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11/02/2021 | FRANCE | N°20MA02746

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, Juge des référés, 11 février 2021, 20MA02746


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux demandes strictement identiques enregistrées le 1er juillet 2020 à deux minutes d'intervalle au greffe du tribunal administratif de Montpellier sous les n° 2002577 et 2002578, le préfet de l'Hérault a demandé au juge des référés de ce tribunal d'ordonner la suspension de l'exécution de la délibération du 12 mai 2020 par laquelle le conseil municipal de Capestang a attribué au centre communal d'action sociale (CCAS) de la commune une subvention d'un montant de 83 000 euros pour le financement d

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux demandes strictement identiques enregistrées le 1er juillet 2020 à deux minutes d'intervalle au greffe du tribunal administratif de Montpellier sous les n° 2002577 et 2002578, le préfet de l'Hérault a demandé au juge des référés de ce tribunal d'ordonner la suspension de l'exécution de la délibération du 12 mai 2020 par laquelle le conseil municipal de Capestang a attribué au centre communal d'action sociale (CCAS) de la commune une subvention d'un montant de 83 000 euros pour le financement d'un dispositif dénommé " Solidarité économie locale " (SEL), et la suspension de l'exécution de la délibération du 14 mai 2020 par laquelle le conseil d'administration de ce CCAS a approuvé la mise en oeuvre de ce même dispositif.

Par une ordonnance n° 2002577 et 2002578 du 24 juillet 2020, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a fait droit à la demande du préfet de l'Hérault.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le numéro 20MA02746 les 4 août et 25 novembre 2020, la commune de Capestang et le CCAS de Capestang, représentés par Me B..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier du 24 juillet 2020 ;

2°) de rejeter les demandes présentées par le préfet de l'Hérault devant le tribunal administratif de Montpellier ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais du litige, au profit du CCAS de Capestang.

Ils soutiennent que :

- contrairement à ce qu'a retenu le juge des référés, le dispositif " SEL " répond manifestement à des préoccupations d'ordre social ainsi, d'ailleurs, que cela est démontré par le fait que c'est le CCAS, et non la commune, qui le met en oeuvre ;

- aucun principe général n'interdit au CCAS d'agir " pour toute la population " dès lors que toute la population se trouve en difficulté et que les circonstances le justifient ;

- la situation sociale et pécuniaire des bénéficiaires est prise en compte puisqu'est prise en considération la situation des plus démunis, bénéficiaires de l'épicerie solidaire, qui auront droit à l'équivalent de 80 euros en bons d'achat, tandis que les autres habitants auront droit à une aide d'un montant moindre ; la distinction ainsi opérée est conforme aux principes régissant l'attribution des aides sociales ;

- il ne peut être reproché à ce dispositif, dont la visée première est sociale, d'avoir également des retombées économiques favorables aux commerçants ;

- en admettant que la cour soit compétente pour y statuer, le moyen tiré par le préfet de la prétendue gestion de fait devra être écarté comme non fondé dès lors que les sommes en question, matérialisées par des bons d'achat, ont été régulièrement extraites du budget du CCAS sur instruction de l'ordonnateur dans un but légitime et déterminé ;

- le moyen tiré par le préfet de l'impossibilité d'attester le service fait pour le règlement des factures par le CCAS devra être écarté comme dépourvu de précisions suffisantes.

Par un mémoire en défense et un mémoire enregistrés les 28 octobre et 11 décembre 2020, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Capestang et du CCAS de Capestang une somme de 2 000 euros au titre des frais du litige.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la cour a désigné M. Alfonsi, président de la 2ème chambre, pour statuer sur les appels formés contre les décisions rendues par les juges des référés des tribunaux du ressort.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir présenté son rapport et entendu au cours de l'audience publique les observations de Me A... représentant le CCAS de Capestang et la commune de Caspestang.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération de son conseil municipal du 12 mai 2020, la commune de Capestang a décidé d'attribuer au centre communal d'action sociale (CCAS) de la commune une subvention d'un montant de 83 000 euros pour le financement d'un dispositif dénommé " Solidarité économie locale " (SEL), qui prévoit la distribution de huit jetons d'une valeur unitaire de 10 euros à tous les foyers capestanais bénéficiaires de l'épicerie solidaire, et de cinq jetons de même valeur à l'ensemble des autres foyers, utilisables chez tous les commerçants, artisans et producteurs de la commune à l'exception des supermarchés et grandes surfaces alimentaires. Par une délibération de son conseil d'administration du 14 mai 2020, le CCAS de Capestang a approuvé la mise en oeuvre de ce dispositif.

2. La commune de Capestang et le centre communal d'action sociale (CCAS) de Capestang relèvent appel de l'ordonnance du 24 juillet 2020 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a ordonné, à la demande du préfet de l'Hérault, la suspension de l'exécution des délibérations mentionnées ci-dessus sur le fondement des dispositions de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales.

3. Dès lors qu'un dispositif comme le " SEL " décrit ci-dessus serait estimé illégal, tant la délibération décidant de l'instituer que celle décidant de lui attribuer un financement se trouveraient, par voie de conséquence, entachées d'illégalité. Il s'en déduit nécessairement que, contrairement à ce qui est soutenu par les requérants, les moyens de la demande du préfet, qui tendent à démontrer l'illégalité du dispositif ainsi mis en place et financé, sont opérants tant contre la délibération contestée du CCAS de Capestang instituant un tel dispositif que contre celle par laquelle le conseil municipal de la commune a décidé de le financer.

4. D'une part, il résulte des termes mêmes des délibérations attaquées que l'objectif poursuivi par le projet " SEL " est d'apporter un soutien à l'économie locale et, en particulier, aux commerçants, artisans et producteurs de la commune. Comme le premier juge l'a relevé à juste titre, la poursuite d'un tel objectif n'entre pas dans les attributions d'un centre communal d'action sociale.

5. D'autre part, et contrairement à ce qui est soutenu, la seule circonstance qu'il est prévu un traitement différencié entre les bénéficiaires de l'épicerie solidaire, éligibles à un tel dispositif lorsque leurs ressources n'excèdent pas un plafond fixé en fonction du revenu de solidarité active, et les autres foyers capestanais, lesquels bénéficient du dispositif à hauteur de la contrevaleur de 50 euros indépendamment de leur niveau de ressources et de l'état de nécessité dans lequel ils se trouvent, ne permet pas de considérer qu'un tel dispositif puisse être rattaché à l'une des actions sociales au sens des dispositions des articles L. 123-5 et suivants du code de l'action sociale et des familles que le CCAS est compétent pour mettre en oeuvre.

6. Il résulte de ce qui précède que la commune de Capestang et le CCAS de Capestang ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, pour ordonner la suspension de l'exécution des délibérations contestées, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a retenu qu'il existait un doute sérieux quant à leur légalité, tenant à l'incompétence du CCAS pour la mise en oeuvre d'un dispositif tel que le " SEL " décrit au point 1. Il y a lieu, par suite, de rejeter leur requête en toutes ses conclusions.

7. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions du préfet de l'Hérault tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

DECIDE

Article 1er : La requête de la commune de Capestang et du CCAS de Capestang est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du préfet de l'Hérault tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la commune de Capestang, au centre communal d'action sociale de Capestang et au préfet de l'Hérault.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 février 2021.

2

N°20MA02746


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 20MA02746
Date de la décision : 11/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-03-015 Procédure. Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000. Référé-provision.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-François ALFONSI
Avocat(s) : SCP VINSONNEAU-PALIES NOY GAUER et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-02-11;20ma02746 ?
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