La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/11/2019 | FRANCE | N°17MA03710

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 04 novembre 2019, 17MA03710


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La métropole Aix-Marseille-Provence a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat à lui verser la somme de 22 510 863 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 5 octobre 2015, capitalisés pour chaque année, en réparation du préjudice lié à la déduction, de la dotation de compensation versée, d'un montant égal au produit de la taxe sur les surfaces commerciales, pour 2012, 2013 et 2014 et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros en application de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1606...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La métropole Aix-Marseille-Provence a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat à lui verser la somme de 22 510 863 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 5 octobre 2015, capitalisés pour chaque année, en réparation du préjudice lié à la déduction, de la dotation de compensation versée, d'un montant égal au produit de la taxe sur les surfaces commerciales, pour 2012, 2013 et 2014 et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 160645 du 27 juin 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 août 2017, la métropole Aix-Marseille-Provence, représentée par Me A... de la SELARL Parme avocats, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 juin 2017 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler la décision de rejet du 27 novembre 2015 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de faire droit à sa demande tendant à l'indemnisation du préjudice subi au titre des années 2012, 2013 et 2014 ;

3°) de condamner l'Etat à l'indemniser de ce préjudice s'élevant à la somme de 22.510.863 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable d'indemnisation du 5 octobre 2015 et de la capitalisation des intérêts ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a commis une erreur de droit et une erreur de fait ;

- l'article 133 de la loi de finances pour 2016 est contraire à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- sa demande est recevable et n'est notamment pas tardive ;

- la jurisprudence Lafon n'est pas applicable ;

- les illégalités commises par l'Etat sont en relation directe et certaine avec ses préjudices.

La requête a été communiquée au ministre de l'intérieur qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n°2014-1654 du 29 décembre 2014 ;

- la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La métropole Aix-Marseille Provence a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat à lui verser la somme de 22 510 863 euros en réparation du préjudice lié à la déduction opérée sur la dotation de compensation versée pour les années 2012, 2013 et 2014 d'un montant équivalent au produit de la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM). Elle relève appel du jugement du 27 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

2. En premier lieu, aux termes du paragraphe 1.2.4.2 de l'article 77 de la loi du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 : " Le montant de la compensation prévue au D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998) ou de la dotation de compensation prévue à l'article L. 5211-28-1 du code général des collectivités territoriales est diminué en 2011 d'un montant égal, pour chaque collectivité territoriale ou établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, au produit de la taxe sur les surfaces commerciales perçu par l'État en 2010 sur le territoire de la collectivité territoriale ou de l'établissement public de coopération intercommunale ". Aux termes du b) du 2° du paragraphe 1.2.4.3 de l'article 77 de la même loi, l'article L. 2334-7 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié : " Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé : "Pour les communes et établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, lorsque le montant de la compensation prévue au D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998) ou de la dotation de compensation prévue à l'article L. 5211-28-1 du présent code est, en 2011, inférieur au montant de la diminution à opérer en application du 1.2.4.2 de l'article 77 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, le solde est prélevé au profit du budget général de l'Etat, prioritairement sur le montant correspondant aux montants antérieurement perçus au titre du 2° bis du II de l'article 1648 B du code général des impôts dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004 et enfin sur le produit de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, de la taxe d'habitation et de la contribution économique territoriale perçu au profit de ces communes et établissements" ". Il résulte de ces dispositions que les mécanismes de diminution et de prélèvement portant sur les dotations et sur les recettes fiscales perçues par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, mis en place pour compenser le transfert du produit de la taxe sur les surfaces commerciales de l'Etat aux communes et à leurs groupements, ne sont applicables qu'au titre de la seule année 2011.

3. Toutefois, aux termes de l'article L. 133 de la loi du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016 : " Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée sont validés les arrêtés préfectoraux pris au titre des exercices 2012, 2013 et 2014 constatant le prélèvement opéré sur le montant de la compensation prévue au D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998) ou de la dotation de compensation prévue à l'article L. 5211-28-1 du code général des collectivités territoriales en tant que leur légalité serait contestée par le moyen tiré de ce qu'il aurait été fait application au-delà de 2011 des dispositions du paragraphe 1.2.4.2 de l'article 77 de la loi n°2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 et de l'article L. 2334-7 du code général des collectivités territoriales, dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 ".

4. Aux termes du premier paragraphe de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) publiquement (...) par un tribunal indépendant et impartial établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ". Il ne résulte pas de l'instruction que la métropole disposait d'une créance suffisamment certaine sur l'Etat, correspondant à la compensation TASCOM pratiquée par celui-ci au titre des années 2012 à 2014, ni d'une espérance légitime d'obtenir le paiement des sommes correspondantes. Au demeurant, l'ingérence résultant de la loi de validation qui l'aurait privée de ce bien n'est pas incompatible avec les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. L'intention du législateur était, en adoptant la loi de finances pour 2010, d'instituer un dispositif de compensation pérenne, comme l'ont relevé les motifs de la décision du Conseil constitutionnel n° 2017-644 QPC. L'objet de l'article 133 de la loi de finances rectificative pour 2016 avait pour seul objet de supprimer un effet d'aubaine, né d'une malfaçon législative, il est donc justifié par un motif impérieux d'intérêt général et n'est pas manifestement disproportionné au regard de l'objectif poursuivi. Ces dispositions sont donc compatibles avec l'article 6, § 1 de la convention.

5. Compte tenu de l'intervention de ces dispositions, les décisions préfectorales prises au titre des années 2012, 2013 et 2014 sont désormais validées en tant qu'elles appliquent les mécanismes de diminution et de prélèvement portant sur les dotations et les recettes fiscales perçues par les communes et établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, mis en place pour compenser le transfert du produit de la TASCOM de l'Etat à ces personnes publiques.

6. Il résulte de ce qui précède que l'Etat n'a commis aucune faute en opérant les prélèvements contestés par la métropole Aix-Marseille-Provence. Cette dernière n'est donc pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur les frais du litige :

7. L'Etat n'ayant pas la qualité de partie perdante au litige, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la métropole Aix-Marseille Provence fondées sur ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la métropole Aix-Marseille-Provence est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la métropole Aix-Marseille-Provence et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 14 octobre 2019, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. B..., président-assesseur,

- Mme Duran-Gottschalk, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 novembre 2019.

2

N° 17MA03710


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17MA03710
Date de la décision : 04/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Collectivités territoriales - Dispositions générales - Dispositions financières - Compensation des transferts de compétences.

Collectivités territoriales - Coopération - Finances des organismes de coopération.

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Responsabilité et illégalité - Absence d'illégalité et de responsabilité.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Laurent MARCOVICI
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : SELARL PARME AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 08/11/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-11-04;17ma03710 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award