La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/07/1999 | FRANCE | N°96MA00796

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, Pleniere, 01 juillet 1999, 96MA00796


Vu l'ordonnance en date du 29 août 1997 par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Lyon a transmis à la Cour administrative d'appel de Marseille, en application du décret n° 97-457 du 9 mai 1997, la requête présentée pour la S.A. Daninvest ;
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon, le 3 avril 1996 sous le n° 96LY00796, présentée pour la S.A. Daninvest, représentée par ses représentants légaux, dont le siège social est situé ..., par Me Didier Y..., avocat ;
La S.A. Daninvest demande à la Cour :
1° d'ann

uler le jugement n° 93-2746 du 16 janvier 1996 par lequel le Tribunal adminis...

Vu l'ordonnance en date du 29 août 1997 par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Lyon a transmis à la Cour administrative d'appel de Marseille, en application du décret n° 97-457 du 9 mai 1997, la requête présentée pour la S.A. Daninvest ;
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon, le 3 avril 1996 sous le n° 96LY00796, présentée pour la S.A. Daninvest, représentée par ses représentants légaux, dont le siège social est situé ..., par Me Didier Y..., avocat ;
La S.A. Daninvest demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement n° 93-2746 du 16 janvier 1996 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 25 janvier 1993 par laquelle la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte-d'Azur a considéré que le paiement de la somme de 2.444.511,95 F ne constituait pas une dépense obligatoire pour le Syndicat d'Agglomération Nouvelle Ville Nouvelle de Fos ;
2° d'annuler ladite décision pour excès de pouvoir ;

Vu la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 ;
Vu la loi n° 83-636 du 13 juillet 1983 ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 juin 1999 :
- le rapport de M. LUZI, président assesseur ;
- les observations de Me X... pour le Syndicat d'Agglomération Nouvelle Ville Nouvelle de Fos ;
- et les conclusions de M. DUCHON-DORIS, premier conseiller ;

Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982, alors en vigueur, relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions, rendu applicable aux syndicats d'agglomérations nouvelles en vertu des dispositions combinées des articles 16 de la loi précitée du 2 mars 1982 et 13 de la loi n° 83-636 du 13 juillet 1983 : "Ne sont obligatoires pour les communes que les dépenses nécessaires à l'acquittement des dettes exigibles et les dépenses pour lesquelles la loi l'a expressément décidé. La chambre régionale des comptes saisie, soit par le représentant de l'Etat dans le département, soit par le comptable public concerné, soit par toute personne y ayant intérêt, constate qu'une dépense obligatoire n'a pas été inscrite au budget communal ou l'a été pour une somme insuffisante. Elle opère cette constatation dans le délai d'un mois à partir de sa saisine ..." ;
Considérant que par une délibération du 1er février 1989 le comité du Syndicat d'Agglomération Nouvelle Ville Nouvelle de Fos (S.A.N.) a décidé d'accorder la garantie du syndicat à un emprunt d'un montant de 2.480.000 F que la Fédération d'Action Sociale et Familiale du Golfe de Fos envisageait de contracter auprès de la Kuweiti-French-Bank (K.F.B.) "aux taux et conditions applicables suivant la réglementation en vigueur lors de la signature du prêt" ; que cette délibération précisait "que cette garantie était subordonnée à l'établissement d'une garantie hypothécaire au profit du S.A.N. sur les biens appartenant à la Fédération sur le territoire du S.A.N." et autorisait le président du S.A.N. à prendre les mesures d'exécution qu'impliquait cette délibération ; que par une convention du 9 février 1989 la K.F.B. a consenti à la Fédération d'Action Sociale et Familiale du Golfe de Fos le prêt demandé, le président du S.A.N. intervenant à cette convention en qualité de représentant du garant ; que la Fédération d'Action Sociale et Familiale du Golfe de Fos ayant été défaillante, la K.F.B. a mis en demeure le S.A.N. d'honorer sa garantie ; que le S.A.N. n'ayant pas satisfait à cette demande la K.F.B. a saisi, sur le fondement de l'article 11 précité, la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d'Azur en vue d'obtenir le paiement de la somme de 2.444.511,95 F ; que, par une décision du 25 janvier 1993, la chambre régionale des comptes a estimé que le paiement de la somme en cause ne constituait pas une dépense obligatoire du S.A.N. ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de la K.F.B. tendant à l'annulation de la décision précitée du 25 janvier 1993 ; que la S.A. Daninvest venant aux droits de la K.F.B. en qualité de cessionnaire de la créance en cause fait appel devant la Cour de ce jugement ;

