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25/06/2019 | FRANCE | N°18MA03411

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 25 juin 2019, 18MA03411


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2017 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1800057 du 29 juin 2018, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 juillet 2

018, Mme A...B..., représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2017 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1800057 du 29 juin 2018, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 juillet 2018, Mme A...B..., représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 29 juin 2018 du tribunal administratif de Nice ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2017 du préfet des Alpes-Maritimes ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de l'absence d'examen par le préfet de ses qualifications concernant sa demande de titre de séjour en qualité de salariée ;

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ;

- les stipulations de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ont également été méconnues ;

- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été violées ;

- les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ont été méconnues ;

- le préfet des Alpes-Maritimes a entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour.

La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 novembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

- le protocole relatif à la gestion concertée des migrations entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne du 28 avril 2008 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Slimani a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. MmeB..., de nationalité tunisienne, née le 13 septembre 1988, a présenté le 25 octobre 2017 une demande de titre de séjour que le préfet des Alpes-Maritimes a rejetée par un arrêté du 21 décembre 2017, en lui faisant obligation de quitter le territoire français et en fixant le pays de destination. Par un jugement du 29 juin 2018 dont l'intéressée relève appel, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Le tribunal ayant indiqué que la délivrance aux ressortissants tunisiens d'un titre de séjour portant la mention " salarié " est subordonnée à la présentation d'un visa de long séjour et d'un contrat de travail visé par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi tout en concluant à ce que l'intéressée était démunie d'un visa de long séjour, n'a pas omis de statuer sur le moyen tiré de l'absence d'examen par le préfet de ses qualifications concernant sa demande de titre de séjour en qualité de salariée dès lors que ce dernier pouvait, pour ce seul motif, lui refuser la délivrance d'un tel titre. Les premiers juges n'ont, par suite, pas entaché le jugement attaqué d'une quelconque omission à statuer.

Sur bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, l'article 7 quater de la convention franco-tunisienne du 17 mars 1988, modifiée prévoit que : " Sans préjudice des dispositions du b) et du d) de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7 ° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ".

4. En l'espèce, Mme B...est entrée en France, à l'âge de 24 ans, avec un visa court séjour en 2012. Si l'intéressée soutient qu'elle est présente de manière continue sur le territoire français depuis cette date, les pièces versées au dossier ne corroborent pas cette affirmation. Elle n'établit pas être dépourvue de toutes attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu la plus grande partie de sa vie. Malgré la présence en situation régulière de membres de sa famille sur le territoire français, l'appelante, célibataire et sans charge de famille, n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté pris par le préfet des Alpes-Maritimes porterait une atteinte disproportionnée au respect de son droit à mener une vie privée et familiale normale et méconnaîtrait de ce fait les dispositions de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, de l'article L. 313-11 7° du code précité et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa vie personnelle.

5. Aux termes de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 : " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié ". / (...) ". Aux termes de l'article 11 du même accord : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord. / Chaque Etat délivre notamment aux ressortissants de l'autre Etat tous titres de séjour autres que ceux visés au présent accord, dans les conditions prévues par sa législation. ". Enfin, aux termes de l'article L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire et celle de la carte de séjour pluriannuelle mentionnée aux articles L. 313-20, L. 313-21, L. 313-23 et L. 313-24 sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1. (..). ".

6. Pour rejeter la demande de MmeB..., le préfet des Alpes-Maritimes s'est fondé sur le fait qu'elle ne détenait pas de visa de long séjour. Il ressort des pièces du dossier que, lorsqu'elle a présenté sa demande de titre de séjour, l'intéressée n'était pas titulaire d'un visa de long séjour visé conformément aux stipulations et dispositions précitées de l'accord franco-tunisien et du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le préfet du Rhône n'a pas méconnu les dispositions combinées des articles 3 et 11 de l'accord franco- tunisien.

7. Enfin, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ". Ces stipulations ne s'opposent pas à ce que le préfet, saisi par un ressortissant tunisien d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale, ou lorsque cette autorité administrative s'en empare d'office, apprécie en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.

8. D'une part, il résulte des circonstances de fait énoncées au point 4 que Mme B...n'établit pas que le préfet aurait méconnu son pouvoir de régularisation en refusant de l'admettre exceptionnellement au séjour.

9. D'autre part, s'agissant de son activité professionnelle, domaine régi, en ce qui concerne les ressortissants tunisiens, par les stipulations de l'accord bilatéral franco-tunisien qui ont pour effet d'écarter l'application des dispositions de l'article L. 313-14 précité, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dernières est inopérant à l'encontre de la décision refusant à Mme B...un titre de séjour en qualité de salarié.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. L'appelante n'établissant pas l'illégalité du refus de titre de séjour, elle n'est pas fondée à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de cette décision à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français.

11. Il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B..., au ministre de l'intérieur et à MeC....

Copie en sera adressée pour information au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 11 juin 2019, où siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente,

- MmeD..., première conseillère,

- M. Slimani, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 juin 2019.

6

N° 18MA03411


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA03411
Date de la décision : 25/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: M. Ahmed SLIMANI
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : TRAVERSINI

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-06-25;18ma03411 ?
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