Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 24 juillet 2006 sous le n° 06MA02158, présentée par la SCP d'avocats Piwnica-Molinié, pour Mme , ... ;
Mme demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement n° 0500838 du 17 mars 2006 du Tribunal administratif de Bastia, en tant qu'il l'a condamnée à payer une amende de 300 euros dans le cadre des poursuites de contravention de grande voirie diligentées à son encontre, en raison de l'implantation de deux abris à bateaux sans autorisation sur le domaine public maritime ;
2°/ de la relaxer des poursuites relatives à l'action publique en matière de contravention de grande voirie, diligentées à son encontre par le préfet de la Haute-Corse ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code du domaine de l'Etat ;
Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;
Vu le code pénal ;
Vu l'ordonnance sur la marine d'août 1681 ;
Vu la loi n° 63-1178 du 28 novembre 1963 relative au domaine public maritime modifiée par le décret n° 72-879 du 19 septembre 1972 ;
Vu le décret n° 2003-172 du 25 février 2003 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 mai 2008 ;
- le rapport de Mme Chenal Peter, rapporteur ;
- et les conclusions de Mme Steck-Andrez, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'un procès-verbal de contravention de grande voirie a été dressé le 30 juin 2005 à l'encontre de Mme , gérante de la SCI du Cap, détentrice d'une propriété au droit de laquelle deux abris à bateaux étaient implantés sans autorisation sur le domaine public maritime, au lieu-dit Plage de la Roya à Saint-Florent ; que par jugement en date du 17 mars 2006, le Tribunal administratif de Bastia a constaté le non-lieu à statuer sur les poursuites de contravention de grande voirie diligentées à son encontre par le préfet de la Haute-Corse, dès lors que Mme avait procédé à la remise en état des lieux et l'a condamnée au paiement d'une amende de 300 euros ; que Mme relève appel de ce jugement en tant qu'il l'a condamnée à payer ladite amende ;
Sur l'intervention de l'association U Levante :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 142-1 du code de l'environnement : «Toute association ayant pour objet la protection de la nature et de l'environnement peut engager des instances devant les juridictions administratives pour tout grief se rapportant à celle-ci. Toute association de protection de l'environnement agréée au titre de l'article L. 141-1 justifie d'un intérêt pour agir contre toute décision administrative ayant un rapport direct avec son objet et ses activités statutaires et produisant des effets dommageables pour l'environnement sur tout ou partie du territoire pour lequel elle bénéficie de l'agrément dès lors que cette décision est intervenue après la date de son agrément» ; qu'aux termes de l'article L. 142-2 du même code : «Les associations agréées mentionnées à l'article L. 141-2 peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits portant un préjudice direct ou indirect aux intérêts collectifs qu'elles ont pour objet de défendre et constituant une infraction aux dispositions législatives relatives à la protection de la nature et de l'environnement, à l'amélioration du cadre de vie, à la protection de l'eau, de l'air, des sols, des sites et paysages, à l'urbanisme, ou ayant pour objet la lutte contre les pollutions et les nuisances, la sûreté nucléaire et la radioprotection, ainsi qu'aux textes pris pour leur application» ;
Considérant que l'association U Levante, qui a pour objet notamment la protection des sites et des paysages et les actions visant à protéger l'intégrité du littoral, est agréée au titre de l'article L. 142-1 du code de l'environnement pour les départements de Corse du Sud et de Haute-Corse ; que par suite, ladite association est donc recevable à se prévaloir d'un droit auquel la décision à prendre est susceptible de préjudicier ; que, dans ces conditions, il y a lieu d'admettre son intervention au soutien des conclusions du ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durable, qui tendent au rejet de la requête ;
Sur l'action publique :
Considérant que l'article 2, titre VII, livre IV de l'ordonnance royale d'août 1681 fait défense à toutes personnes de bâtir sur les rivages de la mer, d'y planter aucuns pieux, ni faire aucuns ouvrages qui puissent porter préjudice à la navigation, à peine de démolition des ouvrages, de confiscation de matériaux et d'amende arbitraire ; qu'aux termes de l'article L. 28 du code du domaine de l'Etat, alors applicable : Nul ne peut, sans autorisation délivrée par l'autorité compétente, occuper une dépendance du domaine public national ou l'utiliser dans des limites excédant le droit d'usage qui appartient à tous. Le service des domaines constate les infractions aux dispositions de l'alinéa précédent en vue de poursuivre, contre les occupants sans titre, le recouvrement des indemnités correspondant aux redevances dont le Trésor a été frustré, le tout sans préjudice de la répression des contraventions de grande voirie ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 25 février 2003 susvisé relatif aux peines d'amende applicables aux infractions de grande voirie commises sur le domaine public maritime en dehors des ports : «Toute infraction en matière de grande voirie commise sur le domaine public maritime en dehors des ports, et autres que celles concernant les amers, feux, phares et centres de surveillance de la navigation maritime prévues par la loi du 27 novembre 1987 susvisée, est punie de la peine d'amende prévue par l'article 131-13 du code pénal pour les contraventions de la 5ème classe. En cas de récidive, l'amende est celle prévue pour la récidive des contraventions de la 5ème classe par les articles 132-11 et 132-15 du code pénal. L'amende est appliquée autant de fois qu'il y a de contrevenants» ; que l'article 131-13 du code pénal dispose que le montant de l'amende est de «1 500 euros au plus pour les contraventions de la 5ème classe, montant qui peut être porté à 3 000 euros en cas de récidive lorsque le règlement le prévoit, hors les cas où la loi prévoit que la récidive de la contravention constitue un délit» ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et en particulier du procès-verbal dressé le 30 juin 2005 par un agent assermenté de la direction départementale de l'équipement que les deux abris à bateaux établis sans autorisation à une date indéterminée sont situés au droit de la propriété appartenant à la SCI Le Cap, gérée par Mme , et qu'ils empiètent sur le domaine public maritime ; que cette occupation du domaine public sans autorisation, qui n'est pas contestée, est constitutive d'une contravention de grande voirie, alors même que l'empiètement sur le domaine public n'est que partielle ; qu'elle doit être réprimée conformément aux dispositions de l'ordonnance du 3 août 1681 susmentionnée, notamment en condamnant le contrevenant au paiement d'une amende ; que l'action pénale n'est pas devenue sans objet à la suite de la démolition des ouvrages litigieux, contrairement à l'action domaniale ; qu'enfin, eu égard au barème des amendes fixées en la matière, qui correspond à celui des contraventions de la 5ème classe, et qui peut s'élever jusqu'à 1 500 euros, le tribunal administratif a fait une juste appréciation du montant de l'amende infligée à Mme-, dans les circonstances de l'espèce, en tenant compte de la remise en état du site ; que, par suite, Mme n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bastia l'a condamnée au paiement d'une amende de 300 euros ;
Considérant que la Cour ne peut aggraver la situation de Mme en lui infligeant une amende d'un montant plus élevé à celui qui avait été retenu par les premiers juges ; que dès lors, les conclusions de l'association U Levante tendant à la condamnation de Mme à payer une amende proportionnelle à l'infraction commise ne sont, en tout état de cause, pas recevables ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : «Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation» ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions susmentionnées de l'association U Levante ;
D E C I D E :
Article 1er : L'intervention de l'association U Levante est admise.
Article 2 : La requête de Mme est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de l'association U Levante tendant à la majoration du montant de l'amende infligée à Mme et à sa condamnation au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme , au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire et à l'association U Levante.
N° 06MA02158 2
SR