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12/12/2019 | FRANCE | N°18MA02729

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 12 décembre 2019, 18MA02729


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... et la SCI C... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération en date du 28 avril 2015 par laquelle le conseil municipal de Montfuron a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune.

Par un jugement n° 1504913 du 2 mars 2017, le tribunal, après avoir constaté l'irrégularité de l'enquête publique et écarté tous les autres moyens de la demande de première instance, a, en application de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme, imparti à la commune un

délai de neuf mois à compter de la notification du jugement aux fins d'obtenir la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... et la SCI C... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération en date du 28 avril 2015 par laquelle le conseil municipal de Montfuron a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune.

Par un jugement n° 1504913 du 2 mars 2017, le tribunal, après avoir constaté l'irrégularité de l'enquête publique et écarté tous les autres moyens de la demande de première instance, a, en application de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme, imparti à la commune un délai de neuf mois à compter de la notification du jugement aux fins d'obtenir la régularisation de la délibération du 28 avril 2015 par laquelle le conseil municipal de Montfuron a approuvé son plan local d'urbanisme et, en attendant, a sursis à statuer sur les conclusions des parties.

Par un jugement n° 1504913 du 12 avril 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour:

Par une requête, enregistrée le 11 juin 2018, M. C... et la SCI C..., représentés par Me A..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 avril 2018 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler la délibération en date du 28 avril 2015 par laquelle le conseil municipal de Montfuron a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune, ou à tout le moins ses dispositions relatives aux zones Aa ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Montfuron une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le conseil municipal n'a pas été convoqué dans le délai prescrit par l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales ;

- les conseillers municipaux n'ont pas bénéficié d'une information suffisante en méconnaissance des dispositions de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales ;

- dans le cadre de la seconde enquête publique consécutive au jugement avant dire droit du 2 mars 2017, une nouvelle enquête publique a été organisée. Mais l'étude relative à la dérogation à la règle de l'urbanisation en continuité n'a pas été jointe au dossier d'enquête publique, alors que la commune de Montfuron est située en zone de montagne ;

- la création de trois secteurs situés en zone agricole où seront autorisées de nouvelles constructions méconnaît les objectifs du SCOT de préservation de l'activité agricole ;

- les STECAL créés en zone agricole méconnaissent les dispositions de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme. Ils sont aussi entachés d'erreur manifeste d'appréciation car ils ouvrent des possibilités de construire en zone agricole sans liens avec l'activité agricole ;

- le changement de destination du bâtiment n° 3 méconnaît l'article L. 123-5-1 du code de l'urbanisme car il autorise une construction en zone agricole, et il méconnaît aussi l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire enregistré le 13 décembre 2018, la commune de Montfuron, représentée par la SCP d'avocats Lesage, B..., Gouard-Robert, demande à la Cour de rejeter la requête et de mettre à charge des requérants la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Un mémoire a été enregistré le 1er février 2019, enregistré pour les requérants, et non communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. F... D... en application de l'article R. 22226 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- les conclusions de Mme Gougot, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant les requérants, et celles de Me B..., représentant la commune de Montfuron.

Considérant ce qui suit :

1. Le conseil municipal de Montfuron a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune par une délibération du 28 avril 2015. M. C... et la SCI C... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler cette délibération. Par un jugement n° 1504913 du 2 mars 2017, le tribunal, après avoir constaté l'irrégularité de l'enquête publique, en raison de l'absence au dossier des avis des personnes publiques associées, et écarté tous les autres moyens de la requête, a, en application de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme, imparti à la commune un délai de neuf mois à compter de la notification du jugement aux fins d'obtenir la régularisation. Une nouvelle enquête publique a été organisée par la commune du 8 septembre au 9 octobre 2017. Par une délibération du 21 décembre 2017, le conseil municipal de Montfuron a approuvé cette régularisation. Par un jugement du 12 avril 2018, dont les requérants relèvent appel, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Sur la recevabilité des moyens de la requête d'appel :

2. En application de l'article R. 811-6 du code de justice administrative, le requérant qui n'a pas fait appel du jugement avant dire droit rendu en application de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme, mais a relevé appel du seul jugement qui a pris acte de la régularisation et rejeté sa demande, peut reprendre dans la requête d'appel des moyens écartés par le jugement avant dire droit.

