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26/09/2019 | FRANCE | N°17MA02571

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 26 septembre 2019, 17MA02571


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cap Sud Exploitation a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 11 juin 2014 par laquelle le maire de la commune de Saint-Laurent-du-Var s'est opposé à sa déclaration préalable.

Par un jugement n° 1403506 du 20 avril 2017, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 21 juin 2017, la société Cap Sud Exploitation, représentée par la SCP CGCB et associés, demande à la Cour

:

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 20 avril 2017 ;

2°) d'annuler la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cap Sud Exploitation a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 11 juin 2014 par laquelle le maire de la commune de Saint-Laurent-du-Var s'est opposé à sa déclaration préalable.

Par un jugement n° 1403506 du 20 avril 2017, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 21 juin 2017, la société Cap Sud Exploitation, représentée par la SCP CGCB et associés, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 20 avril 2017 ;

2°) d'annuler la décision du 11 juin 2014 par laquelle le maire de la commune de Saint-Laurent-du-Var s'est opposé à sa déclaration préalable ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société soutient que :

- le tribunal a commis une erreur de droit en jugeant qu'une partie de la construction était irrégulière et que la décision ne pouvait être accordée au regard des dispositions de l'article L. 111-12 du code de l'urbanisme ;

- le tribunal a commis une erreur de droit concernant le moyen tiré de l'illégalité du retrait de la décision de non opposition tacite.

Le ministre de la cohésion des territoires a produit un mémoire en défense le 5 février 2018 par lequel il conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens sont infondés.

Le mémoire présenté par la société Cap Sud Exploitation le 2 juillet 2019, après clôture de l'instruction, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de Mme Gougot, rapporteur public,

- et les observations de Me A... de la SCP d'avocats CGCB et associés, pour la société Cap Sud Exploitation.

Vu la note en délibéré produite le 24 septembre 2019 par la société Cap Sud Exploitation.

Considérant ce qui suit :

1. La société Cap Sud Exploitation relève appel du jugement du 20 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du 11 juin 2014 par laquelle le maire de la commune de Saint-Laurent-du-Var s'est opposé à sa déclaration préalable.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. En premier lieu et d'une part, aux termes de l'article R. 421-14 du code de l'urbanisme alors applicable : " Sont soumis à permis de construire les travaux suivants, exécutés sur des constructions existantes, à l'exception des travaux d'entretien ou de réparations ordinaires : a) Les travaux ayant pour effet la création d'une surface de plancher ou d'une emprise au sol supérieure à vingt mètres carrés ; b) Dans les zones urbaines d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu, les travaux ayant pour effet la création d'une surface de plancher ou d'une emprise au sol supérieure à quarante mètres carrés (...) c) Les travaux ayant pour effet de modifier les structures porteuses ou la façade du bâtiment, lorsque ces travaux s'accompagnent d'un changement de destination entre les différentes destinations définies à l'article R. 123-9 ; (...) Pour l'application du c du présent article, les locaux accessoires d'un bâtiment sont réputés avoir la même destination que le local principal. ". Aux termes de l'article R. 421-17 du même code : " Doivent être précédés d'une déclaration préalable lorsqu'ils ne sont pas soumis à permis de construire en application des articles R. 421-14 à R. 421-16 les travaux exécutés sur des constructions existantes, à l'exception des travaux d'entretien ou de réparations ordinaires, et les changements de destination des constructions existantes suivants : a) Les travaux ayant pour effet de modifier l'aspect extérieur d'un bâtiment existant, à l'exception des travaux de ravalement ; b) Les changements de destination d'un bâtiment existant entre les différentes destinations définies à l'article R. 123-9 ; pour l'application du présent alinéa, les locaux accessoires d'un bâtiment sont réputés avoir la même destination que le local principal ; (...) f) Les travaux qui ont pour effet la création soit d'une emprise au sol, soit d'une surface de plancher supérieure à cinq mètres carrés et qui répondent aux critères cumulatifs suivants :-une emprise au sol créée inférieure ou égale à vingt mètres carrés ; - une surface de plancher créée inférieure ou égale à vingt mètres carrés. Ces seuils sont portés à quarante mètres carrés pour les projets situés en zone urbaine d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu, à l'exclusion de ceux impliquant la création d'au moins vingt mètres carrés et d'au plus quarante mètres carrés de surface de plancher ou d'emprise au sol lorsque cette création conduit au dépassement de l'un des seuils fixés à l'article R. 431-2 du présent code. g) La transformation de plus de cinq mètres carrés de surface close et couverte non comprise dans la surface de plancher de la construction en un local constituant de la surface de plancher. ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 111-12 du code de l'urbanisme dans sa version alors en vigueur : " Lorsqu'une construction est achevée depuis plus de dix ans, le refus de permis de construire ou de déclaration de travaux ne peut être fondé sur l'irrégularité de la construction initiale au regard du droit de l'urbanisme. Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables : a) Lorsque la construction est de nature, par sa situation, à exposer ses usagers ou des tiers à un risque de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ; b) Lorsqu'une action en démolition a été engagée dans les conditions prévues par l'article L. 480-13 ; c) Lorsque la construction est située dans un site classé en application des articles L. 341-2 et suivants du code de l'environnement ou un parc naturel créé en application des articles L. 331-1 et suivants du même code ; d) Lorsque la construction est sur le domaine public ; e) Lorsque la construction a été réalisée sans permis de construire ; f) Dans les zones visées au 1° du II de l'article L. 562-1 du code de l'environnement. ".

