La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/05/2015 | FRANCE | N°13MA03483

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 29 mai 2015, 13MA03483


Vu la requête, enregistrée le 20 août 2013, présenté pour Mme C...B..., demeurant..., par Me A... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1302103 du 18 juin 2013 par laquelle le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 22 mars 2013 par lequel le recteur de l'académie de Montpellier lui a refusé une prolongation d'activité et l'a admise à la retraite par limite d'âge à compter du 16 juin 2013 ;

2°) de demander à l'administration de produire l'avis de la présidente de l'Univers

ité de Montpellier I ;

3°) d'annuler l'arrêté du recteur d'académie 22 mars 2013 ;

4...

Vu la requête, enregistrée le 20 août 2013, présenté pour Mme C...B..., demeurant..., par Me A... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1302103 du 18 juin 2013 par laquelle le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 22 mars 2013 par lequel le recteur de l'académie de Montpellier lui a refusé une prolongation d'activité et l'a admise à la retraite par limite d'âge à compter du 16 juin 2013 ;

2°) de demander à l'administration de produire l'avis de la présidente de l'Université de Montpellier I ;

3°) d'annuler l'arrêté du recteur d'académie 22 mars 2013 ;

4°) d'enjoindre au recteur de faire droit à sa demande de prolongation d'activité ou à défaut de statuer à nouveau sur sa demande ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Mme B...soutient que :

- ses demandes comportaient un moyen de légalité externe tiré du défaut de motivation qui n'était ni inopérant ni manifestement infondé et des moyens de légalité interne tirés du détournement de pouvoir et de ce que la décision constituerait une sanction déguisée qui sont étayés par des pièces et ne peuvent être qualifiés de moyens manifestement non assortis de faits susceptibles de venir à leur soutien ;

- elle n'a pas été mise à même de formuler des observations avant la prise de décision en méconnaissance du principe général des droits de la défense ;

- la décision n'est fondée que sur des faits très généraux qui ne lui permettent pas d'apprécier les motifs réels de l'administration ;

- le recteur s'est estimé en situation de compétence liée au vu de l'avis négatif rendu par la présidente de l'université dont il appartient à la juridiction de demander la production ;

- le refus de lui accorder une prolongation d'activité méconnaît l'article 1-1 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 dès lors qu'il n'est pas justifié par l'intérêt du service ;

- cette décision constitue une sanction déguisée et est entachée d'un détournement de procédure ;

Vu l'ordonnance et l'arrêté attaqués ;

Vu la lettre du 25 juillet 2014 informant les parties, en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, de la date à partir de laquelle la clôture de l'instruction sera susceptible d'être prononcée et de la date prévisionnelle de l'audience ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 août 2014, présenté par la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui conclut au rejet de la requête ;

Elle fait valoir :

- que l'ordonnance attaquée n'est pas irrégulière ;

- que le recteur n'a pas méconnu sa compétence ;

- que l'arrêté est suffisamment motivé ;

- qu'aucune disposition normative n'obligeait l'administration à présenter des observations orales ;

- que la réorganisation du service a conduit à la création d'un nouveau poste d'ingénieur d'études au service des relations internationales qui ne correspondait pas au profil de Mme B... ;

- que le détournement de pouvoir n'est pas établi ;

Vu l'ordonnance du 18 septembre 2014 prononçant la clôture de l'instruction à la date de son émission, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu, enregistré le 4 février 2015 après clôture de l'instruction, le nouveau mémoire présenté pour MmeB... ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 2015 :

- le rapport de M. Argoud, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Roux, rapporteur public ;

1. Considérant que par un arrêté du 22 mars 2013, le recteur de l'académie de Montpellier a rejeté la demande de prolongation d'activité formulée par Mme B...et l'a admise à la retraite par limite d'âge à compter du 16 juin 2013 ; que, par ordonnance du 18 juin 2013, le président du tribunal administratif de Montpellier a, par application du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, rejeté la demande de Mme B... tendant à l'annulation de cet arrêté, aux motifs que les moyens de légalité externe tirés de l'insuffisante motivation de la décision en litige et de la méconnaissance du principe général des droits de la défense étaient manifestement infondés et que les moyens de légalité interne tirés de la méconnaissance de l'article 1-1 de la loi du 13 septembre 1984 et du détournement de pouvoir étaient n'étaient assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ; que Mme B...relève appel de cette ordonnance ;

Sur la régularité de l'ordonnance du 18 juin 2013 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif (...) peuvent, par ordonnance : / (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. (...) " ;

3. Considérant que la demande de Mme B...était notamment fondée sur un moyen tiré de ce que le refus de la maintenir en activité sur un poste nouvellement créé n'était pas justifié par l'intérêt du service, en méconnaissance de l'article 1-1 de la loi susvisée du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge des fonctionnaires de l'Etat ; que la requérante invoquait à l'appui de ce moyen le fait que la réorganisation du service invoquée par l'administration pour justifier la suppression de son poste avait conduit à la création d'un nouveau poste aux caractéristiques duquel son profil correspondait ; que ce fait, contrairement à ce qu'a retenu l'ordonnance attaquée, n'est pas manifestement insusceptible de venir à l'appui de ce moyen ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit au point 3, que Mme B...est fondée à soutenir que le président du tribunal administratif de Montpellier ne pouvait rejeter sa demande par application des dispositions précitées du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ; qu'il en résulte que l'ordonnance attaquée est entachée d'une irrégularité et qu'elle doit être annulée pour ce motif, en tant qu'elle rejette les conclusions de Mme B...tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 mars 2013 du recteur de l'académie de Montpellier en litige ;

5. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme B...devant le tribunal administratif de Montpellier ;

Sur la légalité de l'arrêté du 22 mars 2013 :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 1-1 de la loi susvisée du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public, issu de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 : " Sous réserve des droits au recul des limites d'âge reconnus au titre des dispositions de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté, les fonctionnaires dont la durée des services liquidables est inférieure à celle définie à l'article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite peuvent, lorsqu'ils atteignent les limites d'âge applicables aux corps auxquels ils appartiennent, sur leur demande, sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique, être maintenus en activité. (...) " ;

7. Considérant que l'arrêté en litige est motivé, d'une part, par l'obligation pour l'administration de respecter le plafond d'emplois qui lui est fixé et, d'autre part, par des mesures de réorganisation prises par l'université en vue de répartir autrement les missions liées au rayonnement international, nécessitant une modification de la couverture en emploi et une autre définition des compétences requises ; que, d'une part, le plafond d'emplois n'est pas, par lui-même, de nature à justifier le refus de faire droit à la demande de prolongation d'activité au-delà de la limite d'âge formulée par MmeB... ; que, d'autre part, il ressort de ses écritures que l'administration a par ailleurs entendu se fonder sur la suppression du poste de Mme B...et sur le fait qu'un nouveau poste d'ingénieur d'études créé au service des relations internationales ne correspondrait pas au profil de personnel administratif de l'intéressée ; que, cependant, il ressort des pièces du dossier que Mme B...a rempli les fonctions de chargée du développement international des études et des formations doctorales entre les années 2001 et 2012, assurant ainsi la coordination et la gestion de l'ensemble du service des relations internationales, avant d'être plus spécifiquement chargée en 2012 du développement international des études et des formations doctorales, l'administration reconnaissant qu'elle a donné entière satisfaction dans ses fonctions successives ; que, dans ces conditions, et alors que l'administration ne fait valoir aucun élément de nature à établir que le poste nouvellement créé de chargé de la coopération internationale nécessiterait un savoir-faire spécifique dont Mme B... serait dépourvue, celle-ci apparaît fondée à soutenir que le motif ainsi avancé n'est pas de nature à établir son inaptitude à occuper ce poste et qu'il ne suffit pas, par suite, à fonder, au regard de l'intérêt du service, le refus de la maintenir en service au-delà de la limite d'âge ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment d'attestations produites par MmeB..., auxquelles l'administration n'apporte aucune contradiction sérieuse, relatives aux séances du conseil d'administration de l'université des 5 juin et 3 juillet 2012, que son changement d'affectation a été présenté comme étant justifié, sans autre précision, par de possibles fautes qu'elle aurait commises ; que Mme B...fait valoir, sans être davantage sérieusement contredite sur ce point, que son changement d'affectation en 2012 a été décidé en raison de critiques qu'elle avait émises concernant l'attribution et le financement d'un poste d'agent contractuel à l'épouse du vice-président chargé des relations internationales ; que, dans ces circonstances, Mme B...apparaît fondée à soutenir que le refus de la maintenir en activité au-delà de la limite d'âge n'est pas justifié par des motifs tirés de l'intérêt du service ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...est fondée à soutenir que l'arrêté du 22 mars 2013, par lequel le recteur de l'académie de Montpellier a rejeté sa demande de prolongation d'activité et l'a admise à la retraite par limite d'âge à compter du 16 juin 2013 est illégale et à en demander l'annulation ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Considérant que le présent arrêt n'implique pas nécessairement, pour l'application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, que Mme B...soit autorisée à prolonger son activité au-delà de la limite d'âge et réintégrée à cette fin, mais seulement que l'administration réexamine sa demande au regard des motifs du présent arrêt et de l'ensemble des conditions auxquelles les dispositions précitées de la loi du 13 septembre 1984 subordonnent une telle prolongation ; qu'il y a lieu de fixer à deux mois le délai dans lequel ce réexamen devra avoir lieu ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

10. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme B...et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L'ordonnance du président du tribunal administratif de Montpellier du 18 juin 2013 est annulée.

Article 2 : L'arrêté du recteur de l'académie de Montpellier du 22 mars 2013 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint à l'autorité compétente de réexaminer la demande de Mme B...et de prendre une nouvelle décision dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat (ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche) versera à Mme B...une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Montpellier.

''

''

''

''

2

N° 13MA03483


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-10-01 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Mise à la retraite pour ancienneté ; limites d'âge.


Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: M. Jean-Marie ARGOUD
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SCM MAZAS - ETCHEVERRIGARAY

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 29/05/2015
Date de l'import : 11/06/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 13MA03483
Numéro NOR : CETATEXT000030664848 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-05-29;13ma03483 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award