Sur la légalité de la délibération du 28 avril 2015 :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 212113 du code général des collectivités territoriales : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération. ". Il ne ressort pas des pièces du dossier que le plan local d'urbanisme n'aurait pas été mis à disposition des conseillers municipaux ou qu'ils auraient été empêchés de le consulter au cours de la séance du 21 décembre 2017. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.

4. En deuxième lieu, si les requérants soutiennent que l'étude relative à la dérogation à la règle de l'urbanisation en continuité n'a pas été jointe au dossier de l'enquête publique qui s'est déroulée du 8 septembre au 9 octobre 2017, suite au jugement avant dire droit du 2 mars 2017, alors que la commune de Montfuron est située en zone de montagne, il ne résulte pas des pièces du dossier qu'une telle étude aurait été réalisée.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée. Elle est adressée par écrit, au domicile des conseillers municipaux ou, s'ils en font la demande, envoyée à une autre adresse ou transmise de manière dématérialisée. ". Aux termes de l'article L. 2121-11 du même code : " Dans les communes de moins de 3 500 habitants, la convocation est adressée trois jours francs au moins avant celui de la réunion (...) ".

6. Un requérant qui soutient que les délais légaux d'envoi des convocations à un conseil municipal n'ont pas été respectés alors que, selon les mentions du registre des délibérations du conseil municipal, ces délais auraient été respectés doit apporter des éléments circonstanciés au soutien de son moyen. En l'absence de tels éléments, ses allégations ne sauraient conduire à remettre en cause les mentions factuelles précises du registre des délibérations qui, au demeurant, font foi jusqu'à preuve du contraire. Le registre des délibérations de la commune de Montfuron mentionne que les convocations à la séance du conseil municipal du 28 avril 2015 ont été faites le 23 avril 2015. Les requérants n'apportent aucun élément circonstancié à l'appui du moyen tiré de ce que les conseillers municipaux n'ont pas été convoqués dans le délai prescrit par le code général des collectivités territoriales. Ce moyen ne peut dès lors qu'être écarté.

7. En quatrième lieu, l'article L. 12315 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur à la date de la délibération attaquée, dispose : " II. Le règlement peut fixer les règles suivantes relatives à l'usage des sols et la destination des constructions : 6° A titre exceptionnel, délimiter dans les zones naturelles, agricoles ou forestières des secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées dans lesquels peuvent être autorisés : a) Des constructions... Le règlement précise les conditions de hauteur, d'implantation et de densité des constructions, permettant d'assurer leur insertion dans l'environnement et leur compatibilité avec le maintien du caractère naturel, agricole ou forestier de la zone. Il fixe les conditions relatives aux raccordements aux réseaux publics, ainsi que les conditions relatives à l'hygiène et à la sécurité auxquelles les constructions, les résidences démontables ou les résidences mobiles doivent satisfaire. ".

8. Le règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Montfuron dispose : " Outre les constructions autorisées dans la zone A, sont également autorisées dans les zones les zones Aa - ...les constructions à usage d'habitation, d'hébergement hôtelier, de bureau, de commerce, d'artisanat et d'entrepôt. En aucun cas la surface de plancher totale créée à partir de la date d'approbation du plan local d'urbanisme dans chaque secteur Aa ne pourra dépasser 280 m2. De plus, ces constructions doivent être situées à proximité immédiate des bâtiments existants à la date d'approbation du plan local d'urbanisme et former un ensemble bâti cohérent. - L'extension limitée à 30 % de la superficie initiale de chaque construction à usage d'habitation existante à la date d'approbation du plan local d'urbanisme, à condition que la surface de plancher créée ne dépasse pas la surface de plancher existante et qu'après agrandissement, la surface de plancher totale de chaque construction ne dépasse pas 250 m2- L'extension limitée à 30 % de la superficie initiale de chaque construction et installation liée aux activités existante à la date d'approbation du plan local d'urbanisme, dans la mesure où les nouvelles conditions d'exploitation n'aggravent pas les nuisances pré existantes et à condition que la surface de plancher créée ne dépasse pas la surface de plancher existante et qu'après agrandissement, la surface de plancher totale de chaque construction ne dépasse pas 250 m2. ".

