La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/06/2020 | FRANCE | N°18MA02606

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 19 juin 2020, 18MA02606


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Sarl Midi Immobilier a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 12 février 2016 par lequel le maire de Perpignan a accordé à la SAS Tao un permis de stationnement pour l'installation d'une terrasse et la décision implicite rejetant son recours gracieux tendant à la modification de cette permission, de condamner la commune de Perpignan à lui verser la somme de 199 789 euros au titre des préjudices subis, ainsi que le montant correspondant au préjudice subi pour l'exercice

2016 en cours et d'enjoindre à la commune de rétablir le passage des piét...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Sarl Midi Immobilier a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 12 février 2016 par lequel le maire de Perpignan a accordé à la SAS Tao un permis de stationnement pour l'installation d'une terrasse et la décision implicite rejetant son recours gracieux tendant à la modification de cette permission, de condamner la commune de Perpignan à lui verser la somme de 199 789 euros au titre des préjudices subis, ainsi que le montant correspondant au préjudice subi pour l'exercice 2016 en cours et d'enjoindre à la commune de rétablir le passage des piétons le long de l'immeuble.

Par un jugement n° 1603715 du 6 avril 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ces demandes et a mis à la charge de la Sarl Midi Immobilier la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 4 juin 2018 et 7 janvier 2020, sous le n° 18MA02606, la SARL Midi Immobilier, représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 6 avril 2018 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 février 2016 et la décision implicite rejetant son recours gracieux ;

3°) de réduire à 800 euros le montant mise à sa charge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par l'article 2 du jugement attaqué ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Perpignan la somme de 4 500 euros à en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de l'irrégularité tenant à l'absence de précision dans le permis de stationnement sur le cheminement des piétons ;

- sa requête est recevable ;

- l'arrêté contesté ne contient pas de plan d'implantation ;

- l'avis de la commission des terrasses a été rendu à une date postérieure à l'arrêté en litige ;

- ce vice était susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision à intervenir et l'a privée d'une garantie ;

- aucun dossier relatif aux entourages, aménagements et agencements de la terrasse du Tanoa Café n'a été soumis à la commission des terrasses en violation de l'article 22 du règlement municipal ;

- l'absence d'un plan terrasse est contraire à l'article 18.1 du règlement municipal ;

- la commune ne dispose pas d'un pouvoir discrétionnaire en matière d'autorisation de terrasse ;

- l'arrêté contesté n'est pas conforme aux règles d'accessibilité aux personnes handicapées et à la mobilité réduite fixées par l'article 15 du règlement municipal ;

- aucun aménagement n'est implanté pour les personnes ayant une déficience visuelle ou auditive ainsi que l'exige l'article 15 du règlement municipal ;

- cet arrêté a violé le principe d'égalité ;

- il présente un caractère discriminatoire ;

- le moyen tiré de ce que le motif de rejet du recours gracieux relatif à la sécurité des passants serait entaché d'inexactitude matérielle n'est pas inopérant ;

- l'arrêté contesté entraîne une gêne pour la circulation et la liberté de commerce contraire aux dispositions de l'article L. 2213-6 du code général des collectivités territoriales ;

- les décisions en litige portent atteinte aux droits des piétons de circuler sur les trottoirs ;

- la modification du flux des passants découlant de l'implantation de la terrasse lui porte préjudice ;

- le permis de stationnement ne constitue pas une décision créatrice de droit dès lors qu'une autorisation d'occupation du domaine public est, par nature, " précaire et révocable " ;

- les motifs de rejet de son recours gracieux invoqués dans le courrier du 25 juillet 2016 sont illégaux et emportent l'illégalité de la décision implicite et de l'arrêté contestés ;

- le tribunal a commis une erreur de droit en écartant comme inopérant le moyen tiré de l'atteinte au principe régissant les autorisations temporaires du domaine public ;

- les frais d'instance mis à sa charge par le tribunal sont exagérés et inéquitables.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 novembre 2018, la commune de Perpignan, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de la SARL Midi Immobilier la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est hors délai et donc irrecevable ;

