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15/03/2004 | FRANCE | N°01MA00291

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5eme chambre - formation a 3, 15 mars 2004, 01MA00291


Vu, enregistrée le 8 février 2001 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 01MA00291, la requête présentée par la société civile professionnelle d'avocats Mairin, pour la SARL MAXIM'PRIM dont le siège est situé ... ;

La Société demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 97 05644 en date du 7 novembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 527.917,40 F en réparation du préjudice qu'elle estimait avoir subi en raison des barrages r

outiers établis du 18 au 30 novembre 1996 ;

Classement CNIJ : 60-01-05-01

C...

Vu, enregistrée le 8 février 2001 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 01MA00291, la requête présentée par la société civile professionnelle d'avocats Mairin, pour la SARL MAXIM'PRIM dont le siège est situé ... ;

La Société demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 97 05644 en date du 7 novembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 527.917,40 F en réparation du préjudice qu'elle estimait avoir subi en raison des barrages routiers établis du 18 au 30 novembre 1996 ;

Classement CNIJ : 60-01-05-01

C

2°/ de condamner l'Etat à lui verser :

* la somme précitée de 527.917,40 F ;

* une somme de 10.000 F sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Elle soutient :

- que durant les barrages routiers, aucun transporteur n'a pu accéder à son établissement ;

- que la responsabilité de la puissance publique est engagée dès lorsque celle-ci a choisi de ne pas s'opposer à l'installation desdits barrages, ce qui constitue une faute lourde ;

- qu'en application des dispositions de l'article 92 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983, l'Etat est civilement responsable des manifestations organisées sur la voie publique quant aux dommages qui peuvent en résulter pour les tiers ;

- que les conditions d'une force ouverte sont remplies et qu'il convient de relever que les comportements manifestés par les grévistes sont constitutifs de délits sanctionnés par l'article 7 du code de la route ;

- que l'inaction même non fautive des services de l'Etat est de nature à engager la responsabilité pour rupture d'égalité devant les charges publiques puisque l'inaction en cause est à l'origine de charges anormales supportées par la société ;

- que le préjudice matériel d'une ampleur exceptionnelle est également de nature spéciale en raison du caractère périssable des denrées produites par la requérante et dès lors que la carence de l'Etat n'a pas eu les mêmes conséquences pour les autres acteurs sociaux ;

- que le préjudice évalué à 527.917,40 F ressort des certificats de transporteurs et d'agent assermenté produits ainsi que d'un constat d'huissier de justice daté du 22 novembre 1996 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 27 juillet 2001 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, le mémoire en défense par lequel le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir :

- que le régime de la faute lourde qui serait imputable à l'Etat est irrecevable dès lors qu'il a été soulevé par la société requérante pour première fois en appel ;

- que la responsabilité de l'Etat ne saurait être engagée sur le fondement de l'article L.2216-3 du code général des collectivités territoriales dès lors que :

* ces dispositions sont subordonnées à la condition que les dommages dont l'indemnisation est demandée résultent de manière directe et certaine de crimes ou délits identifiés ;

* l'appelante ne se prévaut d'aucun barrage ni d'aucun délit précis ;

- que la rupture d'égalité des citoyens devant les charges relève d'un préjudice anormal et spécial dont la société ne fait aucunement la démonstration ;

- que le lien de causalité entre le fait générateur et le dommage invoqué n'est pas établi dans la mesure où le mouvement de grève et les barrages routiers concernés n'ont pas rendu totalement impossible la circulation routière eu égard à la densité du réseau routier et à la brièveté du mouvement invoqué ;

- que le refus manifesté par les transporteurs de la société requérante ne saurait à lui seul permettre l'engagement de la responsabilité de l'Etat ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 février 2004 :

- le rapport de M. Francoz, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Louis, commissaire du gouvernement ;

