La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/11/2003 | FRANCE | N°98MA01305

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5eme chambre - formation a 3, 24 novembre 2003, 98MA01305


Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 31 juillet 1998, sous le n° 98MA1305, présentée par M. Bernard X, demeurant ...) ;

M. X demande à la Cour :

1°/ de surseoir à l'exécution du jugement n° 96-1956 en date du 13 mai 1998 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande dirigée contre la décision en date du 22 décembre 1995 par laquelle le maire de la commune de Cournonterral a limité la vitesse des véhicules à 15 kilomètres/heure dans l'impasse Jean Mermoz ;

2°/ d'annuler ce même j

ugement ;

3°/ d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 22 décembre 1995 du mai...

Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 31 juillet 1998, sous le n° 98MA1305, présentée par M. Bernard X, demeurant ...) ;

M. X demande à la Cour :

1°/ de surseoir à l'exécution du jugement n° 96-1956 en date du 13 mai 1998 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande dirigée contre la décision en date du 22 décembre 1995 par laquelle le maire de la commune de Cournonterral a limité la vitesse des véhicules à 15 kilomètres/heure dans l'impasse Jean Mermoz ;

2°/ d'annuler ce même jugement ;

3°/ d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 22 décembre 1995 du maire de Cournonterral ;

Classement CNIJ : 49-04-01-01

C

4°/ de condamner la commune de Cournonterral à lui verser la somme de 6.000 F en réparation du préjudice qu'il a subi ;

5°/ de condamner la commune de Cournonterral à lui verser la somme de 2.000 F au titre des frais irrépétibles ;

Il soutient :

- que le jugement attaqué, qui ne discute qu'un des moyens soulevés, est insuffisamment motivé ;

- que la commune ayant ignoré son recours gracieux, le requérant ne devait pas être condamné à lui rembourser les frais irrépétibles ;

- qu'il a été le destinataire exclusif de l'arrêté en cause, pris à titre de sanction personnelle par le maire suite à l'accident survenu le 12 décembre 1995 et à l'incident survenu lors du conseil municipal du 21 décembre suivant ;

- que la décision litigieuse est insuffisamment motivée, n'est pas fondée sur faits réels, et est entachée de détournement de pouvoir ;

- que l'arrêté contesté porte atteinte à l'image du requérant ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 septembre 1998, présenté par M. Bernard X ;

M. X persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que l'arrêté litigieux, en limitant la vitesse à 15 kilomètres/heure, est contraire à la circulaire d'application du décret n° 90-160 du 29 novembre 1990 ; que le contrôle de légalité de cette décision par le préfet de l'Hérault n'a pas été exercé ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 novembre 1998, présenté pour M. Bernard X par Maître Benyoucef, avocat à la Cour ;

M. X persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que la décision contestée méconnaît le décret sus-mentionné du 29 novembre 1990 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 février 1999, présenté pour la commune de Cournonterral, représentée par son maire en exercice, par Maître Brunel, avocat à la Cour ;

La commune demande à la Cour le rejet de la requête et la condamnation de M. X à lui verser la somme de 5.000 F au titre des dommages-intérêts et la somme de 8.000 F au titre des frais irrépétibles ;

Elle soutient :

- que la requête est irrecevable pour tardiveté ;

- que l'arrêté, acte réglementaire, n'avait pas à être motivé en application de la loi sous-visée du 11 juillet 1979 ;

- que la référence à l'article L.131-2 du code des communes alors en vigueur était suffisante ;

- que la limitation à 15 kilomètres/heure critiquée est due à la fréquence des collisions ;

- que le décret du 29 novembre 1990 n'est pas applicable dans le cas de l'espèce ;

- que la procédure est abusive et crée un préjudice ;

Vu le mémoire en réplique enregistré le 12 mars 1999, présenté pour M. X par Maître Medjadj ;

M. X persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens, et demande en outre la condamnation de la commune à lui verser la somme de 20.000 F au titre de son préjudice moral, et la somme de 8.000 F au titre des frais irrépétibles ;

Il soutient en outre :

