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24/04/2015 | FRANCE | N°13MA02076

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 24 avril 2015, 13MA02076


Vu la requête, enregistrée le 27 mai 2013 au greffe de la Cour, sous le n° 13MA02076, présentée, d'une part, pour M. C...B..., demeurant..., et, d'autre part, pour l'association Avenir d'Alet représentée par son président en exercice, dont le siège est Impasse du Séminaire à Alet-les-Bains (11580), par la SCP Darribère ;

M. B...et l'association Avenir d'Alet demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103845, n° 1103854, n° 1103892 et n° 1103904 en date du 26 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes tendant

l'annulation des délibérations du conseil municipal de la commune d'Alet-les-...

Vu la requête, enregistrée le 27 mai 2013 au greffe de la Cour, sous le n° 13MA02076, présentée, d'une part, pour M. C...B..., demeurant..., et, d'autre part, pour l'association Avenir d'Alet représentée par son président en exercice, dont le siège est Impasse du Séminaire à Alet-les-Bains (11580), par la SCP Darribère ;

M. B...et l'association Avenir d'Alet demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103845, n° 1103854, n° 1103892 et n° 1103904 en date du 26 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des délibérations du conseil municipal de la commune d'Alet-les-Bains du 17 février 2011 intitulées " création d'une régie de recettes Point Accueil Abbaye " et " création d'un poste de travail saisonnier : Point Accueil Abbaye " ;

2°) d'annuler les deux délibérations susvisées du conseil municipal de la commune d'Alet-les-Bains ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Alet-les-Bains une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice ;

Ils soutiennent que :

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2015 :

- le rapport de Mme Hameline, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Revert, rapporteur public ;

- les observations de M. Dargegen, président de l'association Avenir d'Alet et celles de Me A... de la SCP Vinsonneau-Paliès Noy Gauer pour la commune d'Alet-les-Bains ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 16 avril 2015, présentée par la SCP Darribère pour M. B...et l'association Avenir d'Alet ;

1. Considérant que le conseil municipal de la commune d'Alet-les-Bains a adopté deux délibérations le 17 février 2011, à la suite de la dissolution de l'office du tourisme associatif de la commune, portant respectivement l'objet de " création d'une régie de recettes : Point Accueil Abbaye " et de " création d'un poste saisonnier : Point Accueil Abbaye " ; que M. C...B..., d'une part, et l'association Avenir d'Alet, d'autre part, ont demandé l'annulation de chacune de ces délibérations respectivement au tribunal administratif de Montpellier ; que celui-ci, après avoir joint les quatre instances dont il était saisi, a rejeté leurs demandes ainsi que leurs conclusions accessoires par un même jugement du 26 mars 2013 ; que M. B...et l'association Avenir d'Alet interjettent appel de ce jugement ;

Sur la recevabilité des écritures en défense présentées devant la Cour pour la commune d'Alet-les-Bains :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le conseil municipal d'Alet-les-Bains a délégué au maire de la commune le pouvoir d'ester en justice en vertu de l'article L. 2122-22 16° du code général des collectivités territoriales, par délibération du 7 avril 2014 régulièrement publiée ainsi qu'il résulte d'un certificat d'affichage du 9 avril 2014, et transmise au contrôle de légalité ; qu'en outre le maire d'Alet-les-Bains a décidé de défendre les intérêts de la commune dans la présente instance, sur le fondement de la délégation ainsi consentie par le conseil par une décision formalisée du 24 mars 2015 elle-même transmise au contrôle de légalité et publiée ; que, par suite, les appelants ne sont pas fondés en tout état de cause à demander que les écritures en défense de la commune d'Alet-les-Bains devant la Cour soient écartées comme irrecevables ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement contesté ;

Sur la recevabilité des demandes de M. B...et de l'association Avenir d'Alet devant le tribunal administratif de Montpellier :

3. Considérant, en premier lieu, que l'association Avenir d'Alet a notamment pour objet, selon l'article 2 de ses statuts, " la promotion du tourisme et de toutes les activités y afférentes ", " la promotion des activités culturelles (...) et notamment les activités liées au patrimoine historique et culturel d'Alet ", ainsi que la " défense des contribuables d'Alet " notamment par " l'action pour la mise en valeur des ressources communales dans l'intérêt public " et " l'action pour une saine gestion des deniers publics " ; que, par suite, elle justifie de son intérêt pour agir contre les délibérations du conseil municipal d'Alet-les-Bains du 17 février 2011 relatives à l'organisation du nouveau " Point Accueil Abbaye " communal principalement dédié à l'ouverture au public du patrimoine historique des ruines de l'abbaye d'Alet et à la promotion de sites et produits culturels du " pays cathare " ;

4. Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. C...B..., habitant de la commune d'Alet-les-Bains, était jusqu'à son licenciement économique le 21 septembre 2010 salarié permanent de l'association de l'office du tourisme d'Alet dissoute par décision de son assemblée générale du 19 novembre 2010, et qu'il est constant qu'il était chargé à ce titre de la gestion notamment des activités d'accueil et de billetterie touristique de l'abbaye d'Alet sur lesquelles portent les deux délibérations en litige ; que l'intéressé a demandé au maire de la commune à bénéficier d'un transfert de son contrat de travail de ce fait en février 2011, tout en postulant sur un futur emploi communal du service " Point Accueil Abbaye " ; que, dès lors, et sans qu'ait d'influence à cet égard l'issue du contentieux parallèlement introduit par l'intéressé devant le juge judiciaire quant à l'existence d'un transfert d'entité économique au sens de l'article L. 1224-3 du code du travail, M. B...doit être regardé comme justifiant d'un intérêt à agir suffisant dans les circonstances de l'espèce pour former un recours pour excès de pouvoir contre les délibérations du conseil municipal portant " création d'un emploi saisonnier " et d'une " régie de recettes " au nouveau " Point Accueil Abbaye " communal eu égard à l'objet et aux effets de ces délibérations ;

5. Considérant qu'il suit de là que les fins de non-recevoir opposées aux demandeurs par la commune d'Alet-les-Bains en première instance doivent être écartées ;

Sur la légalité des délibérations du conseil municipal d'Alet-les-Bains du 17 février 2011 :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 33 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable à la date de la délibération contestée : " Les comités techniques paritaires sont consultés pour avis sur les questions relatives : / 1° A l'organisation des administrations intéressées ; / 2° Aux conditions générales de fonctionnement de ces administrations (...). " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des termes des délibérations en litige ainsi que des explications du maire d'Alet-les-Bains portées au procès-verbal de la séance du conseil municipal du 17 février 2011, que les deux délibérations intitulées " création d'un poste de travail saisonnier : Point Accueil Abbaye " et " création d'une régie de recettes : Point Accueil Abbaye ", ont été présentées de manière simultanée et complémentaire à l'approbation du conseil municipal en conséquence de la cessation de l'activité de l'office du tourisme associatif fin 2010, afin d'assurer à l'avenir en régie directe les missions de billetterie des visites de l'abbaye d'Alet et de vente de produits directement liés à ce " service public " dans la boutique attenante, ainsi que le requiert l'adhésion de la commune d'Alet-les-Bains à l'association des sites du pays cathare, par la proposition d'une carte intersites et de produits culturels ; qu'ainsi, ces deux délibérations, dont il est constant qu'elles n'ont été précédées d'aucune autre décision de l'assemblée délibérante relative à la création ou au fonctionnement du " Point Accueil Abbaye ", ont pour effet de créer un nouveau service public communal, ainsi d'ailleurs que le confirme la lettre adressée par le maire d'Alet-les-Bains à M. B...le 22 février 2011, immédiatement après leur adoption, précisant notamment que le " Point Accueil Abbaye " constitue un " nouveau service appelé à assurer l'accueil des visiteurs des ruines de l'abbaye Notre-Dame d'Alet " et " dédié à titre principal à la gestion des visites des ruines de l'abbaye " ; que les délibérations en litige définissent elles-mêmes, au moins de manière sommaire, les missions, l'effectif, la période d'ouverture annuelle, les ressources ainsi que l'organisation comptable de ce service ; que, par suite, ces délibérations constituaient des décisions affectant l'organisation et le fonctionnement de la commune d'Alet-les-Bains au sens des dispositions de l'article 33 de la loi du 26 janvier 1984 et nécessitaient de ce fait la consultation préalable du comité technique ; que la circonstance que le conseil des Prud'hommes, saisi par M.B..., ait estimé par une décision au demeurant frappée d'appel en date du 2 octobre 2012 que la reprise de l'activité du " Point Accueil Abbaye " par la commune n'entrait pas dans les prévisions de l'article L. 1224-3 du code du travail, demeure par elle-même sans incidence sur la portée susmentionnée des délibérations en litige et sur l'obligation de consultation qui en résulte par application des dispositions de la loi du 26 janvier 1984, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges ; que, par suite, les requérants sont fondés à soutenir que ceux-ci ont entaché leur décision d'erreur de droit en estimant que les délibérations en litige n'avaient pas à être soumises à l'avis préalable du comité technique ;

8. Considérant que, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité de la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ; que l'application de ce principe n'est pas exclue en cas d'omission d'une procédure obligatoire, à condition qu'une telle omission n'ait pas pour effet d'affecter la compétence de l'auteur de l'acte ;

