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14/10/2019 | FRANCE | N°18MA00363

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 14 octobre 2019, 18MA00363


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier, à titre principal, d'annuler les titres de recettes émis à son encontre le 25 novembre 2015 et le 10 novembre 2016 par le président de l'association syndicale autorisée (ASA) du canal de Gignac en vue d'obtenir le recouvrement des redevances syndicales dues au titre des années 2015 et 2016, ainsi que la décision implicite rejetant sa demande tendant à la réduction de la surface souscrite prise en compte pour le calcul de ces redevances, et,

à titre subsidiaire, d'en réduire le montant et d'enjoindre à l'ASA de l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier, à titre principal, d'annuler les titres de recettes émis à son encontre le 25 novembre 2015 et le 10 novembre 2016 par le président de l'association syndicale autorisée (ASA) du canal de Gignac en vue d'obtenir le recouvrement des redevances syndicales dues au titre des années 2015 et 2016, ainsi que la décision implicite rejetant sa demande tendant à la réduction de la surface souscrite prise en compte pour le calcul de ces redevances, et, à titre subsidiaire, d'en réduire le montant et d'enjoindre à l'ASA de lui restituer les sommes versées.

Par un jugement n° 1601557 du 28 novembre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 janvier 2018 et le 7 juin 2019, M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 novembre 2017 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) à titre principal, d'annuler les titres de recettes du 25 novembre 2015 et du 10 novembre 2016, ainsi que la décision implicite rejetant sa demande tendant à la révision de la base de la redevance ;

3°) à titre subsidiaire, de réduire les montants mis à sa charge et d'enjoindre à l'ASA de lui restituer les sommes versées ;

4°) de mettre à la charge de l'ASA du canal de Gignac la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif a omis de statuer sur le moyen tiré de ce qu'aucune surface n'avait été souscrite pour les parcelles dont il est propriétaire pour la détermination des redevances ;

- il a omis de viser les statuts de l'ASA du canal de Gignac ;

- aucune surface n'a été souscrite pour la parcelle dont il est propriétaire ;

- les surfaces souscrites sont d'une superficie inférieure à celle de cinq hectares retenue pour la détermination du montant des redevances ;

- l'article 41 des statuts de l'ASA prévoit une répartition de la surface souscrite en cas de division foncière ;

- le montant des redevances aurait dû être établi sur la base de la surface cadastrée.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 26 avril et le 15 juillet 2019, l'ASA du canal de Gignac, représentée par la SCP Dillenschneider, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête présentée par M. B... ;

2°) de mettre à sa charge la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 ;

- le décret n° 2006-504 du 3 mai 2006 ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- et les observations de M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... est propriétaire à Gignac d'une parcelle cadastrée section AX n° 98 située dans le périmètre de l'ASA du canal de Gignac. Par un courrier du 18 décembre 2015, il a demandé à l'ASA de réduire à 3,14 hectares la surface souscrite permettant de déterminer le montant des redevances dues au titre de cette parcelle. Une décision implicite de rejet est née du silence conservé par l'ASA sur cette demande. M. B... fait appel du jugement du 28 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et des titres de recettes émis à son encontre le 25 novembre 2015 et le 10 novembre 2016 en vue d'obtenir le recouvrement des redevances dues au titre des années 2015 et 2016.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. L'article 3 de l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires dispose que : " Les droits et obligations qui dérivent de la constitution d'une association syndicale de propriétaires sont attachés aux immeubles compris dans le périmètre de l'association et les suivent, en quelque main qu'ils passent, jusqu'à la dissolution de l'association ou la réduction de son périmètre. " Le II de l'article 31 précise que : " Les redevances syndicales sont établies annuellement et réparties entre les membres en fonction des bases de répartition des dépenses déterminées par le syndicat. Ces bases tiennent compte de l'intérêt de chaque propriété à l'exécution des missions de l'association. "

3. L'article 51 du décret n° 2006-504 du 3 mai 2006 prévoit en outre que : " Lors de sa première réunion et de toute modification ultérieure, le syndicat élabore un projet de bases de répartition des dépenses entre les membres de l'association, accompagné d'un tableau faisant état pour chaque membre de la proportion suivant laquelle il contribue et d'un mémoire explicatif indiquant les éléments de ses calculs et assorti le cas échéant d'un plan de classement des propriétés en fonction de leur intérêt à l'exécution des missions de l'association et d'un tableau faisant connaître la valeur attribuée à chaque classe. / Un exemplaire du projet et de ses annexes et un registre destiné à recevoir les observations des membres de l'association sont déposés pendant quinze jours au siège de l'association. (...) A l'expiration de ce délai, le syndicat examine les observations des membres de l'association. Il arrête ensuite les bases de répartition des dépenses. Cette délibération est notifiée aux membres de l'association par le président. "

