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22/12/2020 | FRANCE | N°19MA00900

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre, 22 décembre 2020, 19MA00900


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner l'université Paul Valéry Montpellier III à lui payer la somme totale de 89 828,05 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis en raison de faits constitutifs de harcèlement moral et de discrimination syndicale, et d'enjoindre à l'université de lui allouer les moyens nécessaires à l'exercice de sa mission, de cesser de l'exclure de fait et de le traiter de la même manière que ses collègues en termes d'avancement et

de traitement.

Par un jugement n° 1605765 du 21 décembre 2018, le tribunal ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner l'université Paul Valéry Montpellier III à lui payer la somme totale de 89 828,05 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis en raison de faits constitutifs de harcèlement moral et de discrimination syndicale, et d'enjoindre à l'université de lui allouer les moyens nécessaires à l'exercice de sa mission, de cesser de l'exclure de fait et de le traiter de la même manière que ses collègues en termes d'avancement et de traitement.

Par un jugement n° 1605765 du 21 décembre 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la requête de M. E....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 25 février et le 14 novembre 2019,

M. C... E..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 21 décembre 2018 ;

2°) de condamner l'université Paul Valéry Montpellier III à lui verser la somme totale de 87 308,05 euros en réparation des préjudices subis du fait du harcèlement moral et des discriminations dont il est victime ;

3°) de condamner l'université Paul Valéry Montpellier III à lui verser la somme de 3 500 euros à titre de provision au titre de la protection fonctionnelle ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en vertu de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- le jugement attaqué est irrégulier faute pour le tribunal d'avoir communiqué à la partie adverse son dernier mémoire enregistré le 8 novembre 2018 et d'avoir examiné ses écritures et les pièces y annexées ;

- le jugement est entaché d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation professionnelle au sein de la Maison des Sciences de l'Homme de Montpellier (MSH-M) et de la " Cellule innovation " marquée par une dégradation de ses conditions de travail et d'une perte d'autonomie dans l'exercice de ses fonctions. Les manoeuvres dolosives de l'université ont affecté sa santé en raison de leurs conséquences sur son état moral qui a entraîné de nombreux arrêts de travail ; il a été maintenu abusivement sans missions, ni matériels de travail dans des locaux dégradés et isolé de son environnement de travail ; son préjudice moral se monte à la somme de 30 000 euros ;

- ses activités syndicales ont également entraîné une discrimination qui s'est traduite par la rétention d'une partie de son traitement pour un montant de 478,73 euros, l'absence d'attribution de la nouvelle bonification indiciaire (NBI) pour son poste à la MSH-M qui s'évalue à la somme de 6 829,68 euros, outre que cette prime est intégrée dans la détermination de sa retraite pour laquelle il a perdu la chance de bénéficier d'une majoration de 3 000 euros ;

- l'interruption de sa carrière au sein de la MSH-M pour rejoindre la cellule innovation lui a fait perdre la possibilité de promotions pour un montant de 50 000 euros ;

- il doit être enjoint à l'université de faire cesser cette situation de harcèlement moral et de discrimination et de le traiter à égalité avec ses collègues s'agissant de son traitement et de son avancement ;

- il est fondé à solliciter la somme de 3 500 euros de frais d'avocat à titre de provision sur la garantie fonctionnelle à laquelle il a droit et que doit lui accorder la juridiction.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 août 2019, l'université Paul Valéry III, représentée par Me D..., demande à la Cour de rejeter la requête et de mettre à la charge de M. E... la somme de 3 000 euros de frais d'instance.

L'université soutient que les moyens du requérant sont infondés.

Une ordonnance du 19 novembre 2019 fixe la clôture de l'instruction au

19 décembre 2019 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 80-900 ;

- le décret n° 85-1534 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., ingénieur d'études, fait appel du jugement n° 1605765 du

21 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à faire condamner l'université Paul Valéry Montpellier III (UPV M3) à lui verser la somme de 89 828,05 euros en réparation notamment des préjudices qu'il estime avoir subis en raison de faits constitutifs de harcèlement moral et de discrimination syndicale, et d'enjoindre à l'université de lui allouer les moyens nécessaires à l'exercice de sa mission, de cesser de l'exclure de fait et de le traiter de la même manière que ses collègues en termes d'avancement et de traitement.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " (...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...). / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ".

