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21/09/2020 | FRANCE | N°20MA00412

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 21 septembre 2020, 20MA00412


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 23 septembre 2019 par lequel le préfet de l'Hérault lui a refusé l'octroi d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée

et familiale " ou " salarié " dans un délai d'un mois à compter du jugement à i...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 23 septembre 2019 par lequel le préfet de l'Hérault lui a refusé l'octroi d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1905676 du 30 décembre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 30 janvier 2020, Mme D..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 30 décembre 2019;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 septembre 2019 du préfet de l'Hérault ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié ", à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement, qui n'a pas écarté les pièces produites par le préfet alors que leur présentation méconnaissait les dispositions du dernier alinéa de l'article R. 611-8-2 du code de justice administrative, est irrégulier ;

- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;

- la direction régionale des entreprises, de la concurrence, des conditions de travail et de l'emploi a rendu un avis incomplet dès lors que celui-ci ne se prononce pas sur les critères prévus aux 1° à 7° de l'article R. 5221-10 du code du travail ;

- cette décision mentionnant qu'elle travaille 240 heures par mois, repose sur une erreur de fait en l'absence de prise en compte de la cessation un contrat de travail en avril 2018 ;

- le préfet a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a violé les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juin 2020, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné Mme E... F..., présidente assesseure, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de

M. Guy Fédou, président de la 6ème chambre en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C... Grimaud, rapporteur ;

- et les observations de Mme D..., invitée à présenter des observations orales en l'absence de son avocat.

Considérant ce qui suit :

1. Entrée pour la première fois en France en septembre 2014, Mme D..., née le 14 juillet 1996 et de nationalité kazakhe, a bénéficié de titres de séjour délivrés en sa qualité d'étudiante de la date de son entrée en France au 30 août 2017, puis d'un titre de séjour en sa qualité de conjointe de français à compter du 19 mars 2018. Elle a demandé le 21 mars 2019 à se voir délivrer, en lieu et place de ce dernier titre de séjour, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié ". Par un arrêté du 23 septembre 2019, le préfet de l'Hérault a rejeté cette demande et prescrit l'éloignement de l'intéressée.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Il ressort des pièces du dossier que Mme D... a produit à l'appui de sa demande de titre de séjour un contrat de travail conclu le 18 mars 2018 avec la société Axstom pour un emploi de 108 heures par mois ainsi qu'un second contrat de travail conclu le 2 mai 2018 avec un particulier en vue de travaux domestiques pour un total de 128 heures par mois. L'administration en a déduit que l'intéressée cumulait ces deux emplois, sans toutefois soutenir que sa demande de titre de séjour aurait mentionné ce cumul. Cependant, Mme D... établit avoir démissionné le 23 avril 2018 de son emploi au sein de la société Axstom, de telle sorte que son temps de travail mensuel à la date de la décision attaquée atteignait 128 heures et non 240 heures. La requérante est par suite fondée à soutenir que la décision de refus de titre de séjour prise à son encontre est entachée d'erreur de fait et doit être annulée de même que, par voie de conséquence, l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination, aucun autre moyen n'étant mieux à même de régler le litige.

3. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté lui refusant le séjour et l'obligeant à quitter le territoire français et qu'il y a lieu, par conséquent, d'annuler ce jugement ainsi que l'arrêté du 23 septembre 2019.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

4. Aux termes de l'article L. 9112 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ".

5. Eu égard au motif qui fonde l'annulation prononcée par le présent arrêt, il y a seulement lieu d'enjoindre au préfet de l'Hérault de réexaminer la situation de Mme D... dans un délai de deux mois à compter de sa notification et de la munir dans cette attente d'une autorisation provisoire de séjour.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 7611 du code de justice administrative :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat, à verser à Mme D... en application de ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1905676 du tribunal administratif de Montpellier du 30 décembre 2019 et l'arrêté du 23 septembre 2019 du préfet de l'Hérault sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de réexaminer la situation de Mme D... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de la munir dans cette attente d'une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'État versera à Mme D... la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de l'Hérault et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Montpellier.

Délibéré après l'audience du 7 septembre 2020, où siégeaient :

- Mme E... F..., présidente assesseure, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. C... Grimaud, premier conseiller,

- M. François Point, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 septembre 2020.

2

N° 20MA00412


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA00412
Date de la décision : 21/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme MASSE-DEGOIS
Rapporteur ?: M. Philippe GRIMAUD
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : CABINET MAZAS - ETCHEVERRIGARAY

Origine de la décision
Date de l'import : 03/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-09-21;20ma00412 ?
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