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13/07/2016 | FRANCE | N°16MA01038

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, Juge des référés, 13 juillet 2016, 16MA01038


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet du Var a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulon la suspension de l'arrêté du 6 août 2015 par lequel le maire de la commune de Fréjus a délivré à titre précaire à la Sarl Tinaya un permis de construire pour la création d'un salle de restaurant sur des parcelles cadastrées 53 et 54, section CH et 47 et 49, section CI au lieu-dit Les Esclamandes ;

Par ordonnance n° 1600309 du 2 mars 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a suspendu l

'exécution de l'arrêté du 6 août 2015.

Procédure devant la cour :

Par requête enregis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet du Var a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulon la suspension de l'arrêté du 6 août 2015 par lequel le maire de la commune de Fréjus a délivré à titre précaire à la Sarl Tinaya un permis de construire pour la création d'un salle de restaurant sur des parcelles cadastrées 53 et 54, section CH et 47 et 49, section CI au lieu-dit Les Esclamandes ;

Par ordonnance n° 1600309 du 2 mars 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a suspendu l'exécution de l'arrêté du 6 août 2015.

Procédure devant la cour :

Par requête enregistrée le 18 mars 2016, la SARL Tinaya, représenté par la société d'avocats CGCB et Associés, demande à la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de rejeter la demande de suspension présentée par le préfet du Var ;

3°) de lui allouer, à la charge de l'Etat, la somme de 2 000 euros au titre de ses frais d'instance.

La société soutient que :

- le déféré préfectoral était irrecevable faute de la notification préalable régulière d'un recours gracieux qui n'a pu interrompre le délai de délai de recours contentieux ;

- que l'ordonnance attaquée est entachée d'une insuffisance de motivation en précisant pas en quoi les dispositions de l'article L. 433-1 du code de l'urbanisme était méconnues par le permis expressément demandé et obtenu sur ce fondement et ce d'autant que ce moyen n'était pas soulevé par le préfet qui soulevait seulement la méconnaissance des dispositions d'urbanisme opposables dans la zone ;

- que ces moyens du déféré tirés de la méconnaissance des articles L. L.121-8 et L.121-16 du code de l'urbanisme sont inopérants dès lors qu'il est constant que le projet objet de la demande de permis précaire déroge à ces dispositions ;

- que les articles L.121-23 et R.121-4 du code de l'urbanisme ne sont pas méconnus par le projet compte tenu de l'altération ancienne du site ;

- que les dispositions de l'article N2 du plan local d'urbanisme ne sont pas opposables à un projet situé sur un terrain privé ;

- que les dispositions du PPRI sont respectées par le projet, qui crée notamment une zone refuge adaptée et que le projet doit pouvoir bénéficier du régime des installations concourant au service public balnéaire ;

- que le projet répond aux caractéristiques des installations pouvant faire l'objet d'un permis précaire, et ne porte pas atteinte à la qualité du site tout en favorisant le développement économique de la commune.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 juin 2016, le préfet du Var conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que l'irrecevabilité de son déféré devant le tribunal administratif n'est pas démontrée par les seuls affirmations de la société requérante, que l'ordonnance est régulière, que le projet, qui méconnaît l'article L.421-6 du code de l'urbanisme, ne présente aucun caractère exceptionnel au sens de l'article L. 433-1 du même code.

La société Tinya a produit le 11 juillet 2016 un mémoire en réplique dans lequel elle expose à nouveau ses moyens.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Le président de la cour a désigné le 1er septembre 2015 M. d'Hervé, président de la 1ère chambre, en application des articles L. 555-1, R. 533-3 et R. 541-5 du code de justice administrative, pour statuer sur les appels formés contre les décisions rendues par les juges des référés des tribunaux du ressort.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience qui s'est tenue le 12 juillet 2016 à 14h00.

Après avoir présenté son rapport et entendu :

- les observations de Me B...représentant la société Tinaya, qui a exposé les moyens de sa requête ;

- de M. A...représentant le préfet du Var qui a rappelé ses moyens de défense.

1. Considérant que, par ordonnance du 2 mars 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a suspendu, sur le déféré du préfet du Var, l'exécution du permis de construire expressément délivré le 6 août 2015 à titre précaire à la société Tinaya pour la création d'une salle de restaurant, développant 1 056 m² dans un bâtiment de deux niveaux, sur un terrain situé au lieu-dit Les Esclamandes ; que la société Tinaya demande à la cour l'annulation de cette ordonnance et le rejet du déféré du préfet du Var ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 554-1 du code de justice administrative : " Les demandes de suspension assortissant les requêtes du représentant de l'Etat dirigées contre les actes des communes sont régies par le 3e alinéa de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales (...) " ; qu'aux termes de cet article : " Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission. / (...) Le représentant de l'Etat peut assortir son recours d'une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué. (...) " ;