- qu'un recours avait été adressé au préfet de l'Hérault avec copie déposée à la mairie de Cournonterral, dans le délai de recours contentieux, qu'ainsi la requête est recevable ;

- que la limitation de vitesse à 15 kilomètres/heure est disproportionnée par rapport au danger représenté par la circulation dans l'impasse ;

- que le caractère abusif de la présente procédure n'est absolument pas démontré ;

Vu le mémoire en réponse, enregistré le 6 mars 2000, présenté pour la commune de Cournonterral par Maître Brunel ;

La commune persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre :

- que le recours adressé au préfet de l'Hérault a été dirigé sur une autorité incompétente et n'a pu interrompre le délai de recours contentieux ;

- que les conditions du sursis à exécution du jugement ne sont pas remplies ;

- que la notification de l'arrêté litigieux à M. X ne lui confère pas un caractère de décision individuelle ;

- que le requérant ne justifie pas de cette notification ;

- que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

- que le maire peut limiter la vitesse de circulation à moins de 30 kilomètres/heure en application de l'article R.225 du code de la route ;

- que la décision en cause ne peut faire l'objet, de la part du juge administratif, que d'un contrôle minimum ;

Vu le mémoire en duplique, enregistré le 30 mars 2000, présenté pour M. X par Maître Medjadj ;

M. X persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des communes ;

Vu le code de la route ;

Vu le décret n°83-1025 du 28 novembre 1983 ;

Vu le décret n° 90-1060 du 29 novembre 1990 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 octobre 2003 :

- le rapport de M. Pocheron, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Louis, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par arrêté du 22 décembre 1995, le maire de Cournonterral (Hérault) a limité la vitesse maximum de circulation des véhicules dans l'impasse Jean Mermoz à 15 kilomètres/heure ; que M. X, habitant de cette impasse, a sollicité l'annulation de cette décision devant le Tribunal administratif de Montpellier, qui, par jugement du 13 mai 1998, a rejeté sa demande ; que, devant la cour, et dans le dernier état de ses conclusions, M. X sollicite le sursis à exécution et l'annulation de ce jugement, l'annulation de l'arrêté du 22 décembre 1995, la condamnation de la commune à lui verser une somme de 20.000 F au titre de son préjudice moral et une somme de 8.000 F au titre des frais irrépétibles ; que la commune de Cournonterral demande le rejet de la requête, la condamnation de M. X à lui verser une somme de 5.000 F au titre des dommages-intérêts et une somme de 8.000 F au titre des frais irrépétibles ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le requérant soutient que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé en ce qu'il ne répondrait qu'à un des moyens soulevés en première instance ; que, cependant, il ressort de l'examen de la demande et des mémoires de M. X ainsi que des motifs du jugement qu'il a répondu aux deux moyens soulevés par l'intéressé, tirés de l'insuffisance de la motivation de l'arrêté litigieux et du détournement de pouvoir ;

Au fond et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir invoquée par la commune de Cournonterral :

Sur la légalité de l'arrêté du 22 décembre 1995 :

Considérant en premier lieu que le Tribunal administratif de Montpellier a à bon droit jugé que l'acte litigieux, de nature réglementaire, n'avait pas à être motivé ; que par suite le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation de l'arrêté en cause doit être rejeté ;

Considérant en deuxième lieu que si le décret susvisé du 29 novembre 1990 a introduit dans le code de la route des dispositions limitant la vitesse en agglomération à 50 kilomètres/heure et conférant aux maires compétence pour la délimitation des zones 30 où la vitesse est limitée à 30 kilomètres/heure, il ressort des dispositions de l'article R.225 du code de la route alors en vigueur, aux termes desquelles : Les dispositions du présent code ne font pas obstacle au droit conféré par les lois et règlements...aux maires de prescrire dans les limites de leurs pouvoirs, et lorsque l'intérêt de la sécurité ou de l'ordre public l'exige, des mesures plus rigoureuses que celles édictées par le présent code., des dispositions de l'article L.131-2 alors en vigueur aux termes desquelles : La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques... et des dispositions de l'article L.131-3 du même code aux termes desquelles : Le maire a la police de la circulation sur...les voies de communication à l'intérieur des agglomérations..., que M. X n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté du 22 décembre 1995 limitant la vitesse maximum à 15 kilomètres/heure dans une impasse communale manquerait de base légale ; qu'au surplus, la circonstance que le maire de Cournonterral n'aurait pas respecté les exigences de la circulaire d'application du décret du 29 novembre 1990, à la supposer même établie, est en tout état de cause sans incidence sur la légalité de la décision litigieuse, la dite circulaire étant dépourvue de caractère réglementaire ;

