Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision en date du 6 septembre 2012 par laquelle l'inspectrice du travail de l'Hérault a autorisé son licenciement pour motif économique.
Par un jugement n° 1204213 du 3 juin 2014, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 5 août 2014 et le 20 avril 2015, Mme E..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 3 juin 2014 ;
2°) de faire droit à sa demande de première instance ;
3°) de mettre à la charge de la SAS Ediser la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient que :
- les difficultés économiques invoquées n'étaient pas réelles au moment du licenciement et étaient dues à des fautes de gestion de l'employeur ;
- l'employeur n'a pas procédé à une recherche effective de possibilités de reclassement au sein de l'entreprise, dans le groupe et dans les autres sociétés ayant le même gérant que la SAS Ediser ;
- son employeur n'a pas respecté sa priorité de réembauche ;
- elle n'a pas été informée sur la cause des difficultés économiques ;
- lors de la réunion du 13 juin 2012, les délégués du personnel ne se sont pas prononcés sur son licenciement, en violation des articles L. 2313-1 et suivants du code du travail.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 octobre 2014, la SAS Ediser, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la requérante la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 mars 2015, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Par une lettre du 6 octobre 2015, la Cour a informé les parties que la décision à intervenir est susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office tiré de l'incompétence de l'inspecteur du travail pour statuer sur la demande de la SAS Ediser dès lors qu'à la date de la décision le délai de six mois prévu à l'article L. 2411-7 du code du travail, qui a commencé à courir au plus tard le jour de l'élection, soit le 1er mars 2012, était expiré.
Par un mémoire, enregistré le 20 octobre 2015, Mme E... conclut aux mêmes fins que sa requête et soutient qu'elle fait sien le moyen soulevé d'office par la Cour.
Par un mémoire, enregistré le 17 novembre 2015, la SAS Ediser conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures et soutient que l'inspecteur du travail était compétent pour statuer sur la demande d'autorisation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M.A...'hôte, premier conseiller,
- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., pour la SAS Ediser.
Une note en délibéré présentée par MeC..., pour la SAS Ediser, a été enregistrée le 8 décembre 2015.
1. Considérant que Mme E... a été embauchée en qualité de secrétaire comptable le 15 novembre 2006 par la SAS Ediser ; que, le 7 août 2012, la société a demandé à l'inspection du travail l'autorisation de la licencier pour motif économique ; que l'inspectrice du travail de l'Hérault a autorisé le licenciement par une décision du 6 septembre 2012 ; que Mme E... demande à la Cour d'annuler le jugement du 3 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 2411-7 du code du travail : " L'autorisation de licenciement est requise pendant six mois pour le candidat, au premier ou au deuxième tour, aux fonctions de délégué du personnel, à partir de la publication des candidatures. La durée de six mois court à partir de l'envoi par lettre recommandée de la candidature à l'employeur " ;
3. Considérant que la SAS Ediser a saisi l'inspectrice du travail d'une demande d'autorisation de licenciement en raison de la candidature, sans succès, de Mme E... aux élections de délégués du personnel ; qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement aux mentions de la décision d'autorisation du 6 septembre 2012, la requérante n'a pas été candidate au premier tour des élections qui s'est tenu le 1er mars 2012 mais seulement au second tour du 16 mars ; qu'il n'est d'ailleurs pas contesté qu'elle a porté sa candidature à la connaissance de son employeur le 7 mars 2012 ; qu'ainsi, à la date de la décision litigieuse, le délai de six mois prévu à l'article L. 2411-7 du code du travail n'était pas expiré ; que, dès lors, Mme E... bénéficiait encore du statut de salarié protégé et l'inspectrice du travail était compétente pour statuer sur la demande d'autorisation ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que Mme E... reconnaît avoir été informée du motif économique de son licenciement ; qu'aucun texte n'imposait à la SAS Ediser de l'informer des causes de ce motif économique ;
5. Considérant, en troisième lieu, que ni les dispositions des articles L. 2313-1 et suivants du code du travail, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire n'imposent que les délégués du personnel se prononcent sur le licenciement pour motif économique d'un salarié protégé ;
6. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la SAS Ediser était déficitaire depuis 1995 en dépit d'une hausse de son chiffre d'affaires ; que ses résultats ont été négatifs en 2010, puis de nouveau en 2011 en dépit du licenciement de 11 personnes ; que l'encours clients et l'encours fournisseurs se sont nettement dégradés en 2011 ; que la trésorerie de la SAS Ediser ne lui a d'ailleurs pas permis, au cours des premiers mois de l'année 2012, d'acquitter les salaires en une seule mensualité et l'a contrainte à étaler le paiement en plusieurs échéances ; que, dans ces circonstances, l'inspecteur du travail n'a pas commis d'erreur d'appréciation en estimant qu'à la date de sa décision, la réalité des difficultés économiques invoquées, qui n'étaient pas purement passagères, était établie ; qu'il n'avait pas à faire porter son examen de la situation économique au niveau du groupe, dès lors qu'il n'est établi ni même allégué que ce dernier, à la date à laquelle le licenciement a été autorisé, incluait des sociétés oeuvrant dans le même secteur d'activité économique que la SAS Ediser ; qu'il ne lui appartenait pas de rechercher si ces difficultés étaient dues à la faute ou à la légèreté blâmable de l'employeur ;
7. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient (...) " ;
8. Considérant que Mme E... fait valoir que la SAS Ediser ne justifie pas avoir accompli des démarches en vue de rechercher des possibilités de la reclasser ; que, toutefois, l'employeur ne manque pas à son obligation de reclassement s'il justifie de l'absence de poste disponible, à la date où le licenciement est envisagé, dans l'entreprise ou, s'il y a lieu, dans le groupe auquel elle appartient ; qu'il ressort des pièces produites par la SAS Ediser et il n'est d'ailleurs pas réellement contesté qu'à la date où le licenciement de Mme E... a été envisagé, aucun poste n'était disponible dans l'entreprise, ni dans le groupe dont elle faisait partie, comprenant les sociétés Apportmédia et Webamine ; que la circonstance, à la supposer établie, que la société aurait publié des offres d'emplois en janvier 2013 est postérieure à la décision contestée et est donc sans incidence sur sa légalité ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;
9. Considérant, en sixième lieu, que l'article L. 1233-45 du code du travail accorde au salarié licencié pour motif économique une priorité de réembauche durant un délai d'un an à compter de la date de la rupture de son contrat de travail, s'il en fait la demande au cours de ce même délai ; que, selon l'article L. 1233-42 du même code, la lettre de licenciement pour motif économique doit mentionner la priorité de réembauchage et ses conditions de mise en oeuvre ; que cette formalité a été respectée en l'espèce ; que, par suite, la priorité de réembauche ne s'imposait à SAS Ediser qu'à partir du moment où la salariée demandait à en bénéficier ; qu'en l'occurrence, Mme E... n'a pas demandé à bénéficier de cette priorité ; qu'ainsi, elle n'est pas fondée à soutenir que le droit qu'elle tirait de l'article L. 1233-45 du code du travail aurait été méconnu ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de l'inspectrice du travail de l'Hérault du 6 septembre 2012 ;
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SAS Ediser, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme E... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de cette dernière la somme demandée par la SAS Ediser au même titre ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la SAS Ediser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...E..., au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à la SAS Ediser.
Délibéré après l'audience du 24 novembre 2015, où siégeaient :
- M. Lascar, président de chambre,
- M. Guidal, président assesseur,
- M.A...'hôte, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 décembre 2015.
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N° 14MA03532 4
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