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d'Azur a décidé que la créance dont se prévalait la K.F.B. ne présentait pas un caractère obligatoire aux motifs, d'une part, qu'en l'absence de précisions sur le taux de l'emprunt garanti par le S.A.N. et sur les risques de change, l'assemblée délibérante ne pouvait être regardée comme ayant été valablement informée des conditions de l'emprunt qu'elle se proposait de garantir, d'autre part, qu'en l'absence de prise d'hypothèque le président du S.A.N. ne pouvait signer aucun document engageant le S.A.N. à garantir l'emprunt en cause, enfin, que la convention qui n'avait pas été transmise au représentant de l'Etat n'était pas exécutoire ;
Considérant que la convention de prêt passée entre deux personnes de droit privé est un contrat de droit privé ; que l'engagement de garantie pris par le S.A.N. n'avait pas pour objet l'exécution d'une mission de service public et ne comportait pas de clause exorbitante du droit commun ; qu'ainsi la convention de prêt constituait un contrat de droit privé qui en vertu des dispositions de l'article 45-IV de la loi susvisée du 2 mars 1982 n'avait pas à être transcrit au représentant de l'Etat dans le département ; que par suite, en estimant que la convention de prêt n'était pas exécutoire au motif qu'elle n'avait pas été transmise au représentant de l'Etat, la chambre régionale des comptes a entaché sa décision d'une erreur de droit ;
Considérant qu'il n'appartient pas aux chambres régionales des comptes, saisies à l'effet de constater le caractère obligatoire d'une dépense, d'apprécier la légalité des actes exécutoires qui fondent cette saisine ; qu'il est constant que la délibération précitée du 1er février 1989 était exécutoire à la date de la décision litigieuse du 25 janvier 1993 ; que, par suite, la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d'Azur ne pouvait, sans commettre d'erreur de droit, retenir un motif tiré de l'illégalité de cette délibération pour décider que la dépense n'était pas obligatoire pour le S.A.N. ;

Considérant en revanche qu'aux termes de l'article L. 163-13-1 du code des communes, repris à l'article L. 5212-11 du code général des collectivités territoriales, applicable aux syndicats d'agglomérations nouvelles : "Le président est l'organe exécutif du syndicat. Il prépare et exécute les délibérations du comité" ; que par la délibération précitée du 1er février 1989, le comité syndical du S.A.N. n'a pas délégué à son président ses pouvoirs mais s'est borné à l'autoriser en application des dispositions précitées de l'article L. 163-13-1 du code des communes à prendre les mesures d'exécution qu'impliquait cette délibération ; que, par suite, la S.A. Daninvest ne peut se prévaloir des stipulations de l'article 10 de la convention de prêt, selon lesquelles la garantie du S.A.N. était accordée "sans restriction, de façon totale et inconditionnelle", pour soutenir que la dépense était obligatoire dans la mesure où ces stipulations ne correspondaient pas aux termes de la délibération adoptée par le comité syndical le 1er février 1989 ; que si la S.A. Daninvest fait valoir qu'il n'apparaissait pas, à la date à laquelle le contrat de prêt a été signé, que le syndicat n'avait pas procédé à la prise d'hypothèque, dont il avait seul l'initiative, et qu'au demeurant cette formalité s'est avérée impossible en l'absence de biens appartenant à la Fédération d'Action Sociale et Familiale du Golfe de Fos, il est constant que la délibération du 1er février 1989 était annexée au contrat de prêt ; qu'ainsi la Kuweiti French Bank ne pouvait ignorer que la garantie du syndicat était expressément subordonnée à cette prise d'hypothèque ; qu'en sa qualité d'organisme financier professionnel la Kuweiti French Bank aurait dû s'assurer soit que la condition fixée par la délibération avait été remplie, soit que le comité syndical, informé que cette condition ne pouvait être réalisée, avait maintenu sa décision de garantir l'emprunt ; qu'ainsi la S.A. Daninvest n'est pas fondée à soutenir que la Kuweiti French Bank pouvait légitimement croire que le président du syndicat avait satisfait aux conditions fixées par la délibération du comité syndical ; que ce motif est à lui seul suffisant pour justifier légalement la décision par laquelle la chambre régionale des comptes a estimé que les sommes litigieuses ne constituaient pas une dépense obligatoire pour le S.A.N. ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la S.A. Daninvest n'est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 25 janvier 1993 de la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d'Azur ;

