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27/03/2020 | FRANCE | N°19MA01776

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 27 mars 2020, 19MA01776


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... F... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 26 mars 2018 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1802614 du 2 octobre 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enr

egistrés les 12 avril et 26 mai 2019, sous le n° 19MA01776, Mme F..., représentée par Me B..., d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... F... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 26 mars 2018 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1802614 du 2 octobre 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 avril et 26 mai 2019, sous le n° 19MA01776, Mme F..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 2 octobre 2018 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 mars 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jours de retard à compter de la décision intervenir ou à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil Me B... en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- le tribunal n'a pas vraiment répondu au moyen tiré de l'insuffisance de motivation ;

- l'arrêté contesté est entaché d'un vice d'incompétence ;

- l'avis du collège des médecins de l'OFII est irrégulier dès lors qu'il ne mentionne pas la durée prévisible de traitement et les éléments de procédure ;

- il n'est pas établi que le médecin ayant établi le rapport n'a pas participé à l'élaboration de l'avis du collège ;

- cet avis est incomplet car il ne donne aucune indication quant à la possibilité de bénéficier d'un traitement approprié dans le pays d'origine ;

- l'arrêté contesté est entaché d'une erreur de fait ;

- il méconnaît l'autorité de la chose jugée par un jugement du 5 décembre 2017 du tribunal ;

- l'arrêté est contraire aux dispositions des articles L. 313-11 11° et L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La demande d'aide juridictionnelle de Mme F... a été rejetée par une décision du 21 novembre 2018.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 décembre 2019, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme F... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- et les observations de Me B..., représentant Mme F....

Considérant ce qui suit :

1. Mme F..., née en 1960, de nationalité marocaine, relève appel du jugement du 2 octobre 2018 du tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 mars 2018 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ne ressort pas des écritures de première instance que Mme F... aurait soulevé le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la procédure du fait de la seule production d'un avis laconique et stéréotypé et de l'absence de production du rapport mentionné à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle ne saurait dès lors reprocher au tribunal de ne pas avoir répondu à ce moyen.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Par arrêté n° 201-/I-1318 du 17 novembre 2017, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet de l'Hérault a accordé à M. Pascal C..., secrétaire général de la préfecture et signataire de l'arrêté contesté, à l'effet de signer tous actes, arrêtés, décisions et circulaires relevant des attributions de l'Etat dans le département de l'Hérault et notamment en ce qui concerne les affaires intéressant plusieurs services départementaux, des administrations civiles de l'Etat, à l'exception, notamment, d'une part, des réquisitions prises en application de la loi du 11 juillet 1938 relative à l'organisation générale de la nation pour temps de guerre, d'autre part, de la réquisition des comptables publics régie par le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique. Cet arrêté précise que cette délégation comprend donc, notamment, la signature de tous les actes administratifs et correspondances relatifs au séjour et à la police des étrangers. Les circonstances que les dispositions du décret du 29 décembre 1962 ont été abrogées par le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique et que les réquisitions pour le temps de guerre n'ont plus été utilisées demeurent sans incidence sur la régularité de la délégation accordée dès lors que les matières concernées restent exclues de la délégation en litige. Cette délégation, qui n'est pas générale, habilitait dès lors M. C... à signer la décision contestée. Il suit de là que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté.

4. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. (...) ".

5. L'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration./ L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Selon L'article R 313-23 du code précité : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. Le médecin de l'office peut solliciter, le cas échéant, le médecin qui suit habituellement le demandeur ou le médecin praticien hospitalier. Il en informe le demandeur. Il peut également convoquer le demandeur pour l'examiner et faire procéder aux examens estimés nécessaires. (...) L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission par le demandeur des éléments médicaux conformément à la première phrase du premier alinéa. Lorsque le demandeur n'a pas présenté au médecin de l'office ou au collège les documents justifiant son identité, n'a pas produit les examens complémentaires qui lui ont été demandés ou n'a pas répondu à la convocation du médecin de l'office ou du collège qui lui a été adressée, l'avis le constate. L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. ".

6. Aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 27 décembre 2016 : " Pour l'établissement de son rapport médical, le médecin de l'office peut demander, dans le respect du secret médical, tout complément d'information auprès du médecin ayant renseigné le certificat médical et faire procéder à des examens complémentaires. / Le médecin de l'office, s'il décide, pour l'établissement du rapport médical, de solliciter un complément d'information auprès du médecin qui a renseigné le certificat médical, en informe le demandeur. / Il peut convoquer, le cas échéant, le demandeur auprès du service médical de la délégation territoriale compétente. (...) ". L'article 6 de cet arrêté dispose que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

7. Il ressort des pièces du dossier que le collège de médecins qui a rendu l'avis du 15 mars 2018 était composé des docteurs Marc Minani, Pierre Bisbal et Charles Candillier. Par ailleurs, selon l'attestation du 28 novembre 2019, établie par le directeur territorial de Montpellier, le rapport médical a été rédigé par le docteur Mettais-Cartier, médecin du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). Dès lors, Mme F... n'est pas fondée à soutenir qu'il n'est pas établi que le médecin auteur du rapport médical n'aurait pas siégé au sein du collège de médecins.