4. Enfin, lorsqu'une construction a été édifiée sans respecter la déclaration préalable déposée ou le permis de construire obtenu ou a fait l'objet de transformations sans les autorisations d'urbanisme requises, il appartient au propriétaire qui envisage d'y faire de nouveaux travaux de déposer une déclaration ou de présenter une demande de permis portant sur l'ensemble des éléments de la construction qui ont eu ou auront pour effet de modifier le bâtiment tel qu'il avait été initialement approuvé. Il en va ainsi même dans le cas où les éléments de construction résultant de ces travaux ne prennent pas directement appui sur une partie de l'édifice réalisée sans autorisation. Il appartient à l'administration de statuer au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'après les règles d'urbanisme en vigueur à la date de sa décision, en tenant compte, le cas échéant, de l'application des dispositions de l'article L. 111-12 du code de l'urbanisme précité relatives à la régularisation des travaux réalisés depuis plus de dix ans.

5. Pour s'opposer à la déclaration de travaux déposée par la société requérante le 12 mai 2014, la commune de Saint-Laurent-du-Var a constaté d'une part, que la façade sur laquelle la société souhaitait installer un store en toile comportait une enseigne " Utile " ainsi que des menuiseries et une porte coulissante automatique qui avaient été récemment installées sans autorisation, et d'autre part, que des travaux existants et irréguliers, constatés par un procès-verbal du 22 octobre 2013, n'étaient pas mentionné dans la déclaration préalable et que seul un permis de construire global en régularisation des surfaces de plancher créées, des stationnements requis et des modifications d'aspect extérieur réalisées, pouvait être valablement autorisé.

6. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que par arrêtés du 7 décembre 1970 et du 11 septembre 1972, la commune de Saint-Laurent-du-Var a autorisé notamment la construction de l'immeuble " Le Valéria " comportant, au rez-de-chaussée du bâtiment A, une surface commerciale d'une superficie de 313 m² environ ainsi qu'une surface affectée au stationnement, et en sous-sol, 7 caves et une galerie technique. Le certificat de conformité du permis de construire modificatif, qui portait notamment sur les places de stationnements couvertes, a été refusé le 7 mai 1975. Rachetant le bail commercial le 8 avril 1976, la SARL Supermarché des Hameaux est devenue locataire de 180 m² de locaux commerciaux, de 130 m² de cave et du parking intérieur. Le local commercial et les caves ont par la suite été vendus le 24 février 1983 à la SARL Distral, puis le bail a finalement été repris par la société requérante qui ne disposait donc que d'une surface commerciale de 180 m² au rez-de-chaussée et d'une surface de 130 m² de caves en sous-sol. Or, il ressort des constatations effectuées par deux agents assermentés le 22 octobre 2013, qui font foi jusqu'à preuve contraire, qu'a été créée au rez-de-chaussée une surface commerciale supplémentaire de 90,80 m² par changement de destination d'une partie de l'espace initialement destinée au stationnement et située à l'arrière du commerce existant, et qu'a été transformé, au sous-sol, l'espace dédié aux caves en plusieurs surfaces utilisées en tant que réserve pour environ 79,60 m², chambre froide pour environ 14,80 m² et local technique ventilation pour environ 12,58 m². Si la société appelante soutient que ces travaux d'agrandissement et de changement de destination ont été réalisés il y a plus de dix ans et étaient donc régularisés par l'effet du temps, les éléments qu'elle produit, notamment l'expertise réalisée sur les bétons, ne permettent pas de l'établir.

