La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/04/2003 | FRANCE | N°99MA01444

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2eme chambre, 29 avril 2003, 99MA01444


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 30 juillet 1999 sous le n° 99MA01444, présentée par Mme Alexandra X, demeurant 30, avenue du Commandant Bret à CANNES (06400) ;

Mme BECHLITCH demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement du 16 mars 1999, par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet des Alpes-Maritimes, en date du 23 juin 1995, l'excluant à titre définitif du bénéfice du revenu de remplacement ;

2°/ d'annuler la décision en cause ;
<

br>3°/ de condamner l'Etat à lui verser la somme de10.000 F au titre de l'article L.761-1...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 30 juillet 1999 sous le n° 99MA01444, présentée par Mme Alexandra X, demeurant 30, avenue du Commandant Bret à CANNES (06400) ;

Mme BECHLITCH demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement du 16 mars 1999, par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet des Alpes-Maritimes, en date du 23 juin 1995, l'excluant à titre définitif du bénéfice du revenu de remplacement ;

2°/ d'annuler la décision en cause ;

3°/ de condamner l'Etat à lui verser la somme de10.000 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Classement CNIJ : 66-10-02

C

La requérante soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une irrégularité de procédure en ce qu'il a soulevé d'office un moyen d'irrecevabilité en ne la prévenant que deux ans après l'introduction de sa requête, ce qui a eu pour effet de la priver de son droit de recours contre la décision postérieure et ce, en violation de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 16 de la convention des droits de l'homme et du citoyen ;

- le tribunal a commis une erreur de droit car la seule décision attaquable était celle du 23 juin 1995 et non le courrier du 25 septembre 1995 ; qu'en tout état de cause sa requête devant le tribunal contenait des moyens dirigés contre la décision du 25 septembre 1995, laquelle était jointe à cette requête ;

- elle s'est bornée à aider son père à trouver des solutions de gestion de son garage alors qu'il connaissait de graves difficultés psychologiques, et elle se trouvait pour des raisons d'ordre privé dans les locaux du garage, le 26 janvier 1995 ;

- en raison d'une grossesse pathologique, elle était dans l'impossibilité de travailler de février à juillet 1994 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 20 janvier 2003, le mémoire en défense présenté par le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, qui conclut au rejet de la requête en faisant valoir que :

- la demande étant dirigée contre la décision initiale, alors que s'y est substituée celle prise sur recours gracieux, elle est irrecevable ;

- Mme BECHLITCH s'est livrée à une activité professionnelle, qu'elle n'a pas déclarée, contrairement aux prescriptions de l'article R.311-3-2 du code du travail ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 1er avril 2003, présentée par Mme BECHLITCH, qui ne contient l'exposé d'aucune circonstance de fait ou de droit nouvelle ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en vigueur jusqu'au 31 décembre 2000, ensemble le code de justice administrative entré en vigueur le 1er janvier 2001

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er avril 2003 :

- le rapport de Mme GAULTIER, premier conseiller ;

- les observations de Mme X ;

- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'en vertu des dispositions des articles R.351-33 et 34 du code du travail, les travailleurs qui désirent contester les décisions d'exclusion du bénéfice du revenu de remplacement doivent former un recours gracieux préalable sur lequel le préfet statue après avis de la commission départementale prévue par l'article 351-34 ; qu'en pareil cas, la décision prise sur recours administratif préalable à caractère obligatoire se substitue à la décision initiale ;

Considérant que, dans sa demande introductive d'instance, Mme BECHLITCH-GICQUEL demandait l'annulation de la décision du 23 juin 1995 par laquelle le directeur départemental du travail des Alpes-Maritimes décidait son exclusion définitive du revenu de remplacement des travailleurs involontairement privés d'emploi à compter du 1er février 1994 ; que cette demande, qui a été enregistrée le 24 novembre 1995 au greffe du Tribunal administratif de Nice, mentionnait et commentait également la décision du 25 septembre 1995 par laquelle la même autorité administrative avait rejeté le recours gracieux, à caractère obligatoire, exercé par l'intéressée à l'encontre de la première décision ; que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la demande de Mme BECHLITCH-GICQUEL pouvait être regardée comme dirigée contre les deux décisions ; qu'ainsi, si les conclusions de Mme BECHLITCH-GICQUEL étaient sans objet en tant qu'elles étaient dirigées contre la décision du 23 juin 1995, elles devaient être accueillies en tant qu'elles concernaient la décision du 25 septembre 1995 ;

Considérant qu'il suit de là que c'est à tort que les premiers juges ont déclaré l'ensemble de la demande comme irrecevable ; que, par suite, le jugement attaqué doit être annulé pour irrégularité ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme BECHLITCH-GICQUEL devant le Tribunal administratif de Nice ;

Sur les conclusions relatives à la décision du directeur du travail des Alpes-Maritimes en date du 23 juin 1995 :

