La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/07/2015 | FRANCE | N°13MA01389

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 16 juillet 2015, 13MA01389


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI d'Arcy a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner le centre hospitalier de La Ciotat à lui verser, dans le dernier état de ses écritures, la somme de 424 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de la réalisation de l'extension du centre hospitalier. Le centre hospitalier de La Ciotat a appelé en garantie la commune de La Ciotat et la société " Les travaux du midi ".

Par un jugement n° 0807752 du 28 avril 2011, le tribunal administratif de Marseille a ordonné

une expertise en vue de déterminer, d'une part, si des arbres avaient été abatt...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI d'Arcy a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner le centre hospitalier de La Ciotat à lui verser, dans le dernier état de ses écritures, la somme de 424 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de la réalisation de l'extension du centre hospitalier. Le centre hospitalier de La Ciotat a appelé en garantie la commune de La Ciotat et la société " Les travaux du midi ".

Par un jugement n° 0807752 du 28 avril 2011, le tribunal administratif de Marseille a ordonné une expertise en vue de déterminer, d'une part, si des arbres avaient été abattus sans autorisation et d'évaluer le préjudice correspondant et, d'autre part, si l'extension du centre hospitalier de La Ciotat était irrégulière au regard des dispositions applicables en matière d'urbanisme et de déterminer la perte de valeur vénale et la perte d'agrément résultant du caractère illégal de cette extension. Par un jugement n° 0807752 du 7 février 2013, le tribunal administratif de Marseille a condamné le centre hospitalier de La Ciotat à payer une somme de 263 000 euros à la SCI d'Arcy au titre des préjudices subis du fait de la réalisation de l'extension du centre et a condamné la commune de La Ciotat à garantir le centre hospitalier de La Ciotat des condamnations mises à sa charge.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, un mémoire en réplique et un mémoire récapitulatif, enregistrés les 9 avril 2013, le 6 juin 2014 et 27 mars 2015, le centre hospitalier de La Ciotat, représenté par la SCP J. L. Bergel et M. R. Bergel, demande à la Cour :

1°) d'annuler les jugements du tribunal administratif de Marseille des 28 avril 2011 et 7 février 2013 ;

2°) de rejeter la demande de la SCI d'Arcy ;

3°) de mettre à sa charge les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme de 4 370 euros ;

4°) subsidiairement de condamner la commune de La Ciotat à le relever et garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre et la société Les travaux du midi à le relever et garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée au titre du préjudice tiré de l'abattage d'arbres ;

5°) de mettre à la charge de toute partie succombante la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement du 28 avril 2011 qui confie à l'expert la mission d'apprécier la légalité du permis de construire est irrégulier, une telle mission n'appartenant qu'au juge ;

- c'est à tort que le tribunal s'est fondé, pour apprécier la légalité du permis de construire, sur les dispositions des articles UC 7 et UC 10 du règlement du plan local d'urbanisme et non sur celles de l'article 7 des dispositions générales du plan local d'urbanisme ;

- c'est à tort que le tribunal a appliqué les dispositions applicables à la date de délivrance de l'arrêté et non celles qui étaient applicables à la date du dépôt de sa demande ;

- le tribunal ne pouvait, sans nier le contenu des preuves matérielles qu'il avait versées aux débats, considérer que rien n'indiquait que les arbres abattus auraient fait l'objet d'une indemnisation ou d'une compensation ou été abattus avec l'accord de la société ;

- le tribunal aurait dû estimer que la preuve de leur absence d'indemnisation n'était pas rapportée ;

- la somme de 6 000 euros pour l'abattage de six arbres est excessive ;

- la SCI est malvenue à se prévaloir des conséquences de l'abattage d'arbres dans le cadre des travaux du centre hospitalier sur la valeur de sa propriété alors qu'elle a déposé deux demandes de permis de construire devant entraîner l'abattage de 24 arbres ;

- il est fondé à demander que la société Les travaux du midi le garantisse sur le fondement de l'article 13.6 alinéa 2 intitulé assurances responsabilité civile du cahier des clauses administratives particulières du marché ;

