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30/03/2021 | FRANCE | N°20MA03911

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 30 mars 2021, 20MA03911


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... E... épouse D... a demandé au tribunal administratif de Nice, dans l'instance n° 1905800, d'annuler l'arrêté du 13 novembre 2019 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée.

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Nice, dans l'instance n° 1905801,

d'annuler l'arrêté du 13 novembre 2019 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... E... épouse D... a demandé au tribunal administratif de Nice, dans l'instance n° 1905800, d'annuler l'arrêté du 13 novembre 2019 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée.

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Nice, dans l'instance n° 1905801, d'annuler l'arrêté du 13 novembre 2019 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.

Par un jugement nos 1905800, 1905801 du 25 septembre 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté ces deux demandes après les avoir jointes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 octobre 2020, Mme et M. D..., représentés par Me F..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 25 septembre 2020 ;

2°) d'annuler les arrêtés du préfet des Alpes-Maritimes du 13 novembre 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de leur délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à venir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à leur conseil, de la somme de

2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- les arrêtés contestés sont entachés d'erreurs de fait dès lors que les mesures d'éloignement prises à leur encontre en 2017 ont été annulées par le juge d'appel ;

- les décisions de refus de titre de séjour en litige méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- ces décisions sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de leurs conséquences sur leur situation ;

- elles méconnaissent le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les mesures d'éloignement en litige sont illégales du fait de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour prises à leur encontre.

La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Mme et M. D... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 décembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme et M. D..., ressortissants philippins respectivement nés en 1977 et en 1980, déclarent être entrés en France au cours de l'année 2005 pour le second et de l'année 2011 pour la première. Ils ont sollicité, au mois de janvier 2017, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que leur admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du même code. Le préfet des Alpes-Maritimes a, par des arrêtés du 7 juillet 2017, refusé de leur délivrer un titre de séjour et a notamment assorti ces refus de mesures d'éloignement. Par deux arrêts du 22 janvier 2019, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé respectivement l'arrêté édicté le 7 juillet 2017 à l'encontre de M. D... et la décision du même jour obligeant Mme D... à quitter le territoire français. En exécution de l'injonction de réexamen prononcée par ces arrêts, le préfet des Alpes-Maritimes a, par des arrêtés du 13 novembre 2019, de nouveau refusé de délivrer un titre de séjour aux intéressés, leur a fait obligation de quitter le territoire français, leur a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être éloignés. Mme et M. D... relèvent appel du jugement du 25 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés du 13 novembre 2019.

2. Il ressort des pièces du dossier que Mme et M. D... résidaient en France depuis de nombreuses années à la date des arrêtés attaqués, ce dernier y séjournant de manière habituelle depuis plus de dix ans à cette date. Les intéressés, qui se sont mariés à Nice en 2015, occupent, avec leur fille née au cours de la même année et scolarisée dans cette commune, un logement dont ils sont locataires depuis 2018. Par ailleurs les époux D... établissent, par les nombreuses pièces qu'ils versent aux débats, avoir travaillé en qualité d'employés de maison au cours des années précédant les arrêtés contestés. Ils produisent plusieurs promesses d'embauche établies, notamment au cours de l'année 2019, par des particuliers s'engageant à les employer sous réserve de l'obtention d'un titre de séjour. Il n'est pas contesté que les intéressés disposent de revenus suffisants pour disposer d'un logement et subvenir aux besoins de leur famille. Il ressort en outre des pièces du dossier que l'un des frères de M. D... réside à Nice, sous couvert d'une carte de résident délivrée par le préfet des Alpes-Maritimes, avec son épouse, également en situation régulière, et leur fils. Dans les circonstances particulières de l'espèce, compte tenu notamment de la durée de présence significative des intéressés en France ainsi que de leurs efforts d'insertion professionnelle, en refusant de leur délivrer un titre de séjour, le préfet des Alpes-Maritimes a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle et familiale des intéressés. Par suite, Mme et M. D... sont fondés à demander l'annulation des décisions de refus de titre de séjour en litige ainsi que, par voie de conséquence, celle des décisions, également contenues dans les arrêtés contestés, leur faisant obligation de quitter le territoire français, leur accordant un délai de départ volontaire de trente jours et fixant le pays à destination duquel ils pourront être éloignés.

3. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués, Mme et M. D... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté leurs demandes respectives tendant à l'annulation des arrêtés du préfet des AlpesMaritimes du 13 novembre 2019.

4. Eu égard au motif d'annulation retenu, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement qu'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " soit délivré tant à Mme D... qu'à M. D.... Il y a lieu d'enjoindre au préfet des AlpesMaritimes de délivrer un titre de séjour aux intéressés dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir ces injonctions d'astreintes.

5. Mme et M. D... ayant été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, leur avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 7611 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me F... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à cet avocat d'une somme de 1 500 euros.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 25 septembre 2020 est annulé.

Article 2 : Les arrêtés du préfet des Alpes-Maritimes du 13 novembre 2019 sont annulés.

Article 3 : Il est enjoint au préfet des AlpesMaritimes de délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " à Mme D... ainsi qu'à M. D... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me F... une somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 7611 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 5 : Le surplus des conclusions de Mme et M. D... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme et M. A... et Melchor D..., au ministre de l'intérieur et à Me F....

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Nice.

Délibéré après l'audience du 16 mars 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Chazan, président,

- Mme Simon, président assesseur,

- M. B..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mars 2021.

4

N° 20MA03911


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA03911
Date de la décision : 30/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. CHAZAN
Rapporteur ?: M. Raphaël MOURET
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : TRAVERSINI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-03-30;20ma03911 ?
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