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01/12/2015 | FRANCE | N°14MA00305

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 01 décembre 2015, 14MA00305


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Marlou a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du préfet du Var en date du 8 avril 2011 autorisant la société Cemex Granulats Rhône Méditerranée à exploiter une carrière et des installations de traitement des matériaux au lieu-dit " Pont du Duc " sur le territoire de la commune de Fréjus .

Par un jugement n° 1102398 du 22 novembre 2013, le tribunal administratif de Toulon a fait droit à la demande de la SCI Marlou et a annulé cet arrêté du 8 avril 2011.
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Par une requête, enregistrée le 20 janvier 2014, la société Ce...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Marlou a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du préfet du Var en date du 8 avril 2011 autorisant la société Cemex Granulats Rhône Méditerranée à exploiter une carrière et des installations de traitement des matériaux au lieu-dit " Pont du Duc " sur le territoire de la commune de Fréjus .

Par un jugement n° 1102398 du 22 novembre 2013, le tribunal administratif de Toulon a fait droit à la demande de la SCI Marlou et a annulé cet arrêté du 8 avril 2011.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 janvier 2014, la société Cemex Granulats Rhône Méditerranée, représentée par la SCP d'avocats Celice-Blancain-Soltner, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 22 novembre 2013 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la SCI Marlou devant ce tribunal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la SCI Marlou la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement n'est pas signé en méconnaissance des dispositions de l'article L. 741-7 du code de justice administrative ;

- l'autorisation d'exploitation qui lui a été délivrée a été annulée par voie de conséquence d'un arrêt du 27 juin 2013 de la cour administrative de Marseille, qui lui-même a fait l'objet d'un pourvoi en cassation, procédure susceptible de conduire à l'annulation de cet arrêt et à la remise en vigueur du plan local d'urbanisme dans sa version issue de la révision de 2008 ;

- subsidiairement, l'arrêté querellé est conforme aux dispositions du plan d'urbanisme dans sa version antérieure à la révision de 2008 ;

- cet arrêté ne méconnaît pas davantage les dispositions de l'article R. 146-2 du code de l'urbanisme ;

- en admettant même qu'il aurait méconnu ces dispositions, l'illégalité constatée par le tribunal ne pouvait entraîner qu'une annulation partielle de l'autorisation délivrée.

Par des mémoires, enregistrés le 29 avril 2014 et le 23 avril 2015, la SCI Marlou, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la société Cemex Granulats Rhône Méditerranée, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la société Cemex Granulats Rhône Méditerranée ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guidal, président ;

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;

- et les observations de MeA..., représentant la SCI Marlou.

1. Considérant que, par un premier arrêté du 2 février 1999, le préfet du Var a autorisé la société Morillon Corvol Rhône Méditerranée à exploiter une carrière au lieu-dit " Pont du Duc " sur le territoire de la commune de Fréjus, puis a autorisé, par un second arrêté du 28 juin 2007, le changement d'exploitant au profit de la société Cemex Granulats Rhône Méditerranée ; que, par un arrêté du 8 avril 2011, le préfet a abrogé la précédente autorisation d'exploitation et a autorisé la société Cemex Granulats Rhône Méditerranée à poursuivre et à étendre l'exploitation à ciel ouvert de cette carrière, ainsi qu'à y exploiter une installation de lavage, concassage et criblage de matériaux, sur un ensemble de terrains d'une superficie de 33,86 hectares ; que la société Cemex Granulats Rhône Méditerranée relève appel du jugement du 22 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Toulon a annulé cet arrêté du 8 avril 2011, à la demande de la SCI Marlou qui est propriétaire d'une maison à usage d'habitation, sise Route de Cannes, à environ 80 mètres du périmètre de la carrière ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'il résulte des pièces du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué comporte la signature du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier, conformément aux dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ; que ces signatures n'avaient pas à figurer sur les copies du jugement adressés aux parties ; que le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit dès lors être écarté ;

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par une délibération du 24 novembre 2008, le conseil municipal de Fréjus a approuvé la révision simplifiée du plan local d'urbanisme de la commune pour le secteur de la carrière du " Pont du Duc ", afin de faire correspondre le zonage du secteur Ns, dans lequel ne sont autorisées que les carrières et les sablières existantes en cours d'exploitation ainsi que les ouvrages et installations qui leur sont strictement nécessaires, avec le périmètre existant de la carrière du Pont du Duc et celui de son extension envisagée ; que, par un arrêt n° 11MA02945 du 27 juin 2013, la cour administrative d'appel de Marseille, après avoir relevé que le terrain concerné par l'extension de la carrière supportait environ 7 hectares d'espaces boisés classés au sens de l'article L. 130-1 du code de l'urbanisme et que ces espaces constituaient une partie naturelle caractéristique du site et contribuaient au caractère remarquable qui avait justifié son classement au titre de la loi du 2 mai 1930, a annulé cette délibération au motif qu'en décidant d'amputer ce site classé de ces espaces naturels pour l'extension de la carrière du Pont du Duc, elle avait méconnu les dispositions de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme ;

