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28/12/1998 | FRANCE | N°96MA01599

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1e chambre, 28 décembre 1998, 96MA01599


Vu l'ordonnance en date du 29 août 1997 par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Lyon a transmis à la Cour administrative d'appel de Marseille, en application du décret n 97-457 du 9 mai 1997, la requête présentée pour la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DES ALPES DE HAUTE-PROVENCE ;
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 12 juillet 1996 sous le n 96LY01599, présentée pour la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DES ALPES DE HAUTE-PROVENCE (C.R.C.A.M.), dont le siège est ..., venant aux droits des

caisses régionales de Crédit Agricole Mutuel de Vaucluse, Bouc...

Vu l'ordonnance en date du 29 août 1997 par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Lyon a transmis à la Cour administrative d'appel de Marseille, en application du décret n 97-457 du 9 mai 1997, la requête présentée pour la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DES ALPES DE HAUTE-PROVENCE ;
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 12 juillet 1996 sous le n 96LY01599, présentée pour la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DES ALPES DE HAUTE-PROVENCE (C.R.C.A.M.), dont le siège est ..., venant aux droits des caisses régionales de Crédit Agricole Mutuel de Vaucluse, Bouches-du-Rhône et Hautes-Alpes, par Me Eric X..., avocat ; et le mémoire ampliatif enregistré le 23 août 1996 ;
La caisse requérante demande à la Cour :
1 / d'annuler le jugement en date du 24 mai 1996 du Tribunal administratif de Marseille ;
2 / de déclarer l'Etat et le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT ET L'ENTRETIEN DE LA SORGUE, responsable du préjudice né du défaut de remboursement de ses prêts par l'association syndicale autorisée des Sorgues de Velleron ;
3 / de condamner l'Etat et le syndicat à lui verser les sommes de 26.294,78 F et 178.454,93 F, montant des sommes dues par l'association syndicale au 5 septembre 1990, ainsi que les intérêts à compter de cette date aux taux respectifs de 2,50 % et 7 % tels que prévus par les contrats de prêt initiaux, au titre de remboursement de prêts accordés par la caisse à l'association syndicale en vue de travaux d'aménagement des berges de la Sorgue ;
4 / de les condamner à lui verser 15.000 F à titre de dommages et intérêts et 15.000 F sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 21 juin 1865 ;
Vu la loi du 5 août 1911 ;
Vu le décret du 18 décembre 1927 ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 décembre 1998 :
- le rapport de Mme LORANT, premier conseiller ;
- les observations de Me Y... pour le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT ET L'ENTRETIEN DES SORGUES ;
- et les conclusions de M. BENOIT, premier conseiller ;

Considérant que la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL a présenté devant les premiers juges des conclusions à fin d'indemnisation dirigées, d'une part contre le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT ET L'ENTRETIEN DES SORGUES sur le fondement de la responsabilité contractuelle et de l'enrichissement sans cause, et d'autre part, contre l'Etat, sur le fondement de la faute ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'aux termes de l'article R.107 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Lorsqu'une partie est représentée devant le Tribunal administratif ou la Cour administrative d'appel par un des mandataires mentionnés à l'article R.108, les actes de procédure, à l'exception de la notification de la décision prévue aux articles R.211 et suivants ne seront accomplis qu'à l'égard de ce mandataire" ; et que l'article R.193 du même code précise que : "toute partie doit être avertie par une notification faite conformément aux articles R.139 ou R.140 du jour où l'affaire sera appelée à l'audience" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que si l'avocat représentant la caisse requérante avait été régulièrement averti de la date de l'audience, l'avis de réception est revenu avec la mention "décédé" ; que, dès lors, il appartenait au Tribunal de faire toutes diligences pour convoquer la caisse, qui devait être regardée comme n'ayant plus de mandataire ; qu'en l'absence de l'envoi d'un avis d'audience à la caisse, la procédure suivie devant le Tribunal était irrégulière et que, pour ce motif, le jugement attaqué doit être annulé ;
Considérant que l'affaire est en état ; qu'il y a lieu d'évoquer pour y statuer immédiatement ;
Sur les conclusions dirigées contre le syndicat intercommunal :

