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21/01/2021 | FRANCE | N°19MA00645

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 21 janvier 2021, 19MA00645


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille de déclarer nul et non avenu l'arrêté du 21 août 2015 par lequel le maire d'Eyragues a retiré le permis de construire qu'elle avait tacitement obtenu le 10 novembre 2009 afin d'édifier un bâtiment agricole de 163 m².

Par un jugement n° 1703026 du 10 décembre 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 8 février 2019, le

21 novembre 2019, le 10 avril 2020, le 28 mai 2020,le 5 novembre 2020 et le 19 novembre 2020, Mme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille de déclarer nul et non avenu l'arrêté du 21 août 2015 par lequel le maire d'Eyragues a retiré le permis de construire qu'elle avait tacitement obtenu le 10 novembre 2009 afin d'édifier un bâtiment agricole de 163 m².

Par un jugement n° 1703026 du 10 décembre 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 8 février 2019, le 21 novembre 2019, le 10 avril 2020, le 28 mai 2020,le 5 novembre 2020 et le 19 novembre 2020, Mme A..., représentée par Me F..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 10 décembre 2018 ;

2°) de déclarer nul et non avenu l'arrêté du 21 août 2015 précité ainsi que tout acte subséquent ;

3°) d'annuler l'arrêté du 21 août 2015 ainsi que tout acte subséquent ;

4°) de mettre à la charge de la commune d'Eyragues la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté du 21 août 2015 ne lui ayant pas été régulièrement notifié, elle est recevable à le contester ;

- cet arrêté est entaché d'illégalités particulièrement graves justifiant qu'il soit déclaré inexistant ;

- d'une part, la décision attaquée se fonde sur le fait que l'intéressée ne justifie pas avoir affiché le permis qui lui a été tacitement accordé et que le projet méconnait les articles 2NC et 4NC du règlement du plan d'occupation des sols (POS): ces motifs méconnaissent la chose jugée par le tribunal administratif de Marseille dans son jugement du 13 février 2012, qui a annulé le retrait de ce permis tacite du 14 décembre 2009, jugement confirmé par un arrêt de la Cour administrative d'appel de Marseille du 16 janvier 2014, devenu définitif ;

- d'autre part, le retrait est intervenu au-delà du délai de trois mois prévu par l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme ;

- elle est recevable à demander que soit déclaré nul et non avenu l'arrêté interruptif de travaux du 27 septembre 2016, une telle action pouvant être engagée sans délai.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 9 mars 2020 et le 1er octobre 2020, la commune d'Eyragues conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de la requérante la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les conclusions, nouvelles en appel, tendant à l'annulation de l'arrêté de retrait du 21 août 2015 ainsi que de tout acte subséquent sont irrecevables. Elle ajoute que les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de Mme Giocanti, rapporteur public,

- et les observations de Me H... de la SCP F...-Pouyanne-C..., représentant Mme A..., et de Me E..., substituant Me C... représentant la commune d'Eyragues.

Une note en délibéré a été produite le 14 janvier 2021 par Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 14 décembre 2009, le maire de la commune d'Eyragues a refusé de délivrer à Mme G... A... un permis de construire visant à édifier un bâtiment agricole, d'une superficie de 163 m² de surface hors oeuvre nette (SHON), comprenant un hangar avec logement ouvrier incorporé, situé chemin de Couderc, lieu-dit Plaine de Pechimbert, et classé en zone " NC " du plan d'occupation des sols de la commune. Par un jugement n° 1001034 du 13 février 2012, le tribunal administratif de Marseille a annulé cet arrêté, après l'avoir requalifié de retrait de permis tacite obtenu le 10 novembre 2009. Ce jugement a été confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille n° 12MA01471 du 16 janvier 2014 devenu définitif, le pourvoi en cassation enregistré n'ayant pas été admis. Saisi d'un recours gracieux par courrier du 4 juin 2015 d'un tiers et voisin, le maire d'Eyragues, par arrêté du 21 août 2015, a de nouveau procédé au retrait de ce permis tacite obtenu le 10 novembre 2009. Mme A... relève appel du jugement du 10 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à ce que cet arrêté du 21 août 2015 soit déclaré nul et non avenu. Elle demande en outre l'annulation de cet arrêté ainsi que de tout acte subséquent et que soit déclaré nul et non avenu l'arrêté interruptif de travaux du 27 septembre 2016.

Sur les conclusions tendant à ce que soit déclaré nul et non avenu l'arrêté interruptif de travaux du 27 septembre 2016 :

2. Les conclusions tendant à ce que soit déclaré nul et non avenu l'arrêté interruptif de travaux du 27 septembre 2016, qui n'ont pas été soumises aux premiers juges, ont le caractère de conclusions nouvelles en cause d'appel et sont, par suite, irrecevables, alors même que de telles conclusions peuvent être présentées sans délai devant le tribunal.

