La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/12/2016 | FRANCE | N°16MA00719

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 19 décembre 2016, 16MA00719


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le collectif alétois " gestion publique de l'eau " et l'association " Avenir d'Alet " ont demandé au tribunal administratif de Montpellier :

- d'annuler la délibération du conseil municipal d'Alet-les-Bains du 14 avril 2008 décidant d'attribuer la délégation de service public de gestion de l'assainissement à la société Saur ;

- d'enjoindre au maire d'Alet-les-Bains de saisir le juge du contrat dans un délai de deux mois en vue de prononcer la nullité du contrat attribué à la société Sa

ur à moins d'une résolution amiable entre les parties, sous astreinte de 100 euros par jou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le collectif alétois " gestion publique de l'eau " et l'association " Avenir d'Alet " ont demandé au tribunal administratif de Montpellier :

- d'annuler la délibération du conseil municipal d'Alet-les-Bains du 14 avril 2008 décidant d'attribuer la délégation de service public de gestion de l'assainissement à la société Saur ;

- d'enjoindre au maire d'Alet-les-Bains de saisir le juge du contrat dans un délai de deux mois en vue de prononcer la nullité du contrat attribué à la société Saur à moins d'une résolution amiable entre les parties, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai ;

- de mettre une somme de 1 000 euros à la charge de la commune d'Alet-les-Bains au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 0802498 du 21 mai 2010, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 10MA03255, 10MA03404 du 23 décembre 2013, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté leurs requêtes tendant à l'annulation de ce jugement.

Par une décision n° 375792 du 12 février 2016, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 23 décembre 2013 et a renvoyé les affaires devant la même Cour.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête et des mémoires, enregistrés le 11 août 2010 et les 17 septembre 2012, 12 avril 2013, 28 novembre 2013, 14 avril 2016, 3 juin 2016 et 21 octobre 2016, le collectif alétois " gestion publique de l'eau ", représenté par la SCP cabinet Darribère, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 mai 2010 ;

2°) d'annuler la délibération du conseil municipal d'Alet-les-Bains du 14 avril 2008 décidant de confier la délégation de service public de gestion de l'assainissement à la société Saur et autorisant le maire à signer le contrat correspondant ;

3°) d'enjoindre au maire d'Alet-les-Bains de saisir le juge du contrat afin qu'il prononce la nullité de ce contrat à moins d'une résolution du contrat par voie amiable entre les parties, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai de deux mois ;

4°) de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de la commune d'Alet-les-Bains au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il a intérêt et qualité pour agir ;

- les écritures de la commune sont irrecevables ;

- le jugement est entaché d'une omission à statuer ;

- il est insuffisamment motivé ;

- la délibération litigieuse est illégale par voie d'exception de l'illégalité de la délibération du 29 juin 2007 ;

- la mention d'informations erronées dans les documents de la consultation a eu pour effet de violer les principes d'égal accès à la commande publique et d'égalité des candidats ;

- la commission chargée d'émettre un avis sur la délégation de service public n'a pas eu communication du dossier de consultation des entreprises ni des caractéristiques des prestations envisagées ; sa composition était irrégulière ; aucun rapport d'analyse des offres n'a été dressé ;

- la modification substantielle des caractéristiques de la délégation en cours de négociation a été de nature à fausser la concurrence et à violer le principe d'égalité entre les candidats ;

- le principe de la participation financière de la commune retenu en cours de négociation viole les dispositions de l'article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales ;

- la délibération est insuffisamment motivée au regard de l'article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales ;

- les dispositions de l'article L. 1413-1 du code général des collectivités territoriales sont inconstitutionnelles en tant qu'elles ne prévoient la création d'une commission consultative des services publics locaux que pour les communes de plus de 10 000 habitants ;

- la délibération ne peut avoir un effet rétroactif ;

- des informations erronées ont été données aux conseillers municipaux ;

- le règlement du service d'assainissement est illégal ;

