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29/06/2004 | FRANCE | N°01MA02282

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4eme chambre-formation a 3, 29 juin 2004, 01MA02282


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 1er octobre 2001 sous le n° 01MA02282, présentée pour la SOCIETE GAGNERAUD CONSTRUCTION, dont le siège social est situé ..., prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié es qualité au dit siège, par Me X..., avocat ;

La SOCIETE GAGNERAUD CONSTRUCTION demande à la Cour :

1°/ de réformer le jugement du 29 juin 2001, par lequel le Tribunal administratif de Nice n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la condamnation de la commune de Pégoma

s à lui payer la somme de 1.272.589,08 F avec les intérêts moratoires à compt...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 1er octobre 2001 sous le n° 01MA02282, présentée pour la SOCIETE GAGNERAUD CONSTRUCTION, dont le siège social est situé ..., prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié es qualité au dit siège, par Me X..., avocat ;

La SOCIETE GAGNERAUD CONSTRUCTION demande à la Cour :

1°/ de réformer le jugement du 29 juin 2001, par lequel le Tribunal administratif de Nice n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la condamnation de la commune de Pégomas à lui payer la somme de 1.272.589,08 F avec les intérêts moratoires à compter du 1er octobre 1995 et les intérêts des intérêts ;

2°/ de condamner la commune de Pégomas à lui payer la somme de 707.910,70 F assortie des intérêts moratoires et des intérêts des intérêts ;

3°/ de condamner la commune de Pégomas au remboursement des frais d'expertise ainsi qu'à lui payer la somme de 15.000 F sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative et les frais de timbre ;

Elle soutient que les travaux sur la route départementale 209, qui ne lui ont pas été payés, ont pourtant été réalisés suite à quatre devis acceptés par la commune ; que la totalité des travaux qu'elle a été amenée à facturer lui ont été commandés par la commune ; que ces travaux, réellement effectués, nécessaires et utiles doivent lui être payés ; qu'il n'est pas acceptable que la commune se prévale d'une procédure pénale dans laquelle son maire était poursuivi en qualité d'auteur principal alors qu'elle n'était elle-même que complice ; qu'il suffirait à l'administration de systématiquement violer les règles légales dans l'attribution des marchés pour pouvoir bénéficier de travaux gratis ; qu'il est inexact de donner une connotation fautive au montage illicite de l'opération ; que si les règles formelles ont été violées c'est uniquement dans l'intérêt de la commune et de ses concitoyens ; que l'efficacité des travaux réalisés a été démontrée ; qu'un appel d'offres aurait entraîné la perte des subventions du Conseil Général ; qu'il est anormal que la faute ne soit retenue qu'à son encontre alors qu'elle n'a fait qu'exécuter les ordres qui lui ont été donnés ; que la position de la mairie pour éviter de payer des travaux utiles, à leur juste prix, consiste à invoquer sa propre turpitude ; que dans une autre affaire similaire, la commune a été condamnée à son profit ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré au greffe le

13 octobre 2003, présenté pour la SOCIETE GAGNERAUD CONSTRUCTION ; celle-ci persiste dans ses écritures ; elle demande, en outre, la capitalisation des intérêts à la date du présent mémoire ;

Vu le mémoire en défense, enregistré au greffe le 22 décembre 2003, présenté pour la commune de Pégomas, représentée par son maire en exercice à ce dûment habilité par délibération du conseil municipal du

10 avril 2002, par la Selarl d'avocats Burlett-Plénot-Suarès ;

La commune de Pégomas demande à la Cour, d'une part, de rejeter la requête et, d'autre part, de condamner la SOCIETE GAGNERAUD CONSTRUCTION à lui payer la somme de 2.300 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que l'ENTREPRISE GAGNERAUD a de toute évidence organisé un détournement manifeste du code des marchés publics pour la réalisation de travaux qui ne présentaient aucun caractère d'urgence ; que le rapport de l'expert sur lequel se fonde la requérante procède d'une vision très partiale de la situation ; qu'il est constant, d'une part, qu'aucune ouverture de crédit n'avait été prévue au budget et, d'autre part, qu'aucun marché public n'a été conclu pour de tels travaux ; que c'est l'ENTREPRISE GAGNERAUD qui tente de justifier son intervention par l'urgence et non elle ; que ces travaux n'étaient pas justifiés et procèdent de manoeuvres totalement irrégulières ; qu'il n'y a pas eu de marché pour les travaux se rapportant à la RD 209 ; que, dans une telle situation, seule la théorie de l'enrichissement sans cause est susceptible de recevoir application ; que le contournement du code des marchés publics n'a pu se faire qu'avec la complaisance de l'ENTREPRISE GAGNERAUD ; que celle-ci savait parfaitement qu'elle violait le code des marchés publics dans son propre intérêt ; qu'elle conteste, de ce fait, la position prise par l'expert ; que les intérêts moratoires ne sauraient s'appliquer en l'absence de marché ; qu'elle s'est efforcée de ne pas évoquer la procédure pénale tant qu'elle n'était pas parvenue à son terme ; que le Tribunal correctionnel de Grasse a beaucoup plus lourdement condamné l'employé de la SOCIETE GAGNERAUD que le maire ; que l'ENTREPRISE GAGNERAUD, de dimension nationale, possède une parfaite connaissance des règles propres aux marchés publics ; qu'elle a activement contribué à la matérialisation de l'infraction ; qu'il existe un devoir de résister à un ordre qui serait illégal et pénalement sanctionné ;

