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22/07/2020 | FRANCE | N°18MA03822

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre, 22 juillet 2020, 18MA03822


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision implicite de rejet en date du 19 mars 2016 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a refusé le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté prévu par la loi du 26 juillet 1991.

Par un jugement n° 1601823 du 15 juin 2018, le tribunal administratif de Nice a rejeté la requête de M. B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 9 août 2018 et un mémoire présenté le 16 novembre

2018, M. B..., représenté par Me D..., demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision implicite de rejet en date du 19 mars 2016 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a refusé le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté prévu par la loi du 26 juillet 1991.

Par un jugement n° 1601823 du 15 juin 2018, le tribunal administratif de Nice a rejeté la requête de M. B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 9 août 2018 et un mémoire présenté le 16 novembre 2018, M. B..., représenté par Me D..., demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du 15 juin 2018 ;

2°) d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande du 15 janvier 2016 tendant au bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté et au versement des arriérés de rémunération du 1er septembre 2006 au 16 décembre 2015 ;

3°) d'ordonner à l'administration de reconstituer sa carrière en lui accordant l'avantage spécifique d'ancienneté pour la période du 1er septembre 2006 au 16 décembre 2015, et de lui verser les arriérés de traitement résultant de la régularisation de sa carrière sous astreinte de

200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement n'est pas motivé à défaut dans ses motifs d'explication de la solution de rejet de sa requête ;

- l'administration a mal apprécié sa situation professionnelle et commis une erreur de droit en lui refusant le bénéfice de l'ASA pour la période du 1er septembre 2006 au

16 décembre 2015. Il a en effet été affecté dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, au sens de la loi n° 91-715 et du décret

n° 95-313, même si ces deux textes ne définissent pas précisément lesdites zones, et alors que l'arrêté du 17 janvier 2001 qui fixait la liste des secteurs concernés a été annulé par une décision du Conseil d'Etat du 20 novembre 2015, et que l'arrêté du 30 décembre 2015 ne dispose que pour l'avenir ;

- son affectation à l'UMZ CRS Sud détachement de Nice répond à la qualification de circonscription urbaine de police au sens du décret du 21 mars 1995. Il est légitime à prétendre au bénéfice de l'ASA au titre de dix années de service continu.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 octobre 2018, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 24 octobre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au

25 novembre 2019 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 91-715 du 26 juillet 1991 ;

- la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 ;

- le décret n° 95-313 du 21 mars 1995 ;

- le décret n°2003-952 du 3 octobre 2003 relatif à l'organisation des compagnies républicaines de sécurité ;

- les arrêtés des 17 janvier 2001 et 3 décembre 2015 fixant la liste des secteurs prévue au 1° de l'article 1er du décret du 21 mars 1995 ;

- l'arrêté du 29 mai 2009 relatif à l'implantation et à la composition des directions zonales, des délégations, des unités motocyclistes zonales et des compagnies républicaines de sécurité ;

- l'arrêté du ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire du 6 juin 2006 portant règlement général d'emploi de la police nationale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., substituant Me D..., représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., fonctionnaire de police a été affecté à l'unité motocycliste zonale (UMZ) du secteur sud en détachement à Nice, implantée à Cagnes-sur-Mer, du 1er septembre 2006 au

31 août 2016. Il a contesté la décision implicite de rejet de sa demande du 15 janvier 2016 tendant à bénéficier de l'avantage spécifique d'ancienneté (ASA) au titre de son affectation à l'UMZ du secteur sud en détachement de Nice. Par un jugement du 15 juin 2018 dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. Le jugement attaqué qui cite l'article 11 de la loi du 26 juillet 1991 et l'article 1er du décret du 21 mars 1995 pris pour l'application de ces dispositions législatives, a relevé en son point 9, que l'affectation de M. B... à l'UMZ CRS SUD en détachement de Nice depuis le

