que ce moyen doit être écarté.

S'agissant du préjudice financier lié à la perte de retraite :

13. L'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite dispose que : " Sous réserve du b de l'article L. 43, la pension et la rente viagère d'invalidité sont définitivement acquises et ne peuvent être révisées ou supprimées à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé que dans les conditions suivantes : / A tout moment en cas d'erreur matérielle ; / Dans un délai d'un an à compter de la notification de la décision de concession initiale de la pension ou de la rente viagère, en cas d'erreur de droit. (...) ".

14. Si cette dernière disposition permet notamment de redresser toute erreur de droit concernant la détermination de la situation administrative du fonctionnaire retraité au jour de son admission à la retraite et ayant eu une influence sur la liquidation de sa pension, il appartient à l'autorité chargée de cette liquidation de vérifier, sous le contrôle du juge, l'existence et la portée des erreurs alléguées, sans que les intéressés puissent se prévaloir de droits acquis qu'ils tiendraient d'actes intervenus postérieurement à la date de leur admission à la retraite et modifiant rétroactivement leur situation administrative à cette date, pour des motifs autres que l'exécution d'une loi, d'un règlement ayant légalement un effet rétroactif ou d'une décision du juge de l'excès de pouvoir.

15. La ministre des armées et le ministre de l'économie, des finances et de la relance soutiennent que la demande de réparation de perte de retraite de M. B... à hauteur de 4 956 euros est prescrite en application de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Toutefois, M. B... ne demande pas la révision de sa pension mais la réparation du préjudice financier résultant d'une mise à la retraite d'office plus tôt qu'elle n'aurait dû l'être du fait de l'illégalité fautive de la décision du 1er décembre 2009. Dès lors, il n'y a pas lieu de faire application de ce délai de prescription. Si la ministre des armées soutient que l'intimé ne produit aucun élément à l'appui du calcul du montant de 4 956 euros, M. B... verse au débat une évaluation de la pension qu'il aurait dû toucher de 2 801 euros brut mensuel et effectuée à partir du simulateur du service des retraites de l'Etat dont le montant n'est pas contesté par la ministre des armées qui ne propose aucune autre évaluation. En outre, il résulte de l'instruction que l'intéressé a perçu, depuis le 2 juillet 2013, une pension de retraite de 2 541,11 euros brut mensuel. Par suite, il sera fait une juste appréciation de l'indemnité à laquelle il a droit en condamnant l'Etat à lui verser la somme de 4 956 euros au titre de ce préjudice.

S'agissant du préjudice moral :

16. Il résulte de l'instruction que M. B... a subi un préjudice moral en lien avec la faute mentionnée au point 2. Le tribunal a fait une juste appréciation de ce préjudice en lui accordant la somme de 10 000 euros, laquelle n'est pas disproportionnée.

17. Il résulte de tout ce qui précède que la ministre des armées est seulement fondée à demander que l'indemnité de 158 956 euros, que le tribunal administratif l'a condamnée à verser à M. B..., soit ramenée à la somme de 67 314,17 euros.

Sur les intérêts :

18. M. B... a droit aux intérêts au taux légal correspondant à l'indemnité de 67 314,17 euros à compter de la date de réception de sa demande préalable du 1er décembre 2014 par la ministre des armées.

Sur les frais liés au litige :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La somme de 158 956 euros que la ministre des armées a été condamnée à verser à M. B... par l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Toulon du 22 octobre 2018 est ramenée à la somme de 67 314,17 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la demande préalable du 1er décembre 2014.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 22 octobre 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre des armées, à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2021, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- Mme D..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 juin 2021.

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N° 18MA05442

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 18MA05442
Date de la décision : 11/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Service de l'armée.

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Évaluation du préjudice.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Jacqueline MARCHESSAUX
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : MDMH - MAUMONT MOUMNI AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-06-11;18ma05442 ?
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