9. Considérant qu'il est constant que le comité technique n'a pas été consulté par le maire d'Alet-les-Bains, ce qui entache ainsi d'irrégularité les délibérations du 17 février 2011 relatives au " Point Accueil Abbaye " ; que la consultation obligatoire du comité technique préalablement à l'adoption d'une délibération modifiant l'organisation des services de la commune, qui a notamment pour objet d'éclairer celle-ci sur la position des représentants du personnel, constitue pour ces derniers une garantie ; qu'une telle omission de consultation préalable a ainsi constitué en l'espèce une irrégularité de nature à entacher la légalité des délibérations attaquées ;

10. Considérant, au surplus, qu'aux termes de l'article R. 1617-6 du code général des collectivités territoriales relatif aux régies de recettes : " La nature des produits à encaisser est fixée par l'acte constitutif de la régie. (...). " ; que l'article R. 1617-7 du même code prévoit que " Les régisseurs encaissent les recettes réglées par les redevables dans les mêmes conditions que les comptables publics. (...). ", et que l'article R. 1617-8 de ce code prévoit que : " Les régisseurs versent et justifient les recettes encaissées par leurs soins au comptable public assignataire dans les conditions fixées par l'acte constitutif de la régie et au minimum une fois par mois. " ;

11. Considérant que le conseil municipal d'Alet-les-Bains a institué, par la délibération litigieuse portant sur l'organisation financière et comptable du " Point Accueil Abbaye ", une régie de recettes afin d'encaisser au profit du budget de la commune le produit des droits de visite du monument, comme le lui permettent les dispositions des articles R. 1617-1 et suivants du code général des collectivités territoriales ; que, toutefois, il ressort des termes de cette délibération que le service municipal nouvellement créé, dépourvu de la personnalité morale et de l'autonomie financière, doit avoir pour mission de percevoir auprès des usagers non seulement des fonds soumis à la comptabilité publique et destinés au budget communal par le biais de la régie de recettes, ainsi que le prévoient les articles 3 et 5 de la délibération, mais également des fonds destinés à l'association régie par la loi du 1er juillet 1901 des sites du pays cathare, personne morale de droit privé ; que la nature exacte de ces produits et les conditions du paiement, de l'encaissement et de la comptabilisation des fonds ainsi perçus par des agents communaux pour le compte d'une association, ne sont toutefois aucunement définies par l'article 4 ou par toute autre disposition de la délibération, alors par ailleurs que la commune d'Alet-les-Bains n'établit ni même ne soutient qu'une convention à cet effet la lierait à cette personne morale, la commune se bornant à faire état de sa demande d'adhésion à l'association des sites du pays cathare par délibération du 14 septembre 2009 ; que, si la commune invoque devant la Cour la faculté dont disposent les collectivités territoriales, en vertu de l'instruction codificatrice du 21 avril 2006 relative aux régies du secteur public local, de percevoir des fonds pour autrui par le biais d'une régie de recettes, ceux-ci étant alors comptabilisés sur un compte de tiers avant leur reversement par le comptable public à leur destinataire final, il ne ressort ni de la délibération en litige ni des autres pièces du dossier que tel serait le dispositif adopté en l'espèce, alors notamment que la vente de produits effectuée pour le compte de l'association des sites du pays cathare n'est pas incluse dans le champ de la régie de recettes définie par ses articles 3 et 5, et que les requérants soutiennent au surplus sans être contredits qu'une part du prix de vente devait être conservée par la commune en contrepartie de sa prestation pour le compte de l'association ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance par la délibération en cause des dispositions précitées des articles R. 1617-6 et suivants du code général des collectivités territoriales doit également être accueilli ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, ni de faire droit à la demande de communication de pièces formée par les requérants devant la Cour sur le fondement de l'article R. 611-10 du code de justice administrative, et sans qu'il soit par ailleurs besoin de tenir compte de la note en délibéré produite pour les requérants après l'audience, M. B... et l'association Avenir d'Alet sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des délibérations du conseil municipal d'Alet-les-Bains du 17 février 2011 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune d'Alet-les-Bains une somme globale de 2 000 euros à verser aux requérants en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 26 mars 2013 et les délibérations n° 1 et n° 2 du conseil municipal de la commune d'Alet-les-Bains du 17 février 2011 sont annulés.

Article 2 : La commune d'Alet-les-Bains versera une somme globale de 2 000 (deux mille) euros à M. B... et à l'association l'Avenir d'Alet en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B..., à l'association Avenir d'Alet et à la commune d'Alet-les-Bains.

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N° 13MA02076


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA02076
Date de la décision : 24/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Collectivités territoriales - Commune - Organisation de la commune - Organes de la commune - Conseil municipal - Délibérations - Délibérations intervenues à la suite d'une procédure irrégulière.

Collectivités territoriales - Commune - Attributions - Services communaux.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Marie-Laure HAMELINE
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : CABINET DARRIBERE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-04-24;13ma02076 ?
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