Considérant, en premier lieu, qu'eu égard à l'ampleur des manifestations déclenchées par les chauffeurs routiers sur l'ensemble du territoire national au mois de novembre 1996, qui ont affecté l'activité de très nombreuses entreprises dont le fonctionnement est lié directement ou indirectement aux transports routiers, le préjudice résultant de l'abstention, de la part des autorités de l'Etat chargées de la police de la circulation, de recourir à la force pour disperser les barrages ne peut être regardé comme imposant de ce fait à ces entreprises une charge suffisamment grave et spéciale pour engager envers elles, en dehors de toute faute, la responsabilité de l'Etat, que si leurs marchandises ont été empêchées de circuler librement pendant une certaine durée ; qu'il est constant que les barrages mis en place par les chauffeurs routiers le 18 novembre 1996 ont été partiellement levés dès le 23 novembre et totalement levés le 28 novembre 1996 ; qu'en l'espèce, eu égard à la brièveté de la période pendant laquelle elles ont laissé subsister ces barrages routiers, les autorités compétentes n'ont pas imposé aux usagers des voies publiques un préjudice anormal et spécial dont la société requérante serait fondée à demander réparation sur le fondement de la rupture de l'égalité devant les charges publiques ;

Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes du premier alinéa l'article L.2216-3 du code général des collectivités territoriales, issu de l'article 92 de la loi du 7 janvier 1983 : L'Etat est civilement responsable des dégâts et dommages résultant de crimes et délits commis à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens ; que la société requérante est recevable à présenter, pour la première fois en appel, des conclusions indemnitaires sur le fondement des dispositions précitées qui instituent un régime de responsabilité sans faute dont l'examen est d'ordre public ;

Considérant toutefois que l'application de ces dispositions est subordonnée à la condition que les dommages dont l'indemnisation est demandée résultent de manière directe et certaine de crimes ou de délits déterminés, commis par des rassemblements ou attroupements précisément identifiés ;qu'en l'espèce, si la SARL MAXIM'PRIM demande réparation à l'Etat de dommages qu'elle a subis au cours du mois de novembre 1996 en raison des entraves apportées à la circulation par des barrages de transporteurs routiers, elle se borne à faire état d'une situation générale de blocage ayant affecté le réseau routier et autoroutier national sans établir de lien direct avec un crime ou un délit déterminé ni avec un rassemblement ou un attroupement précisément identifié ; qu'elle n'est, par suite, pas fondée à soutenir que la responsabilité de l'Etat serait engagée à son égard sur le fondement des dispositions sus rappelées de l'article L.2216-3 du code général des collectivités territoriales ;

Considérant en dernier lieu que les conclusions de la SARL MAXIM'PRIM visant à faire reconnaître la responsabilité pour faute de l'Etat à raison de la carence du service de maintien de l'ordre public présentées pour la première fois devant la cour, se rattachent à une cause juridique distincte de celle qui fondait la demande devant les premiers juges et constituent une demande nouvelle en appel qui n'est, dès lors, pas recevable ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL MAXIM'PRIM n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 font obstacle à ce que L'Etat, qui n'est pas la partie perdante, soit condamné à rembourser à la SARL MAXIM'PRIM les frais, non compris dans les dépens, qu'elle a exposés à l'occasion de la présente instance ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL MAXIM'PRIM est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL MAXIM'PRIM au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Délibéré à l'issue de l'audience du 9 février 2004 où siégeaient :

Mme Bonmati, président de chambre,

M. Moussaron, président assesseur,

M. Francoz, premier conseiller,

assistés de Mme Ranvier, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 15 mars 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Dominique Bonmati Patrick-Gilbert Francoz

Le greffier,

Signé

Patricia Ranvier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur de la sécurité intérieure et des libertés locales en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

2

N° 01MA00291


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 01MA00291
Date de la décision : 15/03/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BONMATI
Rapporteur ?: M. FRANCOZ
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : SCP MAIRIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-03-15;01ma00291 ?
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