7. En outre, il ressort des pièces du dossier que, par une décision en date du 8 octobre 2013, le maire de la commune de Saint-Laurent-du-Var s'est opposé aux travaux déclarés par la société portant sur la modification de la façade par la mise en place d'une nouvelle enseigne, de nouvelles menuiseries et d'une porte coulissante automatisée. Le dossier de déclaration préalable ayant été déposé le 19 août 2013 et complété le 13 septembre 2013, aucune décision tacite de non opposition autorisant de tels travaux n'a pu naitre avant la décision du 8 octobre 2013 précitée, contrairement à ce que soutient la société, et ces travaux n'ont donc jamais été autorisés. Or, il ressort du procès-verbal de constat précité du 22 octobre 2013 que ces travaux ont été réalisés, ce que ne conteste pas la société.

8. Dans ces conditions, la société Cap Sud Exploitation devait déposer une demande de permis de construire portant sur l'ensemble des travaux non autorisés, tels que cités aux points 6 et 7 du présent arrêt, et c'est sans commettre d'erreur de droit que le tribunal administratif a jugé que le maire avait pu légalement s'opposer au projet.

9. En second lieu, aux termes de l'article R. 423-23 du code de l'urbanisme : " Le délai d'instruction de droit commun est de : a) Un mois pour les déclarations préalables ; (...) ". Aux termes de l'article R. 424-1 du même code : " A défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction déterminé comme il est dit à la section IV du chapitre III ci-dessus, le silence gardé par l'autorité compétente vaut, selon les cas : a) Décision de non-opposition à la déclaration préalable ; (...) ". Aux termes de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme, tel que modifié par l'article 134 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014, dans sa version alors en vigueur : " Le permis de construire, d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peut être retiré que s'il est illégal et dans le délai de trois mois suivant la date de cette décision ".

10. Il ressort des pièces du dossier que le dossier de déclaration préalable a été déposé en mairie le 12 mai 2014. Aucune demande de pièce complémentaire ou prorogation du délai d'instruction n'ayant été effectuée, ledit délai courait donc jusqu'au 12 juin 2014 à minuit. Si la décision d'opposition, datée du 11 juin 2014, a été notifiée par lettre recommandée à M. C..., représentant de la société, demeurant .... Toutefois, cette notification a également été réalisée le 11 juin 2014, en mains propres, auprès de Mme D..., directeur du point de vente " Utile ". Cette notification, réalisée à l'adresse des travaux et auprès d'une préposée de la société, dont la qualité de directeur, si elle ne lui permettait pas de représenter juridiquement ladite société, permettait de s'assurer, avec une confiance suffisante, de la remise effective du pli au représentant légal, doit être regardée comme étant régulière. Dans ces conditions, aucune décision tacite de non opposition n'est née, et c'est sans commettre d'erreur de droit que le tribunal administratif a jugé que la société ne pouvait se prévaloir d'une décision tacite de non opposition ni, en tout état de cause, de la méconnaissance de l'article L. 424-5 précité.

11. Il résulte de ce qui précède que la société Cap Sud Exploitation n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. L'Etat n'étant pas partie perdante à la présente instance, il y a lieu de rejeter la demande de la société présentée au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société Cap Sud Exploitation est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Cap Sud Exploitation et à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2019 où siégeaient :

- M. Poujade président,

- M. Portail, président assesseur,

- Mme B..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 septembre 2019.

2

N° 17MA02571

nb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17MA02571
Date de la décision : 26/09/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Travaux soumis au permis.

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses - Régimes de déclaration préalable.


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: Mme Elisabeth BAIZET
Rapporteur public ?: Mme GOUGOT
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS CGCB et ASSOCIES MONTPELLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-09-26;17ma02571 ?
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