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15/12/2009 | FRANCE | N°08MA02522

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 15 décembre 2009, 08MA02522


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 20 mai 2008 et confirmée par l'original le 22 mai 2008, présentée pour la SARL MENTON DISTRIBUTION dont le siège est sis 38 rue Patourneaux à Menton (06500), par Me Serpentier-Linares, de la Selafa Fidal ; la société MENTON DISTRIBUTION demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0505441 du 13 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à obtenir la restitution des droits de taxe sur les achats de viande auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er octobre 2001 au 3

1 octobre 2003 assortis des intérêts moratoires ;

2°) de lui accorder l...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 20 mai 2008 et confirmée par l'original le 22 mai 2008, présentée pour la SARL MENTON DISTRIBUTION dont le siège est sis 38 rue Patourneaux à Menton (06500), par Me Serpentier-Linares, de la Selafa Fidal ; la société MENTON DISTRIBUTION demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0505441 du 13 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à obtenir la restitution des droits de taxe sur les achats de viande auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er octobre 2001 au 31 octobre 2003 assortis des intérêts moratoires ;

2°) de lui accorder la restitution des sommes versées depuis octobre 2001 d'un montant de 26 106,44 euros, assorties des intérêts moratoires ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'article 88-1 de la Constitution ;

Vu le traité instituant la Communauté Européenne ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code rural ;

Vu l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 ;

Vu la loi n° 96-1139 du 26 décembre 1996 ;

Vu la loi n° 2000-1353 du 30 décembre 2000, notamment son article 35 ;

Vu le code de justice administrative et l'arrêté d'expérimentation du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 ;

Vu la décision du 14 septembre 2005 du directeur des services fiscaux des Alpes-Maritimes ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er décembre 2009 :

- le rapport de Mme Haasser, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Emmanuelli, rapporteur public ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 87 du traité instituant la Communauté européenne : Sauf dérogations prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre Etats membres, les aides accordées par les Etats ou au moyen de ressources d'Etat sous quelque forme que ce soit, qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions ; qu'aux termes de l'article 88 du même traité : 1. La Commission procède avec les Etats membres à l'examen permanent des régimes d'aides existant dans ces Etats. (...) / 2. Si (...) la Commission constate qu'une aide accordée par un Etat ou au moyen de ressources d'Etat n'est pas compatible avec le marché commun aux termes de l'article 87 (...) elle décide que l'Etat intéressé doit la supprimer ou la modifier (...) / 3. La Commission est informée, en temps utile, pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. Si elle estime qu'un projet n'est pas compatible avec le marché commun, aux termes de l'article 87, elle ouvre, sans délai, la procédure prévue au paragraphe précédent. L'Etat membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées, avant que cette procédure ait abouti à une décision finale ;

Considérant qu'il résulte de ces stipulations que, s'il ressortit à la compétence exclusive de la Commission européenne de décider, sous le contrôle de la Cour de justice des Communautés européennes, si une aide de la nature de celles mentionnées à l'article 87 du traité est, ou non, compte tenu des dérogations prévues par ce traité, compatible avec le marché commun, il incombe, en revanche, aux juridictions nationales de sanctionner, le cas échéant, l'invalidité de dispositions de droit national qui auraient institué ou modifié une telle aide en méconnaissance de l'obligation, qu'impose aux Etats membres le paragraphe 3 de l'article 88 du traité, d'en notifier à la Commission, préalablement à toute mise à exécution, le projet ; que l'exercice de ce contrôle implique, notamment, de rechercher si les dispositions dont l'application est contestée instituent un régime d'aide, ou si une taxe fait partie intégrante d'une telle aide ;

Considérant qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, d'une part, que les taxes n'entrent pas dans le champ d'application des stipulations précitées du traité instituant la Communauté européenne concernant les aides d'Etat, à moins qu'elles constituent le mode de financement d'une mesure d'aide, de sorte qu'elles font partie intégrante de cette mesure, d'autre part que, pour que l'on puisse juger qu'une taxe, ou une partie d'une taxe, fait partie intégrante d'une mesure d'aide, il doit exister un lien d'affectation contraignant entre la taxe et l'aide en vertu de la réglementation nationale pertinente, en ce sens que le produit de la taxe est nécessairement affecté au financement de l'aide ;

