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18/02/2021 | FRANCE | N°19MA02876

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 18 février 2021, 19MA02876


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Sud Navigation Restauration a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012 et 2013, et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er mars 2012 au 31 décembre 2013.

Par un jugement n° 1703623 du 10 mai 2019, le tribunal administrat

if de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Sud Navigation Restauration a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012 et 2013, et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er mars 2012 au 31 décembre 2013.

Par un jugement n° 1703623 du 10 mai 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 24 juin, 22 octobre et 16 décembre 2019, l'EURL Sud Navigation Restauration, représentée par la société d'avocats Fidal, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 10 mai 2019 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la durée de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet a excédé la durée de six mois prévu par le 4° du II de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales ;

- ce délai de six mois ne pouvait pas être suspendu ;

- l'administration fiscale a méconnu le II de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales en ne précisant pas, dans sa demande, la nature des investigations qu'elle souhaitait effectuer, c'est-à-dire les données qu'elle souhaitait voir listées et analysées ;

- c'est à tort que l'administration fiscale a écarté sa comptabilité comme non probante dès lors notamment que les recettes sont parfaitement justifiées pour une très grande partie de la période vérifiée, et que l'enregistrement global des recettes en fin de journée ne suffit pas à faire regarder une comptabilité comme non probante ;

- la méthode de reconstitution de recettes retenue par le service est radicalement viciée et incohérente ;

- l'administration a retenu des paramètres erronés notamment concernant la contenance moyenne des consommations servies et la prise en compte de la consommation des apéritifs pour déterminer le nombre de repas ;

- l'administration ne pouvait extrapoler les données 2013 sur l'année 2012 ;

- l'importance des discordances entre le chiffre d'affaires déclaré au titre des deux exercices vérifiés et le chiffre d'affaires reconstitué par le service suffit à démontrer l'incohérence de la méthode retenue ;

- l'administration aurait dû appliquer une méthode alternative fondée uniquement sur la consommation de vin et sur l'exploitation des tickets Z de l'année 2013 ;

- l'absence de caractère délibéré des manquements doit entraîner la décharge de la majoration de 40 %.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 26 septembre et 13 novembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par l'EURL Sud Navigation Restauration ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné Mme A..., présidente assesseure, pour présider la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement du président de la 3ème chambre, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus, au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de Mme Courbon, rapporteur public,

- et les observations de Me B... représentant l'EURL Sud Navigation Restauration.

Considérant ce qui suit :

1. L'EURL Sud Navigation Restauration, qui exploite un restaurant situé à La Ciotat, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité du 30 avril au 30 octobre 2015 portant sur la période du 25 novembre 2011 au 31 décembre 2013. A l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale a écarté la comptabilité, a procédé à la reconstitution du chiffre d'affaires pour les exercices clos en 2012 et 2013 et lui a notifié, selon la procédure de rectification contradictoire, par une proposition de rectification du 26 novembre 2015, des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er mars 2012 au 31 décembre 2013. L'EURL Sud Navigation Restauration relève appel du jugement du 10 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et pénalités correspondantes.

2. Aux termes de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " I. - Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois (...) II. - Par dérogation au I, l'expiration du délai de trois mois n'est pas opposable à l'administration : / 4° En cas de graves irrégularités privant de valeur probante la comptabilité. Dans ce cas, la vérification sur place ne peut s'étendre sur une durée supérieure à six mois. / III. - En cas de mise en oeuvre du I de l'article L. 47 A, le délai de trois mois prévu au I du présent article est suspendu jusqu'à la remise de la copie des fichiers des écritures comptables à l'administration. / En cas de mise en oeuvre du II de l'article L. 47 A, la limitation à trois mois de la durée de la vérification sur place est prorogée de la durée comprise entre la date du choix du contribuable pour l'une des options prévues à cet article pour la réalisation du traitement et, respectivement selon l'option choisie, soit celle de la mise à disposition du matériel et des fichiers nécessaires par l'entreprise, soit celle de la remise des résultats des traitements réalisés par l'entreprise à l'administration, soit celle de la remise des copies de fichiers nécessaires à la réalisation des traitements par l'administration. Cette dernière date fait l'objet d'une consignation par écrit. ".

3. L'EURL Sud Navigation Restauration a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des exercices clos en 2012 et 2013. Il est constant que le contrôle a effectivement débuté le 30 avril 2015, date de la première intervention sur place du vérificateur, et que celui-ci s'est terminé le 30 octobre 2015. Il résulte de la proposition de rectification du 26 novembre 2015 que la durée des opérations de vérification sur place a été portée de trois à six mois, en application du 4° du II de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, au motif que la comptabilité de l'EURL Sud Navigation Restauration était entachée de graves irrégularités. Si l'entreprise a remis le 4 mai 2015 les fichiers des écritures comptables concernant les exercices en litige, le point de départ du délai accordé à l'administration pour mener ses opérations de contrôle doit néanmoins être fixé au 30 avril 2015, les dispositions du III de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales applicables aux impositions en litige ne prévoyant pas la suspension du délai jusqu'à la remise de la copie des fichiers des écritures comptables à l'administration lorsque le délai a été porté à six mois pour les vérifications de comptabilité qui ont révélé de graves irrégularités privant de valeur probante la comptabilité du contribuable. Ainsi, la durée globale de la vérification de comptabilité, dont l'EURL Sud Navigation Restauration a fait l'objet, a excédé celle de six mois fixée par les dispositions de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, qui constituent une garantie pour les contribuables, qui expirait le 29 octobre 2015. Par suite, l'EURL Sud Navigation Restauration est fondée à soutenir que la procédure d'imposition était irrégulière.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que l'EURL Sud Navigation Restauration est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012 et 2013, et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er mars 2012 au 31 décembre 2013, ainsi que des pénalités correspondantes.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à l'EURL Sud Navigation Restauration au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 10 mai 2019 du tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : L'EURL Sud Navigation Restauration est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012 et 2013, et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er mars 2012 au 31 décembre 2013, ainsi que des pénalités correspondantes.

Article 3 : L'Etat versera à l'EURL Sud Navigation Restauration une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Sud Navigation Restauration et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 4 février 2021, où siégeaient :

- Mme A..., présidente assesseure, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme C..., premier conseiller,

- Mme Mastrantuono, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 février 2021.

5

N° 19MA02876

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA02876
Date de la décision : 18/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal - Vérification de comptabilité.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : Mme BERNABEU
Rapporteur ?: Mme Sylvie CAROTENUTO
Rapporteur public ?: Mme COURBON
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-02-18;19ma02876 ?
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