4. Considérant que le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté contesté du 8 avril 2011 du préfet du Var, au motif que l'autorisation d'exploitation de la carrière du " Pont du Duc " avait été délivrée à la société Cemex Granulats Rhône Méditerranée en méconnaissance du règlement de la zone Np du plan local d'urbanisme de la commune de Fréjus dans sa version en vigueur avant que sa révision ne soit approuvée par la délibération, depuis annulée, du 24 novembre 2008 ;

5. Considérant, en premier lieu, que si la société Cemex Granulats Rhône Méditerranée soutient que la commune de Fréjus s'est pourvue en cassation contre l'arrêt du 27 juin 2013 et que l'annulation de cet arrêt serait, le cas échéant, susceptible de remettre en vigueur le plan local d'urbanisme dans sa version issue de la révision de 2008, il résulte de l'instruction que, par une décision n° 371124 en date du 15 octobre 2014, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a déclaré non admis le pourvoi de la commune de Fréjus ; que l'arrêt du 27 juin 2013 de la Cour prononçant l'annulation de la délibération du conseil municipal du 24 novembre 2008 approuvant la révision du plan d'urbanisme, est par suite, devenu irrévocable ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme : " L'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'une carte communale, d'un schéma directeur ou d'un plan d'occupation des sols ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu a pour effet de remettre en vigueur le schéma de cohérence territoriale, le schéma directeur ou le plan local d'urbanisme, la carte communale ou le plan d'occupation des sols ou le document d'urbanisme en tenant lieu immédiatement antérieur " ;

7. Considérant que l'annulation ainsi prononcée par la Cour a eu pour effet, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, de remettre en vigueur les dispositions antérieures du plan d'urbanisme auxquelles les dispositions annulées s'étaient substituées ; qu'il s'ensuit qu'au 8 avril 2011, date à laquelle le préfet du Var a accordé à la société Cemex Granulats Rhône Méditerranée l'autorisation litigieuse, ce plan classait les parcelles sur lesquelles était prévue l'extension de la carrière en zone Np, laquelle correspondait aux zones naturelles et forestières de la commune présentant soit le caractère d'une coupure d'urbanisation, soit celui de site et paysage remarquables, soit celui d'un espace proche du rivage au sens de la loi " Littoral ", sur lesquelles ne sont admis que les aménagements légers prévus à l'article R. 146-2 du code de l'urbanisme ;

8. Considérant, en troisième lieu, que si la requérante soutient que la carrière autorisée ne méconnaît pas le caractère de cette zone où sont autorisés les aménagements légers prévus à l'article R. 146-2 du code de l'urbanisme et qu'elle est compatible avec la préservation du site, il ressort des dispositions combinées des articles N 1 et N 2 du règlement du plan d'urbanisme que les carrières ne sont pas autorisées en zone N, à la seule exception de la zone Ns où sont autorisées les carrières et les sablières existantes en cours d'exploitation ainsi que les ouvrages et installations qui leur sont strictement nécessaires ; que l'exploitation des carrières est ainsi interdite dans la zone Np ; que l'autorisation litigieuse, en tant qu'elle permettait l'extension de la carrière dans cette zone, a ainsi été accordée en violation des dispositions du plan d'urbanisme de la commune de Fréjus, comme l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Toulon ;

9. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'autorisation litigieuse a été accordée à la société Cemex Granulats Rhône Méditerranée " pour poursuivre et étendre l'exploitation d'une carrière à ciel ouvert sur une superficie d'environ 33,86 hectares " pour une durée de quinze ans et une production maximale annuelle de 400 000 tonnes ; que les parcelles faisant l'objet de cette autorisation comprennent une zone dont l'exploitation était achevée ou encore en cours, située pour l'essentiel en zone Ns du plan d'urbanisme où sont autorisées les carrières, et une zone d'extension destinée à l'exploitation future située en zone Np où elles sont interdites ; que l'autorisation litigieuse portant à la fois sur des parcelles exploitables et sur un tonnage d'exploitation, elle ne présente pas un caractère divisible devant conduire à distinguer la zone déjà exploitée située en zone Ns du reste du projet d'exploitation litigieux situé en zone Np ; que c'est, par suite, à bon droit que le tribunal a annulé l'autorisation contestée en estimant qu'elle présentait un caractère indivisible ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Cemex Granulats Rhône Méditerranée n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du 8 avril 2011, par lequel le préfet du Var l'a autorisée à poursuivre et à étendre l'exploitation à ciel ouvert de la carrière du Pont du Duc ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

12. Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions susmentionnées présentées par la société Cemex Granulats Rhône Méditerranée ; qu'en revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à sa charge une somme de 2 000 euros à verser à la S.C.I. Marlou au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Cemex Granulats Rhône Méditerranée est rejetée.

Article 2 : La société Cemex Granulats Rhône Méditerranée versera à la S.C.I. Marlou une somme de 2 000 (deux mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Cemex Granulats Rhône Méditerranée, à S.C.I. Marlou et à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

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N° 14MA00305

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA00305
Date de la décision : 01/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Mines et carrières - Carrières - Autorisation d'exploitation.

Mines et carrières - Carrières - Extension de carrière.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SCP CELICE - BLANCPAIN - SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-12-01;14ma00305 ?
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