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14/01/2020 | FRANCE | N°18MA03016

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre, 14 janvier 2020, 18MA03016


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 3 mars 2016 du ministre de l'intérieur en tant qu'il ne prend en compte, au titre de l'avantage spécifique d'ancienneté, que sa période d'affectation à la circonscription urbaine de police de Marseille depuis le 1er février 2010, ainsi que la décision implicite de rejet opposée à son recours gracieux.

Par une ordonnance n° 1605512 du 27 avril 2018, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Ma

rseille a prononcé un non-lieu sur les conclusions en annulation et en injonction d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 3 mars 2016 du ministre de l'intérieur en tant qu'il ne prend en compte, au titre de l'avantage spécifique d'ancienneté, que sa période d'affectation à la circonscription urbaine de police de Marseille depuis le 1er février 2010, ainsi que la décision implicite de rejet opposée à son recours gracieux.

Par une ordonnance n° 1605512 du 27 avril 2018, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a prononcé un non-lieu sur les conclusions en annulation et en injonction de la requête de M. D... et a rejeté le surplus de ses conclusions.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 27 juin 2018, et un mémoire présenté le

26 février 2019, M. D..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 27 avril 2018 ;

2°) d'ordonner au ministre de l'intérieur de reconstituer sa carrière en lui accordant l'avantage spécifique d'ancienneté de juin 1999 à mai 2006 et du 1er février 2010 au

22 avril 2017 ;

3°) d'ordonner au ministre de l'intérieur de lui verser les arriérés de traitement résultant de la régularisation de sa carrière sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) d'ordonner au ministre de l'intérieur de lui notifier l'arrêté annoncé par l'avis du 30 juin 2016 du médiateur interne de la police nationale s'agissant de la reconstitution de ses droits à l'avantage spécifique d'ancienneté ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'ordonnance attaquée est irrégulière pour avoir statué sur son cas en l'absence de la notification de l'arrêté ministériel du 23 juin 2016 annoncé dans l'avis du 30 juin 2016 du médiateur interne de la police nationale, qui annule à la fois l'arrêté du 3 mars 2016 et le rejet implicite du 25 avril 2016, et qui lui attribue l'avantage spécifique d'ancienneté au titre des périodes de juin 1999 à avril 2003 (CSP de Marseille) et de février 2010 à décembre 2015 (CSP de Marseille) et d'avril 2003 à mai 2006 (CSP d'Aix-en-Provence) ;

- la prescription quadriennale n'est pas opposable à sa demande puisque le fait générateur de sa créance a commencé à courir à compter du jour où sa situation administrative a été identifiée, soit au 3 mars 2016 ; en outre, il fait valoir qu'il était dans l'ignorance légitime de l'existence de sa créance relative à l'avantage spécifique d'ancienneté puisque la liste des quartiers urbains où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles a évolué, notamment sous l'effet de deux décisions du conseil d'Etat du

16 mars 2011, n° 327 428 et du 26 mars 2014, n° 359 366, ce qui a donné lieu à l'établissement d'une nouvelle liste publiée au bulletin officiel du ministère de l'intérieur du 15 avril 2016 ;

- il est fondé à demander l'attribution de l'avantage spécifique d'ancienneté sur les périodes sollicitées et le paiement de l'arriéré de traitement en découlant.

Par ordonnance du 28 janvier 2019, la clôture d'instruction a été fixée au

11 février 2019 à 12h00.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 février 2019, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Une ordonnance du 13 février 2019 a rouvert l'instruction de l'affaire, et une ordonnance du 13 février 2019 a clos l'instruction de l'affaire au 28 février 2019 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 91-715 du 26 juillet 1991 ;

- le décret n° 95-313 du 21 mars 1995 ;

- l'arrêté du 17 janvier 2001 fixant la liste des secteurs prévue au 1° de l'article 1er du décret du 21 mars 1995 ;

- l'arrêté du 3 décembre 2015 fixant la liste des secteurs prévue au 1° de l'article 1er du décret du 21 mars 1995 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

- et les observations de M. D....

Une note en délibéré présentée par Me B..., pour M. D..., a été enregistrée le 20 décembre 2019.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., fonctionnaire de police, qui a fait valoir le 22 avril 2017 ses droits à la retraite en qualité de capitaine, affecté dans les circonscriptions de sécurité publique (CSP) de Pertuis, du 1er janvier 1995 au 31 mai 1999 et du 11 mai 2006 au 31 janvier 2010, de Marseille, du 1er juin 1999 au 1er avril 2003, d'Aix-en-Provence, du 2 avril 2003 au

10 mai 2006, puis à nouveau de Marseille à compter du 1er février 2010, a, par une réclamation du 2 mai 2012, demandé à sa hiérarchie le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté (ASA) prévu par l'article 11 de la loi du 26 juillet 1991, au titre de ces affectations. Par un arrêté du 3 mars 2016, le ministre de l'intérieur lui a attribué l'avantage d'ancienneté spécifique uniquement au titre de son affectation à la CSP de Marseille du

1er février 2010 au 16 décembre 2015. M. D... a alors demandé le 25 avril 2016 au ministre de l'intérieur de lui accorder l'ASA pour la période du 1er janvier 1995 jusqu'au