3. Considérant qu'à l'appui du déféré qu'il a présenté le 2 février 2016 au tribunal administratif, le préfet du Var, après avoir énuméré les dispositions législatives et réglementaires s'opposant selon lui au projet de la SARL Tinaya, soutenait aussi que le permis de construire délivré à titre précaire à cette société au visa de l'article L.433-1 du code de l'urbanisme ne respectait les conditions restrictives imposées par ces dispositions, eu égard notamment à l'ampleur du projet ; que le juge des référés, à qui il incombe en application des dispositions précitées de se prononcer sur les moyens invoqués par l'auteur du déféré à l'appui de sa demande d'annulation, a pu retenir que ce moyen, qu'il n'a ainsi pas irrégulièrement soulevé d'office, lui paraissait susceptible de créer un doute sérieux sur la légalité de la décision déférée ; qu'il a ainsi désigné avec une précision suffisante, eu égard à son office, le moyen lui permettant d'ordonner à ce stade de la procédure la suspension de cet acte ;

Sur le bien-fondé de l'ordonnance :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de suspension :

4. Considérant que la Sarl Tinaya indique toujours n'avoir constaté l'absence d'un exemplaire du recours gracieux, formé le 6 octobre 2015 par le sous-préfet de Draguignan auprès du maire de Fréjus, dans le courrier du 7 octobre 2015 que lui a adressé en application de l'article R.600-1 du code de l'urbanisme le sous-préfet de Draguignan pour l'informer de ce recours, en indiquant lui en joindre une copie, qu'après que la commune ait pris son attache pour évoquer cette contestation du permis de construire par le dit recours gracieux ; qu'ainsi que l'a retenu à bon droit le premier juge, cette seule allégation, en l'absence notamment de toute diligence contemporaine de sa réception auprès de l'expéditeur de ce courrier pour obtenir communication de la pièce annoncée comme jointe à cet envoi, ne permet seule d'établir que les délais du recours contentieux n'ont pas été régulièrement prolongés par l'exercice de ce recours gracieux et les conditions de sa notification préalable ; que la société requérante n'est ainsi pas fondée à soutenir que le déféré du préfet était tardif et que la demande de suspension devait être en conséquence rejetée comme irrecevable par le juge du référé du tribunal administratif de Toulon ;

En ce qui concerne la légalité du permis de construire précaire :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L.433-1 du code de l'urbanisme : " Une construction n'entrant pas dans le champ d'application de l'article L. 421-5 et ne satisfaisant pas aux exigences fixées par l'article L. 421-6 peut exceptionnellement être autorisée à titre précaire dans les conditions fixées par le présent chapitre. Dans ce cas, le permis de construire est soumis à l'ensemble des conditions prévues par les chapitres II à IV du titre II du présent livre. " ; que ces dispositions ont pour objet d'autoriser, à titre exceptionnel, des constructions temporaires qui, sans respecter l'ensemble de la règlementation d'urbanisme applicable, répondent à une nécessité caractérisée, tenant notamment à des motifs d'ordre économique, social, culturel ou d'aménagement, sans pouvoir toutefois déroger de manière disproportionnée aux règles d'urbanisme applicables, eu égard aux caractéristiques du terrain d'assiette, à la nature de la construction et aux motifs rendant nécessaire le projet ainsi mis en oeuvre ; que le projet autorisé de la société Tinaya doit lui permettre de réaliser, pour une durée limitée à cinq ans, dans l'enceinte du terrain d'assiette situé en bordure immédiate du littoral, sans s'inscrire cependant dans la continuité d'une urbanisation existante, et où elle exploite déjà une activité de restauration et des installations en lien avec des activités balnéaires et de loisir et l'accueil des touristes, un bâtiment, d'une hauteur maximale de 7 mètres, destiné à accueillir à titre principal une salle de restauration de 1056 m² ;

6. Considérant que si la société Tinaya soutient que ce projet doit permettre, en assurant la poursuite d'une exploitation commerciale profitable au développement économique du secteur et de la commune, de garantir la pérennité de sa participation à l'accueil des touristes et des usagers des plages dans de bonnes conditions, notamment de sécurité, et celle de son implication dans la sauvegarde du milieu naturel, il ressort des pièces du dossier que l'ampleur du projet autorisé paraît en l'état du dossier hors de proportion avec les nécessités de tous ordres alléguées pour justifier la dérogation ainsi obtenue ; que la Sarl Tinaya n'est ainsi pas fondée à soutenir que c'est à tort que le juge des référés a retenu que le moyen du préfet, tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L.433-3 du code de l'urbanisme, était de nature à créer un doute sérieux sur la légalité du permis de construire que lui avait délivré le maire de Fréjus ; que sa requête doit, dès lors, et en conséquence de tout ce qui précède, être rejetée ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ; que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à payer à la Sarl Tinaya la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de la Sarl Tinaya est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Tinaya et au préfet du Var.

Copie en sera adressée à la commune de Fréjus et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Draguignan.

Fait à Marseille, le 13 juillet 2016.

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N° 16MA01038


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 16MA01038
Date de la décision : 13/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Collectivités territoriales - Dispositions générales - Contrôle de la légalité des actes des autorités locales - Déféré préfectoral.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Nature de la décision - Octroi du permis - Permis à titre précaire.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Louis d'HERVE
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS CGCB et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-07-13;16ma01038 ?
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