3. La circonstance que le dernier mémoire de M. E..., enregistré le

8 novembre 2018, n'a pas été communiqué à l'université n'affecte pas le respect du caractère contradictoire de la procédure à son égard, et ne saurait, dès lors, être utilement invoquée par lui. Ainsi, M. E... n'est pas fondé à soutenir que la méconnaissance de l'obligation posée par l'article R. 611-1 du code de justice administrative entache d'irrégularité la procédure devant le tribunal, et à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement attaqué.

Sur les conclusions indemnitaires :

4. M. E..., ingénieur d'études à compter du 1er décembre 2006, a été affecté à la Maison des Sciences de l'Homme de Montpellier (MSH-M) jusqu'au 1er septembre 2015 pour occuper les fonctions de concepteur rédacteur web. Il devient responsable de système d'informations puis est nommé, le 28 septembre 2010, responsable administratif et financier de cette structure tout en étant chargé de la communication et des systèmes d'information, avant d'être nommé, au 1er septembre 2015, responsable de la " Cellule innovation " de l'UPV M3. Par une réclamation préalable notifiée le 28 avril 2016, il a sollicité la réparation des préjudices qu'il estimait avoir subis en raison de faits constitutif d'un harcèlement moral et d'une discrimination syndicale, tout en demandant la protection fonctionnelle. Cette réclamation a été rejetée le 23 juin 2016 par l'université.

En ce qui concerne le harcèlement moral :

5. Aux termes de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ". Aux termes de l'article 11 de la même loi : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions, d'une protection organisée par la collectivité publique dont ils dépendent, conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales. / (...) La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. (...) ".

6. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour être qualifiés de harcèlement moral, les agissements en cause doivent être répétés et excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique.

7. M. E... soutient qu'il a fait l'objet de faits constitutifs d'un harcèlement moral en raison des agissements de ses supérieurs hiérarchiques constitués notamment par la décharge progressive de ses fonctions à la Maison des Sciences de l'Homme de Montpellier suite à l'arrivée d'un nouveau directeur à la fin de l'année 2014, en indiquant en outre qu'il a été exclu ou non informé de certaines actions dont il assurait normalement le suivi, qu'il n'a été chargé d'aucune mission suite à sa nomination comme responsable de la cellule innovation, qu'il a été privé des moyens matériels nécessaires à l'exercice de ces responsabilités, tablette et téléphone portable, et qu'il a changé de bureau à trois reprises. Il fait également valoir que sa qualité de responsable syndical l'a empêché de participer à des jurys de concours, et de devenir membre de la parité administrative de la commission paritaire d'établissement (CPE), et qu'il n'a pas perçu la nouvelle bonification indiciaire. Enfin, il se prévaut de congés de maladies dus à un état

anxio-dépressif réactionnel avéré.

8. Premièrement, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'organigramme de janvier 2015 de la Maison des Sciences de l'Homme de Montpellier ainsi que de la fiche de poste de l'intéressé pour 2014-2015, que celui-ci est, contrairement à ce qu'il prétend, responsable administratif et financier de cette structure. Si les organigrammes des années 2010/2011 à 2014/2015 mentionnent qu'il occupe des fonctions de secrétaire général de la Maison des Sciences de l'Homme de Montpellier, cette dénomination de fonction n'est pas au nombre de celles correspondant à un grade du statut des ingénieurs d'études. Par ailleurs, l'intéressé ne peut se prévaloir de ces organigrammes internes qui, certes ont conservé une appellation originelle contenue dans l'article 9 des statuts initiaux de cette structure, signés le

23 septembre 2005, qui prévoient que le directeur est assisté d'un " secrétaire général ", mais qui ne correspondent plus à la réalité de l'organisation de la structure alors que ces statuts modifiés ne font pas état, en 2013, de ce titre. Ainsi, M. E..., nommé, le 28 septembre 2010, responsable administratif et financier, conformément aux statuts modifiés, n'est pas fondé à soutenir qu'il a brusquement été écarté de ses fonctions de secrétaire général de la maison des sciences de l'homme de Montpellier, et que ses supérieurs hiérarchiques ont cherché, par ce changement de titre, à lui nuire.

