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17/06/2019 | FRANCE | N°18MA01515

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 17 juin 2019, 18MA01515


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. J...G..., Mme Q...K..., M. et MmeA... L..., Mme O...P..., Mme M...C..., Mme N...R...et M. I... D... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 3 juin 2016 par lequel le préfet de l'Aude a autorisé l'exploitation d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent de cinq aérogénérateurs sur le territoire de la commune de Sainte-Valière (Aude).

Par un jugement n° 1604955 du 6 février 2018, le tribunal administratif de Montpell

ier a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. J...G..., Mme Q...K..., M. et MmeA... L..., Mme O...P..., Mme M...C..., Mme N...R...et M. I... D... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 3 juin 2016 par lequel le préfet de l'Aude a autorisé l'exploitation d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent de cinq aérogénérateurs sur le territoire de la commune de Sainte-Valière (Aude).

Par un jugement n° 1604955 du 6 février 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 9 avril 2018 et le 8 février 2019, M. G..., MmeK..., M. et MmeL..., MmeP..., MmeC..., Mme R... et M.D..., représentés par MeB..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 6 février 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 3 juin 2016 du préfet de l'Aude ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société " La Ferme éolienne de Sainte-Valière " la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

Sur la recevabilité de leur demande de première instance :

- ils justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour agir contre l'arrêté en litige ;

Sur la composition du dossier de demande d'autorisation :

- le dossier ne comportait pas des justificatifs suffisants des capacités techniques et financières de l'exploitant, en méconnaissance des dispositions des articles L. 512-1 et R. 512-3 du code de l'environnement ;

- l'avis de certains propriétaires du site de l'installation n'était pas joint au dossier, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 512-6 du code de l'environnement ;

- en prévoyant à l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 les conditions techniques des opérations de démantèlement, sans se limiter à définir celles nécessaires à la seule remise en état du site, le ministre de l'environnement a excédé les pouvoirs qu'il détenait de l'article R. 553-6 du code de l'environnement ;

- en se bornant à imposer, à l'article 1er de ce même arrêté, dans sa version en vigueur depuis le 23 novembre 2014, le démantèlement des câbles dans un rayon de dix mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison, le ministre chargé de l'environnement a méconnu les dispositions de l'article R. 553-6 précité ;

- seul le conseil municipal de Sainte-Valière, à l'exclusion du maire, avait compétence pour émettre un avis au nom de la commune en sa qualité de propriétaire du chemin d'accès à l'installation ;

Sur l'étude d'impact :

- l'étude d'impact est entachée de plusieurs inexactitudes, omissions ou insuffisances, affectant tant son volet paysager que les études chiroptérologiques ;

Sur l'enquête publique :

- les mesures de publicité de l'arrêté portant ouverture de l'enquête publique n'ont pas été régulièrement mises en oeuvre, privant le public d'une garantie ;

- la composition du dossier d'enquête publique est irrégulière, faute de comporter les avis obligatoires du ministre de l'aviation civile, du ministre de la défense, du maire et de l'INAO ;

- la lettre portant engagement financier de la société Volkswind GmbH, postérieure à la date de délivrance de l'autorisation, ne figurait pas au dossier d'enquête public, ce qui a nui à l'information du public ;

Sur la procédure de consultation :

- l'avis du conseil municipal de Sainte-Valière a été rendu dans des conditions irrégulières en raison à la fois de la méconnaissance des règles relatives aux délais et modalités de convocation des membres du conseil municipal et de la circonstance qu'ont pris part à la délibération des membres de ce conseil intéressés à l'affaire ;

Sur le bien-fondé de l'autorisation :

- les capacités techniques et financières de l'exploitant ne sauraient être appréciées au regard des dispositions de l'ordonnance du 26 janvier 2017 permettant au pétitionnaire d'en justifier lors de l'entrée en service de l'exploitation car elles méconnaissent tant les dispositions de la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 que le principe de non régression issu de l'article L. 110-1 du code de l'environnement ;

- les capacités techniques et financières du pétitionnaire sont insuffisantes au regard des dispositions en vigueur à la date de l'autorisation ;

- il appartenait au préfet d'imposer une distance d'éloignement de l'installation des lieux d'habitation supérieure à 500 mètres ;

- il aurait dû écarter les dispositions illégales de l'arrêté ministériel du 26 août 2011 et imposer au pétitionnaire de constituer des garanties financières réellement propres à couvrir les frais de démantèlement et de remise en état du site ;

- l'installation des éoliennes autorisées par l'arrêté en litige porte une atteinte excessive aux intérêts protégés par les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'environnement.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 19 juillet 2018 et le 4 mars 2019, la société " La Ferme éolienne de Sainte-Valière ", représentée par MeF..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de M. G...et autres requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance est irrecevable faute pour les requérants de justifier d'un intérêt à agir contre l'arrêté en litige ;

- les autres moyens soulevés par M. G...et autres ne sont pas fondés ;

- subsidiairement si le moyen tiré de l'irrégularité du dossier de demande était jugé fondé, il y aurait lieu pour la Cour de faire application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement pour fixer des modalités de régularisation adaptées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 février 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par M. G...et autres ne sont pas fondés.

- subsidiairement si le moyen tiré de l'irrégularité du dossier de demande était jugé fondé, il y aurait lieu pour la Cour de faire application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement pour fixer des modalités de régularisation adaptées.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement ;

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 ratifiée par la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un Etat au service d'une société de confiance ;

- le décret n° 2018-797 du 18 septembre 2018 ;

- l'arrêté du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent ;

- l'arrêté du 26 août 2011 modifié relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;

- la décision n° 2016-737 DC du 4 août 2016 du Conseil constitutionnel ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guidal,

- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant M. G...et autres, et de Me H... représentant la société " La Ferme éolienne de Sainte-Valière ".

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 3 juin 2016, le préfet de l'Aude a accordé à la société " La Ferme éolienne de Sainte-Valière " l'autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent de cinq aérogénérateurs et un poste de livraison sur le territoire de la commune de Sainte-Valière (Aude). M.G..., MmeK..., M. et Mme L..., MmeP..., MmeC..., Mme R...et M. D...relèvent appel du jugement du 6 février 2018, par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les règles applicables au litige :

2. Aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'environnement : " Sont soumises à autorisation préfectorale les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1. / L'autorisation, dénommée autorisation environnementale, est délivrée dans les conditions prévues au chapitre unique du titre VIII du livre Ier. ". Selon l'article L. 511-1 du même code : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique ". Aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 susvisée relative à l'autorisation environnementale ratifiée par l'article 56 de la loi du 10 août 2018 susvisée : " Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : / 1° Les autorisations délivrées au titre (...) du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement dans leur rédaction antérieure à la présente ordonnance (...) sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code, avec les autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés par le I de l'article L. 181-2 du même code que les projets ainsi autorisés ont le cas échéant nécessités ; les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables, notamment lorsque ces autorisations sont contrôlées, modifiées, abrogées, retirées, renouvelées, transférées, contestées ou lorsque le projet autorisé est définitivement arrêté et nécessite une remise en état ; / 2° Les demandes d'autorisation au titre du (...) chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement (...) régulièrement déposées avant le 1er mars 2017 sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance ; après leur délivrance, le régime prévu par le 1° leur est applicable ; / (...) ".