- le calcul des surfaces prétendument édifiées en violation des règles d'urbanisme est erroné ;

- c'est à tort que le tribunal n'a pas tenu compte du fait que la propriété de la SCI D'Arcy a pris de la valeur grâce au projet en litige ;

- la commune aurait dû le garantir de l'ensemble des condamnations prononcées eu égard à la faute commise ;

- la juridiction administrative est compétente pour se prononcer sur les dommages permanents liés à la présence d'un ouvrage public ;

- la circonstance que la commune n'ait pas été appelée à assister aux opérations d'expertise ne fait pas obstacle à ce que le rapport de l'expert désigné lui soit rendu opposable, même après le dépôt, dès lors que cette partie a eu la possibilité de discuter des conclusions rendues dans le cadre de la procédure juridictionnelle et que ledit rapport a été soumis au débat contradictoire entre les parties ;

- aucune réclamation préalable n'était nécessaire avant de l'appeler en garantie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juillet 2013 et deux mémoires en réplique enregistrés les 10 juin 2014 et 22 mai 2015, la SCI d'Arcy conclut au rejet de la requête, à ce que son indemnisation soit portée à la somme de 424 000 euros et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge du centre hospitalier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens de l'appelant ne sont pas fondés ;

- la réparation qui lui a été allouée est insuffisante.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 octobre 2013, la commune de La Ciotat conclut :

1°) à l'annulation des jugements des 28 avril 2011 et 7 février 2013 ;

2°) au rejet de l'ensemble des prétentions du centre hospitalier de La Ciotat et de la SCI d'Arcy dirigées contre elle ;

3°) à la condamnation du centre hospitalier de La Ciotat et de la SCI d'Arcy aux dépens ;

4°) à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à leur charge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le juge administratif n'est pas compétent pour se prononcer sur un litige lié à des troubles anormaux de voisinage ;

- n'ayant pas été partie aux opérations d'expertise, le rapport d'expertise ne lui est pas opposable ;

- en l'absence de réclamation préalable, l'appel en garantie du centre hospitalier est irrecevable ;

- le jugement du 28 avril 2011 est irrégulier, pour avoir introduit la notion de faute qui n'était pas invoquée par la SCI dans la partie du litige fondée sur une indemnisation au titre des dommages de travaux publics ;

- il n'appartenait pas au tribunal de déléguer à un technicien la solution d'un problème de droit, a fortiori ultra petita ;

- le tribunal, qui avait épuisé sa compétence sur la demande de la SCI fondée sur la faute, ne pouvait y revenir dans son jugement définitif et lui accorder une indemnisation fondée sur la faute ;

- l'article 7 du PLU vise expressément tous les articles 7 des différentes zones et a fait l'objet d'une interprétation erronée par le tribunal ;

- la réparation mise à la charge de la commune est excessive ;

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 6 juin 2014 et 6 mai 2015, la société Les travaux du midi conclut au rejet des conclusions dirigées contre elle et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge du centre hospitalier de La Ciotat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, subsidiairement à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de tout succombant, au même titre ;

Elle soutient que :

- la réception sans réserve des travaux fait obstacle à sa mise en cause ;

- elle n'a commis aucune faute

- la SCI d'Arcy n'a subi aucun préjudice qui n'ait pas été réparé ;

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur des moyens relevés d'office, tirés de ce que l'abattage d'arbres ayant provoqué l'extinction du droit de propriété que détenait la SCI d'Arcy sur ces derniers, il n'appartient qu'à la juridiction judiciaire de connaître de la réparation des conséquences dommageables de cette mesure et, par suite, des conclusions du centre hospitalier tendant à ce que la société Les travaux du midi le garantisse des condamnations prononcées au titre de l'abattage d'arbres et de ce qu'en s'estimant compétents pour statuer sur cette partie du litige, les premiers juges ont, dans cette mesure, entaché leurs jugements d'irrégularité.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code de l'urbanisme ;

- la décision n° 3931 du Tribunal des conflits du 9 décembre 2013 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Menasseyre, rapporteure,

- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique,

- et les observations de MeA..., substituant la SCP Bergel pour le centre hospitalier de La Ciotat, de Me D...pour la commune de la Ciotat et de Me C...substituant Me B... pour la SCI d'Arcy.