- elle est dépourvue d'objet dès lors que l'arrêté a été accordé pour une période prenant fin le 31 décembre 2016 ;

- les moyens soulevés par la Sarl Midi Immobilier ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le décret n° 2006-1657 du 21 décembre 2006 ;

- l'arrêté municipal du 13 février 2012 portant règlement d'installation et d'aménagement des terrasses de cafés et de restaurants sur le domaine public communal de Perpignan ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- et les conclusions de M. Chanon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Midi Immobilier relève appel du jugement du 6 avril 2018 du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 février 2016 par lequel le maire de Perpignan a accordé à la SAS Tao un permis de stationnement pour l'installation d'une terrasse et de la décision implicite rejetant son recours gracieux tendant à la modification de cette permission.

Sur le non-lieu à statuer et la fin de non-recevoir opposés par la commune de Perpignan :

2. En premier lieu, la circonstance que l'arrêté contesté a épuisé ses effets à la fin de l'année 2016 n'a pas rendu sans objet les conclusions de la SARL Midi Immobilier. Par suite, les conclusions à fin de non-lieu à statuer présentées par la commune de Perpignan doivent être rejetées.

3. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté en litige a été affiché le 17 février 2016. Par ailleurs, le recours gracieux du 21 mars 2016 de la SARL Midi Immobilier, notifié le 22 mars suivant à la commune de Perpignan qui était dirigé contre la permission de voirie accordée à la brasserie Tanoa au titre de l'année 2016 a fait l'objet d'une décision implicite de rejet le 22 mai 2016. Ainsi, la requête enregistrée le 18 juillet 2016 au greffe du tribunal n'était pas tardive.

Sur la recevabilité des conclusions à fin d'indemnisation présentées en première instance par la SARL Midi Immobilier :

4. La SARL Midi Immobilier n'ayant produit aucune demande préalable indemnitaire, ses conclusions tendant à la condamnation de la commune de Perpignan à lui verser la somme de 199 789 euros au titre des préjudices subis, ainsi que le montant correspondant au préjudice subi pour l'exercice 2016 en cours sont, par suite, irrecevables.

Sur la régularité du jugement attaqué :

5. Aucune disposition législative et réglementaire ne prévoit que l'arrêté portant autorisation d'occupation du domaine public doive indiquer le cheminement des piétons. Par suite le tribunal n'était pas tenu de répondre au moyen inopérant tiré de l'absence de précision sur ce point dans le permis de stationnement contesté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