3. En vertu de l'article L. 181-17 du code de l'environnement, issu de l'article 1er de l'ordonnance du 26 janvier 2017 et applicable depuis le 1er mars 2017, l'autorisation environnementale est soumise, comme l'était avant elle l'autorisation délivrée au titre de la police des installations classées pour la protection de l'environnement mentionnées au 1° de l'article 15 de cette même ordonnance, à un contentieux de pleine juridiction. Il appartient, dès lors, au juge du plein contentieux d'apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond applicables aux autorisations environnementales au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme qui s'apprécie au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de l'autorisation.

4. Par ailleurs, lorsqu'il estime qu'une autorisation au titre des installations classées pour la protection de l'environnement a été délivrée en méconnaissance des règles de procédure applicables à la date de sa délivrance, le juge peut, eu égard à son office de juge du plein contentieux, prendre en compte la circonstance, appréciée à la date à laquelle il statue, que de telles irrégularités ont été régularisées, sous réserve qu'elles n'aient pas eu pour effet de nuire à l'information complète de la population.

Sur la régularité de la procédure suivie :

En ce qui concerne la composition du dossier de demande d'autorisation :

S'agissant des garanties techniques et financières de l'exploitant :

5. Aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'environnement dans sa rédaction en vigueur à la date de l'autorisation : " La délivrance de l'autorisation, pour ces installations (...) prend en compte les capacités techniques et financières dont dispose le demandeur, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts visés à l'article L. 511-1 et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-6-1 lors de la cessation d'activité ". Les dispositions de l'article R. 512-3 du code de l'environnement applicables à la date de délivrance de l'autorisation attaquée exigeaient que le dossier de demande comporte, en vertu du 5° de ce dernier article, " les capacités techniques et financières de l'exploitant ". Les éléments du dossier de demande devaient par ailleurs figurer dans le dossier soumis à enquête publique en vertu des articles L. 512-1 et R. 123-6. Une telle insuffisance du dossier de demande entraîne, au regard de ces règles de droit, un défaut d'information du public, qui est susceptible d'entacher la légalité de la décision. Il appartient au juge de déterminer si, dans les circonstances de l'espèce, elle a eu un tel effet.

6. Les règles de composition du dossier ont été modifiées par le décret du 26 janvier 2017 relatif à l'autorisation environnementale, qui a créé l'article D. 181-15-2 du code de l'environnement, ensuite modifié par le décret du 18 septembre 2018, en vertu duquel le dossier comprend une description des capacités techniques et financières dont le pétitionnaire dispose, ou, lorsque ces capacités ne sont pas constituées au dépôt de la demande d'autorisation, les modalités prévues pour les établir.

7. En application des règles rappelées au point 3, la circonstance que les règles de composition du dossier de demande aient évolué, en l'espèce dans un sens favorable au demandeur, ne dispense pas ce dernier de l'obligation de régulariser le vice qui affectait la composition de son dossier, à la date de la délivrance de l'autorisation attaquée. S'il est établi que l'autorité administrative compétente a reçu, postérieurement à l'autorisation, les éléments justifiant la constitution effective des capacités techniques et financières qui manquaient au dossier de demande initialement déposé, la régularisation peut être regardée par le juge comme acquise, sous réserve que le caractère incomplet du dossier d'enquête publique n'ait pas été de nature à nuire à l'information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération ou à exercer une influence sur les résultats de l'enquête.

8. En l'espèce, le dossier présenté par le pétitionnaire à l'autorité préfectorale et soumis à enquête publique comportait un document relatif aux capacités techniques de l'exploitant qui énonçait de manière suffisamment précise les moyens tant humains que techniques que la société " La Ferme éolienne de Sainte-Valière " entendait mettre en oeuvre pour l'exploitation des éoliennes. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance des informations relatives aux capacités techniques dans le dossier de demande manque en fait et doit être écarté.

9. Le dossier de demande soumis à enquête public comportait également une rubrique intitulé " capacités financières " sous la forme notamment d'un plan de développement d'où il ressortait que le montant de l'investissement prévu par la société " La Ferme éolienne de Sainte-Valière " s'établissait à 24 228 699 euros financé à hauteur de 19,98 % sur capitaux propres et de 80,02 % par emprunt bancaire. La demande précisait que la société était détenue à 100 % par sa société-mère de droit allemand Volkswind GmbH, et retraçait l'évolution des bilans annuels et des capitaux propres du groupe Volkswind au cours des six dernières années, faisant apparaître pour chaque exercice un taux de capitaux propres supérieur à 30 %. Le document rappelait que la solvabilité et la viabilité du groupe Volkswind étaient favorablement appréciées par l'agence de notation Euler Hemes. Etait également joint un compte de résultat prévisionnel de la société " La Ferme éolienne de Sainte-Valière " sur les 16 années à venir faisant apparaître le chiffre d'affaires, les différentes charges d'exploitation, ainsi que la capacité d'autofinancement de la société pour chacun des exercices prévisionnels en cause. Cette projection était fondée sur une estimation de la production d'électricité et le tarif réglementaire de rachat de cette énergie par EDF, circonstance qui conférait aux prévisions financières de la société un caractère réaliste.

10. Au regard, d'une part, de la nature du projet et de son coût estimé, et d'autre part, des éléments mentionnés au point précédent, la seule circonstance que la société n'avait pas joint à sa demande un engagement ferme de financement d'un établissement bancaire, ne permet pas de retenir qu'elle n'a pas justifié, en l'espèce, de manière suffisamment précise de ses capacités financières pour conduire son projet et satisfaire aux obligations résultant de l'application de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement.

11. Néanmoins, dans la mesure où le pétitionnaire ne disposait pas lui-même du capital lui permettant de financer le projet en cause, il lui appartenait de justifier d'un engagement précis de sa société mère de mettre à la disposition de sa filiale les financements nécessaires à la conduite du projet. Il ne résulte pas de l'instruction qu'un tel document aurait été versé au dossier de demande d'autorisation.

12. Toutefois, postérieurement à la délivrance de l'autorisation, le pétitionnaire a complété sa demande en produisant une lettre d'intention du 23 novembre 2016 de la société Volkswind GmbH, signée du gérant et du fondé de pouvoir de la société mère, par laquelle celle-ci s'engageait de manière ferme et définitive, dans le cas où les prêts bancaires seraient refusés à la société " La Ferme éolienne de Sainte-Valière ", à mettre à la disposition de sa filiale les financements nécessaires à la conduite du projet. Elle s'engageait également dans cette lettre à assurer " toute dépense de sa filiale pour répondre aux obligations liées à la règlementation des installations classées. " Au regard de la nature du projet, de son coût estimé, des capacités de la société mère, ces éléments étaient, en l'espèce, suffisants pour justifier des capacités financières du pétitionnaire à mener à bien son projet. Dans la mesure où il n'est pas contesté que l'autorité administrative compétente a reçu, postérieurement à l'autorisation, ces éléments qui manquaient au dossier de demande initialement déposé, la société doit être regardée comme ayant procédé sur ce point à sa régularisation.

13. Si la lettre du 23 novembre 2016 ne figurait pas au dossier d'enquête publique, il ne résulte toutefois pas de l'instruction que la population aurait reçu une information erronée quant aux moyens réels dont disposait l'auteur de la demande. Dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu, en particulier, de la nature des observations émises au cours de l'enquête publique qui portaient essentiellement sur l'impact du projet sur les paysages, l'environnement ainsi que l'activité viticole et le tourisme et alors qu'aucune des personnes intéressées n'a mis en cause l'insuffisance des informations relatives aux capacités financières de la société, il n'est pas établi que le caractère incomplet du dossier aurait nui à l'information du public, ni encore qu'il aurait été susceptible d'exercer une influence sur les résultats de l'enquête. Il en résulte que le caractère incomplet du dossier n'a pas, dans ces circonstances, affecté la légalité de la décision.