Vu le mémoire, enregistré au greffe le

11 juin 2004, présenté pour la SOCIETE GAGNERAUD construction ; celle-ci persiste dans ses écritures ; elle demande en outre la suppression, dans le mémoire de la commune de Pégomas, de passages qu'elle estime injurieux et diffamatoires ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 juin 2004 :

- le rapport de M. Firmin, Rapporteur,

- les observations de Me A... pour la commune de Pégomas,

- et les conclusions de M. Bédier, Commissaire du gouvernement.

Considérant que, dans le courant des années 1994 et 1995, la commune de Pégomas a engagé des travaux d'aménagement des trottoirs et réseaux, du boulevard de la Mourachonne (route départementale 209), qui ont été réalisés par la SOCIETE GAGNERAUD CONSTRUCTION ; qu'à l'issue de ces travaux un litige portant sur leur paiement s'est élevé entre les personnes précitées ; que la SOCIETE GAGNERAUD CONSTRUCTION relève appel du jugement du 29 juin 2001, par lequel le Tribunal administratif de Nice n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la condamnation de la commune de Pégomas à lui payer la somme de 1.272.589,08 F avec les intérêts moratoires à compter du

1er octobre 1995 et les intérêts des intérêts ;

Considérant qu'il est constant que les travaux ci-dessus décrits ont été exécutés, par la seule SOCIETE GAGNERAUD CONSTRUCTION, sous couvert de quatre devis présentés par celle-ci et trois autres entreprises avec lesquelles elle s'était entendu à cette fin ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment du jugement du 21 mars 2001 du Tribunal de Grande Instance de Grasse statuant en matière correctionnelle, que cette procédure a été utilisée dans le seul but de fractionner, en deçà du seuil de 300.000 F fixé par l'article 321 du code des marchés publics alors applicable au-delà duquel la commande publique est soumise aux prescriptions du dit code relatives aux obligations de mise en concurrence, l'opération en cause ; que si la SOCIETE GAGNERAUD CONSTRUCTION soutient qu'elle n'a ainsi fait que satisfaire une demande de la commune de Pégomas elle ne pouvait ignorer, en sa qualité de professionnelle des travaux publics, le caractère délictuel de cette manoeuvre qui n'aurait pu aboutir sans son concours délibéré ; qu'il suit de là que, quelque soit le caractère utile des travaux qu'elle a réalisés pour le compte de la personne publique, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que, eu égard à la gravité de la faute ainsi commise par l'entreprise, celle-ci n'était pas fondée à invoquer l'enrichissement sans cause procuré à la commune de Pégomas par l'exécution effective des prestations précédemment décrites pour en obtenir le paiement ; que la requête de la SOCIETE GAGNERAUD CONSTRUCTION ne peut, par suite, qu'être rejetée ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient la SOCIETE GAGNERAUD CONSTRUCTION, les termes du mémoire susvisé de la commune de Pégomas n'ont pas excédé les limites du débat contentieux ; qu'il n'y a dès lors pas lieux de faire droit à sa demande de suppression de passages injurieux ou diffamatoires ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais qu'elles ont engagés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions de la SOCIETE GAGNERAUD CONSTRUCTION et de la commune de Pégomas tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative doivent, par suite, être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SOCIETE GAGNERAUD CONSTRUCTION est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la SOCIETE GAGNERAUD CONSTRUCTION et de la commune de Pégomas tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE GAGNERAUD CONSTRUCTION, à la commune de Pégomas et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Délibéré à l'issue de l'audience du 15 juin 2004, où siégeaient :

M. Bernault, président de chambre,

M. Y... et M.Firmin, premiers conseillers,

Prononcé à Marseille, en audience publique le 29 juin 2004.

Le rapporteur

signé

Jean-Pierre Firmin

Le président,

signé

François Bernault

Le greffier,

signé

Danièle Z...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

Classement CNIJ : 39-04-01

C

N° 01MA02282 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4eme chambre-formation a 3
Numéro d'arrêt : 01MA02282
Date de la décision : 29/06/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre FIRMIN
Rapporteur public ?: M. BEDIER
Avocat(s) : SCP ESCOFFIER - WENZINGER - DEUR

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-06-29;01ma02282 ?
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