9. Deuxièmement, il est constant que des divergences ont existé entre le nouveau directeur de la Maison des Sciences de l'Homme de Montpellier, nommé au cours de

l'année 2014, et M. E..., qui se sont traduites par des désaccords dans l'organisation de la structure, notamment par la décharge progressive de certaines des tâches assignées à M. E..., ainsi que par la demande du directeur à celui-ci de justifier de 25 absences considérées comme non légitimes, qui a été mal ressentie. Si l'intéressé fait état de ce qu'il aurait été déchargé de ses responsabilités concernant la gestion du travail des personnels de la Maison des Sciences de l'Homme de Montpellier et de la production audiovisuelle, et n'aurait pas été informé de certaines modifications du budget ou de l'avancement de certains projets, ainsi que de la réalisation d'un inventaire du matériel informatique, il est constant d'une part, qu'outre ses fonctions de responsable administratif et financier, il avait la charge de la communication, des systèmes d'information ainsi qu'il ressort très clairement de sa fiche de poste 2014/2015, que l'activité production audio-visuelle était partagée avec un autre agent, et qu'il ne conteste pas avoir conservé les nombreuses autres missions qui sont portées sur cette fiche de poste. Dans un contexte de tensions et de dysfonctionnements du service, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces circonstances révéleraient une animosité des supérieurs hiérarchiques de M. E... à son égard.

10. Troisièmement, après avoir refusé d'être co-porteur du projet de refonte intégrale du site web de l'université, M. E... a été nommé au 1er septembre 2015 en qualité de responsable de la " Cellule innovation " avec le titre de directeur de l'innovation, qui disposait d'un budget annuel de 15 000 euros. Cette cellule a été créée à son initiative, avec une installation prévue dès le 22 juin 2015, lors de l'examen du projet par le comité technique de proximité, au 1er septembre 2015, et dont les tâches sont définies clairement dès cette date. Il est constant qu'en décembre 2015, M. E... n'avait pas donné suite à la demande du

21 octobre 2015 du directeur général des services de l'université de produire un " cadrage du dossier dématérialisation avec une méthodologie associée ainsi qu'une proposition de lettre de mission et calendrier de réalisation ". Pour autant, il a bénéficié du versement de la prime d'intéressement pour l'investissement collectif en 2015 au prorata du temps passé, ainsi que pour l'année 2016, en raison de son investissement dans cette structure. Ainsi, même s'il n'a pas été destinataire par sa hiérarchie d'une fiche de poste lors de sa prise de fonction, alors qu'il est constant, ainsi qu'il ressort d'un courriel détaillé reprenant un compte rendu d'entretien, en octobre 2015, avec le directeur général des services, ainsi qu'il vient d'être dit, qu'il a pour mission de venir en appui du chantier de la dématérialisation, M. E... n'est pas fondé à soutenir qu'il a été volontairement isolé et que cette " Cellule innovation " constitue une " coquille vide " alors qu'il détaille, par une note d'étape du 1er décembre 2016, l'ensemble des missions confiées à cette structure ainsi que les activités déjà réalisées. La demande du directeur général des services à M. E..., qui justifiait alors de 15 années d'expérience au grade d'ingénieur de recherches dont 5 années comme responsable administratif et financier, de produire un document de portage du projet de " Cellule innovation ", sans lui fournir préalablement une fiche de poste en qualité de responsable de cette cellule, n'excède pas les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, et ne présente pas le caractère d'un fait constitutif de harcèlement moral.