Sur les conclusions du Syndicat d'Agglomération Nouvelle Ville Nouvelle de Fos tendant à l'application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et de condamner la S.A. Daninvest à payer au Syndicat d'Agglomération Nouvelle de Fos la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1 : La requête de la S.A. Daninvest est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du Syndicat d'Agglomération Nouvelle Ville Nouvelle de Fos tendant à l'application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la S.A. Daninvest, au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et au Syndicat d'Agglomération Nouvelle Ville Nouvelle de Fos.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : Pleniere
Numéro d'arrêt : 96MA00796
Date de la décision : 01/07/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

COLLECTIVITES TERRITORIALES - DISPOSITIONS GENERALES - DISPOSITIONS FINANCIERES - CONTROLE DES COLLECTIVITES TERRITORIALES PAR LES JURIDICTIONS FINANCIERES - Constatation du caractère obligatoire d'une dépense - Appréciation par la chambre de la légalité des actes fondant la dépense.

135-01-07-07, 18-02-05 Il n'appartient pas à la chambre régionale des comptes, saisie d'une demande tendant à ce qu'elle constate le caractère obligatoire d'une dépense, d'apprécier la légalité des actes qui fondent cette saisine, en l'espèce, la délibération par laquelle le comité syndical d'un syndicat d'agglomération de ville nouvelle a accepté de garantir un emprunt.

COMPTABILITE PUBLIQUE - BUDGETS - CONTROLE DES BUDGETS DES COLLECTIVITES LOCALES PAR LES CHAMBRES REGIONALES DES COMPTES - Constatation du caractère obligatoire d'une dépense - Appréciation par la chambre de la légalité des actes fondant la dépense.

39-06-01-06 Litige opposant un organisme financier professionnel à un syndicat d'agglomération de ville nouvelle portant sur l'engagement de garantie souscrit par celui-ci pour garantir le remboursement des échéances d'un emprunt contracté par un organisme privé d'intérêt général. La décision de garantir l'emprunt relevant de la compétence du comité syndical, l'organisme prêteur ne se peut se prévaloir des termes du contrat de prêt, signé par le président du syndicat en qualité de représentant du garant, relatifs à l'étendue de la garantie du syndicat. La délibération par laquelle le comité syndical a décidé d'accorder sa garantie étant jointe au contrat de prêt, l'organisme prêteur pouvait vérifier que les conditions prévues par la délibération étaient ou non remplies à la date de la signature du contrat. Il n'est donc pas fondé à soutenir qu'il pouvait légitimement croire que le président du syndicat avait respecté ces conditions.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - ACTIONS EN GARANTIE - Action en garantie du créancier de l'emprunteur défaillant contre le syndicat d'agglomération de ville nouvelle ayant donné sa garantie - Vice du consentement du prêteur - Absence en l'espèce.


Références :

Code des communes L163-13-1
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Code général des collectivités territoriales L5212-11
Loi 82-213 du 02 mars 1982 art. 11, art. 16, art. 45
Loi 83-636 du 13 juillet 1983 art. 11


Composition du Tribunal
Président : M. Hertgen
Rapporteur ?: M. Luzi
Rapporteur public ?: M. Duchon-Doris

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;1999-07-01;96ma00796 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award