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11/02/2016 | FRANCE | N°15MA01896

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 11 février 2016, 15MA01896


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...a demandé au tribunal administratif de Marseille de lui accorder la décharge des droits complémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 25 août au 31 décembre 2010.

Par un jugement n° 13003144 en date du 3 mars 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 11 mai 2015 et par deux mémoires complémentaires enregistrés le 29 juin 2015 et le 8 octob

re 2015, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 3 mar...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...a demandé au tribunal administratif de Marseille de lui accorder la décharge des droits complémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 25 août au 31 décembre 2010.

Par un jugement n° 13003144 en date du 3 mars 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 11 mai 2015 et par deux mémoires complémentaires enregistrés le 29 juin 2015 et le 8 octobre 2015, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 3 mars 2015 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de lui accorder, en droits et pénalités, la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif de Marseille ne cite pas la sixième directive mais la règlementation nationale (code général des impôts et doctrine administrative), règlementation qui a été jugée contraire à la sixième directive ;

- elle remplit les conditions pour être assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, comme le prouve l'attestation rédigée par la société Odalys ; la condition de promotion touristique et de commercialisation à l'étranger est satisfaite ; subsidiairement, à supposer que cette condition ne soit pas considérée comme satisfaite, il conviendrait de s'interroger sur sa conformité par rapport à l'article 13 B de la sixième directive n° 77/388/CEE du Conseil des communautés européennes qui ne la prévoit pas ;

- l'appartement qu'elle donne en location est situé dans une résidence de tourisme classée en catégorie deux étoiles et se trouve donc concurrencer directement le secteur hôtelier ;

- à titre subsidiaire, elle est fondée à invoquer la doctrine référencée BOI-TVA-CHAMP-10-10-50-20, n° 40, qui prévoit que, pour être assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, l'exploitant doit proposer au moins trois des quatre services que sont le petit déjeuner, le ménage des locaux, la fourniture de linge et l'accueil par un service de réception ; ces prestations doivent pouvoir être proposées, sans être imposées aux locataires ; c'est à tort que le tribunal administratif a relevé qu'elle ne justifiait pas du caractère effectif de ces prestations, dès lors que celles-ci sont proposées ; concernant le linge, et contrairement à ce que soutient l'administration fiscale, la fourniture des draps est comprise dans le prix ; s'agissant du ménage, le dépliant fourni par la société Odalys montre que celui-ci peut être soit fait par les locataires soit fait intégralement ou partiellement par du personnel ;

- la Fédération des Associations de résidences de Services a pu obtenir de l'administration fiscale une réponse, qui s'impose donc, et qui prévoit que la fourniture de services peut être soit comprise dans le forfait soit proposée à titre optionnel ;

- le critère de la durée du séjour a été occulté ;

- il n'y a pas eu d'appréciation " in concreto " ; aucun hôtel, aucune résidence n'ont été cités en référence ;

- la loi française n'étant toujours pas en conformité avec le droit européen, il conviendrait, le cas échéant, de poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne.

Par des mémoires en défense enregistrés le 9 septembre 2015 et le 5 novembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics demande à la Cour de rejeter la requête de Mme A....

Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le traité instituant la Communauté économique européenne devenue la Communauté européenne ;

- la sixième directive 77/388/CEE du Conseil des communautés européennes du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires ;

- la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 ;

- le code général des impôts ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Paix,

- et les conclusions de M. Maury, rapporteur public.

1. Considérant que Mme A..., qui avait acquis le 30 juillet 2002 un appartement avec son époux à Puy-Saint-Vincent, a mis en location ce bien immobilier en tant que résidence de tourisme relevant du a. du 4° de l'article 261 D du code général des impôts et, consécutivement, obtenu à ce titre la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente au bien immobilier ; qu'elle a mis fin, le 25 août 2010, au bail commercial ainsi conclu ; qu'elle a alors conclu un nouveau bail commercial avec la société Odalys Résidences, pour une durée de neuf années, en vue de l'exploitation de cet appartement ; que, par proposition de rectification en date du 5 octobre 2012, l'administration fiscale a notifié à Mme A... un redressement à concurrence de 11/20ème de la taxe sur la valeur ajoutée initialement déduite sur le prix d'acquisition de cet appartement ; que Mme A... demande à la Cour d'annuler le jugement du 3 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en décharge des droits complémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 25 août 2010 au 31 décembre 2010 ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