1er septembre 2006 ne pouvait être regardée comme correspondant à une affectation dans une circonscription de police ou une subdivision de circonscription de police au sens de l'article 1er du décret du 21 mars 1995, et qu'en conséquence, l'intéressé ne pouvait utilement invoquer l'illégalité de l'arrêté interministériel du 17 janvier 2001. Par suite, le moyen fondé sur l'insuffisante motivation du jugement attaqué doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Premièrement, l'article 11 de la loi du 26 juillet 1991 modifiée dispose que : " Les fonctionnaires de l'Etat et les militaires de la gendarmerie affectés pendant une durée fixée par décret en Conseil d'Etat dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, ont droit, pour le calcul de l'ancienneté requise au titre de l'avancement d'échelon, à un avantage spécifique d'ancienneté dans des conditions fixées par ce même décret ; ". Aux termes de l'article 1er du décret n° 95-313 du 21 mars 1995 : " Les quartiers urbains où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, mentionnés au quatrième alinéa de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée et à l'article 11 de la loi du 26 juillet 1991 susvisée, doivent correspondre : 1° En ce qui concerne les fonctionnaires de police, à des circonscriptions de police ou à des subdivisions de ces circonscriptions désignées par arrêté conjoint du ministre chargé de la sécurité, du ministre chargé de la ville, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget (...) ". Il résulte de ces dispositions que le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté n'est ouvert qu'aux fonctionnaires de police affectés administrativement à une circonscription de sécurité publique ou une subdivision d'une telle circonscription correspondant à un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, désignées par arrêté conjoint du ministre chargé de la sécurité, du ministre chargé de la ville, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget. Ces dispositions font, par suite, obstacle à l'attribution de l'avantage spécifique d'ancienneté à un agent affecté administrativement, non à une circonscription de sécurité publique ou à une circonscription de sécurité de proximité, mais à une direction départementale de la sécurité publique ou à une autre direction de la police nationale, lesquelles ne correspondent pas à des circonscriptions ou subdivisions territoriales où sont exercées des missions en relation directe avec ces quartiers.

5. Deuxièmement, un arrêté du 3 décembre 2015 fixe la liste des circonscriptions de police mentionnées au 1° de l'article 1er du décret du 21 mars 1995 précité. La liste établie par l'arrêté attaqué comprend des circonscriptions de sécurité publique, qui constituent, aux termes de l'article 252-3 du règlement général d'emploi de la police nationale approuvé par l'arrêté du

6 juin 2006, " la structure de base des services territoriaux de la sécurité publique ".

6. Troisièmement, aux termes de l'article 1er du décret du 3 octobre 2003 relatif à l'organisation des compagnies républicaines de sécurité : " Les compagnies républicaines de sécurité sont un des éléments de la force publique, composé d'unités mobiles de police placées sous l'autorité du ministre chargé de l'intérieur. Elles constituent une direction active de la police nationale. Elles sont spécialisées dans le maintien et le rétablissement de l'ordre public sur l'ensemble du territoire ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " Les compagnies républicaines de sécurité peuvent être employées sur tout le territoire, conjointement avec les autres forces de police, soit à concourir au maintien de l'ordre public et à la protection des personnes et des biens, soit à assumer des missions propres de surveillance, notamment sur les voies de communications, soit à renforcer les autres services de police dans leurs missions ".

Et, aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 29 mai 2009 relatif à l'implantation et à la composition des directions zonales, des délégations, des unités motocyclistes zonales et des compagnies républicaines de sécurité : " Les directions zonales des compagnies républicaines de sécurité ont les limites territoriales des zones de défense (...) ". Il résulte de ces dispositions que toutes les unités qui composent les compagnies républicaines de sécurité ont vocation à intervenir sur l'ensemble du territoire national.

7. Pour soutenir que la décision attaquée est entachée d'une erreur de droit ainsi que d'une erreur d'appréciation de sa situation professionnelle, le requérant fait valoir que sa zone d'affectation, notamment la commune de Nice, correspondait à un quartier urbain où se posaient des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles.