- le contrat viole le principe de libre concurrence s'agissant du choix de l'entrepreneur chargé des travaux de réalisation des branchements des particuliers au réseau.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 3 août 2011, 18 avril 2013, 7 mai 2013, 20 novembre 2013, 13 mai 2016 et 21 juin 2016, la commune d'Alet-les-Bains conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge du collectif alétois " gestion publique de l'eau " au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le collectif alétois " gestion publique de l'eau " ne justifie pas d'un intérêt à agir ;

- son président n'est pas habilité à agir ;

- la requête n'est pas motivée ;

- les moyens soulevés par le collectif alétois " gestion publique de l'eau " ne sont pas fondés.

Par un mémoire distinct, enregistré le 12 avril 2013, le collectif alétois " gestion publique de l'eau " a demandé à la Cour de transmettre au Conseil d'Etat la question de la constitutionnalité de l'article L. 1413-1 du code général des collectivités territoriales au regard des droits et libertés garantis par la Constitution.

Par un mémoire, enregistré le 4 mai 2013, la commune d'Alet-les-Bains a conclu qu'il n'y avait pas lieu de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par l'association requérante.

Par une ordonnance du 13 juin 2013, le président de la 6ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité susvisée relative à l'article L. 1413-1 du code général des collectivités territoriales.

Par une décision n° 369535 du 17 septembre 2013, le Conseil d'Etat a décidé qu'il n'y avait pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel cette question prioritaire de constitutionnalité.

Vu les autres pièces du dossier.

II. Par une requête et des mémoires, enregistrés le 16 août 2010 et les 17 septembre 2012, 28 novembre 2013, 14 avril 2016, 3 juin 2016 et 21 octobre 2016, l'association " Avenir d'Alet ", représentée par la SCP cabinet Darribère, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 mai 2010 ;

2°) d'annuler la délibération du conseil municipal d'Alet-les-Bains du 14 avril 2008 décidant de confier la délégation de service public de gestion de l'assainissement à la société Saur et autorisant le maire à signer le contrat correspondant ;

3°) d'ordonner à la commune d'Alet-les-Bains de produire le rapport de délégation du service public de l'eau potable de l'année 2013 ;

4°) d'enjoindre au maire d'Alet-les-Bains de saisir le juge du contrat afin qu'il prononce la nullité de ce contrat à moins d'une résiliation par voie amiable entre les parties, dans un délai de deux mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai ;

5°) de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de la commune d'Alet-les-Bains au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a intérêt et qualité pour agir ;

- les écritures de la commune sont irrecevables ;

- le jugement est entaché d'une omission à statuer ;

- il est insuffisamment motivé ;

- la délibération litigieuse est illégale par voie d'exception de l'illégalité de la délibération du 29 juin 2007 ;

- la mention d'informations erronées dans les documents de la consultation a eu pour effet de violer les principes d'égal accès à la commande publique et d'égalité des candidats ;

- la commission chargée d'émettre un avis sur la délégation de service public n'a pas eu communication du dossier de consultation des entreprises ni des caractéristiques des prestations envisagées ; sa composition était irrégulière ; aucun rapport d'analyse des offres n'a été dressé ;

- la modification substantielle des caractéristiques de la délégation en cours de négociation a été de nature à fausser la concurrence et à violer le principe d'égalité entre les candidats ;

- le principe de la participation financière de la commune retenu en cours de négociation viole les dispositions de l'article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales ;

- la délibération est insuffisamment motivée au regard de l'article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales ;

- les dispositions de l'article L. 1413-1 du code général des collectivités territoriales sont inconstitutionnelles en tant qu'elles ne prévoient la création d'une commission consultative des services publics locaux que pour les communes de plus de 10 000 habitants ;

- la délibération ne peut avoir un effet rétroactif ;

- des informations erronées ont été données aux conseillers municipaux ;

- le règlement du service d'assainissement est illégal ;

- le contrat viole le principe de libre concurrence s'agissant du choix de l'entrepreneur chargé des travaux de réalisation des branchements des particuliers au réseau.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 3 août 2011, 18 avril 2013, 20 novembre 2013, 13 mai 2016 et 21 juin 2016, la commune d'Alet-les-Bains conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de l'association " Avenir d'Alet ".