Une note en délibéré présentée pour la SCI d'Arcy a été enregistrée le 30 juin 2015.

1. Considérant que, par arrêté daté du 9 juin 2006 le maire de la commune de La Ciotat a accordé un permis de construire au centre hospitalier de La Ciotat en vue de réaliser une extension d'une surface hors oeuvre nette de 5 122 mètres carrés ; que les travaux se sont déroulés à partir de la fin de l'année 2007, la réception ayant été prononcée en août 2009 ; que la SCI d'Arcy, propriétaire d'une parcelle limitrophe, a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner le centre hospitalier de La Ciotat à réparer les préjudices liés à la coupe non autorisée d'arbres, à la perte de valeur vénale de sa propriété et à la présence de l'ouvrage ; que par jugement avant dire droit du 28 avril 2011, le tribunal, après avoir jugé que la responsabilité pour faute de l'hôpital n'était pas susceptible d'être engagée à raison de l'éventuelle illégalité d'un permis de construire délivré par une autre autorité, a ordonné une expertise en vue de déterminer si des arbres avaient été abattus sans autorisation, si l'extension construite était ou pas irrégulière au regard des règles d'urbanisme applicables et de chiffrer les préjudices ; que par jugement du 7 février 2013, le tribunal a condamné le centre hospitalier à verser à la SCI 263 000 euros en réparation de ses préjudices, condamné la commune de La Ciotat à garantir le centre hospitalier à hauteur de 50 % des condamnations prononcées, mis les frais d'expertise à la charge de l'hôpital, rejeté ses autres conclusions en garantie et mis à sa charge des frais irrépétibles ; que le centre hospitalier de La Ciotat relève appel de ces jugements, en tant qu'ils lui sont défavorables ; que la SCI conclut pour sa part au rejet de la requête de l'hôpital et à une réparation plus complète de ses préjudices ; que la commune de La Ciotat demande également que les condamnations mises à sa charge soient reconsidérées ;

Sur la compétence de la juridiction administrative pour statuer sur les conclusions tendant à la réparation du préjudice liée à l'abattage d'arbres :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les moyens de la requête ;

2. Considérant que, sauf dispositions législatives contraires, la responsabilité qui peut incomber à l'Etat ou aux autres personnes morales de droit public en raison des dommages imputés à leurs services publics administratifs est soumise à un régime de droit public et relève en conséquence de la juridiction administrative ; que cette compétence, qui découle du principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires posé par l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790 et par le décret du 16 fructidor an III, ne vaut toutefois que sous réserve des matières dévolues à l'autorité judiciaire par des règles ou principes de valeur constitutionnelle ; que, dans le cas d'une décision administrative portant atteinte à la propriété privée, le juge administratif, compétent pour statuer sur le recours en annulation d'une telle décision et, le cas échéant, pour adresser des injonctions à l'administration, l'est également pour connaître de conclusions tendant à la réparation des conséquences dommageables de cette décision administrative, hormis, ainsi que l'a jugé le Tribunal des conflits par décision du 9 décembre 2013, le cas où elle aurait pour effet l'extinction du droit de propriété ;

3. Considérant que les conclusions présentées par la SCI d'Arcy tendaient notamment à la réparation des préjudices résultant de l'abattage d'arbres remarquables, situés dans le parc implanté sur sa parcelle, abattage effectué selon elle sans autorisation ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les arbres abattus aient repoussé ; qu'ils ont, ainsi, été détruits ; que le droit de propriété ne pouvant survivre à la disparition de son objet, l'abattage de ces arbres a provoqué l'extinction du droit de propriété que détenait la SCI d'Arcy sur ces derniers ; qu'en vertu des principes rappelés ci-dessus, il n'appartient qu'à la juridiction judiciaire de connaître de la réparation des conséquences dommageables de cet abattage ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que les premiers juges se sont estimés compétents pour connaître de cette partie du litige ; que leurs jugements doivent être annulés dans cette mesure ; qu'il y a lieu pour la Cour d'évoquer l'affaire dans cette mesure et, pour les motifs qui viennent d'être exposés, de rejeter les conclusions de la SCI d'Arcy tendant à la réparation du préjudice lié à l'abattage d'arbres comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ; qu'il ne lui appartient pas davantage de connaître des conclusions du centre hospitalier tendant à ce que la société Les travaux du Midi le garantisse des condamnations prononcées au titre de l'abattage d'arbres ;

