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17/09/2020 | FRANCE | N°19MA01930

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 17 septembre 2020, 19MA01930


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 28 mars 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1809123 du 21 décembre 2018, le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 25 avril et 4

juillet 2019, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 28 mars 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1809123 du 21 décembre 2018, le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 25 avril et 4 juillet 2019, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille du 21 décembre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 28 mars 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- elle est apatride ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La procédure a été régulièrement communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 mars 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les observations de Me C... représentant Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... relève appel du jugement du 21 décembre 2018 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 mars 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme B... est née en Arménie le 22 décembre 1949. Elle a rejoint une cousine en Ukraine en 2008 afin de s'établir dans ce pays. Si elle soutient avoir acquis la nationalité ukrainienne, elle ne l'établit nullement, comme l'ont relevé l'office français de protection des réfugiés et apatrides et la cour nationale du droit d'asile. En outre, Mme B... n'établit pas plus qu'elle aurait dû répudier la nationalité arménienne pour acquérir la nationalité ukrainienne et qu'elle serait ainsi devenue apatride en raison de la perte de sa nationalité arménienne. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que la mesure d'éloignement ne pourrait être exécutée dès lors qu'elle serait apatride.

3. En deuxième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L.313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté pour les motifs énoncés au point 9 du jugement en litige, qui n'appellent pas de précisions en appel.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

5. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... est entrée en France selon ses déclarations le 20 août 2016, à l'âge de soixante-huit ans. Elle n'établit ni même n'allègue avoir de la famille en France ou avoir noué des relations privées, amicales ou sociales sur le territoire français et ne peut ainsi établir avoir constitué une vie privée et familiale en France. Elle n'établit pas plus être dépourvue d'attaches dans son pays d'origine, l'Arménie, ou dans le pays où elle a vécu jusque 2016, l'Ukraine. Les circonstances, aussi tragiques soient-elles, qu'elle a perdu deux maris et ait survécu à un tremblement de terre et à plusieurs conflits armés, ne sauraient suffire à établir la constitution, en France, d'une vie privée et familiale. Dans ces conditions, l'intéressée n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale.

6. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " et aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établir que sa vie ou sa liberté sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".

7. D'une part, Mme B... n'apporte aucun élément de nature à démontrer un risque de traitements inhumains et dégradants en cas de retour en Arménie, pays dont elle a la nationalité. D'autre part, à supposer qu'elle soit légalement admissible en Ukraine, bien qu'elle ne démontre pas, comme il a été dit, avoir acquis la nationalité ukrainienne, Mme B... se borne à invoquer, de manière générale, l'actualité du conflit armé qui affecte une partie du territoire ukrainien et n'établit donc pas être exposée personnellement à des risques en cas de retour dans ce pays. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que les stipulations précitées ont été méconnues.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

9. Par voie de conséquence du rejet des conclusions aux fins d'annulation présentées par Mme B..., il y a lieu de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction.

Sur les frais liés au litige :

10. L'Etat n'étant pas la partie perdante à la présente instance, il y a lieu de rejeter les conclusions de Mme B... présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B..., à Me C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2020 où siégeaient :

- M. Poujade, président,

- M. Portail, président-assesseur,

- Mme A..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 septembre 2020.

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N° 19MA01930

hw


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19MA01930
Date de la décision : 17/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: Mme Elisabeth BAIZET
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : KUHN-MASSOT

Origine de la décision
Date de l'import : 29/09/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-09-17;19ma01930 ?
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