8. En premier lieu, pour refuser à M. B... le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté au titre de son affectation à l'UMZ du secteur sud en détachement de Nice pour la période du 1er septembre 2006 au 16 décembre 2015, date de publication de l'arrêté du

3 décembre 2015, le ministre de l'intérieur a considéré que le service d'affectation de l'agent ne correspondait pas à une circonscription de police au sens du décret du 21 mars 1995, c'est-à-dire à un quartier urbain où se posaient des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles. Ce faisant, le ministre s'est implicitement mais nécessairement appuyé, s'agissant d'une période antérieure à la publication de l'arrêté du 3 décembre 2015, sur la méthode retenue par les auteurs de cet arrêté qui fixe la liste des circonscriptions de police mentionnées au 1° de l'article 1er du décret du 21 mars 1995. Cette méthode est fondée sur le calcul d'un indice moyen de délinquance à partir des statistiques des faits recensés en matière de délinquance de voie publique, violences crapuleuses, outrages ou violences à dépositaires de l'autorité et violences urbaines, corrigé pour tenir compte, le cas échéant, du classement du territoire comme quartier prioritaire au sens des décrets du 30 décembre 2014 fixant la liste des quartiers prioritaires de la politique de la ville ou comme zone de sécurité prioritaire au sens de la circulaire du

30 juillet 2012 du ministre de l'intérieur relative à la mise en oeuvre des zones de sécurité prioritaires. Rien ne s'oppose à ce que le ministre fonde son appréciation sur les critères et la méthodologie qui ont été mis en oeuvre pour élaborer l'arrêté du 3 décembre 2015. M. B... n'est donc pas fondé à soutenir que le ministre de l'intérieur aurait par suite commis une erreur de droit.

9. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, et particulièrement des écritures en défense de l'administration non contestées par M. B..., que les unités de CRS sont des unités mobiles de renfort, pouvant intervenir sur tout le territoire national sans un exercice constant des missions, rattaché à un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles. Ces unités ne correspondent donc pas à des circonscriptions de police ou une subdivision d'une telle circonscription évoquées au point 4., seules éligibles à l'attribution de l'avantage spécifique d'ancienneté au sens du décret du 21 mars 1995. Ainsi, en se fondant également, pour rejeter la demande de M. B..., sur la circonstance que l'affectation à l'UMZ du secteur sud en détachement de Nice, alors même que celle-ci est implantée à

Saint-Laurent du Var et sur le territoire de la circonscription de sécurité publique de

Cagnes-sur-mer, ne pouvait être regardée comme une affectation dans une circonscription de police ou une subdivision d'une telle circonscription, susceptible d'ouvrir droit à l'avantage spécifique d'ancienneté en application des dispositions de l'article 1er du décret du 21 mars 1995, le ministre de l'intérieur n'a pas fait une inexacte application de ces dispositions ou entaché sa décision d' une erreur manifeste d'appréciation.

10. En troisième lieu, si le requérant invoque l'illégalité de l'arrêté interministériel du 17 janvier 2001 en vertu duquel les circonscriptions de police relevant des secrétariats généraux pour l'administration de la police de Paris et de Versailles sont les seules dans lesquelles les fonctionnaires de police peuvent bénéficier de l'avantage spécifique d'ancienneté, dont l'illégalité a été constatée par une décision n°s 374912 ; 377146 ; 379735 ; 380784 du Conseil d'Etat du 20 novembre 2015, il ne ressort pas des pièces du dossier que le refus contesté serait fondé sur cet arrêté. Ainsi, ce moyen inopérant ne peut qu'être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui vient d'être dit que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande tendant au bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté pour la période du 1er septembre 2006 au 16 décembre 2015. Dès lors, sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nice et de la décision implicite de refus attaquée doit être rejetée, ainsi que ses conclusions à fin d'injonction et celles fondées sur l'article L.761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2020, où siégeaient :

- M. Badie, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 juillet 2020.

2

N° 18MA03822


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA03822
Date de la décision : 22/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération. Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Didier URY
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : SELARL NOUS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 08/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-07-22;18ma03822 ?
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