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la décision en cause a disparu de l'ordonnancement juridique par suite de l'intervention, le 25 septembre 1995, de la décision de rejet du recours obligatoire ; que les dites conclusions sont, dès lors, sans objet ;

Sur les conclusions relatives à la décision du directeur du travail des Alpes-Maritimes en date du 25 septembre 1995 :

Considérant qu'en vertu de l'article L.351-17 du code du travail, le droit au revenu de remplacement institué par l'article L.351-1 du même code au bénéfice des travailleurs involontairement privés d'emploi s'éteint en cas de fraude ou de fausse déclaration ; qu'aux termes de l'article R.351-28 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : Sont... exclus du bénéfice du revenu de remplacement mentionné par l'article L.351-1 : ... 5° les travailleurs qui, sciemment, ont fait des déclarations inexactes, présenté des attestations mensongères ou touché indûment le revenu de remplacement prévu à l'article L.351-1 ; qu'aux termes de l'article R.351(33 dudit code : Si le contrôle conduit à constater qu'un travailleur ne peut, légalement, bénéficier du revenu de remplacement prévu par l'article L.351-1, le préfet fait connaître à l'intéressé et aux institutions gestionnaires du régime d'assurance chômage sa décision motivée de lui refuser l'attribution, le renouvellement ou le maintien du revenu de remplacement par application de l'article... R.351-28... ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, lors d'un contrôle effectué, le 26 janvier 1995, dans les locaux de la S.A.R.L. BECHLITCH, exploitant un garage de réparation automobile, le contrôleur du travail du département des Alpes-Maritimes a constaté la présence de Mme BECHLITCH-GICQUEL, fille de M. Antoine BECHLITCH, gérant, et elle-même détentrice de parts sociales, laquelle a déclaré : tenir le secrétariat de la société en raison du travail à mi-temps du secrétaire titulaire, embauché le 13 octobre 1994, et combler ainsi l'autre mi-temps ; que, quelles qu'aient pu être les circonstances expliquant l'aide apportée à l'entreprise de son père par Mme BECHLITCH-GICQUEL, cette dernière doit être regardée comme ayant occupé de façon habituelle, dans une entreprise commerciale, un emploi au sens des dispositions de l'article L.351-1 du code du travail ; qu'il est constant qu'elle n'avait pas déclaré cette activité professionnelle au service de l'agence nationale pour l'emploi, contrairement à l'obligation qui lui en était faite par l'article R.311-3-2 du code du travail ; que, par suite, en application des dispositions des articles L.351-1, L.351-17, R.351-28 et R.351-33 du code du travail, l'exercice de cette activité professionnelle non déclarée, alors même que le versement d'une rémunération ne serait pas établi, a entraîné l'extinction du droit de Mme BECHLITCH-GICQUEL à bénéficier du revenu de remplacement ; qu'il résulte toutefois des pièces du dossier que Mme BECHLITCH-GICQUEL n'était pas en état d'accomplir un réel travail avant le 27 juillet 1994, en raison d'un accouchement, suivi d'un état pathologique ; que , dans ces conditions, la décision du 25 septembre 1995 par laquelle le directeur départemental du travail et de l'emploi s'est fondé sur l'activité professionnelle non déclarée exercée par Mme BECHLITCH-GICQUEL pour l'exclure du revenu de remplacement est entachée d'erreur manifeste d'appréciation en tant qu'elle concerne la période antérieure au 27 juillet 1994 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme BECHLITCH-GICQUEL est fondée à demander l'annulation de la décision du préfet des Alpes-Maritimes en date du 25 septembre 1995 en tant qu'elle concerne la période antérieure au 27 juillet 1994 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative en condamnant l'Etat à verser à Mme BECHLITCH-GICQUEL la somme de 1.000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nice est annulé.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre la décision du directeur du travail des Alpes-Maritimes en date du 23 juin 1995.

Article 3 : La décision du directeur du travail des Alpes-Maritimes en date du 25 septembre 1995 est annulée en tant qu'elle concerne la période comprise entre le 1er février et le 26 juillet 1994 .

Article 4 : L'Etat est condamné à verser à Mme BECHLITCH-GICQUEL la somme de 1.000 euros (mille euros) sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme BECHLITCH-GICQUEL et au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

Délibéré à l'issue de l'audience du 1er avril 2003, où siégeaient :

Mme LORANT, président assesseur assurant la présidence de la chambre en application de l'article R.222.26 du code de justice administrative,

Mme GAULTIER, M. ZIMMERMANN, premiers conseillers,

assistés de Mme LOMBARD, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 29 avril 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Nicole LORANT Joëlle GAULTIER

Le greffier,

Signé

Marie-Claire LOMBARD

La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

6

N°'99MA01444

7

N° MA


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 99MA01444
Date de la décision : 29/04/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPORTE
Rapporteur ?: Mme GAULTIER
Rapporteur public ?: M. BOCQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-04-29;99ma01444 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award