2. Considérant qu'aux termes du B de l'article 13 de la sixième directive du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 : " Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les Etats membres exonèrent (...) b. l'affermage et la location de biens immeubles, à l'exception : 1. des opérations d'hébergement telles qu'elles sont définies dans la législation des Etats membres qui sont effectuées dans le cadre du secteur hôtelier ou des secteurs ayant une fonction similaire (...). Les Etats membres ont la faculté de prévoir des exclusions supplémentaires au champ d'application de cette exonération (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que ne peuvent faire l'objet d'une exonération, dans la législation des Etats membres, les locations de logements meublés qui correspondent à des opérations d'hébergement, soit hôtelières, soit assimilables à ces dernières ; que les critères utiles à la distinction entre la location d'un logement meublé susceptible d'être exonérée et la mise à disposition d'un tel logement dans des conditions l'apparentant à un hébergement hôtelier et, de ce fait, obligatoirement soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, doivent être propres à garantir que ne soient exonérés du paiement de cette taxe que des assujettis dont l'activité ne remplit pas la ou les fonctions essentielles des entreprises hôtelières, avec lesquelles ils ne se trouvent donc pas en situation de concurrence potentielle ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 261 D du code général des impôts : " Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : (...) / 4° Les locations occasionnelles, permanentes ou saisonnières de logements meublés ou garnis à usage d'habitation. / Toutefois, l'exonération ne s'applique pas : a. Aux prestations d'hébergement fournies dans les hôtels de tourisme classés, les villages de vacances classés ou agréés et les résidences de tourisme classées lorsque ces dernières sont destinées à l'hébergement des touristes et qu'elles sont louées par un contrat d'une durée d'au moins neuf ans à un ou plusieurs exploitants qui ont souscrit un engagement de promotion touristique à l'étranger dans les conditions fixées par un décret en Conseil d'Etat ; / b. Aux prestations de mise à disposition d'un local meublé ou garni effectuées à titre onéreux et de manière habituelle, comportant en sus de l'hébergement au moins trois des prestations suivantes, rendues dans des conditions similaires à celles proposées par les établissements d'hébergement à caractère hôtelier exploités de manière professionnelle : le petit déjeuner, le nettoyage régulier des locaux, la fourniture de linge de maison et la réception, même non personnalisée, de la clientèle. " ; que, pour l'application du b. du 4° de cet article, les critères définis par la loi n'exigent pas que les prestations parahôtelières soient matériellement effectuées mais seulement que la société dispose des moyens nécessaires pour répondre aux éventuelles demandes de ses clients ; que la proposition de rectification adressée à Mme A... se fonde sur la méconnaissance des dispositions du b. du 4° de l'article 261 D du code général des impôts ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'il n'est contesté ni que la prestation de petit déjeuner n'est pas offerte par la société Odalys Résidences ni, en revanche, que la prestation de réception de la clientèle est assurée ; que demeurent... ;

5. Considérant, d'une part, que l'appartement de Mme A... a été confié en location à la société Odalys Résidences, en vertu d'un bail commercial signé le 21 juillet 2010 conclu pour une durée de neuf années dont l'article V prévoit que " (...) le preneur exercera exclusivement, dans les biens faisant l'objet du présent bail, une activité parahôtelière comprenant la fourniture, au profit de sa clientèle, d'unités d'hébergement meublées associée à différents services ou prestations à la carte telles que l'accueil, le gardiennage, la distribution de petits déjeuners, le nettoyage des locaux, ou la fourniture de linge de lit " ; que les prestations de nettoyage et la fourniture de linge de lit sont donc prévues par le contrat de location ;

6. Considérant, d'autre part, qu'ainsi que le relève Mme A..., la circonstance que la prestation de ménage n'aurait pas été réellement effectuée au cours de la période en litige est sans incidence sur le respect de la condition prévue au b. du 4° de l'article 261 D du code général des impôts dès lors que cette prestation est effectivement proposée aux locataires de façon régulière ; que tel est le cas en l'espèce, où le bien immobilier a été confié en gestion à la société Odalys Résidences, spécialisée dans la gestion de résidences données en location, qui gère au minimum quarante appartements pris à bail dans la résidence " Les Chalets " ; qu'il résulte également de l'instruction que la société Odalys Résidences propose des prestations de nettoyage, dont le tarif est prévu sur la plaquette publicitaire, et de location de linge de toilette, comme cela résulte tant du contrat produit que de la plaquette publicitaire ou de l'attestation du gérant de la société ; que, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal administratif de Marseille, le fait que le tarif de nettoyage retenu, fixé à 54 euros pour un studio, 60 euros pour un appartement de quatre personnes, et 68 euros pour un appartement de six personnes, serait peu attractif n'est pas démontré ; que la prestation de nettoyage doit, par suite, être regardée comme assurée ; qu'en outre, la fourniture du linge de lit résulte du contrat de location lui-même et n'a d'ailleurs pas été remise en cause initialement par l'administration fiscale dans la proposition de rectification adressée à Mme A... le 5 décembre 2012 ; qu'enfin il résulte de l'instruction que la fourniture de linge de toilette est proposée moyennant un supplément de prix de 6 euros ; que, dans ces conditions, c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a relevé que Mme A... n'établissait pas que les prestations de nettoyage et de fourniture de linge de maison étaient offertes et a rejeté sa demande tendant à être assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée sur le fondement du b. du 4° de l'article 261 D du code général des impôts ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande et à demander la décharge des droits complémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 25 août au 31 décembre 2010 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation." ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'allouer la somme de 2 000 euros à Mme A... en application de ces dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 3 mars 2015 est annulé.

Article 2 : Mme A... est déchargée des droits complémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes qui lui ont été réclamés pour la période du 25 août au 31 décembre 2010.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A... la somme de 2 000 (deux mille) euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A...et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 21 janvier 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Bédier, président de chambre,

- Mme Paix, président assesseur,

- Mme Markarian, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 février 2016.

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N°15MA01896


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Exemptions et exonérations.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: Mme Evelyne PAIX
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : DUVAUX

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 11/02/2016
Date de l'import : 23/02/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 15MA01896
Numéro NOR : CETATEXT000032064493 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-02-11;15ma01896 ?
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