Sur le surplus du litige :

5. Considérant que les défendeurs de première instance n'ont pas intérêt à contester la partie du jugement du 28 avril 2011 se prononçant, pour l'écarter, sur le fondement de responsabilité tiré de la faute de l'hôpital ; que la SCI d'Arcy, qui demande la confirmation des jugements sur le principe de la responsabilité et leur seule réformation sur le montant des indemnités allouées, ne peut être regardée comme ayant entendu remettre en débat ce point ; qu'il en résulte que le litige se trouve circonscrit à l'indemnisation décidée par le tribunal par application du régime d'indemnisation des dommages de travaux publics ; que, contrairement à ce qui est soutenu par la commune de La Ciotat, la juridiction administrative est compétente pour connaître d'un tel litige ; que, pour réparer les dommages invoqués par la SCI d'Arcy, le tribunal a considéré que cette dernière était fondée à demander réparation du préjudice correspondant à la perte de valeur vénale et d'agrément résultant de ce que la construction réalisée par le centre hospitalier excédait la hauteur maximale imposée dans le secteur UC2 par le règlement du plan local d'urbanisme de La Ciotat ;

6. Considérant qu'en matière de dommages de travaux publics, seuls sont susceptibles d'ouvrir droit à indemnité les préjudices qui excèdent les sujétions susceptibles d'être normalement imposées, dans l'intérêt général, aux riverains des ouvrages publics ; qu'il appartient donc auxdits riverains de justifier, notamment, de l'anormalité de leur dommage ; que lorsqu'un ouvrage public a été édifié au prix de la méconnaissance des règles d'urbanisme, cette méconnaissance caractérise, lorsqu'elle est à l'origine des préjudices invoqués, leur anormalité ; qu'en effet les riverains des ouvrages publics ne sauraient normalement se voir imposer le voisinage de constructions édifiées au mépris des règles d'urbanisme ; que si la victime invoque la méconnaissance de règles d'urbanisme, il n'appartient pas au juge de se prononcer sur la conformité du projet par rapport à des règles d'urbanisme autres que celles qui sont invoquées par la victime, laquelle supporte la charge de la preuve de l'anormalité de son dommage ;

