La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/03/2020 | FRANCE | N°17MA04026

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 09 mars 2020, 17MA04026


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Association de Préservation de l'Environnement de Grisgione (APEG) a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune de San Martino di Lota a rejeté sa demande tendant à ce qu'il fasse usage de ses pouvoirs de police afin de faire procéder au rétablissement de la circulation sur le chemin de la Grandinaja et de lui enjoindre de faire procéder au retrait du portail situé sur ce chemin.

Par un jugement n° 1600749 du 28 juillet 2017, l

e tribunal administratif de Bastia a annulé ce refus implicite et a enjoint au...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Association de Préservation de l'Environnement de Grisgione (APEG) a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune de San Martino di Lota a rejeté sa demande tendant à ce qu'il fasse usage de ses pouvoirs de police afin de faire procéder au rétablissement de la circulation sur le chemin de la Grandinaja et de lui enjoindre de faire procéder au retrait du portail situé sur ce chemin.

Par un jugement n° 1600749 du 28 juillet 2017, le tribunal administratif de Bastia a annulé ce refus implicite et a enjoint au maire de prendre toutes mesures afin de faire cesser la présence de ce portail dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 26 septembre 2017, la commune de San Martino di Lota, représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 28 juillet 2017 ;

2°) de rejeter la demande présentée par l'APEG devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de l'APEG la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son maire n'ayant pas été saisi d'une demande tendant à la mise en oeuvre de ses pouvoirs de police, il n'a pu opposer aucun refus ;

- la demande de première instance était donc irrecevable par application de l'article R. 421-1 du code de justice administrative ;

- les conclusions à fin d'injonction présentées en première instance à titre principal étaient également irrecevables ;

- elle n'a aucune obligation d'entretien du chemin en cause qui appartient à son domaine privé ;

- l'obligation de conservation de ce chemin a disparu dès lors que ce dernier fait l'objet d'une procédure de désaffectation et que l'absence d'entretien et les modifications substantielles apportées à la configuration de son emprise par l'urbanisation du site et l'aménagement de la voirie publique le rendent dépourvu d'intérêt pour le public ;

- cette partie du chemin est désaffectée de fait ;

- la continuité de cette portion du chemin n'existe plus depuis longtemps.

Par un mémoire en défense enregistré le 31 octobre 2019, l'Association de Préservation de l'Environnement de Grisgione (APEG), représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête, demande à la cour d'enjoindre au maire de prendre toutes mesures de nature à assurer le rétablissement du chemin dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et demande de mettre à la charge de la commune de San Martino di Lota la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il n'est pas justifié de ce que le conseil municipal a autorisé le maire à le représenter dans la présente instance ;

- elle a bien saisi le maire d'une demande préalable, de sorte qu'un refus implicite est né ;

- la désaffectation du chemin résulte d'une situation illégale, le public étant empêché de circuler en raison des divers obstacles entravant la circulation piétonne.

Un mémoire, présenté pour la commune le 10 février 2020, a été enregistré postérieurement à la clôture de l'instruction intervenue le 22 janvier 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant l'APEG.

Une note en délibéré, présentée pour l'APEG, a été enregistrée le 17 février 2020.

1. L'association de préservation de l'environnement de Grisgione (APEG) a demandé au maire de San Martino di Lota de faire usage de ses pouvoirs de police et de procéder au rétablissement de la circulation sur le chemin de la Grandinaja. La commune de San Martino di Lota relève appel du jugement du 28 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Bastia a annulé le refus implicite du maire de faire usage de ses pouvoirs et lui a enjoint de prendre toutes mesures afin de faire procéder à l'enlèvement d'un portail entravant la circulation sur ce chemin dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif, il ressort des termes de la lettre du 7 avril 2015 et de celle du 26 mai 2015 adressées par l'APEG au maire de la commune de San Martino di Lota que cette dernière lui a demandé d'intervenir afin de remédier à la fermeture par un portail cadenassé du chemin de la Grandinaja et a ainsi entendu, implicitement mais nécessairement, lui demander de faire usage de ses pouvoirs de police pour rétablir la circulation sur ce chemin. Cette demande a fait naître, en l'absence de réponse expresse du maire, une décision implicite de refus susceptible de recours contentieux. Par suite, la demande de l'APEG devant le tribunal administratif n'était pas irrecevable, tout comme ses conclusions à fin d'injonction qui n'étaient pas présentées à titre principal.