11. Quatrièmement, il ressort des pièces du dossier que M. E... a conservé un ordinateur de la Maison des Sciences de l'Homme de Montpellier à la suite de son départ pour la " Cellule innovation ", et qu'il a été doté d'un portable une fois le matériel restitué à ladite maison. La circonstance que ce matériel ne fonctionne pas dans un environnement " MacOS " ne saurait le faire regarder comme impropre aux fonctions attribuées à l'intéressé. Par ailleurs,

M. E... ne saurait sérieusement soutenir qu'il a été privé des moyens d'exercer ses missions faute de l'obtention d'une tablette dont il est constant que seul le président de l'université en est doté. Enfin, s'il fait valoir l'absence d'un téléphone portable indispensable à sa qualité de responsable de la " Cellule innovation ", il ne conteste pas avoir immédiatement bénéficié d'un téléphone fixe lors de sa prise de poste au 1er septembre 2015, puis avoir disposé d'un portable à sa demande, lequel équipement n'est pas en dotation systématique auprès des agents qui sont responsables de missions comparables à celles de M. E.... La seule absence d'un téléphone portable au démarrage de la " Cellule innovation ", ne traduit pas une négligence dans le traitement de sa situation professionnelle, et ne présente pas le caractère d'un fait constitutif de harcèlement moral.

12. Cinquièmement, d'une part, le simple fait de partager un bureau avec un agent en alternance pendant 10 jours ne traduit pas une volonté délibérée de lui nuire par sa hiérarchie. D'autre part, si le deuxième bureau qu'il a occupé abritait une baie de brassage informatique qu'il qualifie de bruyante, cette situation qui a été temporaire dans un contexte de changement de poste, n'est pas une mesure vexatoire. Enfin, le troisième local qui a donné lieu à une visite sur place le 3 juillet 2017 et à un rapport du médecin de prévention, est qualifié par ce dernier comme un espace propre, avec un accès indépendant par une porte extérieure, doté de menuiseries à double isolation et d'un bureau, d'étagères et d'une imprimante, qui ne peut accueillir qu'un agent. Dans ce contexte, la simple présence de traces d'humidité par du salpêtre en période hivernale, ne caractérise pas un local impropre à l'exercice professionnel. Ce local est situé dans la partie du pavillon informatique construit dans les années 1980 qui abrite un atelier informatique et une salle de réunion ainsi qu'un bureau. Il ne ressort pas des documents graphiques que ce local jouxte la cuisine de la cafétéria comme le prétend l'intéressé. Si ce bâtiment est éloigné physiquement des locaux qui abritent les instances dirigeantes de l'université, cette seule circonstance n'empêche pas M. E... de communiquer avec sa hiérarchie comme il le fait valoir, et ne caractérise pas un traitement vexatoire et humiliant. Ainsi, M. E... n'est pas fondé à faire valoir que l'état des trois bureaux qui lui ont été attribués révèle une atteinte à sa dignité et la volonté de le placer dans des conditions dégradantes de travail.

13. Sixièmement, il ressort des pièces du dossier que M. E... a bénéficié d'au moins 35 entretiens sur sa situation professionnelle avec le directeur général des services de l'université sur une période de trois ans de 2014 à 2017, tout en ayant été reçu par ailleurs par la présidente de l'université. Dans ces circonstances, même s'il fait valoir, sans en préciser le décompte, que certains de ces entretiens étaient motivés par ses activités syndicales, l'attitude de l'administration envers lui n'est pas révélatrice de la volonté délibérée de ne pas dialoguer, et ainsi de le tenir à l'écart des missions et de la vie professionnelle de l'université, de dénigrer sa personne ou de porter atteinte à sa dignité. Par suite, le blocage allégué de la part de sa hiérarchie n'est pas établi.