7. Considérant que, devant les premiers juges, la SCI d'Arcy soutenait que le permis de construire délivré au centre hospitalier de La Ciotat par le maire de la commune le 9 juin 2006 méconnaissait l'article 7 et, dans le dernier état de ses écritures, l'article 10 du règlement de la zone UC du plan local d'urbanisme de La Ciotat sans que l'article 7 f) des dispositions particulières du règlement général de ce plan ne permette d'y déroger ; que le centre hospitalier soutient que le tribunal a fait application, pour répondre à ce moyen, de dispositions qui n'étaient pas applicables ; que si, contrairement à ce que soutient l'hôpital, la légalité du permis de construire devait s'apprécier au regard des dispositions applicables à la date à laquelle ce permis a été adopté et non au regard de celles qui étaient en vigueur au moment de l'instruction de la demande, il ressort de l'examen du permis de construire délivré à l'hôpital qu'il vise un plan d'occupation des sols du 10 février 1982, révisé en 1988, modifié en 1990, 1995, 1997, mis en révision en plan local d'urbanisme en 2001 puis modifié les 31 mars 2004 et 10 octobre 2005 ; qu'en revanche il ne vise pas la dernière révision du 22 mai 2006 ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces versées aux débats, et notamment de la confrontation des dispositions des articles 7 et 10 de la zone UC du plan local d'urbanisme de la commune dans sa version issue de la révision approuvée le 10 octobre 2005 et de celles du même article dans sa version issue de la révision approuvée le 22 mai 2006, que les dispositions dont le tribunal a fait application pour apprécier la conformité du permis de construire au plan local d'urbanisme de la commune de La Ciotat sont celles issues de la révision du plan local d'urbanisme approuvée le 22 mai 2006 ; que la règle de prospect appliquée par le tribunal ne figurait pas dans la version du plan local d'urbanisme issue de la révision approuvée le 10 octobre 2005, qui prévoyait des règles différentes et d'autres possibilités d'y déroger ; qu'en vertu de l'article L. 123-12 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable en 2006, dans les communes non couvertes par un schéma de cohérence territoriale, comme en l'espèce, l'acte publié approuvant le plan local d'urbanisme devient exécutoire un mois suivant sa transmission au préfet, sauf si le préfet demande que des modifications y soient apportées et sous réserve qu'il ait fait l'objet d'un affichage dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article R. 123-25 du code de l'urbanisme et que mention de cet affichage ait été insérée en caractères apparents dans un journal diffusé dans le département ; que ces exigences sont rendues applicables à la révision d'un plan local d'urbanisme par l'article L. 123-13 du même code dans sa rédaction applicable en 2006, qui renvoie à l'article L. 123-12 dudit code ; que la révision du plan local d'urbanisme approuvée le 22 mai 2006 n'était, dès lors, pas exécutoire le 9 juin 2006, au moment de la délivrance du permis de construire litigieux ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SCI d'Arcy ne pouvait utilement invoquer les dispositions de la version du plan local d'urbanisme issue de la révision approuvée le 22 mai 2006 pour soutenir que la construction en cause avait été édifiée en vertu d'un permis de construire illégal puisque, comme le soutient l'hôpital, les dispositions invoquées n'étaient pas applicables à cet acte ; que le centre hospitalier de La Ciotat et la commune de La Ciotat sont donc fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal s'est fondé sur la méconnaissance de dispositions contenues dans le plan local d'urbanisme approuvé en 2006 pour juger que l'extension en cause présentait le caractère d'anormalité requis pour ouvrir droit à réparation par application du régime d'indemnisation applicable aux riverains d'un ouvrage public ;

10. Considérant qu'il appartient à la Cour de se prononcer, par la voie de l'effet dévolutif de l'appel, sur les moyens invoqués par la SCI d'Arcy tant en première instance qu'en appel ;

11. Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il a été exposé au point 6, il appartient à la SCI d'Arcy de démontrer que l'édification du bâtiment en cause sur une parcelle limitrophe est pour elle à l'origine d'un préjudice anormal et spécial ; qu'en se bornant à invoquer les règles de prospect ou de hauteur maximale figurant dans une version du plan local d'urbanisme qui n'était pas devenue exécutoire à la date de délivrance du permis de construire en cause, cette société n'a pas démontré en temps utile que cette construction aurait été édifiée au prix de la méconnaissance des règles d'urbanisme et serait, de ce fait-même, à l'origine pour elle d'un préjudice anormal ;

12. Considérant, en deuxième lieu, qu'en dehors des cas de servitudes légales ou conventionnelles, les propriétaires n'ont aucun droit et aucune garantie de ne pas voir s'édifier aux abords de leur propriété des constructions susceptibles, le cas échéant, d'en diminuer la valeur ; que si la société se plaint des troubles d'agrément et de la perte de valeur vénale que lui occasionnerait la présence de l'immeuble, il résulte de l'instruction que, avant comme après l'extension en cause, la propriété de la SCI était riveraine d'une parcelle occupée par un hôpital public qui dominait déjà la propriété ; que si cette extension donne sur le parc de la villa d'Arcy, il ressort des photographies figurant dans le rapport d'expertise que compte tenu des nombreux arbres présents dans ce parc, elle est peu visible depuis la villa ; que la perte d'agrément du parc doit en outre, et comme l'a relevé l'expert, être fortement nuancée au vu de la réalisation par la société d'Arcy elle-même, sur le terrain limitrophe à la parcelle sur laquelle a été construite l'extension litigieuse, de projets de promotion immobilière devant conduire à la construction d'un centre médical et à la construction d'un immeuble de dix logements collectifs qui contribuent à la dénaturation du parc de cette société qui, par ses propres agissements a porté atteinte à l'élégance et l'harmonie dont elle se prévaut ; qu'ainsi il résulte de l'instruction que les troubles qu'entraîne pour la propriété de la SCI d'Arcy la présence de l'ouvrage public ne sont pas supérieurs à ceux qui peuvent affecter tout propriétaire d'un terrain situé en zone urbaine qui se trouve normalement exposé au risque de voir des immeubles édifiés sur les parcelles voisines ; que les dommages dont s'agit, même appréciés globalement, ne peuvent, faute de présenter le caractère d'anormalité requis, lui ouvrir droit à réparation, ni au titre d'un préjudice d'agrément, ni au titre du préjudice correspondant à une perte de valeur vénale ;