S'agissant de l'avis des propriétaires sur l'état dans lequel devra être remis le site lors de l'arrêt définitif de l'installation :

14. Aux termes de l'article R. 512-6 du code de l'environnement dans sa version applicable à la date de l'arrêté en litige : " I. - A chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : (...) 7° Dans le cas d'une installation à implanter sur un site nouveau, l'avis du propriétaire, lorsqu'il n'est pas le demandeur, ainsi que celui du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme, sur l'état dans lequel devra être remis le site lors de l'arrêt définitif de l'installation ; ces avis sont réputés émis si les personnes consultées ne se sont pas prononcées dans un délai de quarante-cinq jours suivant leur saisine par le demandeur ". L'article R. 553-6 du même code relatif à la mise à l'arrêt définitif d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, dispose, dans sa version alors en vigueur, que : " Les opérations de démantèlement et de remise en état d'un site après exploitation comprennent : a) Le démantèlement des installations de production ; b) L'excavation d'une partie des fondations ; c) La remise en état des terrains sauf si leur propriétaire souhaite leur maintien en l'état ; d) La valorisation ou l'élimination des déchets de démolition ou de démantèlement dans les filières dûment autorisées à cet effet. Un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixe les conditions techniques de remise en état ". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 du ministre en charge de l'environnement relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, modifié par l'arrêté du 6 novembre 2014 : " Les opérations de démantèlement et de remise en état des installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent prévues à l'article R. 553-6 du code de l'environnement comprennent : 1. Le démantèlement des installations de production d'électricité, des postes de livraison ainsi que les câbles dans un rayon de 10 mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison. (...) ". Il résulte de ces dispositions combinées que ne doivent être joints à demande d'autorisation que les avis des propriétaires des parcelles sur lesquelles sont implantés les installations de production d'électricité, les postes de livraison ainsi que les câbles dans un rayon de 10 mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison.

15. D'une part, en prévoyant à l'article R. 553-6 précité qu'un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixerait les conditions techniques de remise en état d'un site après exploitation, le pouvoir règlementaire a nécessairement entendu confier à ce ministre le soin de fixer, par arrêté, les conditions techniques relatives à l'ensemble des opérations mentionnées à cet article, soit à la fois celles de démantèlement des installations et de remise en état du site. Dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'en prévoyant à l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 les conditions techniques des opérations de démantèlement sans se limiter à définir celles nécessaires à la seule remise en état du site, le ministre de l'environnement aurait excédé les pouvoirs qu'il détenait de l'article R. 553-6. Par suite, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité des dispositions de l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 ne peut qu'être écarté.

16. D'autre part, l'arrêté du 26 août 2011, qui a été pris conformément à l'habilitation ainsi donnée au ministre chargé de l'environnement par l'article R. 553-6, s'est borné à préciser l'étendue des obligations de démantèlement et de remise en état des parcs éoliens pesant sur l'exploitant, lesquelles n'exigeaient en aucun cas la suppression de l'ensemble du réseau électrique. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'en se bornant à imposer, à l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 dans sa version en vigueur depuis le 23 novembre 2014, le démantèlement des câbles dans un rayon de dix mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison, le ministre chargé de l'environnement aurait méconnu les dispositions de l'article R. 553-6 du code de l'environnement.

17. Il résulte de l'instruction, d'une part, que le poste de livraison implanté sur la parcelle cadastrée B 522 est situé à plus de 10 mètres de la parcelle cadastrée B 535. D'autre part, si un câble doit être implanté sous le chemin dit de Sainte-Valière appartenant à la commune, il sera situé, selon les documents graphiques figurant dans l'étude d'impact dans un rayon supérieur à 10 mètres autour des aérogénérateurs y compris autour de l'aérogénérateur E03. Il résulte de ce qui précède que ni l'avis du propriétaire de la parcelle cadastrée B 535, ni celui de la commune quant à l'état dans lequel devra être remis le site lors de l'arrêt définitif de l'installation n'avait à être recueilli. Par suite, la circonstance que l'avis de ce propriétaire et de la commune en sa qualité de propriétaire du chemin dit de Sainte-Valière n'aurait pas été joint à la demande est sans incidence sur la légalité de l'autorisation en litige.

En ce qui concerne l'étude d'impact :

18. Le projet litigieux, qui correspond à un parc éolien comportant des aérogénérateurs dont le mât a une hauteur supérieure à 50 mètres, est soumis à autorisation au titre de la législation sur les installations classées sur le fondement de la rubrique n° 2980 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement. La rubrique 1 de l'annexe à l'article R. 122-2 du code de l'environnement soumet à l'obligation de réaliser une étude d'impact les installations classées pour la protection de l'environnement. Aux termes de l'article R. 512-6 du même code : " I.- A chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : (...) 4° L'étude d'impact prévue à l'article L. 122-1 dont le contenu est défini à l'article R. 122-5 et complété par l'article R. 512-8 (...) ". Selon l'article R. 122-5 du code de l'environnement dans sa version en vigueur du 1er juin 2012 au 15 août 2016, applicable en l'espèce : " I.- Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, ouvrages et aménagements projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. / II.- L'étude d'impact présente : / 1° Une description du projet comportant des informations relatives à sa conception et à ses dimensions, y compris, en particulier, une description des caractéristiques physiques de l'ensemble du projet et des exigences techniques en matière d'utilisation du sol lors des phases de construction et de fonctionnement et, le cas échéant, une description des principales caractéristiques des procédés de stockage, de production et de fabrication, notamment mis en oeuvre pendant l'exploitation, telles que la nature et la quantité des matériaux utilisés (...) ; / 2° Une analyse de l'état initial de la zone et des milieux susceptibles d'être affectés par le projet, portant notamment sur la population, la faune et la flore, les habitats naturels, les sites et paysages, les biens matériels, les continuités écologiques telles que définies par l'article L. 371-1, les équilibres biologiques, les facteurs climatiques, le patrimoine culturel et archéologique, le sol, l'eau, l'air, le bruit, les espaces naturels, agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, ainsi que les interrelations entre ces éléments ; 3° Une analyse des effets négatifs et positifs, directs et indirects, temporaires (y compris pendant la phase des travaux) et permanents, à court, moyen et long terme, du projet sur l'environnement, en particulier sur les éléments énumérés au 2° et sur la consommation énergétique, la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses), l'hygiène, la santé, la sécurité, la salubrité publique, ainsi que l'addition et l'interaction de ces effets entre eux ; 4° Une analyse des effets cumulés du projet avec d'autres projets connus (...) ; / 5° Une esquisse des principales solutions de substitution examinées par le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage et les raisons pour lesquelles, eu égard aux effets sur l'environnement ou la santé humaine, le projet présenté a été retenu ; (...) / 7° Les mesures prévues par le pétitionnaire ou le maître de l'ouvrage pour : / - éviter les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine et réduire les effets n'ayant pu être évités ; / - compenser, lorsque cela est possible, les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine qui n'ont pu être ni évités ni suffisamment réduits. S'il n'est pas possible de compenser ces effets, le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage justifie cette impossibilité. / La description de ces mesures doit être accompagnée de l'estimation des dépenses correspondantes (...) ". Aux termes de l'article R. 512-8 du même code : " I.- Le contenu de l'étude d'impact mentionnée à l'article R. 512-6 doit être en relation avec l'importance de l'installation projetée et avec ses incidences prévisibles sur l'environnement, au regard des intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1. / II.- Le contenu de l'étude d'impact est défini à l'article R. 122-5. Il est complété par les éléments suivants : / 1° L'analyse mentionnée au 3° du II de l'article R. 122-5 précise notamment, en tant que de besoin, l'origine, la nature et la gravité des pollutions de l'air, de l'eau et des sols, les effets sur le climat le volume et le caractère polluant des déchets, le niveau acoustique des appareils qui seront employés ainsi que les vibrations qu'ils peuvent provoquer, le mode et les conditions d'approvisionnement en eau et d'utilisation de l'eau ; / 2° Les mesures réductrices et compensatoires mentionnées au 7° du II de l'article R. 122-5 font l'objet d'une description des performances attendues, notamment en ce qui concerne la protection des eaux souterraines, l'épuration et l'évacuation des eaux résiduelles et des émanations gazeuses ainsi que leur surveillance, l'élimination des déchets et résidus de l'exploitation, les conditions d'apport à l'installation des matières destinées à y être traitées, du transport des produits fabriqués et de l'utilisation rationnelle de l'énergie ; (...) ".

19. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

S'agissant de l'étude paysagère :

20. Les recommandations figurant dans les documents, tels que des guides méthodologiques, élaborés par l'administration à destination des publics concernés sont par elles-mêmes dépourvues de toute portée normative. Par suite, la circonstance alléguée que les photomontages que comporte l'étude d'impact ne seraient pas conformes aux recommandations faites par certains services administratifs en matière de photomontages utilisés dans les dossiers de l'éolien est sans incidence sur l'appréciation qu'il convient de porter sur le contenu de l'étude d'impact.

21. Il résulte de l'instruction que l'étude paysagère annexée à l'étude d'impact comporte de nombreuses photographies et près de cinquante photomontages, réalisés selon une méthodologie décrite précisément p. 119 de l'étude, et complétés, pour la majorité des points de vue, par des " zoom ", représentant les différentes situations de perception ou de co-visibilité de nature à affecter les paysages, les monuments historiques ou les habitations les plus proches. Eu égard à l'importance et à la nature du projet, l'étude paysagère permet ainsi d'en apprécier l'impact sur le paysage existant. Le manque allégué d'objectivité et de sincérité de cinq des points de vue, n'est pas corroboré par les résultats de l'instruction, ces clichés, contrairement à ce qui est soutenu, mettant en évidence la visibilité du projet. S'agissant particulièrement du bourg de Sainte-Valière, cinq photomontages sont présentés, dont le point de vue 47 réalisé sur la route départementale 405, à proximité des habitations de certains requérants. Dans ces conditions, et alors que l'étude d'impact n'a pas à présenter des photomontages couvrant tous les angles de vue du paysage proche et lointain pour l'ensemble des propriétés susceptibles d'être affectées par le projet, il en résulte que le moyen tiré de ce que l'étude paysagère n'aurait pas reflété son impact réel, ne permettant pas l'information du public, doit être écarté.

S'agissant de l'étude chiroptérologique :

22. Il résulte de l'instruction que les auteurs de l'étude d'impact ont procédé à un recensement de l'ensemble des données scientifiques connues relatives aux chiroptères, (zonages, plans nationaux d'action, bases de données, études antérieures), qu'ils ont complété par une étude au sol. Ils ont notamment effectué des inventaires naturalistes sur un cycle biologique annuel complet d'activité de vol, d'avril à novembre, avec huit dates couvrant les trois périodes de migration, permettant l'étude des potentialités chiroptérologiques locales, dont les résultats sont détaillés dans l'étude. Les écoutes actives ont ensuite été complétées par des écoutes passives. S'il est soutenu que le diagnostic initial est insuffisant, les requérants ne sauraient utilement se prévaloir du non-respect des recommandations de la société française pour l'étude et la protection des mammifères qui sont dépourvues de toute portée normative. Si aucune écoute en hauteur n'a été réalisée, les requérants n'en démontrent pas la nécessité, alors que les auteurs de l'étude ont de manière circonstanciée indiqué les raisons pour lesquelles, en l'espèce, l'étude au sol leur paraissait suffisante. Par suite, et alors qu'il est constant qu'aucune colonie n'est signalée dans les 5 kilomètres du site, que deux colonies ont été trouvées dans les 10 kilomètres et 3 dans les 20 kilomètres, l'insuffisance alléguée du diagnostic initial de l'étude chiroptérologique n'est nullement établie.

En ce qui concerne l'enquête publique :

S'agissant de la publicité de l'enquête publique :

23. Aux termes de l'article R. 123-11 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors en vigueur : " Un avis portant les indications mentionnées à l'article R. 123-9 à la connaissance du public est publié en caractères apparents quinze jours au moins avant le début de l'enquête et rappelé dans les huit premiers jours de celle-ci dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans le ou les départements concernés. (...) ". Le III de l'article R. 512-14 de ce code, alors applicable, prévoit que : " Les communes, dans lesquelles il est procédé à l'affichage de l'avis au public prévu au I de l'article R. 123-11, sont celles concernées par les risques et inconvénients dont l'établissement peut être la source et, au moins, celles dont une partie du territoire est située à une distance, prise à partir du périmètre de l'installation, inférieure au rayon d'affichage fixé dans la nomenclature des installations classées pour la rubrique dont l'installation relève./ (...) ". L'annexe à l'article R. 511-9 du même code précise, s'agissant d'une installation terrestre de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent et regroupant un ou plusieurs aérogénérateurs dont le mât a une hauteur supérieure ou égale à 50 mètres, soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement, que le rayon d'affichage prévu à l'article R. 512-14 précité s'élève à 6 kilomètres.

24. Il résulte de l'instruction que, par avis d'enquête publique, le préfet de l'Aude a informé le public qu'il serait procédé, du 10 décembre 2015 au 11 janvier 2016, à une enquête publique sur la demande d'autorisation présentée par la société " La Ferme éolienne de Sainte-Valière " pour l'exploitation d'un parc éolien sur la commune de Sainte-Valière. L'affichage prévu par les dispositions précitées concernait vingt-quatre communes situées dans un rayon de six kilomètres sur le territoire des départements de l'Aude et de l'Hérault. Il est constant qu'aucune preuve d'un affichage en mairie d'Argeliers n'a été apportée et que l'avis au public n'a été affiché qu'à partir du 5 décembre 2015 en mairie de Roubia, soit cinq jours avant l'ouverture de l'enquête publique. Si le certificat d'affichage établi le 12 janvier 2016 par le maire de Bize-Minervois atteste d'un affichage pendant un mois, il ne permet pas d'établir la date de mise en place de celui-ci. Ainsi, l'avis au public relatif à l'enquête publique n'a pas fait l'objet d'un affichage régulier dans trois des vingt-quatre communes concernées par le projet.