Sur les conclusions en annulation de l'arrêté de retrait du 21 août 2015 :

3. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, en vigueur à la date de la demande de première instance : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. ". Et la notification au mari d'une mesure concernant une femme mariée, non séparée de corps, fait courir le délai de recours contentieux à son encontre.

4. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la décision de retrait du 21 août 2015 a été notifiée par pli recommandé à Mme G... A..., 2 boulevard Gambetta à Saint-Rémy de Provence qui était l'adresse mentionnée dans sa demande de permis de construire et qui correspond à l'adresse professionnelle de son époux. Et il ressort d'une attestation des services postaux établie le 8 février 2016 que ce pli a été réceptionné le 24 août 2015 par M. D... A..., son époux dont elle ne soutient pas qu'elle était divorcée ni séparée de corps. Une telle notification doit être regardée comme régulièrement effectuée ainsi qu'il a été dit au point 3, alors même que M. D... A... n'est pas mentionné comme pétitionnaire dans la demande d'autorisation de construire. Par ailleurs, la requérante ne démontre, ni même n'allègue qu'elle aurait informé la commune d'Eyragues d'une nouvelle adresse, alors notamment que les courriers des 11 juin 2015 et 7 juillet 2015, mettant en oeuvre la procédure contradictoire préalablement au retrait attaqué lui ont été adressés 2 boulevard Gambetta, et que la requérante y a d'ailleurs répondu par l'intermédiaire de son avocat les 13 juin 2015 et 16 juillet 2015. Enfin, la requérante ne peut utilement se prévaloir ni du deuil familial qui les frappait alors, ni du conflit qui opposerait le maire à M. D... A..., qui sont sans incidence sur les modalités de notification.

5. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune, les conclusions de Mme A... tendant à l'annulation de l'arrêté de retrait du 21 août 2015, formulées pour la première fois dans son mémoire enregistré le 10 avril 2020 à l'encontre d'une décision régulièrement notifiée le 24 août 2015, ne peuvent qu'être rejetées, comme irrecevables car tardives.

Sur les conclusions tendant à ce que l'arrêté de retrait du 21 août 2015 soit déclaré nul et non-avenu :

6. En premier lieu, l'autorité absolue de la chose jugée s'attache au dispositif d'une décision juridictionnelle, et au motif qui en constitue le soutien nécessaire. Or, en l'espèce, il est constant que l'annulation de l'arrêté du 14 décembre 2009 retirant le permis tacite obtenu le 10 novembre 2009, confirmée par un arrêt définitif de la cour administrative d'appel de Marseille, ainsi qu'il a été dit au point 1, a été prononcée pour un motif tiré du défaut de procédure contradictoire, le juge ayant écarté les autres moyens dirigés contre les motifs de fond de la décision administrative par le biais de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme. Le maire d'Eyragues pouvait par suite, sans méconnaitre l'autorité de la chose jugée, reprendre une décision se fondant sur des motifs identiques.

7. En second lieu, aux termes de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme, en vigueur à la date de la décision attaquée : " la décision de non-opposition à une déclaration préalable ou le permis de construire [...] tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions. Passé ce délai, la décision de non-opposition et le permis ne peuvent être retirés que sur demande expresse de leur bénéficiaire. ". Lorsqu'une décision créatrice de droits est retirée et que ce retrait est annulé, la décision initiale est rétablie à compter de la date de lecture de la décision juridictionnelle prononçant cette annulation. Une telle annulation n'a, en revanche, pas pour effet d'ouvrir un nouveau délai de quatre mois pour retirer la décision initiale, alors même que celle-ci comporterait des irrégularités pouvant en justifier légalement le retrait. Toutefois, la méconnaissance de cette disposition législative, telle qu'interprétée par la jurisprudence, ne constitue pas, une illégalité suffisamment grave de nature à faire regarder le retrait du permis en cause comme inexistant.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à déclarer nul et de nul effet l'arrêté de retrait du 21 août 2015.

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de Mme A... dirigées contre la commune d'Eyragues qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros, à verser à la commune d'Eyragues en application de ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Mme A... versera à la commune d'Eyragues une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... A... et à la commune d'Eyragues.

Délibéré après l'audience du 7 janvier 2021, où siégeaient :

- M. Poujade, président de chambre,

- M. Portail, président assesseur,

- Mme B..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 janvier 2021.

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N° 19MA00645

hw


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19MA00645
Date de la décision : 21/01/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Différentes catégories d'actes - Actes inexistants.

Actes législatifs et administratifs - Disparition de l'acte - Retrait - Retrait des actes créateurs de droits.

Procédure - Jugements - Chose jugée - Chose jugée par la juridiction administrative - Étendue.

Procédure - Jugements - Exécution des jugements - Effets d'une annulation.


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: Mme Isabelle GOUGOT
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : SCP CORNILLE POUYANNE FOUCHET

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-01-21;19ma00645 ?
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