Sur le bienfondé du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article L. 161-1 du code rural : " Les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie du domaine privé de la commune ". Selon l'article L. 161-2 du même code : " L'affectation à l'usage du public est présumée, notamment par l'utilisation du chemin rural comme voie de passage ou par des actes réitérés de surveillance ou de voirie de l'autorité municipale ". L'article L. 161-5 dispose : " L'autorité municipale est chargée de la police et de la conservation des chemins ruraux ". Enfin, selon l'article D. 161-11 du même code : " Lorsqu'un obstacle s'oppose à la circulation sur un chemin rural, le maire y remédie d'urgence. Les mesures provisoires de conservation du chemin exigées par les circonstances sont prises, sur simple sommation administrative, aux frais et risques de l'auteur de l'infraction et sans préjudice des poursuites qui peuvent être exercées contre lui ".

4. Il ressort des pièces du dossier que le chemin de la Grandinaja appartient à la commune de San Martino di Lota et n'a pas été classé dans la catégorie des voies communales. Il est constitué, dans sa partie basse, d'un chemin carrossable permettant notamment l'accès aux propriétés riveraines et dans sa partie haute, d'un chemin qui n'est plus accessible en raison de la présence d'un portail cadenassé posé par un riverain. Le chemin rural, y compris dans sa portion en litige, est présumé être affecté à l'usage du public. La commune de San Martino di Lota n'apporte aucun élément de nature à renverser cette présomption, en se bornant à faire valoir sans l'établir que le chemin est désaffecté depuis de nombreuses années alors que l'APEG produit des attestations selon lesquelles le chemin était utilisé avant d'être obstrué par ce portail. La circonstance que le chemin débouche soit sur le mur de soutènement de la route départementale de la Poraja, soit sur des remblais ou des talus abrupts, n'est en outre pas de nature, ainsi que l'a jugé également à bon droit le tribunal administratif, à lui faire perdre sa qualité de chemin affecté à l'usage du public. Il convient d'ajouter quel les procédures d'enquête publique menées en juin 2016 et novembre 2017 sur le projet de désaffectation et de cession de ce tronçon, revendiquées par la commune, sont postérieures à la décision attaquée.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par l'APEG, que la commune de San Martino di Lota n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a annulé le refus implicite du maire de faire usage de ses pouvoirs de police et a enjoint à ce dernier de prendre toutes mesures afin de faire procéder à l'enlèvement du portail entravant la circulation sur le chemin de la Grandinaja.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par l'APEG :

6. Il résulte de l'instruction, notamment des suites données par la présidente de la cour à la demande d'exécution du jugement du tribunal administratif de Bastia du 28 juillet 2017 contesté dans la présente instance, que le portail litigieux a été enlevé. Il n'y a ainsi pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par l'APEG par la voie de l'appel incident.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'APEG, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse une somme à la commune de San Martino di Lota, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune une somme de 1 500 euros à verser à l'APEG au même titre.

D É C I D E :

Article 1er : La requête présentée par la commune de San Martino di Lota est rejetée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu à statuer sur les conclusions à fin d'injonction et à fin d'astreinte présentées par l'APEG par la voie de l'appel incident.

Article 3 : La commune de San Martino di Lota versera une somme de 1 500 euros à l'APEG en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'Association de Préservation de l'Environnement de Grisgione, à la commune de San Martino di Lota et à M. B... D....

Délibéré après l'audience du 17 février 2020, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président-assesseur,

- Mme E..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 9 mars 2020.

2

N° 17MA04026


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17MA04026
Date de la décision : 09/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-02-02-04 Collectivités territoriales. Commune. Biens de la commune. Chemins ruraux.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Karine DURAN-GOTTSCHALK
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : CABINET MUSCATELLI

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-03-09;17ma04026 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award