La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/12/2020 | FRANCE | N°20MA00447-20MA00448

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 18 décembre 2020, 20MA00447-20MA00448


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... et Mme C... D... ont demandé au magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes d'annuler les arrêtés du 18 décembre 2019 par lesquels le préfet du Gard les a assignés à résidence pour une durée de 45 jours.

Par deux jugements n° 1904393 et 1904392 du 31 décembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée le 2 février

2020, sous le n° 20MA00447, Mme D..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) de lui accorder...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... et Mme C... D... ont demandé au magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes d'annuler les arrêtés du 18 décembre 2019 par lesquels le préfet du Gard les a assignés à résidence pour une durée de 45 jours.

Par deux jugements n° 1904393 et 1904392 du 31 décembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée le 2 février 2020, sous le n° 20MA00447, Mme D..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) de lui accorder, à titre provisoire, le bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

2°) d'annuler ce jugement du 31 décembre 2019 du tribunal administratif de Nîmes ;

3°) d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2019 ;

4°) à titre subsidiaire, de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement prise à son encontre en application de l'article L. 743-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5°) d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale, à compter de la notification de l'arrêt à venir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, dans l'hypothèse où elle a remis son passeport au préfet du Gard, de le lui restituer dans un délai de 24 heures, dans le même délai et la même astreinte ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil, Me B..., en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté a été signé par une personne incompétente ;

- il lui a été notifié par une personne incompétente ;

- la mesure d'assignation à résidence porte atteinte à son droit de se maintenir sans contrainte sur le territoire dès lors qu'elle a déposé une demande de réexamen de sa demande d'asile et qu'elle a le droit de séjourner provisoirement sur le territoire national jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile se prononce sur sa demande ;

- la mesure de pointage constitue une contrainte contraire à ses droits de demandeur d'asile dont les voies d'action ne sont pas définitivement closes ;

- le préfet n'établit pas la nécessité d'une telle mesure dès lors qu'elle bénéficie de toutes les garanties de représentation nécessaires justifiant qu'il ne soit pas nécessaire de procéder à un pointage quotidien ;

- l'obligation de pointage est disproportionnée ;

- l'information sur l'éventuelle exécution effective de la mesure d'éloignement à l'occasion d'un pointage n'est pas fondée dès lors qu'elle bénéficie d'une attestation de demande d'asile et qu'elle a formé un recours auprès de la Cour nationale du droit d'asile ;

- la remise de son passeport au préfet et l'interdiction de quitter le département du Gard sans autorisation sont illégales pour les mêmes motifs ;

- conformément aux dispositions de l'article L. 743-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la mesure d'exécution sera dès lors suspendue et il sera mis fin à la décision d'assignation à résidence en litige.

Par décision du 4 septembre 2020, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle présentée par Mme D....

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 juillet 2020, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête de Mme D....

Il soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions subsidiaires tendant à la suspension de l'exécution de la mesure d'éloignement prise à l'encontre de Mme D... en application de l'article L. 743-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que la Cour nationale du droit d'asile a rejeté son recours à l'encontre de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides du 17 décembre 2019 rejetant sa demande d'asile.

II. Par une requête, enregistrée le 2 février 2020, sous le n° 20MA00448, M. D..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) de lui accorder, à titre provisoire, le bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

2°) d'annuler ce jugement du 31 décembre 2019 du tribunal administratif de Nîmes ;

3°) d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2019 ;

4°) à titre subsidiaire, de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement prise à son encontre en application de l'article L. 743-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5°) d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale, à compter de la notification de l'arrêt à venir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, dans l'hypothèse où il a remis son passeport au préfet du Gard, de le lui restituer dans un délai de 24 heures, dans le même délai et la même astreinte ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil, Me B..., en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté a été signé par une personne incompétente ;

- il lui a été notifié par une personne incompétente ;

- la mesure d'assignation à résidence porte atteinte à son droit de se maintenir sans contrainte sur le territoire dès lors qu'il a déposé une demande de réexamen de sa demande d'asile et qu'il a le droit de séjourner provisoirement sur le territoire national jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile se prononce sur sa demande ;

- la mesure de pointage constitue une contrainte contraire à ses droits de demandeur d'asile dont les voies d'action ne sont pas définitivement closes ;

