La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/07/2019 | FRANCE | N°18MA03830

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 11 juillet 2019, 18MA03830


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...D...épouse C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler les décisions du 29 août 2017 par lesquelles le préfet de l'Hérault lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n°1706072 du 3 avril 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 9

août 2018, Mme D...représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 3 av...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...D...épouse C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler les décisions du 29 août 2017 par lesquelles le préfet de l'Hérault lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n°1706072 du 3 avril 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 9 août 2018, Mme D...représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 3 avril 2018 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler les arrêtés du 29 août 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à MeB..., en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 35 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- les décisions de refus de séjour et d'obligation de quitter le territoire français sont insuffisamment motivées ;

- le principe du contradictoire a été méconnu ;

- le préfet de l'Hérault n'a pas procédé à un examen réel et complet de son dossier ;

- l'article R. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été méconnu ;

- le 7° de l'article R. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnus ;

- les décisions sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense du 19 février 2019, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par Mme D...ne sont pas fondés.

Par décision du 20 juin 2018 Mme D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Paix.

Considérant ce qui suit :

1. MmeD..., de nationalité marocaine relève appel du jugement du 3 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation des décisions du 29 août 2017 par lesquelles le préfet de l'Hérault lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Sur la légalité externe :

2. En premier lieu, l'arrêté refusant à Mme D...le renouvellement de son titre de séjour mentionne la date et les conditions de son entrée en France, de la délivrance du premier titre de séjour, ainsi que les circonstances de la demande de renouvellement de celui-ci, et notamment la requête en divorce présentée par l'intéressée auprès du tribunal de grande instance de Lons le Saunier, ainsi que l'enquête de communauté de vie du 22 avril 2016. La seule circonstance que ne soit pas mentionné le conflit familial entre Mme D... et sa famille, et que cet arrêté ne soit pas accompagné des éléments de l'enquête judicaire ne saurait faire considérer qu'il est insuffisamment motivé.

3. En second lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable. ". La procédure contradictoire prévue par ces dispositions n'est pas applicable aux décisions statuant sur une demande. Ainsi, Mme D...ne peut utilement les invoquer à l'encontre de la décision rejetant sa demande de titre de séjour pour soutenir qu'elle serait irrégulière faute d'avoir été précédée d'une procédure contradictoire. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut qu'être écarté.

Sur la légalité interne :

4. En premier lieu, aux termes de l'article 5 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Quelle que soit la date à laquelle ils ont été admis au titre du regroupement familial sur le territoire de l'un ou de l'autre État, le conjoint des personnes titulaires des titres de séjour et des autorisations de travail mentionnés aux articles précédents ainsi que leurs enfants n'ayant pas atteint l'âge de la majorité dans le pays d'accueil sont autorisés à y résider dans les mêmes conditions que lesdites personnes. ". Selon l'article L. 431-2 du même code : " En cas de rupture de la vie commune ne résultant pas du décès de l'un des conjoints, le titre de séjour qui a été remis au conjoint d'un étranger peut, pendant les trois années suivant l'autorisation de séjourner en France au titre du regroupement familial, faire l'objet d'un retrait ou d'un refus de renouvellement (...) lorsque l'étranger a subi des violences conjugales de la part de son conjoint et que la communauté de vie a été rompue, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger admis au séjour au titre du regroupement familial et en accorde le renouvellement. ". Enfin l'article R. 311-15 du même code dispose que : " I.-Le titre de séjour peut être retiré : / (...) 4° Si l'étranger autorisé à séjourner en France au titre du regroupement familial n'est plus en situation de vie commune avec le conjoint qu'il est venu rejoindre dans les trois ans qui suivent la délivrance du titre de séjour, sauf dans les cas mentionnés à l'article L. 431-2 (...) ".

5. Il ressort des pièces du dossier que Mme D...entrée en France le 24 mars 2015 dans le cadre d'un regroupement familial a obtenu le 13 mai 2015 un titre de séjour valable d'un an du 13 mai 2015 au 12 mai 2016 sur le fondement de l'article 5 de l'accord franco-marocain. Toutefois, elle n'a pu obtenir le renouvellement de ce titre compte tenu de la rupture de la vie commune entre elle-même et son époux, établie par l'enquête de gendarmerie effectuée le 22 avril 2016 mais résultant encore de ses propres affirmations, l'intéressée ayant engagé une demande de divorce, et ne résidant plus avec son mari. Elle indique cependant que son départ du domicile conjugal est consécutif aux violences qu'elle a subies de la part de son époux. Il ressort des pièces du dossier et notamment du procès-verbal d'audition du 14 mars 2016, que MmeD..., se réfère à des faits d'agressions survenus le 30 septembre 2015. Le certificat médical, établi le 16 mars 2016 est pour sa part peu précis et fait état d'une agression survenue le 27 septembre 2015. Par ailleurs la plainte de Mme D... a été classée sans suite et les affirmations de la requérante ne sont pas corroborées par d'autres pièces du dossier. Ainsi, ces violences ne sont pas suffisamment établies par les pièces du dossier. Dans ces conditions, et en l'absence de tout élément nouveau, le préfet de l'Hérault a pu à bon droit rejeter la demande de renouvellement de titre de séjour dont il était saisi.

6. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, prévoit que sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : " A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; ". Il appartient au préfet, saisi d'une demande de titre de séjour par un étranger en vue de régulariser sa situation, de vérifier que les décisions de refus et d'éloignement qu'il envisage de prendre ne comportent pas de conséquences d'une gravité exceptionnelle sur la situation personnelle de l'intéressée et ne sont pas ainsi entachées d'une erreur manifeste d'appréciation.

7. Mme D...vivait en France depuis moins de trois ans à la date de l'arrêté attaqué. Elle a passé l'essentiel de sa vie dans son pays d'origine, ou elle conserve des liens. Elle souhaite divorcer de son mari et élève seule un enfant en très jeune âge. Aucune circonstance ne s'oppose à son retour au Maroc avec son enfant. Dans ces conditions, le refus de séjour n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit à sa vie privée et familiale et n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes raisons, il n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

8. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des frais d'instance seront rejetées par voie de conséquence.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D..., à Me B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2019 où siégeaient :

- Mme Mosser présidente,

- Mme Paix, présidente-assesseure,

- M. Haïli, premier conseiller.

Lu en audience publique le 11 juillet 2019.

2

N°18MA03830


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA03830
Date de la décision : 11/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme MOSSER
Rapporteur ?: Mme Evelyne PAIX
Rapporteur public ?: M. OUILLON
Avocat(s) : CABINET MAZAS - ETCHEVERRIGARAY

Origine de la décision
Date de l'import : 30/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-07-11;18ma03830 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award