8. Si Mme F... soutient que l'avis du 15 mars 2018 du collège des médecins de l'OFII est incomplet dès lors que les précisions relatives aux investigations complémentaires menées au cours de l'instruction par les services de l'OFII, qualifiées " d'éléments de procédure" par les dispositions précitées de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016, ne sont pas renseignées sur ce document, cet avis mentionne toutefois qu'une convocation pour examen et qu'une demande de justification de l'identité de la requérante ont été réalisées. Ce moyen doit, dès lors, être écarté.

9. Il ressort des pièces du dossier que, dans son avis du 15 mars 2018, le collège de médecins de l'OFII a indiqué que si l'état de santé de Mme F... nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner pour l'intéressée des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Compte tenu de ce motif, le collège n'avait pas à se prononcer sur la possibilité pour cette dernière de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Il n'était pas davantage tenu de mentionner la durée prévisible des soins, précision qui ne s'impose que dans le cas où l'étranger doit demeurer en France pour y recevoir les soins appropriés. Par suite, ce moyen doit être écarté.

10. L'avis du 15 mars 2018 comporte l'ensemble des mentions prévues par le modèle figurant à l'annexe C de l'arrêté du 27 décembre 2016. Il est dès lors suffisamment motivé. Par ailleurs, le préfet de l'Hérault n'était pas tenu de produire le rapport mentionné à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

11. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

12. Il ressort des pièces du dossier que Mme F... souffre de dyspnées, provoquées par une pathologie inflammatoire sous-glottique sténosante pour laquelle elle a suivi une corticothérapie et subi plusieurs interventions pour des dilatations trachéales et d'une néphropathie protéinurique, comportant un risque d'insuffisance rénale évolutif. Elle présente également un état anxio-dépressif ainsi que de l'hypertension artérielle. Pour prendre l'arrêté contesté, le préfet de l'Hérault s'est fondé sur l'avis du 15 mars 2018 du collège des médecins de l'OFII qui a estimé que l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'au vu des éléments du dossier, son état de santé peut lui permettre de voyager sans risque vers le pays d'origine. Les certificats médicaux produits par Mme F..., dont ceux établis les 29 novembre 2016, 26 septembre 2017 et 8 octobre 2018 par son médecin traitant, qui se bornent à mentionner sans plus de précision et de justification que le défaut de prise en charge pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'intéressée ne peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié au Maroc, ne sont pas de nature à remettre valablement en cause l'avis du 15 mars 2018 du collège des médecins de l'OFII. La requérante ne peut utilement se prévaloir d'un ancien avis favorable du médecin de l'Agence régionale de santé qui a estimé, en 2014, que son état de santé nécessitait des soins dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni d'un examen d'IRM médical réalisé postérieurement à l'arrêté contesté qui conclut à une nouvelle pathologie de leucopathie. Dans ces conditions, Mme F... n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté en litige méconnaîtrait les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et serait entaché d'une erreur de fait.

13. Il ressort des pièces du dossier que par un jugement n° 1703886 du 5 décembre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 11 mai 2017 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté la demande de délivrance d'un titre de séjour de l'intéressée, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Conformément au dispositif de ce jugement qui n'impliquait pas nécessairement que soit délivré à la requérante le titre de séjour sollicité, le préfet a réexaminé sa situation en saisissant à nouveau le collège de médecins de l'OFII. La circonstance que, par ce jugement, le tribunal ait estimé que l'arrêté critiqué était entaché d'une erreur d'appréciation ne faisait pas obstacle à ce que le préfet de l'Hérault, qui devait se prononcer en fonction des éléments de fait dont il avait connaissance à la date de sa décision, considère que Mme F... ne remplissait pas les conditions posées par les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Hérault aurait méconnu l'autorité de la chose jugée qui s'attache à ce jugement du 5 décembre 2017 doit être écarté.

14. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". L'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; ".

15. Il ressort des pièces du dossier que Mme F... est entrée en France le 31 juillet 2010 et a bénéficié d'une autorisation provisoire de séjour en qualité d'étranger malade du 25 juin au 18 septembre 2012. Toutefois, elle est célibataire et sans charge de famille. Les circonstances qu'elle vive chez sa soeur et son beau-frère, bénéficiaires d'un titre de résident et dont les filles sont de nationalité française, qu'elle suive des cours de français et qu'elle participe à diverses activités par le biais de plusieurs associations ne sont pas, à elles seules, de nature à établir l'illégalité du refus de son admission au séjour alors qu'elle ne démontre pas être privée d'attaches personnelles et familiales dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 50 ans, alors même que ses parents y seraient décédés. Dans ces conditions, l'arrêté en litige n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Dès lors, le moyen tiré de ce que cet arrêté aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. Pour les mêmes motifs, cet arrêté n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

16. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. / Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application du présent article ".

17. Au regard de la situation personnelle et familiale de Mme F... telle qu'exposée au point 16 ci-dessus, c'est sans méconnaître les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet de l'Hérault a pu prendre l'arrêté en litige.

18. Le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L. 511-4-10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 12.

19. Il résulte de tout ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 26 mars 2018.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

20. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme F... n'implique aucune mesure d'exécution. Il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte de Mme F....

Sur les frais liés au litige :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative seules applicables au cas de l'espèce, Mme F... n'ayant pas été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle, font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, tout ou partie de la somme que l'intéressée demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme F... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... F... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 13 mars 2020, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- Mme E..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 mars 2020.

2

N° 19MA01776

nl


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA01776
Date de la décision : 27/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Jacqueline MARCHESSAUX
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-03-27;19ma01776 ?
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