25. Il résulte, toutefois, de l'instruction que les autres formalités d'affichage prévues par l'arrêté préfectoral d'organisation de l'enquête publique, sur le terrain, dans quatre journaux régionaux à deux reprises et sur le site internet de la préfecture, ont été régulièrement accomplies. Le commissaire enquêteur fait état également dans son rapport de la publication d'articles de presse et de la diffusion des dates d'enquête sur les réseaux sociaux. Il résulte du rapport d'enquête que le commissaire enquêteur a reçu trente personnes en mairie, non compris les élus et représentants d'associations, qu'il a enregistré 68 observations ainsi qu'une pétition, qui a regroupé 640 signatures électroniques sur un site internet, 190 signatures en mairie de Ginestas et 168 en mairie de Sainte-Valière. Dans ces conditions, l'absence d'affichage régulier dans les trois communes précitées n'a pas eu pour effet d'entacher d'irrégularité la procédure d'enquête. Le moyen tiré de l'insuffisance de cet affichage doit, par suite, être écarté.

S'agissant de la composition du dossier d'enquête publique :

Quant à l'avis du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre de la défense :

26. D'une part, aux termes de l'article R. 123-8 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le dossier soumis à l'enquête publique comprend les pièces et avis exigés par les législations et réglementations applicables au projet, plan ou programme. / Le dossier comprend au moins : (...) 4° Lorsqu'ils sont rendus obligatoires par un texte législatif ou réglementaire préalablement à l'ouverture de l'enquête, les avis émis sur le projet plan, ou programme. (...) ".

27. D'autre part, aux termes de l'article R. 425-9 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet porte sur une construction susceptible, en raison de son emplacement et de sa hauteur, de constituer un obstacle à la navigation aérienne, le permis de construire ou le permis d'aménager tient lieu de l'autorisation prévue par l'article R. 244-1 du code de l'aviation civile dès lors que la décision a fait l'objet d'un accord du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre de la défense. ". Aux termes de l'article R. 244-1 du code de l'aviation civile : " A l'extérieur des zones grevées de servitudes de dégagement en application du présent titre, l'établissement de certaines installations qui, en raison de leur hauteur, pourraient constituer des obstacles à la navigation aérienne est soumis à une autorisation spéciale du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre de la défense. ".

28. Si en vertu des dispositions de l'article R. 425-9 du code de l'urbanisme, la délivrance des permis de construire ou des permis d'aménager concernant des constructions susceptibles, en raison de leur emplacement et de leur hauteur, de constituer un obstacle à la navigation aérienne, est subordonnée à un accord préalable du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre de la défense et que cet accord tient lieu de l'autorisation prévue par l'article R. 244-1 du code de l'aviation civile, aucune disposition législative ou réglementaire, et notamment pas l'article R. 512-21 du code de l'environnement, ni aucun principe, ne prévoit de soumettre la délivrance sur le fondement de la législation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement des autorisations d'exploiter un parc d'aérogénérateurs à l'avis préalable de ces autorités. Dès lors, si l'accord de ces ministres devait être recueilli dans le cadre de l'instruction de la demande de permis de construire des éoliennes, ni ces accords, ni un avis de ces mêmes ministres n'avaient à être joints au dossier d'enquête publique préalable à la délivrance de l'autorisation en litige. Par suite, le moyen tiré de ce que ces avis n'auraient pas figuré au dossier d'enquête publique est, en tout état de cause, inopérant.

Quant à l'avis du maire de Sainte-Valière :

29. L'avis favorable du 19 avril 2015 du maire de la commune de Sainte-Valière sur la demande de permis de construire des éoliennes, n'a pas été émis au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement, mais en application des dispositions du code de l'urbanisme. Dès lors cet avis n'avait pas davantage à être joint au dossier d'enquête publique préalable à la délivrance de l'autorisation d'exploiter les installations en litige. Par suite, le moyen tiré de ce que cet avis n'avait pas été versé au dossier d'enquête publique est, en tout état de cause, inopérant.

Quant à l'avis de l'Institut national de l'origine et de la qualité (INAO) :

30. Aux termes de l'article L. 512-6 du code de l'environnement, alors applicable aux installations classées pour la protection de l'environnement soumises à autorisation : " Dans les communes comportant une aire de production de vins d'appellation d'origine, l'autorité compétente pour délivrer l'autorisation consulte l'Institut national de l'origine et de la qualité. (...). ". Il résulte de ces dispositions combinées avec celles précitées de l'article R. 123-8 du même code que, lorsqu'un projet d'exploitation d'installation classée pour la protection de l'environnement soumise à autorisation est situé dans une commune dont le territoire comporte des vignobles classés appellation d'origine contrôlée, l'Institut national de l'origine et de la qualité (INAO) doit être consulté et son avis figurer au dossier soumis à l'enquête publique.

31. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances affectant le dossier soumis à enquête publique ne sont susceptibles de vicier la procédure et ainsi d'entacher d'irrégularité l'autorisation que si elles ont eu pour effet de nuire à l'information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête et, par suite, sur la décision de l'autorité administrative.

32. Il résulte de l'instruction que l'avis défavorable émis par l'INAO par courriers des 21 avril et 26 octobre 2015 sur le projet d'éolienne de la société " La Ferme éolienne de Sainte-Valière " n'a pas été versé au dossier d'enquête publique. Toutefois, l'étude d'impact jointe à ce dossier reproduisait partiellement cet avis de l'INAO en pages 240 et 241 et en citait les motifs et les conclusions. Etait également joint en annexe 13 à cette étude un précédent avis de l'INAO, daté du 1er septembre 2014, adressé au maire de la commune de Sainte-Valière à l'occasion de l'élaboration du plan local d'urbanisme, qui faisait état de l'avis défavorable de l'Institut au projet d'installation d'un parc éolien au nord-est de la commune en relevant que le secteur concerné était situé dans l'aire délimité des AOC Minervois et Languedoc et pouvait empêcher la possibilité d'implantation de nouvelles vignes " et que le projet " pouvait porter atteinte à l'image de ces AOC qui s'appuyaient sur l'authenticité et l'originalité de leur terroir ". En outre, l'étude d'impact jointe au dossier d'enquête publique reprenait ces différents éléments au titre des incidences du projet sur l'environnement. Il ressort également des observations produites par le syndicat du cru minervois au cours de l'enquête publique que cet avis de l'INAO, auquel ce syndicat se référait expressément dans ses observations et dont il résumait la position, était bien connu de ses adhérents constitués d'exploitants viticoles, notamment ceux résidant sur le territoire des communes concernées par le projet. Enfin, le rapport du commissaire-enquêteur fait ressortir ces inconvénients et indique qu'ils ont été mis en avant, dans leurs observations, par plusieurs riverains du projet au cours de l'enquête qui ont insisté notamment sur ses conséquences négatives pour l'agrotourisme. Dans ces circonstances, l'absence de l'avis de l'INAO dans le dossier soumis à l'enquête publique n'a pas eu pour effet de nuire à l'information complète de la population et n'a pas été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête. Par suite, la circonstance alléguée n'a pas entaché d'illégalité la décision de l'autorité administrative.

En ce qui concerne l'avis émis par le conseil municipal de Sainte-Valière :

33. D'une part, aux termes de l'article L. 512-2 du code de l'environnement alors en vigueur : " L'autorisation prévue à l'article L. 512-1 est accordée par le préfet (...) après avis des conseils municipaux intéressés. (...) ". L'article R. 512-20 du même code précise que " Le conseil municipal de la commune où l'installation projetée doit être implantée et celui de chacune des communes mentionnées au III de l'article R. 512-14 sont appelés à donner leur avis sur la demande d'autorisation dès l'ouverture de l'enquête. Ne peuvent être pris en considération que les avis exprimés au plus tard dans les quinze jours suivant la clôture du registre d'enquête ".