- le préfet n'établit pas la nécessité d'une telle mesure dès lors qu'il bénéficie de toutes les garanties de représentation nécessaires justifiant qu'il ne soit pas nécessaire de procéder à un pointage quotidien ;

- l'obligation de pointage est disproportionnée ;

- l'information sur l'éventuelle exécution effective de la mesure d'éloignement à l'occasion d'un pointage n'est pas fondée dès lors qu'il bénéficie d'une attestation de demande d'asile et qu'il a formé un recours auprès de la Cour nationale du droit d'asile ;

- la remise de son passeport au préfet et l'interdiction de quitter le département du Gard sans autorisation sont illégales pour les mêmes motifs ;

- conformément aux dispositions de l'article L. 743-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la mesure d'exécution sera dès lors suspendue et il sera mis fin à la décision d'assignation à résidence en litige.

Par décision du 4 septembre 2020, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. D....

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 juillet 2020, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête de M. D....

Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions subsidiaires tendant à la suspension de l'exécution de la mesure d'éloignement prise à l'encontre de M. D... en application de l'article L. 743-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que la Cour nationale du droit d'asile a rejeté son recours à l'encontre de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides du 17 décembre 2019 rejetant sa demande d'asile.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme I... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes susvisées, enregistrées sous les n° 20MA00447 et 20MA00448, présentées pour M. et Mme D..., présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt.

2. M. et Mme D..., nés respectivement les 24 novembre 1985 et 2 octobre 1983 et de nationalité albanaise, sont entrés irrégulièrement en France le 8 mai 2018 accompagnés de leurs trois enfants nés en 2012, 2015 et 2016. Ils ont présenté, le 11 juin 2018, deux demandes d'asile qui ont été rejetées par deux décisions du 17 juillet 2018 de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides, confirmées par deux décisions du 19 avril 2019 de la Cour nationale du droit d'asile. Le préfet du Gard a pris à l'encontre de M. et Mme D... deux arrêtés du 24 juin 2019 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a retiré leurs attestations de demandeurs d'asile. Par deux jugements du 8 août 2019, le tribunal a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés. Les requérants ont déposé, le 11 septembre 2019, des demandes de réexamen de leurs demandes d'asile et ont obtenu du préfet du Gard deux attestations de demandes d'asile valables jusqu'au 1er octobre 2019. Ce dernier les a, également, assignés à résidence par deux décisions du 29 août 2019 qui ont été annulées par un jugement du 17 septembre 2019 du tribunal administratif de Nîmes. Par deux décisions du 17 septembre 2019, l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides a rejeté comme irrecevables leurs demandes de réexamen, décisions qu'ils ont contestées auprès de la Cour nationale du droit d'asile. Par ailleurs, par les deux arrêtés en litige du 18 décembre 2019, le préfet du Gard a décidé de les assigner à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. M. et Mme D... relèvent appel des jugements du 31 décembre 2019 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes qui a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés du 18 décembre 2019.

Sur les demandes d'aide juridictionnelle provisoire :

3. Dès lors que le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille a constaté la caducité des demandes d'aide juridictionnelle de M. et Mme D... par deux décisions du 4 septembre 2020, les conclusions de leur requête tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire sont devenues sans objet. Il n'y a donc plus lieu d'y statuer.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. L'arrêté contesté a été signé par Mme G... J... laquelle bénéficiait, en vertu d'un arrêté n° 30-2019-09-09-003 du 9 septembre 2019, publié le 10 septembre 2019 au recueil n° 30-2019-142 des actes administratifs de la préfecture, d'une délégation du préfet du Gard, en cas d'absence ou d'empêchement de Mme F... E..., directrice de l'accueil, des migrations et de l'intégration, à l'effet de signer tous documents et toutes décisions à l'exception de la saisine des tribunaux et des cours administratives d'appel. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des arrêtés contestés doit être écarté comme manquent en fait.

5. Les conditions de notification d'une décision à son destinataire sont, en tout état de cause, dépourvues d'incidence sur sa légalité, qui s'apprécie à la date à laquelle elle a été prise. Par suite, M. et Mme D... ne peuvent utilement se prévaloir de l'incompétence de l'agent qui leur a notifié les arrêtés contestés.