14. Septièmement, s'il ressort des pièces du dossier que M. E... a bénéficié de

trois congés maladie du 17 mars au 20 mars 2015, du 30 mars au 3 avril 2015 et du 9 au

17 juillet 2015 pour un état anxieux et dépressif réactionnel, ces congés s'ils attestent d'un état de stress qui résulte de mauvaises relations entre les agents de la Maison des Sciences de l'Homme de Montpellier, ne permettent pas d'établir que M. E... ait fait l'objet d'un traitement dégradant par sa hiérarchie comme il le soutient, ni d'un exercice anormal de son autorité par son directeur. Au surplus, durant la même période, deux personnes se sont plaintes du mauvais comportement à leur égard par M. E.... Il en va de même pour le congé obtenu à partir du 17 septembre 2016, d'ailleurs dans de toutes autres conditions que les précédents, qui ne dénote pas une volonté de nuire à l'égard de M. E..., et alors que sa demande préalable qui a lié le présent contentieux est antérieure à cette date, et ne prend donc pas en compte les pertes de traitements qui en résulteraient.

15. Il résulte de ce qui précède que les différentes mesures invoquées par M. E..., prises individuellement et dans leur ensemble, ne présentent pas le caractère d'un harcèlement moral au sens des dispositions de l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée portant droits et obligations des fonctionnaires.

En ce qui concerne la discrimination syndicale :

16. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le changement de poste de la Maison des Sciences de l'Homme de Montpellier pour la " Cellule innovation ", créée à la demande de l'intéressé, se soit traduit par une nouvelle situation pécuniaire, ou une modification des garanties de carrière de M. E..., alors qu'il a bénéficié à compter du 1er septembre 2015 d'une prime d'intéressement à l'investissement collectif, et qu'aucun des agents de la maison des sciences de l'homme de Montpellier n'a perçu la nouvelle bonification indiciaire. M. E... qui ne justifie pas par ailleurs avoir présenté vainement sa candidature à des jurys de concours ou demandé à devenir membre de la commission paritaire d'établissement (CPE), n'est pas fondé à soutenir que l'université aurait commis une faute en faisant obstruction aux avantages de carrière auxquels il peut prétendre ou en l'ayant écarté de certaines fonctions du fait de son appartenance syndicale.

Sur la protection fonctionnelle :

17. Il résulte de ce qui vient d'être dit que M. E... n'établit pas avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement moral ou de discrimination syndicale. Par suite, il n'est pas fondé à demander que l'université lui accorde une protection fonctionnelle pour payer ses frais d'avocat engagés à l'occasion des recours diligentés devant la juridiction administrative. Dans ces conditions, M. E... n'établit pas que l'université aurait ainsi commis une faute susceptible d'engager sa responsabilité. Par suite, et en tout état de cause il n'est pas fondé à demander à la Cour de lui accorder une somme de 3 500 euros de " provision " au titre d'une protection fonctionnelle.

18. Il résulte de tout ce qui vient d'être dit, que, si M. E... a connu des difficultés relationnelles avec sa hiérarchie, et a pu ressentir une réelle détresse au travail, il n'établit pas que la dégradation de son état de santé soit en lien direct et certain avec des fautes commises par son employeur. Par voie de conséquence, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa requête tendant à la réparation des préjudices subis dans l'exercice de ses fonctions.

Sur les conclusions d'injonction :

19. Le présent arrêt n'impliquant aucune mesure d'exécution, les conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

20. Les dispositions de cet article font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'université, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, une quelconque somme au titre des frais exposés par M. E... et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. E... la somme de 2 000 euros à verser à l'université Paul Valéry Montpellier III au titre de ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : M. E... versera 2 000 euros à l'université Paul Valéry Montpellier III en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E... et à l'université Paul Valéry Montpellier III.

Délibéré après l'audience du 15 décembre 2020, où siégeaient :

- M. Badie, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 décembre 2020.

2

N° 19MA00900


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA00900
Date de la décision : 22/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Agissements administratifs susceptibles d'engager la responsabilité de la puissance publique.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Didier URY
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : BRUNEL

Origine de la décision
Date de l'import : 23/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-12-22;19ma00900 ?
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