34. D'autre part, aux termes de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction alors en vigueur : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée. Elle est adressée par écrit, au domicile des conseillers municipaux ou, s'ils en font la demande, envoyée à une autre adresse ou transmise de manière dématérialisée. ". Et selon l'article L. 2121-12 du même code, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal (...) Le délai de convocation est fixé à cinq jours francs. En cas d'urgence, le délai peut être abrégé par le maire sans pouvoir être toutefois inférieur à un jour franc. / Le maire en rend compte dès l'ouverture de la séance au conseil municipal, qui se prononce sur l'urgence et peut décider le renvoi de la discussion, pour tout ou partie, à l'ordre du jour d'une séance ultérieure. / Le présent article est également applicable aux communes de moins de 3 500 habitants lorsqu'une délibération porte sur une installation mentionnée à l'article L. 511-1 du code de l'environnement. ". Il résulte de ces dispositions que les convocations aux réunions du conseil municipal, accompagnées des notes explicatives de synthèse, doivent être envoyées aux conseillers municipaux en respectant un délai de cinq jours francs avant la réunion.

35. Il résulte de l'instruction que, par une délibération du 18 décembre 2015, le conseil municipal de Sainte-Valière a émis un avis favorable au projet en litige. Selon les mentions figurant sur cette délibération, les conseillers municipaux n'ont cependant été convoqués à la séance du 18 décembre 2015 que le 14 décembre 2015, soit en méconnaissance du délai de cinq jours francs prévu par l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, qui est applicable aux communes de moins de 3500 habitants lorsque la délibération porte sur une installation mentionnée à l'article L. 511-1 du code de l'environnement. Si en cas d'urgence, le délai peut être abrégé par le maire sans pouvoir être toutefois inférieur à un jour franc et si le maire en rend compte dès l'ouverture de la séance du conseil municipal, il est constant que cette procédure d'urgence n'a pas été observée en l'espèce. Cette méconnaissance entache, par elle-même, d'irrégularité la délibération adoptée par le conseil municipal de Sainte-Valière lors de la séance du 18 décembre 2015, alors même que le conseil municipal avait auparavant été amené à se prononcer à deux reprises sur projet de parc éolien en juin 2013 et novembre 2014 et que la délibération a été adoptée à l'unanimité.

36. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que cette irrégularité aurait, en l'espèce, eu une influence sur le principe ou le contenu de la décision du préfet de l'Aude, prise après enquête publique et avis des vingt-trois autres conseils municipaux intéressés. Dans ces circonstances, les conditions irrégulières dans lesquelles a été rendu cet avis n'ont pu avoir davantage pour effet de priver quiconque d'une garantie dans le cadre de la procédure consultative préalable à l'autorisation attaquée. Le moyen tiré du vice de procédure tenant à l'irrégularité de l'avis émis par le conseil municipal doit, par suite, être écarté.

Sur le bien-fondé de l'autorisation :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'insuffisance des garanties techniques et financières :

37. L'ordonnance du 26 janvier 2017 et en particulier les dispositions de l'article 15-1, ont prévu que les autorisations délivrées au titre de la législation sur les installations classées avant le 1er mars 2017 deviennent, à compter de cette date, des autorisations environnementales soumises au régime prévu par les articles L. 181-1 et suivants du code de 1'environnement. L'article L. 181-27 du code de l'environnement issu de cette ordonnance dispose que : " L'autorisation prend en compte les capacités techniques et financières que le pétitionnaire entend mettre en oeuvre, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-6-1 lors de la cessation d'activité ". L'article D. 181-15-2 du même code, dans sa rédaction issue du décret du 18 septembre 2018, dispose que : " Lorsque l'autorisation environnementale concerne un projet relevant du 2° de l'article L. 181-1, le dossier de demande est complété dans les conditions suivantes. / I. - Le dossier est complété des pièces et éléments suivants : / (...) / 3 ° Une description des capacités techniques et financières mentionnées à l'article L. 181-27 dont le pétitionnaire dispose, ou, lorsque ces capacités ne sont pas constituées au dépôt de la demande d'autorisation, les modalités prévues pour les établir au plus tard à la mise en service de l'installation ". Ainsi, le pétitionnaire peut justifier de ses capacités techniques et financières au jour de la mise en service de l'installation.

S'agissant de l'exception d'illégalité de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale :

Quant au moyen tiré de la méconnaissance du principe de non-régression :

38. L'article 38 de la Constitution dispose que : " Le gouvernement peut, pour l'exécution de son programme, demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi. / Les ordonnances sont prises en conseil des ministres après avis du Conseil d'État. Elles entrent en vigueur dès leur publication mais deviennent caduques si le projet de loi de ratification n'est pas déposé devant le Parlement avant la date fixée par la loi d'habilitation. Elles ne peuvent être ratifiées que de manière expresse. / A l'expiration du délai mentionné au premier alinéa du présent article, les ordonnances ne peuvent plus être modifiées que par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif ".

39. En vertu de l'article L. 110-1 du code de l'environnement : " I. Les espaces, ressources et milieux naturels terrestres et marins, les sites, les paysages diurnes et nocturnes, la qualité de l'air, les êtres vivants et la biodiversité font partie du patrimoine commun de la nation. (...) / II. - Leur connaissance, leur protection, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état, leur gestion, la préservation de leur capacité à évoluer et la sauvegarde des services qu'ils fournissent sont d'intérêt général et concourent à l'objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Elles s'inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, des principes suivants : / (...) 9° Le principe de non-régression, selon lequel la protection de l'environnement, assurée par les dispositions législatives et réglementaires relatives à l'environnement, ne peut faire l'objet que d'une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment. (...) ".

40. Pour l'application et l'interprétation d'une disposition législative, aussi bien les autorités administratives que le juge sont liés par les réserves d'interprétation dont une décision du Conseil constitutionnel, statuant sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution, assortit la déclaration de conformité à la Constitution de cette disposition.

41. Il résulte de la réserve d'interprétation énoncée par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2016-737 DC du 4 août 2016 statuant sur la conformité à la Constitution de l'article L. 110-1 du code de l'environnement, que le principe de non-régression énoncé par cet article s'impose au pouvoir réglementaire, " dans le cadre des dispositions législatives propres à chaque matière " tandis que le législateur demeure libre d'apprécier l'opportunité de modifier ou d'abroger les textes antérieurs, dans le respect des règles et principes s'imposant à lui. Il en résulte que la méconnaissance du principe de non-régression ne saurait être utilement invoquée à l'encontre d'un texte de valeur législative. L'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale a été ratifiée par le III de l'article 56 de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018. Elle a, dès lors, en application de l'article 38 de la Constitution, acquis valeur législative à compter de sa signature. Par suite, le moyen tiré de ce que ses dispositions méconnaissent le principe de non-régression de la protection de l'environnement, dans la mesure où elles autorisent le bénéficiaire d'une autorisation environnementale à justifier de ses capacités techniques et financières non plus dans sa demande, mais au plus tard à la mise en service de l'installation est, en tout état de cause, inopérant.