Elle soutient que :

- la requête n'est pas motivée ;

- les moyens soulevés par l'association " Avenir d'Alet " ne sont pas fondés.

Par un mémoire distinct, enregistré le 12 avril 2013, l'association " Avenir d'Alet " a demandé à la Cour de transmettre au Conseil d'Etat la question de la constitutionnalité de l'article L. 1413-1 du code général des collectivités territoriales au regard des droits et libertés garantis par la Constitution.

Par un mémoire, enregistré le 4 mai 2013, la commune d'Alet-les-Bains a conclu qu'il n'y avait pas lieu de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par l'association requérante.

Par une ordonnance du 13 juin 2013, le président de la 6ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité susvisée relative à l'article L. 1413-1 du code général des collectivités territoriales.

Par une décision n° 369535 du 17 septembre 2013, le Conseil d'Etat a décidé qu'il n'y avait pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel cette question prioritaire de constitutionnalité.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Héry,

- les conclusions de M. Thiele, rapporteur public,

- et les observations de M.B..., représentant l'association " Avenir d'Alet ", et de MeA..., représentant la commune d'Alet-les-Bains.

1. Considérant que les requêtes n° 16MA00719 et n° 16MA00720 présentées respectivement pour le collectif alétois " gestion publique de l'eau " et pour l'association " Avenir d'Alet " présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt ;

2. Considérant que par délibération du 12 avril 2008, le conseil municipal d'Alet-les-Bains a décidé de confier la délégation du service public de gestion de l'assainissement à la société Saur et a autorisé son maire à signer le contrat correspondant ; que par jugement du 21 mai 2010, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande présentée par le collectif alétois " gestion publique de l'eau " et l'association " Avenir d'Alet " tendant à titre principal à l'annulation de cette délibération ; que sur appels de ces deux associations, la Cour, par un arrêt du 23 décembre 2013 commun aux deux requêtes, a confirmé le jugement de première instance ; que par décision du 12 février 2016, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt pour insuffisance de motivation ;

Sur la recevabilité des requêtes d'appel :

3. Considérant que les requêtes contiennent une critique du jugement du 21 mai 2010 et sont assorties de moyens au soutien de cette critique ; qu'elles sont par suite suffisamment motivées ;

Sur la recevabilité des demandes de première instance :

4. Considérant, d'une part, que le collectif alétois " gestion publique de l'eau " a produit ses statuts desquels il ressort que cette association a pour objectif de promouvoir la gestion directe de l'eau et d'exclure toute gestion privée sous forme de délégation de service public ou de marché de prestations de services permanents ; que conformément à l'article 14 de ces statuts, le conseil d'administration a décidé, par délibération du 6 juin 2008, d'engager un recours contre la délibération du 14 avril 2008 et a mandaté son président pour le représenter ;

5. Considérant, d'autre part, que l'objet de l'association " Avenir d'Alet " porte notamment sur l'étude, la protection et la mise en valeur des ressources hydrogéologiques de la commune ainsi que sur la défense des intérêts communaux ; que l'article 10 de ses statuts prévoit que le conseil d'administration peut engager l'association dans des actions en justice et donne mandat à son président pour la représenter ;

6. Considérant qu'il suit de là que ces deux associations ont intérêt à agir contre la délibération portant sur la gestion du service public de distribution de l'eau potable et sont régulièrement représentées par leur président ;

Sur le fond :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur l'ensemble des moyens ;

7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable : " (...) Les délégations de service public des personnes morales de droit public relevant du présent code sont soumises par l'autorité délégante à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes, dans des conditions prévues par un décret en Conseil d'Etat (...)/ La collectivité adresse à chacun des candidats un document définissant les caractéristiques quantitatives et qualitatives des prestations ainsi que, s'il y a lieu,, les conditions de tarification du service rendu à l'usager./ Les offres ainsi présentées sont librement négociées par l'autorité responsable de la personne publique délégante qui, au terme de ces négociations, choisit le délégataire. " ;