Considérant qu'aux termes de l'article 67 du décret susvisé du 18 décembre 1927 : "Lorsqu'une association syndicale subroge une commune ou un syndicat de communes en ses droits et obligations autres que l'obligation d'exécuter les travaux, les bases des taxes qui continuent à être imposées aux membres de l'association sont déterminées par délibérations concordantes de l'assemblée générale et du conseil municipal ou des conseils municipaux intéressés, de telle sorte que chaque propriété soit imposée en raison de l'intérêt qu'elle a aux travaux. Le montant de ces taxes est fixé annuellement par le conseil municipal ou par le comité du syndicat de communes. Ces taxes sont versées au budget communal où elle figurent à un article spécial, ou au budget du syndicat de communes ; elles doivent être exclusivement employées à l'entretien et à l'exploitation des travaux exécutés par l'association, au remboursement des emprunts antérieurement contractés par elle, ainsi qu'au paiement de ses dettes. Le préfet est investi à l'égard de la commune ou du syndicat de communes des pouvoirs qui lui sont conférés vis-à-vis de l'association par les articles 58 et 61, paragraphe 4 du présent décret, en vue de l'inscription d'office des crédits destinés au paiement soit des dettes exigibles, soit des dépenses nécessaires pour empêcher la destruction des ouvrages, soit des dépenses figurant au budget. La subrogation d'une commune ou d'un syndicat de communes aux droits et obligations d'une association syndicale ne peut être consentie pour une durée supérieure à dix ans ; mais elle peut se renouveler par tacite reconduction." ;
Considérant que l'association syndicale autorisée de la Sorgue de Velleron a été créée par décret présidentiel du 26 mars 1849, en vue de regrouper les propriétaires intéressés à l'usage des eaux de la rivière de la Sorgue dans la partie de son cours qui traverse les territoires des communes de Pernes-les-Fontaines, Althen-les-Paluds, Monteux, Entraigues, Velleron et l'Isle-sur-la-Sorgue ; qu'en 1973, a, par ailleurs, été créé le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT ET L'ENTRETIEN DES SORGUES, qui a pour objet, dans le périmètre du bassin versant des Sorgues regroupant les quatre premières communes susmentionnées, l'amélioration et à la meilleure utilisation du patrimoine hydraulique, sans que soit dissoute l'association syndicale ;