6. Aux termes du chapitre 1er de l'arrêté municipal du 13 février 2012 portant règlement d'installation et d'aménagement des terrasses de cafés et de restaurants sur le domaine public communal de Perpignan : " La délivrance des autorisations d'occupation du domaine public pour les terrasses des cafés et restaurants, les aménagements et le fonctionnement des terrasses, sont soumis aux conditions arrêtées au présent règlement ainsi qu'à l'avis d'une commission présidée par le maire ou l'adjoint délégué ". L'article 3 de ce même arrêté dispose que : " Cette commission est chargée de donner un avis sur les demandes d'aménagements de terrasses, avant décision du maire ou de l'adjoint délégué. ". Aux termes de l'article 3 de cet arrêté relatif aux compétences de la commission : " Cette commission est chargée de donner un avis sur les demandes d'aménagements de terrasses, avant décision du maire ou de l'adjoint délégué. / Lors de demandes d'aménagement de la terrasse, la commission sera chargée d'étudier le dossier présenté par le pétitionnaire. Pour cela, elle devra prendre en considération toutes les prescriptions légales et réglementaires, ainsi que celles énoncées dans le présent règlement, notamment en matière de sécurité et d'environnement. / Outre, les prescriptions techniques, légales et réglementaires, la commission appréciera au cas par cas, l'opportunité de la délivrance de l'autorisation suivant différents critères, notamment : / Le maintien de la sécurité des lieux et de ses usagers, des sites inscrits et classés présents sur le lieu, l'environnement général et l'harmonie d'ensemble du site, la cohérence du dossier avec les éléments existants ou les projets à venir. / L'utilisation générale du site pour d'autres animations, régulières (marchés de plein vent, attractions foraines ...) ou ponctuelles (fête de la Musique, Visa pour l'Image - Perpignan ...). / Il sera conseillé d'établir une concertation en amont entre établissements lorsque plusieurs projets se situeront sur le même site afin d'harmoniser l'ensemble avant validation de la Ville. ". Selon les dispositions de l'article 6.2 du même règlement relatif aux pièces à fournir avec la demande : " (...) La demande doit comporter obligatoirement les pièces suivantes : / la demande écrite dûment complétée et signée, / l'extrait K bis émanant du greffe du tribunal de commerce, / une photographie du secteur concerné permettant d'appréhender l'environnement de la future terrasse, / un plan côté et suffisamment large pour montrer l'insertion de la terrasse dans son environnement, / une insertion graphique su projet d'aménagement de la terrasse dans son environnement proche et lointain, / la description précise de tous les éléments de mobilier de la terrasse. Cette description doit notamment montrer le caractère démontable des installations et la description du lieu de stockage du mobilier ". Selon l'article 18.1 de ce règlement relatif à la longueur de la terrasse : " Afin de ne pas gêner le fonctionnement de l'espace public ni les activités des immeubles mitoyens, touts les composants des terrasses y compris les éléments de délimitation, doivent se tenir à l'intérieur des limites autorisées (...) ". L'article 22 du règlement précité dispose que : " Les entourages, aménagements et agencements des terrasses feront l'objet d'une dossier conforme à la réglementation existante et soumis à l'avis de la commission (...) ".

7. Il appartient à l'autorité chargée de la gestion du domaine public de fixer, tant dans l'intérêt dudit domaine et de son affectation que dans l'intérêt général, les conditions auxquelles elle entend subordonner les permissions d'occupation.

8. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la demande d'autorisation de la société Tao aurait comporté un dossier relatif aux entourages, aménagements et agencements des terrasses. La commune de Perpignan se borne à faire valoir que ce dossier était complet sans l'établir. Par ailleurs, l'arrêté contesté indique seulement l'adresse de la terrasse et ses dimensions, soit cinq mètres de long par cinq mètres de large. Dès lors, la société requérante est fondée à soutenir que ce dossier soumis à l'avis de la commission était incomplet au regard des prescriptions de l'article 22 du règlement municipal.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la Sarl Midi Immobilier est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 février 2016 ainsi que de la décision implicite du 22 mai 2016 et a mis à sa charge la somme de 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

10. Le présent arrêt n'implique pas qu'il soit enjoint à la commune de Perpignan de rétablir le passage des piétons le long de l'immeuble. Il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions à fin d'injonction de la SARL Midi Immobilier.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SARL Midi Immobilier, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la commune de Perpignan au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Perpignan la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SARL Midi Immobilier et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Les conclusions de la commune de Perpignan à fin de non-lieu à statuer sont rejetées.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 6 avril 2018, en tant qu'il a rejeté les conclusions de la SARL Midi Immobilier tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 février 2016 ainsi que de la décision implicite du 22 mai 2016 et a mis à sa charge la somme de 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ensemble l'arrêté du 12 février 2016 et la décision implicite du 22 mai 2016, sont annulés.

Article 3 : La commune de Perpignan versera à la SARL Midi Immobilier une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Midi Immobilier et à la commune de Perpignan.

Délibéré après l'audience du 5 juin 2020, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- Mme D..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 19 juin 2020.

2

N° 18MA02606

nl


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA02606
Date de la décision : 19/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

24-01-02-01-01-01 Domaine. Domaine public. Régime. Occupation. Utilisations privatives du domaine. Autorisations unilatérales.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Jacqueline MARCHESSAUX
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : AARPI RGR AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-06-19;18ma02606 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award