8. Considérant que la personne responsable de la passation du contrat de délégation de service public peut apporter, au cours de la consultation engagée sur le fondement des dispositions précitées, des adaptations à l'objet du contrat qu'elle envisage de conclure au terme de la négociation lorsque ces adaptations sont d'une portée limitée, justifiées par l'intérêt du service et qu'elle ne présentent pas, entre les entreprises concurrentes, un caractère discriminatoire ; que le cahier des charges de la délégation du service public de gestion de l'assainissement soumis à consultation prévoyait que le délégataire devrait traiter un volume d'environ 70 000 m3 d'eau, dont 40 000 m3 correspondaient à une consommation forfaitaire de la commune ; qu'en cours de négociation avec la société Saur, la commune, dont le maire avait reconnu en février 2007 le caractère artificiel de la consommation ainsi forfaitairement fixée, a substitué à cette disposition le versement d'une subvention annuelle au délégataire, de 10 000 euros hors taxes les quatre premières années, 5 000 euros hors taxes les quatre années suivantes et 1 500 euros hors taxes les quatre dernières années ; que cette substitution a modifié de manière substantielle les conditions économiques d'exécution du contrat, le volume des quantités à traiter étant diminué de plus de la moitié et le délégataire étant assuré du versement d'une subvention publique annuelle ; qu'ainsi, elle aurait pu, de par son ampleur, intéresser des entreprises qui ne se sont pas manifestées, seul le délégataire sortant s'étant porté candidat ; que, par suite, elle a constitué un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation du contrat envisagé ;

9. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction en vigueur à la date de la délibération attaquée : " Il est interdit aux communes de prendre en charge dans leur budget propre des dépenses au titre des services publics visés à l'article L. 2224-1./ Toutefois, le conseil municipal peut décider une telle prise en charge lorsque celle-ci est justifiée par l'une des raisons suivantes :/ 1° Lorsque les exigences de service public conduisent la collectivité à imposer des contraintes particulières de fonctionnement ;/ 2° Lorsque le fonctionnement du service public exige la réalisation d'investissements qui, en raison de leur importance et eu égard au nombre d'usagers, ne peuvent être financés sans augmentation excessive des tarifs ;/ 3° Lorsque, après la période de réglementation des prix, la suppression de toute prise en charge par le budget de la commune aurait pour conséquence une hausse excessive des tarifs./ La décision du conseil municipal fait l'objet, à peine de nullité, d'une délibération motivée (...)/ L'interdiction prévue au premier alinéa n'est pas applicable :/ 1° Dans les communes de moins de 3 000 habitants (...) aux services de distribution d'eau et d'assainissement ; (...)/ Lorsque le service a été délégué, la part prise en charge par le budget propre ne peut excéder le montant des sommes données au délégataire pour sujétions de service public et représenter une part substantielle de la rémunération de ce dernier. " ;

10. Considérant que conformément au dernier alinéa de l'article L. 2224-2 précité, qui s'applique aux communes de moins de 3 000 habitants, lorsque le service industriel et commercial est délégué, la part de dépenses prises en charge par le budget propre de la commune par exception à l'interdiction générale d'une telle prise en charge ne peut excéder le montant des sommes données au délégataire pour sujétions de service public et représenter une part substantielle de la rémunération de ce dernier ;

11. Considérant que la subvention communale est d'un montant total de 66 000 euros sur la durée d'exécution du contrat ; qu'il ne ressort pas de la délibération en litige ni, en tout état de cause, des écritures de la commune, que le versement de cette subvention correspondrait à une sujétion de service public, la seule maîtrise alléguée du coût pour l'usager ne constituant pas une telle sujétion ; que, dès lors, la commune d'Alet-les-Bains a violé les dispositions précitées de l'article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales ;