Quant au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 3 de la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 :

42. Aux termes de l'article 3 de la directive du Parlement européen et du Conseil 2001/42/CE du 27 juin 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement : " 1. Une évaluation environnementale est effectuée, conformément aux articles 4 à 9, pour les plans et programmes visés aux paragraphes 2, 3 et 4 susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement. / 2. Sous réserve du paragraphe 3, une évaluation environnementale est effectuée pour tous les plans et programmes : / a) qui sont élaborés pour les secteurs de l'agriculture, de la sylviculture, de la pêche, de l'énergie, de l'industrie, des transports, de la gestion des déchets, de la gestion de l'eau, des télécommunications, du tourisme, de l'aménagement du territoire urbain et rural ou de l'affectation des sols et qui définissent le cadre dans lequel la mise en oeuvre des projets énumérés aux annexes I et II de la directive 85/337/CEE pourra être autorisée à l'avenir ; / ou b) pour lesquels, étant donné les incidences qu'ils sont susceptibles d'avoir sur des sites, une évaluation est requise en vertu des articles 6 et 7 de la directive 92/43/CEE. (...) ".

43. Il résulte de l'article 3 précité de la directive du 27 juin 2001, telle qu'interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne, notamment dans ses arrêts du 11 septembre 2012 (C-43/10), Nomarchiaki Aftodioikisi Aitoloakarnanias et du 27 octobre 2016 (C-290/15) Patrice d'Oultremont contre Région wallonne, que la notion de " plans et programmes " se rapporte à tout acte qui établit, en définissant des règles et des procédures de contrôle applicables au secteur concerné, un ensemble significatif de critères et de modalités pour l'autorisation et la mise en oeuvre d'un ou de plusieurs projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement. Si selon la Cour de justice la notion de " plans et programmes " peut ainsi recouvrir au sens de la directive des actes normatifs adoptés par la voie législative ou réglementaire, c'est à la condition toutefois que ces actes concernent des secteurs déterminés et qu'ils définissent le cadre dans lequel la mise en oeuvre des projets énumérés aux annexes I et II de la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 2011 peut être autorisée.

44. L'ordonnance du 26 janvier 2017, qui détermine les règles applicables aux projets relevant de l'ensemble des secteurs soumis auparavant à la règlementation des installations classées pour la protection de l'environnement n'a pas pour objet de définir le cadre dans lequel peuvent être mis en oeuvre des projets déterminés dans un secteur particulier. Elle ne relève pas, par conséquent, de la notion de " plans et programmes " au sens de la directive 2001/42/CE du 27 juin 2001 et n'avait pas, dès lors, à être précédée d'une évaluation environnementale. Dans cette mesure, les dispositions de son article 15-1 selon lequel les autorisations délivrées au titre de la règlementation des installations classées avant le 1er mars 2017 deviennent à compter de cette date des autorisations environnementales soumises au régime prévu par les articles L.181-1 et suivants du code de l'environnement ne méconnaissent pas les objectifs de la directive précitée.

45. Il en résulte que les moyens tirés de ce que les dispositions de l'ordonnance du 26 janvier 2017 seraient illégales et ne seraient pas applicables au présent litige doivent être écartés.

S'agissant de l'appréciation des garanties techniques et financières :

46. Il appartient à la Cour de faire application des dispositions précitées des articles L.181-27 et D. 181-15-2 du code de l'environnement dans leur rédaction en vigueur à la date à laquelle elle se prononce, ainsi qu'il résulte expressément des dispositions du 1° de l'article 15 de cette ordonnance, qui prévoient que ces dispositions s'appliquent à compter du 1er mars 2017 aux autorisations d'exploiter antérieurement délivrées en application de l'article L. 512-1 du même code, " notamment lorsque ces autorisations sont (...) contestées ".

47. Il résulte de ces dispositions qu'une autorisation d'exploiter une installation classée ne peut légalement être délivrée, sous le contrôle du juge du plein contentieux des installations classées, si les conditions qu'elles posent ne sont pas remplies. Lorsque le juge se prononce sur la légalité de l'autorisation avant la mise en service de l'installation, il lui appartient, si la méconnaissance de ces règles de fond est soulevée, de vérifier la pertinence des modalités selon lesquelles le pétitionnaire prévoit de disposer de capacités financières et techniques suffisantes pour assumer l'ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site, au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, ainsi que les garanties de toute nature qu'il peut être appelé à constituer à cette fin en application des article L. 516-1 et L. 516-2 du même code. Lorsque le juge se prononce après la mise en service de l'installation, il lui appartient de vérifier la réalité et le caractère suffisant des capacités financières et techniques du pétitionnaire ou, le cas échéant, de l'exploitant auquel il a transféré l'autorisation.

48. Il résulte de l'instruction que le parc éolien litigieux n'a pas encore été mis en service à la date du présent arrêt. Comme il a été dit aux points 8 à 12, la société " La Ferme éolienne de Sainte-Valière " a produit les éléments justifiant des modalités selon lesquelles elle prévoit de disposer des capacités tant techniques que financières pour assumer l'ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site. Ces justifications apparaissent, en l'espèce, pertinentes au regard des prescriptions de l'article L. 181-27 du code de l'environnement. Le moyen tiré de ce que ces dispositions auraient été méconnues doit, par suite, être écarté.

En ce qui concerne le respect des dispositions de l'article R. 515-101 du code de l'environnement relatif aux garanties prévues pour la remise en état du site :

49. Aux termes du I de l'article R. 515-101 du code de l'environnement, qui a repris les anciennes dispositions de l'article R. 553-1 : " La mise en service d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent soumise à autorisation au titre du 2° de l'article L. 181-1 est subordonnée à la constitution de garanties financières visant à couvrir, en cas de défaillance de l'exploitant lors de la remise en état du site, les opérations prévues à l'article R. 515-106. Le montant des garanties financières exigées ainsi que les modalités d'actualisation de ce montant sont fixés par l'arrêté d'autorisation de l'installation ". Le II du même article dispose que : " Un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixe, en fonction de l'importance des installations, les modalités de détermination et de réactualisation du montant des garanties financières qui tiennent notamment compte du coût des travaux de démantèlement ". L'annexe 1 de l'arrêté du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent prévoit que le coût unitaire forfaitaire correspondant au démantèlement d'une unité, à la remise en état des terrains, à l'élimination ou à la valorisation des déchets générés est fixé à 50 000 euros.

50. Eu égard à l'objectif de préservation des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 auquel les mesures de démantèlement contribuent directement, il n'apparaît pas que le ministre chargé de l'environnement ait fait une inexacte application des pouvoirs qu'il tient des dispositions du II de l'article R. 515-101 du code de l'environnement en fixant à 50 000 euros le coût unitaire forfaitaire correspondant au démantèlement d'une unité. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté du 26 août 2011 est illégal et que, par voie de conséquence, le préfet de l'Aude était tenu d'en écarter les dispositions et de fixer, aux termes de l'arrêté attaqué, ce coût unitaire à un montant supérieur à 50 000 euros.

En ce qui concerne le respect de la distance d'éloignement des habitations :

51. Aux termes de l'article L. 515-44 du code de l'environnement : " Les installations terrestres de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent dont la hauteur des mâts dépasse 50 mètres sont soumises à autorisation au titre de l'article L. 511-2, au plus tard le 12 juillet 2011. La délivrance de l'autorisation d'exploiter est subordonnée au respect d'une distance d'éloignement entre les installations et les constructions à usage d'habitation, les immeubles habités et les zones destinées à l'habitation définies dans les documents d'urbanisme en vigueur au 13 juillet 2010 et ayant encore cette destination dans les documents d'urbanisme en vigueur, cette distance étant, appréciée au regard de l'étude d'impact prévue à l'article L. 122-1. Elle est au minimum fixée à 500 mètres ". Aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, pris pour l'application de ces dispositions, dans sa rédaction résultant en dernier lieu de l'arrêté du 11 mai 2015 : " L'installation est implantée de telle sorte que les aérogénérateurs sont situés à une distance minimale de : / 500 mètres de toute construction à usage d'habitation, de tout immeuble habité ou de toute zone destinée à l'habitation telle que définie dans les documents d'urbanisme opposables en vigueur au 13 juillet 2010. / (...) Cette distance est mesurée à partir de la base du mât de chaque aérogénérateur ". L'article 26 du même arrêté dispose que : " L'installation est construite, équipée et exploitée de façon telle que son fonctionnement ne puisse être à l'origine de bruits transmis par voie aérienne ou solidienne susceptibles de compromettre la santé ou la sécurité du voisinage. / Les émissions sonores émises par l'installation ne sont pas à l'origine, dans les zones à émergence réglementée, d'une émergence supérieure aux valeurs admissibles ", qui sont définies dans un tableau annexe.