6. D'une part, aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.- L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger :/ (...) 5° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (...) ". L'article L. 561-1 du même code dispose : " L'étranger astreint à résider dans les lieux qui lui sont fixés par l'autorité administrative doit se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie. Il doit également se présenter, lorsque l'autorité administrative le lui demande, aux autorités consulaires, en vue de la délivrance d'un document de voyage (...) / L'autorité administrative peut également, aux fins de préparation du départ de l'étranger, lui désigner, en tenant compte des impératifs de la vie privée et familiale, une plage horaire pendant laquelle il doit demeurer dans les locaux où il réside, dans la limite de trois heures consécutives par période de vingt-quatre heures (...) ". En vertu de l'article R. 561-2 de ce code : " L'autorité administrative détermine le périmètre dans lequel l'étranger assigné à résidence en application de l'article (...) L. 561-2 (...) est autorisé à circuler muni des documents justifiant de son identité et de sa situation administrative et au sein duquel est fixé sa résidence. Elle lui désigne le service auquel il doit se présenter, selon une fréquence qu'il fixe dans la limite d'une présentation par jour, en précisant si cette obligation s'applique les dimanches et les jours fériés ou chômés (...) ".

7. D'autre part, aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent ". L'article L. 743-2 du même code dispose que : " Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : (...) / 4° L'étranger n'a introduit une première demande de réexamen, qui a fait l'objet d'une décision d'irrecevabilité par l'office en application du 3° de l'article L. 723-11, qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement ; / 4° bis Sans préjudice du 4° du présent article, l'office a pris une décision d'irrecevabilité en application du 3° de l'article L. 723-11 ; (...) ".

8. Il ressort des fiches Telemofpra produites par le préfet du Gard que M. et Mme D... ont présenté, en dernier lieu, des demandes de réexamen de leurs demandes d'asile le 11 septembre 2019 qui ont été rejetées comme irrecevables, suivant la procédure accélérée, par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides le 17 septembre 2019, décisions qui ont été confirmées par la Cour nationale du droit d'asile, le 13 janvier 2020 pour irrecevabilité en l'absence d'examen sérieux. Le préfet fait valoir sans être contesté que les décisions d'irrecevabilité de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides se fondent sur le 3°) de l'article L. 723-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que ces demandes de réexamen n'ont été introduites que dans le but de faire échec aux mesures d'éloignement prises à leur encontre le 24 juin 2019. Par suite, il pouvait refuser aux requérants de renouveler leurs autorisations provisoires de séjour accordées seulement jusqu'au 1er octobre 2019. M. et Mme D... ayant ainsi perdu, après cette date, le droit de se maintenir sur le territoire français en application des dispositions du 4° de l'article L. 743-2 du code précité, le préfet du Gard a pu légalement, par les arrêtés contestés, décider de les assigner à résidence.

9. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de vérifier que l'administration pouvait légalement, eu égard aux conditions prévues à l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité, prendre une mesure d'assignation à résidence à l'encontre d'un étranger et de vérifier que l'administration n'a pas commis d'erreur d'appréciation dans le choix des modalités de cette mesure d'assignation.

10. Il ressort des arrêtés contestés que M. et Mme D... ont été astreints à une obligation de présentation quotidienne au commissariat de police de Nîmes pour une durée limitée à quarante-cinq jours, à l'exception des dimanches et jours fériés afin de faire constater qu'ils respectaient les mesures d'assignation à résidence en litige. Par ailleurs, ces arrêtés leur imposaient la remise de leur passeport au préfet ainsi qu'une interdiction de quitter le département du Gard sans autorisation. Ainsi qu'il a été dit au point 8, ils ne peuvent utilement se prévaloir des recours qu'ils ont formés devant la Cour nationale du droit d'asile lesquels ne leur donnaient plus le droit de se maintenir sur le territoire français. Les circonstances que les requérants présenteraient des garanties de représentation et seraient engagés dans des activités de bénévolat au " Resto du Coeur ", qu'ils bénéficieraient d'un accompagnement par des associations et que leurs trois enfants en bas âges seraient scolarisés ne sont pas de nature à faire obstacle à ce qu'ils se présentent aux forces de l'ordre et à établir que l'obligation de présentation à laquelle ils ont été astreints constituerait une mesure de surveillance disproportionnée.