13. Considérant au surplus et en toute hypothèse qu'il n'est pas sérieusement répliqué, s'agissant de la perte de valeur vénale invoquée, aux écritures de l'hôpital faisant valoir que la valeur de la propriété détenue par la société, loin d'avoir été affectée par les travaux litigieux, n'a cessé d'être réévaluée, ainsi qu'en attesterait la cession, postérieure, par la SCI d'une partie de ses terrains et la réalisation des projets immobiliers dont témoignent les pièces, non contredites, versées aux débats ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier de La Ciotat est fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Marseille a ordonné une expertise en vue de procéder à l'évaluation des préjudices de la SCI d'Arcy et l'a condamné à réparer les dommages permanents de travaux publics liés à la présence de l'extension de ses bâtiments ; que la commune de La Ciotat est, par voie de conséquence, fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal l'a condamnée à garantir le centre hospitalier de la moitié des condamnations prononcées à son endroit ;

Sur les frais d'expertise :

15. Considérant que les frais de l'expertise qui ont été liquidés et taxés à la somme de 4 370 euros TTC, ont été mis par les premiers juges à la charge du centre hospitalier de La Ciotat ; qu'il y a lieu, en l'espèce, de revenir sur la dévolution ainsi arrêtée et de mettre lesdits frais à la charge de la SCI d'Arcy, partie perdante ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que c'est à tort que les premiers juges ont mis à la charge du centre hospitalier de La Ciotat la somme de 1 000 euros à verser à la SCI d'Arcy et la somme de 800 euros à verser à la SCI Les travaux du midi ;

17. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de la SCI d'Arcy, partie tenue aux dépens, la somme de 3 000 euros à verser au centre hospitalier de La Ciotat au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens tant en première instance qu'en appel, la somme de 2 000 euros à la commune de La Ciotat au titre des mêmes frais exposés en appel, ainsi que la somme de 800 euros à la SCI Les travaux du midi au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens tant en première instance qu'en appel ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées au même titre par la SCI d'Arcy ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 2 à 6 du jugement n° 0807752 du tribunal administratif de Marseille du 28 avril 2011 et le jugement n° 0807752 du tribunal administratif de Marseille du 7 février 2013 sont annulés.

Article 2 : Les conclusions de la SCI d'Arcy tendant à la réparation de préjudices résultant de l'abattage d'arbres et les conclusions du centre hospitalier de La Ciotat tendant à ce que la société Les travaux du midi le garantisse de ces condamnations sont rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Article 3 : Le surplus de la demande de la SCI d'Arcy est rejeté.

Article 4 : Les frais de l'expertise ordonnée en première instance, liquidés et taxés à la somme de 4 370 euros TTC sont mis à la charge de la SCI d'Arcy.

Article 5 : La SCI d'Arcy versera la somme de 3 000 euros au centre hospitalier de La Ciotat, la somme de 2 000 euros à la commune de la Ciotat et la somme de 800 euros à la société Les travaux du Midi au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de l'ensemble des parties est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de La Ciotat, à la SCI d'Arcy, à la commune de La Ciotat et à la société Les travaux du midi.

Délibéré après l'audience du 25 juin 2015, où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- M. Firmin, président assesseur,

- Mme Menasseyre, première conseillère.

Lu en audience publique, le 16 juillet 2015.

N° 13MA01389


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award