12. Considérant que les manquements ainsi retenus ne sont pas régularisables ; que, par suite, la délibération du 14 avril 2008 par laquelle le conseil municipal d'Alet-les-Bains a décidé de confier la délégation du service public de gestion de l'assainissement à la société Saur et a autorisé son maire à signer le contrat correspondant doit être annulée ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les associations requérantes sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

14. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure, assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ;

15. Considérant que l'annulation d'un acte détachable d'un contrat n'implique pas nécessairement que le contrat en cause doive être annulé ; qu'il appartient au juge de l'exécution, après avoir pris en considération la nature de l'illégalité commise, soit de décider que la poursuite de l'exécution du contrat est possible, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation prises par la personne publique ou convenues entre les parties, soit, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, d'enjoindre à la personne publique de résilier le contrat le cas échéant avec un effet différé, soit, eu égard à une illégalité d'une particulière gravité, d'inviter les parties à résoudre leurs relations contractuelles ou, à défaut d'entente sur cette résolution, à saisir le juge du contrat afin qu'il en règle les modalités s'il estime que la résolution peut être une solution appropriée ; que, dans la détermination des mesures rendues nécessaires par l'annulation, le juge de l'exécution n'est pas tenu par celles demandées par le requérant ;

16. Considérant que le vice entachant la délibération annulée constitué par un manquement aux obligations de mise en concurrence a affecté gravement la régularité de la procédure ; que le second vice tiré de l'illégalité de la subvention communale versée au délégataire est de nature à rompre l'équilibre économique du contrat ; qu'aucun des autres moyens soulevés par les associations requérantes ne porte sur l'illicéité du contenu du contrat ou sur un vice du consentement d'une gravité telle qu'il pourrait justifier que soit prononcée une injonction à résoudre ce contrat ; que ces illégalités impliquent cependant, par leur gravité et en l'absence de régularisation possible, que soit ordonnée aux parties de résilier cette convention ; que l'intérêt général tenant à la continuité du service public justifie que la résiliation ne prenne effet qu'au 30 juin 2017, afin que la commune, si elle entend ne pas reprendre en régie l'exploitation, puisse mener à bien la procédure légalement requise de choix d'un délégataire ; que, dès lors, il y a lieu d'enjoindre à la commune d'Alet-les-Bains de résilier la convention la liant à la société au plus tard le 30 juin 2017, sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme de 1 000 euros à la charge de la commune d'Alet-les-Bains au titre des frais exposés par chacune des associations requérantes et non compris dans les dépens ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font en tout état de cause obstacle à ce que soit mise à la charge de ces associations, qui ne sont pas partie perdante à la présente instance, la somme demandée par la commune d'Alet-les-Bains sur ce fondement ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 21 mai 2010 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : La délibération du 14 avril 2008 du conseil municipal d'Alet-les-Bains est annulée.

Article 3 : Il est enjoint à la commune d'Alet-les-Bains de résilier, au plus tard le 30 juin 2017, la convention déléguant le service public de gestion de l'assainissement à la société Saur.

Article 4 : La commune d'Alet-les-Bains versera la somme de 1 000 euros au collectif alétois " gestion publique de l'eau " au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La commune d'Alet-les-Bains versera la somme de 1 000 euros à l'association " Avenir d'Alet " au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié au collectif alétois " gestion publique de l'eau ", à l'association " Avenir d'Alet " et à la commune d'Alet-les-Bains.

Copie en sera adressée à la société Saur et au préfet de l'Aude.

Délibéré après l'audience du 5 décembre 2016, où siégeaient :

- M. Moussaron, président,

- Mme Steinmetz-Schies, président assesseur,

- Mme Héry, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 19 décembre 2016.

2

Nos16MA00719 et 16MA00720


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA00719
Date de la décision : 19/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-01-03-03 Marchés et contrats administratifs. Notion de contrat administratif. Diverses sortes de contrats. Délégations de service public.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: Mme Florence HERY
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : CABINET DARRIBERE

Origine de la décision
Date de l'import : 03/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-12-19;16ma00719 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award