Considérant que, par délibération en date du 26 juillet 1978, le comité syndical du syndicat intercommunal acceptait de subroger l'association syndicale autorisée, à la condition que les annuités de remboursement des emprunts contractés par ladite association auprès de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL d'Avignon et de Vaucluse en vue de financer des travaux d'aménagement des berges de la Sorgue soient prises en charge par le département ou l'Etat ; que cette condition n'ayant pas été satisfaite, le comité syndical, par une délibération du 10 octobre 1980, a décidé de ne pas accepter cette subrogation ; que cette délibération est devenue exécutoire 15 jours après la date de son enregistrement à la sous-préfecture de Carpentras, le 10 octobre 1980, en vertu des dispositions combinées des articles L.121-31, L.163-10 et L.163-11 du code des communes ; qu'à supposer que cette délibération fût illégale, elle a acquis un caractère définitif ; qu'une telle subrogation ne peut être réalisée de manière implicite dès lors que les dispositions précitées du décret du 18 décembre 1927 en organisent les modalités ; qu'en tout état de cause, contrairement à ce que soutient la caisse, le syndicat ne retire aucun bénéfice des travaux réalisés qui restent la propriété des associés ; qu'en l'absence de subrogation, la caisse régionale requérante ne peut se prévaloir d'aucune créance sur le syndicat, avec lequel elle n'a aucun lien contractuel ;
Considérant que la caisse régionale ne peut davantage se prévaloir d'un enrichissement sans cause du syndicat, résultant des emprunts litigieux dès lors que, ainsi qu'il vient d'être dit ci-dessus, le syndicat ne retire aucun bénéfice des travaux réalisés grâce auxdits emprunts ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL d'Avignon et de Vaucluse n'est pas fondée à demander la condamnation du SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT ET L'ENTRETIEN DES SORGUES à lui rembourser les sommes dues par l'association syndicale autorisée de la Sorgue de Velleron, ni à lui payer une quelconque somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Sur les conclusions dirigées contre l'Etat :
En ce qui concerne la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit ci-dessus que l'Etat n'a commis aucune faute en refusant d'inscrire les sommes dont le remboursement était demandé par la caisse requérante au budget du SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT ET L'ENTRETIEN DE LA SORGUE ;
Considérant, en revanche, que la loi du 5 août 1911 et le décret du 18 décembre 1927 susvisés organisent une procédure d'inscription d'office par le préfet au budget des associations syndicales autorisées de crédits nécessaires à l'acquittement des dettes exigibles ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient le ministre, les litiges relatifs aux refus d'inscription susmentionnés et à leurs conséquences dommageables ne relèvent plus, depuis le 1er janvier 1954, de la compétence du Conseil d'Etat mais de celle des tribunaux administratifs ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la caisse requérante a régulièrement saisi le préfet de Vaucluse de demandes d'intervention afin que soit assuré le paiement des dettes de l'association syndicale de la Sorgue de Velleron ; qu'en s'abstenant d'exercer ses pouvoirs de tutelle sur ladite association, qui n'a jamais été dissoute et avait gardé à la fois un périmètre et un objet, en vue du versement à la caisse requérante des sommes qui lui étaient dues, le préfet de Vaucluse a commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;
En ce qui concerne le préjudice :
Considérant qu'il n'est pas contesté que les sommes dues au 5 septembre 1990 par l'association syndicale autorisée s'élevaient à 26.294,78 F et 178.454,93 F ; que le préjudice financier subi par la caisse doit être évalué au montant desdites sommes, augmentées de leurs intérêts respectivement au taux de 2,50 % et 7 %, tels que prévus par les contrats de prêt initiaux, à compter du 5 septembre 1990 ; qu'en revanche, la caisse n'allègue aucun préjudice distinct de nature à justifier des dommages et intérêts supplémentaires ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL est fondée à demander la condamnation de l'Etat à lui verser les sommes dues par l'association syndicale au 5 septembre 1990 soit 26.294,78 F et 178.454,93 F, augmentées des intérêts aux taux respectifs de 2,50 % et 7 % à compter du 5 septembre 1990 ;
En ce qui concerne l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL la somme de 10.000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 24 mai 1996 est annulé.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL la somme de 26.294,78 F (vingt six mille deux cent quatre-vingt- quatorze francs et soixante-dix-huit centimes) avec intérêts au taux de 2,50 % à compter du 5 septembre 1990 et 178.454,93 F (cent soixante-dix-huit mille quatre centre cinquante quatre francs et quatre-vingt-treize centimes) avec intérêts au taux de 7 % à compter du 5 septembre 1990.
Article 3 : L'Etat est subrogé aux droits de la caisse à concurrence des sommes qu'il est condamné à verser par le présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à la caisse susmentionnée 10.000 F (dix mille francs) sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la caisse est rejetée.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL, au SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT ET L'ENTRETIEN DES SORGUES, au MINISTRE DE L'INTERIEUR et au MINISTRE DE LA FONCTION PUBLIQUE, DE LA REFORME DE L'ETAT ET DE LA DECENTRALISATION.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 96MA01599
Date de la décision : 28/12/1998
Type d'affaire : Administrative

Analyses

60-01-01-02 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - FAITS N'ENGAGEANT PAS LA RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS DE GUERRE


Références :

Code des communes L121-31, L163-10, L163-11
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R107, R193, L8-1
Décret du 26 mars 1849
Décret du 18 décembre 1927 art. 67
Loi du 05 août 1911


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme LORANT
Rapporteur public ?: M. BENOIT

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;1998-12-28;96ma01599 ?
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