9. Il ressort des pièces du dossier que trois secteurs organisés autour de l'activité agricole et de l'agritourisme ont été classés dans des secteurs Aa pour une superficie totale d'environ 4,2 hectares. Nonobstant l'étendue de ces trois secteurs, les constructions nouvelles sont limitées dans chaque secteur Aa à un total de 280 m2 pour la totalité du secteur. Elles doivent être réalisées à proximité immédiate des bâtiments existant à la date d'approbation du plan local d'urbanisme. L'agrandissement des constructions existantes est également très encadré, puis qu'après agrandissement, la surface de plancher totale de chaque construction ne peut pas dépasser 250 m2. Ces secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées, STECAL, présentent ainsi un caractère exceptionnel, et les auteurs du plan local d'urbanisme n'ont pas commis d'erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 12315. Ils n'ont pas non plus commis d'erreur manifeste d'appréciation en délimitant ces secteurs.

10. En cinquième lieu, L. 123-5-1 du code de l'urbanisme dispose : " Dans les zones agricoles ou naturelles et en dehors des secteurs mentionnés au présent 6°, le règlement peut désigner les bâtiments qui peuvent faire l'objet d'un changement de destination, dès lors que ce changement de destination ne compromet pas l'activité agricole ou la qualité paysagère du site. ".

11. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le changement de destination du bâtiment agricole n° 3 au lieudit Mataroune compromettrait l'activité agricole ou la qualité paysagère du site. Et il n'est pas incompatible avec le principe d'équilibre résultant des dispositions de l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme applicable à la date de la délibération attaquée.

12. En sixième lieu, le rapport de présentation du schéma de cohérence territoriale, (SCOT), de la région de Manosque souligne certes l'importance de la préservation des terres agricoles, mais également du développement de l'offre d'hébergement touristique. La délimitation des STECAL sur une superficie qui représente 1% de la totalité des zones agricoles de la commune de Montfuron n'apparaît pas dès lors incompatible avec le SCOT de la région de Manosque.

13. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Montfuron, qui n'est partie perdante au litige, la somme que demandent les requérants sur le fondement des dispositions de cet article. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge des requérants une somme au titre des frais exposés par la commune de Montfuron et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... et de la SCI C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Montfuron fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C..., à la SCI C... et à la commune de Montfuron.

2

N° 18MA02729

hw


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18MA02729
Date de la décision : 12/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-06-01 URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE. RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES. INTRODUCTION DE L'INSTANCE. - RÉGULARISATION EN PREMIÈRE INSTANCE SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE L. 600-9 DU CODE DE L'URBANISME. MOYENS ÉCARTÉS EN PREMIÈRE INSTANCE PAR UN JUGEMENT AVANT DIRE DROIT.

68-06-01 Il résulte de l'arrêt du Conseil d'Etat Commune de Sempy, 395963, du 29 juin 2018, que les moyens écartés par une décision avant dire droit ne peuvent être repris pour contester l'acte de régularisation. Le requérant ne peut non plus soulever des moyens nouveaux, à l'exception de ceux qui seraient fondés sur des éléments révélés par la procédure de régularisation.,,,La Cour juge que dans le silence du code de l'urbanisme sur ce point, cette règle ne vaut pas entre la première instance et l'appel. Elle applique l'article R. 811-6 du code de justice administrative en jugeant que le requérant qui n'a pas fait appel du jugement avant dire droit rendu en application de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme mais a relevé appel du seul jugement qui a pris acte de la régularisation et rejeté la demande peut reprendre dans la requête d'appel des moyens écartés par le jugement avant dire droit.... ,[RJ1].


Références :

[RJ1]

Cf. CE 8 / 7 SSR 9 décembre 1991 B Buchalet n° 69544 solution implicite,,,Comp CE, Section, 29 juin 2018, Commune de Sempy, n° 395963.


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: M. Philippe PORTAIL
Rapporteur public ?: Mme GOUGOT
Avocat(s) : SCP LESAGE - BERGUET - GOUARD-ROBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-12-12;18ma02729 ?
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