4. L'article 41 du règlement pour le service des arrosages et la police du canal de Gignac prévoit qu'une partie des droits et obligations des propriétaires membres de l'ASA est définie en fonction de la surface souscrite, indépendante de la surface cadastrée, qui sert de base tant pour l'établissement du tour d'eau ou pour déterminer le débit disponible au point de livraison que pour le calcul du montant des redevances. L'article 43 ajoute que les actes d'engagement permettant de recueillir l'adhésion des propriétaires intéressés avant l'intégration de leur propriété dans le périmètre syndical mentionnent les parcelles concernées avec leur section et numéro cadastral de l'époque et leur surface souscrite. L'article 44 rappelle enfin que le montant et la répartition des redevances syndicales sont déterminés par le conseil syndical dans les conditions prévues par les textes en vigueur.

5. Pour justifier l'établissement des redevances dues par M. B... sur la base d'une surface souscrite de cinq ares, l'ASA du canal de Gignac se borne à produire des actes d'engagement respectivement datés du 2 mai 1883 et du 6 juillet 1897 pour des parcelles alors référencées A 745, A 744 et E 241, qui correspondraient approximativement à la parcelle ultérieurement cadastrée section AX n° 98. Ces actes d'engagement rappellent les surfaces des parcelles en question, qui s'élèvent respectivement à 38 ares et 20 centiares, 27 ares et 70 centiares, et 1 hectare 86 ares et 10 centiares, soit une surface totale de 2,52 hectares. L'établissement de redevances sur la base d'une surface souscrite de cinq ares depuis 1995 ne justifie pas du bien-fondé de ce paramètre en l'absence d'acte d'engagement d'un propriétaire précédent portant sur une telle surface. Par ailleurs, la délibération du conseil syndical du 28 août 2015 portant modification des bases de répartition des dépenses de l'association syndicale ne comporte pas de tableau en annexe fixant la surface souscrite pour chaque propriétaire.

6. Il suit de là que M. B... est fondé à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle l'ASA du canal de Gignac a refusé de prendre en compte une surface souscrite de 3,14 ares pour déterminer les redevances dues pour la parcelle dont il est propriétaire.

7. L'annulation de cette décision implicite opposée à la demande de M. B... du 18 décembre 2015 implique que les redevances syndicales dues au titre des années 2015 et 2016 soient calculées en fonction d'une surface souscrite s'élevant au plus à 3,14 hectares. L'état de l'instruction ne permet pas d'en déterminer le montant. Il convient en conséquence d'annuler les titres de recettes émis le 25 novembre 2015 et le 10 novembre 2016, et de renvoyer M. B... devant l'ASA du canal de Gignac pour le calcul des redevances syndicales selon les modalités vues ci-dessus.

8. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. B....

Sur l'injonction :

9. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. "

10. Il y a lieu, en application de ces dispositions, d'enjoindre à l'ASA du canal de Gignac de restituer à M. B..., dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, les sommes perçues sur le fondement des titres de recettes émis le 25 novembre 2015 et le 10 novembre 2016, augmentées des intérêts à compter de leur date d'encaissement par le Trésor public, si l'association syndicale n'a pas émis avant l'expiration de ce délai de nouveaux titres établis sur la base d'une surface souscrite s'élevant au plus à 3,14 ares.

Sur les frais liés au litige :

11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ASA du canal de Gignac, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés par M. B.... Les dispositions du même article font en revanche obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par l'ASA du canal de Gignac sur le même fondement.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 28 novembre 2017 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : La décision implicite de refus opposée par l'ASA du canal de Gignac à la demande de M. B... du 18 décembre 2015 et les titres de recettes émis le 25 novembre 2015 et le 10 novembre 2016 sont annulés.

Article 3 : Il est enjoint à l'ASA du canal de Gignac de restituer à M. B..., dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, les sommes perçues sur le fondement des titres de recettes émis le 25 novembre 2015 et le 10 novembre 2016, augmentées des intérêts à compter de leur date d'encaissement par le Trésor public, si l'association syndicale n'a pas émis avant l'expiration de ce délai de nouveaux titres établis sur la base d'une surface souscrite s'élevant au plus à 3,14 ares.

Article 4 : L'ASA du canal de Gignac versera à M. B... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à l'association syndicale autorisée (ASA) du canal de Gignac.

Copie en sera adressée pour information au directeur départemental des finances publiques de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 30 septembre 2019, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- M. C..., premier conseiller.

Lu en audience publique le 14 octobre 2019.

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N° 18MA00363


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA00363
Date de la décision : 14/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

11-01-03 Associations syndicales. Questions communes. Ressources.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Sylvain MERENNE
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : CHAVRIER

Origine de la décision
Date de l'import : 17/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-10-14;18ma00363 ?
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