Considérant en troisième lieu qu'au vu de la configuration des lieux concernés par l'acte litigieux, qui consistent en une impasse à double voie de circulation, de faible longueur, sans trottoir, et bordée de maisons individuelles, la mesure prise par le maire n'apparaît pas, contrairement à ce que soutient le requérant, disproportionnée par rapport aux dangers encourus ;

Considérant en quatrième lieu que les circonstances que les rapports entre le maire de Cournonterral et le requérant étaient difficiles à l'époque à laquelle l'arrêté litigieux a été pris et que, le 12 décembre 1995, un accident survenu dans l'impasse Jean Mermoz avait impliqué le véhicule conduit par le fils du maire et celui de M. X, ne sont pas de nature, compte tenu notamment du fait que le maire de la commune est lui-même domicilié impasse Jean Mermoz et donc soumis aux mêmes contraintes de circulation que l'ensemble des riverains de cette voie, à établir le détournement de pouvoir allégué, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges ;

Sur les frais irrépétibles exposés en première instance :

Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel alors en vigueur : Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ; que M. X étant la partie perdante et en l'absence de tout autre élément, notamment économique, allégué, les premiers juges ont pu valablement prononcer cette condamnation ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que, la commune ayant été avertie de l'opposition de M. X à l'arrêté du 22 décembre 1995, il était inéquitable de condamner le demandeur à lui verser une somme de 4.000 F en application des dispositions précitées, lequel est sans incidence sur la régularité du jugement attaqué, est en outre inopérant ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'indemnités présentées par M. X :

Considérant que M. X demande la condamnation de la commune de Cournonterral à lui payer la somme de 20.000 F à titre de réparation de son préjudice moral ; que ces conclusions qui sont présentées pour la première fois en appel ne sont pas recevables ; qu'en outre, ses conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du 22 décembre 1995 ayant été rejetées, M. X n'est, en tout état de cause, pas fondé à invoquer le préjudice qu'il subirait à raison de l'illégalité de cette décision ;

Sur les conclusions de la commune de Cournonterral tendant à la condamnation de M. X à lui verser la somme de 5.000 F au titre des dommages-intérêts pour procédure abusive :

Considérant que les circonstances alléguées par la commune de Cournonterral ne sont pas en l'espèce, différentes de celles qui justifient la demande qu'elle formule par ailleurs au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et ne sont pas davantage de nature à permettre de qualifier d'abusive la procédure engagée par M. X ; que les conclusions susanalysées doivent en conséquence être rejetées ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, de condamner M. X, partie perdante, à payer à la commune de Cournonterral une somme de 1.000 euros au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Cournonterral, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. Bernard X est rejetée.

Article 2 : M. Bernard X versera à la commune de Cournonterral une somme de 1.000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions incidentes de la commune de Cournonterral sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Bernard X, à la commune de Cournonterral et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Délibéré à l'issue de l'audience du 20 octobre 2003, où siégeaient :

Mme Bonmati, président de chambre,

M. Moussaron, président assesseur

M. Pocheron, premier conseiller,

assistés de Mlle Ranvier, greffier.

Prononcé à Marseille, en audience publique le 24 novembre 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Dominique Bonmati Michel Pocheron

Le greffier,

Signé

Patricia Ranvier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

2

N° 98MA1305


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 98MA01305
Date de la décision : 24/11/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BONMATI
Rapporteur ?: M. POCHERON
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : MEDJADJ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-11-24;98ma01305 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award