11. M. et Mme D... ne peuvent critiquer l'information donnée par le préfet du Gard dans les arrêtés contestés selon laquelle, lors d'un pointage, ils pourront être acheminés vers un lieu déterminé en vue d'assurer la mise à exécution effective de la mesure d'éloignement dont ils ont fait l'objet dès lors qu'ils ne bénéficiaient plus du droit de se maintenir sur le territoire français ainsi qu'il a été dit au point 8. Ainsi, le moyen tiré de ce que cette information ne serait pas fondée du fait qu'ils bénéficient d'une attestation de demande d'asile et qu'ils ont formé un recours auprès de la Cour nationale du droit d'asile ne peut qu'être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 18 décembre 2019 par lesquels le préfet du Gard les a assignés à résidence.

Sur les conclusions subsidiaires à fin de suspension de l'exécution des mesures d'éloignement :

13. L'article L. 743-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Sans préjudice des articles L. 556-1 et L. 571-4, lorsque l'étranger sollicitant l'enregistrement d'une demande d'asile a fait l'objet, préalablement à la présentation de sa demande, d'une mesure d'éloignement prise en application du livre V, celle-ci, qui n'est pas abrogée par la délivrance de l'attestation prévue à l'article L. 741-1, ne peut être mise à exécution tant que l'étranger bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français dans les conditions prévues aux articles L. 743-1 et L. 743-2. / Dans le cas où le droit de se maintenir sur le territoire français a pris fin en application des 4° bis ou 7° de l'article L. 743-2, l'étranger qui fait l'objet, postérieurement à la décision de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, d'une assignation à résidence ou d'un placement en rétention administrative dans les conditions prévues au livre V, en vue de l'exécution d'une obligation de quitter le territoire français notifiée antérieurement à la décision de l'office et qui n'est plus susceptible d'un recours devant la juridiction administrative, peut, dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision prononçant son placement en rétention administrative ou son assignation à résidence, demander au président du tribunal administratif de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à l'expiration du délai de recours devant la Cour nationale du droit d'asile ou, si celle-ci est saisie, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la cour, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de notification de celle-ci. La mesure d'éloignement ne peut être mise à exécution pendant ce délai de quarante-huit heures ou, en cas de saisine du président du tribunal administratif, avant que ce dernier ou le magistrat qu'il désigne à cette fin parmi les membres de sa juridiction ou les magistrats honoraires inscrits sur la liste mentionnée à l'article L. 222-2-1 du code de justice administrative ait statué. Le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cette fin statue dans les conditions prévues au III de l'article L. 512-1 du présent code. Il fait droit à la demande de l'étranger lorsque celui-ci présente des éléments sérieux de nature à justifier, au titre de sa demande d'asile, son maintien sur le territoire durant l'examen de son recours par la cour. / La suspension de l'exécution de la mesure d'éloignement met fin à l'assignation à résidence ou à la rétention administrative de l'étranger, sauf lorsque l'office a pris une décision de rejet dans le cas prévu au 5° du III de l'article L. 723-2. ".

14. La Cour nationale du droit d'asile a, par deux décisions du 13 janvier 2020, rejeté les recours formés par M. et Mme D... à l'encontre des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 17 décembre 2019 rejetant leur demande d'asile. Par suite, les conclusions des requérants tendant, en application de l'article L. 743-4 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la suspension de l'exécution des obligations de quitter le territoire dont ils font l'objet, sont irrecevables et doivent être rejetées comme telles.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

15. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. et Mme D... n'implique aucune mesure d'exécution. Il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte de M. et Mme D....

Sur les frais liés au litige :

16. Les dispositions des article 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, tout ou partie des sommes que le conseil de M. et Mme D... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes d'aide juridictionnelle provisoire présentées par M. et Mme D....

Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. et Mme D... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D..., à M. A... D..., à Me B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Gard

Délibéré après l'audience du 4 décembre 2020, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- Mme I..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 décembre 2020.

2

N° 20MA00447, 20MA00448

nl


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA00447-20MA00448
Date de la décision : 18/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-04-01 Étrangers. Séjour des étrangers. Restrictions apportées au séjour. Assignation à résidence.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Jacqueline MARCHESSAUX
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : CAGNON

Origine de la décision
Date de l'import : 08/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-12-18;20ma00447.20ma00448 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award