Considérant que l'article 1er de la loi du 26 décembre 1996 relative à la collecte et à l'élimination des cadavres d'animaux et des déchets d'abattoirs et modifiant le code rural a inséré, dans le code général des impôts, un article 302 bis ZD instituant, à compter du 1er janvier 1997, une taxe sur les achats de viande due par les personnes qui réalisent des ventes au détail de viande, dont le produit était affecté à un fonds faisant l'objet d'une comptabilité distincte, ayant pour objet de financer la collecte et l'élimination des cadavres d'animaux et des saisies d'abattoirs reconnus impropres à la consommation humaine et animale, activités correspondant au service public de l'équarrissage défini à l'article 264 du code rural en vigueur au cours des années d'imposition en litige ; que le II de l'article 35 de la loi du 30 décembre 2000 de finances rectificative pour 2000, entré en vigueur le 1er janvier 2001, a limité à la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 2000, l'affectation de la taxe sur les achats de viande au fonds mentionné ci-dessus ; qu'en conséquence, à compter du 1er janvier 2001, en l'absence de dispositions prévoyant l'affectation de cette taxe, celle-ci est devenue une recette du budget général de l'Etat ; qu'à compter de cette même date, le service public de l'équarrissage a été financé au moyen d'une dotation inscrite au budget général de l'Etat ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 18 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances, en vigueur au cours des années d'imposition en litige : Il est fait recette du montant intégral des produits, sans contraction entre les recettes et les dépenses. L'ensemble des recettes assurant l'exécution de l'ensemble des dépenses, toutes les recettes et toutes les dépenses sont imputées à un compte unique, intitulé budget général ; qu'en vertu du principe à valeur constitutionnelle d'universalité budgétaire résultant de ces dispositions, les recettes et les dépenses doivent figurer au budget de l'Etat pour leur montant brut, sans être contractées, et l'affectation d'une recette déterminée à la couverture d'une dépense déterminée est interdite, sous réserve des exceptions prévues au second alinéa de l'article 18 ; qu'en application de ce principe et de la législation nationale relative à la taxe sur les achats de viande, et sans qu'il soit besoin de se référer aux travaux parlementaires dont est issu l'article 35 de la loi du 30 décembre 2000, à compter du 1er janvier 2001, il n'existait juridiquement aucun lien d'affectation contraignant entre la taxe et le service public de l'équarrissage, et aucun rapport entre le produit de la taxe et le montant du financement public attribué à ce service ; qu'en exécution des règles ainsi applicables, à compter de cette même date, la taxe sur les achats de viande était une recette du budget général, dépourvue de tout lien avec le budget du ministère de l'agriculture et la dotation inscrite à ce budget servant à financer le service public de l'équarrissage ; que la taxe sur les achats de viande n'entrant pas, ainsi, à compter du 1er janvier 2001, dans le champ d'application des stipulations précitées du traité instituant la Communauté européenne concernant les aides d'Etat, la société MENTON DISTRIBUTION ne peut invoquer, au soutien de sa demande en restitution de l'imposition en litige, une éventuelle méconnaissance par les autorités françaises, à l'occasion de la modification du mode de financement du service public de l'équarrissage résultant des dispositions de l'article 35 de la loi du 30 décembre 2000, des obligations qu'imposent la première et la dernière phrase du paragraphe 3 de l'article 88 du traité instituant la Communauté européenne ;

Considérant, par ailleurs, que compte tenu de l'absence de lien d'affectation contraignant entre la taxe sur les achats de viande et le service public de l'équarrissage à compter du 1er janvier 2001, sont inopérants au soutien d'une demande en restitution de la taxe sur les achats de viande acquittée au titre des années 2001 à 2003, le moyen tiré de ce que le régime d'aide constitué par le service public de l'équarrissage aurait dû être notifié à l'origine à la Commission européenne et le moyen tiré de ce que le service public de l'équarrissage méconnaîtrait le principe pollueur-payeur ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 25 du traité instituant la Communauté européenne : Les droits de douane à l'importation et à l'exportation ou taxes d'effet équivalent sont interdits entre les Etats membres. Cette interdiction s'applique également aux droits de douane à caractère fiscal (...) ; que, pour qu'une taxe puisse être qualifiée de taxe d'effet équivalent à un droit de douane interdite par l'article 25 précité du traité, les recettes procurées par cette taxe doivent être affectées au profit des seuls produits nationaux ; que la taxe sur les achats de viande ayant été, ainsi qu'il a été dit, affectée à compter du 1er janvier 2001 au budget général de l'Etat, compte tenu du principe d'universalité budgétaire, les moyens tirés de ce qu'elle constituerait une taxe d'effet équivalent à un droit de douane ne peuvent qu'être écartés ;

Considérant, en troisième lieu, que si la société MENTON DISTRIBUTION invoque l'autorité de la chose jugée par la jurisprudence communautaire et nationale dont elle se prévaut, ce moyen doit, faute d'identité d'objet et de parties, être rejeté ;

Considérant, en dernier lieu, que la société MENTON DISTRIBUTION se prévaut des énonciations d'une note à diffusion restreinte du 6 janvier 2004 émanant du chef du service juridique de la direction générale des impôts ; que cette note à diffusion restreinte, et par ailleurs postérieure à la mise en recouvrement des impositions en litige, présente le caractère d'un document interne à l'administration qui n'a pas fait l'objet de la part de celle-ci d'une diffusion destinée aux contribuables ; que, dès lors, c'est à bon droit que le Tribunal administratif de Nice a estimé que la société MENTON DISTRIBUTION ne peut utilement s'en prévaloir ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société MENTON DISTRIBUTION n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement qu'elle attaque, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société MENTON DISTRIBUTION n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement qu'elle attaque, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions de la société MENTON DISTRIBUTION tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la société MENTON DISTRIBUTION la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société MENTON DISTRIBUTION est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société MENTON DISTRIBUTION et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

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N° 08MA02522 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA02522
Date de la décision : 15/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. RENOUF
Rapporteur ?: Mme Anita HAASSER
Rapporteur public ?: M. EMMANUELLI
Avocat(s) : FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2009-12-15;08ma02522 ?
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