52. Si comme le soutiennent les requérants, plus de la moitié des habitants de Sainte-Valière se trouve dans un rayon de 1000 mètres de l'éolienne E4 et que la quasi-totalité du village se trouve dans un rayon de 1000 mètres de l'éolienne E5, il ne résulte pas de l'instruction et il n'est d'ailleurs pas allégué que la distance minimale de 500 mètres prévue par les dispositions susmentionnées devant séparer les aérogénérateurs des habitations ne serait pas, en l'espèce, respectée. Il résulte des simulations effectuées dans le cadre de l'étude de bruit qu'aucun dépassement des seuils réglementaires relatifs aux niveaux de bruit n'a été constaté en période diurne. Un mode de fonctionnement adapté des aérogénérateurs a été retenu pour assurer le respect des seuils en période nocturne. Enfin l'article 8 de l'autorisation impose à l'exploitant de réaliser des mesures acoustiques pour s'assurer de la conformité de l'exploitation à la règlementation en vigueur. Les requérants n'établissent pas que ces mesures seraient, en l'espèce, insuffisantes pour assurer le respect des règles de bruit fixées par l'arrêté du 26 août 2011 et que l'autorité administrative aurait dû prévoir un éloignement des aérogénérateurs de plus de 500 mètres des habitations au titre des prescriptions spécifiques de l'autorisation.

53. Aucune règle ni aucun principe ne prévoit qu'une installation soumise à autorisation environnementale ne devrait pas être visible des habitations proches. Par suite, la circonstance que les aérogénérateurs seraient visibles des habitations de Sainte-Valière, même à une distance supérieure à 500 mètres, est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de l'autorisation en litige.

54. Enfin, la circonstance qu'une école communale soit située à 775 mètres de l'éolienne E5 n'est pas à elle seule de nature à établir l'existence d'un risque pour la sécurité publique et la santé des élèves qui la fréquentent.

En ce qui concerne les atteintes aux intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement :

55. Aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " I. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas. (...) ".

56. Il résulte de l'instruction que le projet de parc éolien de Sainte-Valière comporte cinq éoliennes qui sont positionnées dans un alignement Nord Sud d'environ 800 mètres de long. Il doit être implanté au nord du département de l'Aude, à environ 15 km au nord-ouest de Narbonne, à 30 km à l'ouest de Béziers, au nord-est de la commune de Sainte-Valière, dans un secteur de plaine viticole ondulée de faible topographie et de collines sèches du bas minervois. Le projet est situé à environ 2,5 kilomètres au nord du canal du Midi, mais visuellement en retrait de ce canal en raison du relief. Le caractère agricole du site doit être relativisé par la présence d'autres parcs éoliens implantés dans un périmètre de vingt kilomètres, notamment ceux de Lézignan-Corbières, de la Serre d'Oupia, de Névian et de Canet. Ce secteur ne présente pas d'enjeu fort en termes paysager et patrimonial.

57. Si le parc éolien de Sainte-Valière sera en partie visible du bourg de Sainte-Valière, il résulte de l'instruction qu'il est situé très nettement en retrait des habitations, dans un secteur de prairies sèches accompagnées d'une végétation de garrigues et de quelques parcelles de vignes et de cultures, traversé par un réseau de voies et de chemins peu fréquentés. S'il est également visible de certains endroits du territoire communal de Ginestas, il résulte de l'étude d'impact que son implantation n'offre que quelques vues partielles et ponctuelles sur une petite partie de ce territoire. Notamment le projet n'est pas visible des proches abords de l'église de Notre-Dame-des-Vals, site patrimonial inscrit à l'inventaire des monuments historiques, ni du hameau de Somail, proche du canal du Midi.

58. Si les requérants soutiennent que le terrain d'assiette du projet est situé dans un secteur identifié en 2005, par le plan paysager Audois, comme une zone à préserver afin de maintenir un effet de coupure entre les parcs éoliens existants, ce document est dépourvu de caractère normatif et ne contient pas de prescriptions qui s'imposeraient à l'autorité administrative.

59. Il résulte des analyses détaillées et photomontages réalisés en de nombreux points par l'étude paysagère jointe à l'étude d'impact que l'ensemble éolien du Lézignanais est peu visible du secteur d'implantation du projet au nord du canal du Midi et qu'aux points où la vue est dégagée, le projet s'inscrit dans le même cône de visibilité et selon une même implantation nord/sud que les projets et parcs du Lézignanais. Ainsi, le risque de saturation des paysages, qui serait susceptible de résulter des parcs en activité ou autorisés situés dans la plaine, entre l'autoroute A 61 et la rivière Aude, ainsi que du parc de la Serre d'Oupia, n'est en l'espèce nullement établi.

60. Il ne résulte pas de l'instruction que l'implantation du parc éolien dans une zone viticole et touristique serait de nature à générer des conséquences négatives sur la pérennité et le développement du terroir viticole ni sur l'activité touristique qui y est associée, une telle atteinte ne pouvant, en tout état de cause, résulter par principe de la seule implantation d'un parc éolien dans un tel périmètre.

61. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que l'autorisation en litige méconnaîtrait les intérêts protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement en raison de l'atteinte portée par le projet à l'environnement et aux paysages doit être écarté.

62. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance par la société " La Ferme éolienne de Sainte-Valière ", que M. G... et les autres requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

63. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat et de la société " La Ferme éolienne de Sainte-Valière " qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces mêmes dispositions et de mettre à la charge de M. G...et des autres requérants une somme globale de 2 000 euros à verser à la société " La Ferme éolienne de Sainte-Valière ".

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. G... et des autres requérants est rejetée.

Article 2 : M. G...et les autres requérants verseront à la société " La Ferme éolienne de Sainte-Valière " une somme globale de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. J...G..., Mme Q...K..., M. et Mme A...L..., Mme O...P..., Mme M...C..., Mme N...R...et M. I...D..., à la société " La Ferme éolienne de Sainte-Valière " et au ministre de la transition écologique et solidaire.

Copie en sera adressée au préfet de l'Aude.

Délibéré après l'audience du 3 juin 2019, où siégeaient :

- Mme Helmlinger, présidente de la Cour,

- M. Guidal, président assesseur,

- Mme E..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 17 juin 2019.

2

N° 18MA01515

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA01515
Date de la décision : 17/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Energie.

Nature et environnement - Installations classées pour la protection de l'environnement - Régime juridique - Pouvoirs du préfet - Instruction des demandes d'autorisation.

Nature et environnement - Installations classées pour la protection de l'environnement - Règles de procédure contentieuse spéciales.

Nature et environnement - Divers régimes protecteurs de l`environnement.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMLINGER
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : MONAMY

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-06-17;18ma01515 ?
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