31 janvier 2010, et il a saisi, le 27 avril 2016, le médiateur interne de la police nationale de cette demande. Faute de réponse du ministre, M. D... a saisi le tribunal administratif de Marseille en vue de l'annulation de l'arrêté du 3 mars 2016 du ministre de l'intérieur en tant qu'il ne lui accorde l'ASA qu'à compter du 1er février 2010 ainsi que de la décision née du silence opposé à son recours gracieux, et à fin d'enjoindre à l'administration de lui verser l'ASA et de procéder à la reconstitution de sa carrière dans un délai de deux mois suivant la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard. En cours d'instance, le premier juge était informé, par un avis du 30 juin 2016 rendu par le médiateur interne de la police nationale, que, par un arrêté du 23 juin 2016, le ministre de l'intérieur avait accordé l'ASA à M. D... pour la période du 1er juin 1999 jusqu'au 1er avril 2003 au titre de son affectation au sein de la CSP de Marseille, puis du 2 avril 2003 au 10 mai 2006 au titre de son affectation au sein de la CSP d'Aix-en-Provence et du 1er février 2010 au

16 décembre 2015 au titre de son affectation à la CSP de Marseille. Par une ordonnance du

27 avril 2018, dont M. D... relève appel, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a considéré qu'il ressortait des termes du courrier du 30 juin 2016 du médiateur interne de la police nationale que l'intéressé s'était vu attribuer l'ASA pour les périodes de juin 1999 à avril 2003 (CSP de Marseille) et de février 2010 à décembre 2015 (CSP de Marseille) et d'avril 2003 à mai 2006 (CSP d'Aix-en-Provence). Par suite, estimant que l'objet de la requête avait disparu, le premier juge a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions d'annulation et d'injonction de la requête de M. D..., et il a rejeté le surplus des conclusions portant sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur l'ordonnance attaquée :

2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) 3° Constater qu'il n'y a pas lieu à statuer sur une requête (...) ".

3. Un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte administratif n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif. Si, avant que le juge n'ait statué, l'acte attaqué est rapporté par l'autorité compétente et si le retrait ainsi opéré acquiert un caractère définitif faute d'être critiqué dans le délai du recours contentieux, il emporte alors disparition rétroactive de l'ordonnancement juridique de l'acte contesté, ce qui conduit à ce qu'il n'y ait lieu pour le juge de la légalité de statuer sur le mérite du pourvoi dont il était saisi. Il en va ainsi, quand bien même l'acte rapporté aurait reçu exécution. Dans le cas où l'administration se borne à procéder à l'abrogation de l'acte attaqué, cette circonstance prive d'objet le recours formé à son encontre, à la double condition que cet acte n'ait reçu aucune exécution pendant la période où il était en vigueur et que la décision procédant à son abrogation soit devenue définitive.

4. Le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a considéré que la demande d'annulation formée par M. D... contre l'arrêté du 3 mars 2016 du ministre de l'intérieur en tant qu'il ne lui accorde l'ASA qu'à compter du 1er février 2010 ainsi que la décision née du silence sur son recours gracieux était devenue sans objet, au motif que cette autorité, par un arrêté du 23 juin 2016 intervenu postérieurement à la saisine de la juridiction, avait accordé l'ASA à M. D... pour la période du 1er juin 1999 jusqu'au

1er avril 2003 au titre de son affectation au sein de la CSP de Marseille, puis du 2 avril 2003 au 10 mai 2006 au titre de son affectation au sein de la CSP d'Aix-en-Provence et du

1er février 2010 au 16 décembre 2015 au titre de son affectation à la CSP de Marseille. Il ressort toutefois des pièces du dossier, qu'à la date de l'ordonnance attaquée, cet arrêté du 23 juin 2016 n'avait pas été notifié à M. D... et n'avait donc pas acquis un caractère définitif alors par ailleurs que l'intéressé conteste avoir perçu les sommes en cause.

5. M. D... est, dès lors, fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a, par application du 3° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, considéré qu'il n'y avait pas lieu à statuer sur les conclusions de sa demande aux fins d'annulation et d'injonction. Il suit de là que cette ordonnance doit être annulée.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

6. Il ressort des pièces du dossier que M. D... a reçu communication comme pièce jointe au mémoire en réplique de l'administration enregistré le 12 février 2019 dans la présente instance, l'arrêté du 23 juin 2016 lequel comportait les voies et délais de recours. Il ne l'a pas contesté. Par voie de conséquence, devant la présente Cour, ledit arrêté ayant acquis un caractère définitif, la requête d'appel de M. D... est devenue sans objet, ainsi que le litige avec le ministre de l'intérieur. Par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur ses conclusions en annulation.

Sur les conclusions tendant à la communication de l'arrêté ministériel du

23 juin 2016 :

7. Comme déjà dit au point 6 du présent arrêt, M. D... a reçu communication de l'arrêté précité comme pièce jointe au mémoire en réplique de l'administration dans la présente instance. Par suite, les conclusions susvisées étant en tout état de cause, ainsi devenues sans objet, il n'y a plus lieu d'y statuer.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. M. D... demande au juge administratif d'enjoindre au ministre de l'intérieur de prendre en compte l'avantage spécifique d'ancienneté et de procéder à la reconstitution de sa carrière dans le délai de deux mois suivant la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, en conséquence de l'annulation des décisions ayant implicitement rejeté sa demande du 25 avril 2016. Mais, le présent arrêt n'impliquant nécessairement l'adoption d'aucune mesure sur le fondement des articles L. 911-1 ou L. 911-2 du code de justice administrative, ces conclusions à fins d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à M. D... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1605512 du 27 avril 2018 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille est annulée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions en annulation de la requête de M. D... ainsi que sur celles tendant à la communication de l'arrêté ministériel du

23 juin 2016.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à M. D... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la zone de défense et de sécurité Sud.

Délibéré après l'audience du 17 décembre 2019, où siégeaient :

- M. Badie, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 janvier 2020.

N° 18MA03016 2

kp


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA03016
Date de la décision : 14/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération. Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Didier URY
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : GERNEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-01-14;18ma03016 ?
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