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16/02/2023 | FRANCE | N°22LY01075

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 16 février 2023, 22LY01075


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 22 octobre 2021 par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays à destination, et d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement

à intervenir, sous astreinte.

Par un jugement n° 2109223 du 4 mars 2022, le trib...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 22 octobre 2021 par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays à destination, et d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte.

Par un jugement n° 2109223 du 4 mars 2022, le tribunal a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 4 avril 2022, M. A... représenté par Me Bescou, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;

2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à défaut de réexaminer sa situation ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros au profit de son conseil, en application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que

- le refus de titre de séjour contesté est entaché d'un vice de procédure et d'un défaut d'examen préalable, réel et sérieux de sa situation personnelle, au regard des dispositions de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article R. 5221-15 du code du travail, mais également au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des articles R. 5221-11 et R. 5221-20 du code du travail ; il méconnaît aussi les dispositions de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article R. 5221-15 du code du travail ; il méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ; il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et compte tenu de l'usage par le préfet de son pouvoir de régularisation ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les décisions fixant un délai de départ volontaire et le pays de renvoi sont illégales par voie de conséquence de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français.

La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 31 août 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code du travail ;

- l'arrêté du 1er avril 2021 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Chassagne, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant de l'État de Libye, né le 12 octobre 1979 à Tripoli, est entré en France selon le préfet le 22 novembre 2013, sous couvert d'un visa de long séjour portant la mention " étudiant ", valide jusqu'au 4 septembre 2014. La demande qu'il a présentée en dernier lieu sur le fondement des articles L. 421-1, L. 435-1 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été rejetée par un arrêté du préfet du Rhône du 22 octobre 2021, avec obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination. M. A... relève appel du tribunal administratif de Lyon qui a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 412-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues aux articles L. 412-2 et L. 412-3, la première délivrance d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle est subordonnée à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 411-1." Aux termes de l'article L. 421-1 du même code : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " d'une durée maximale d'un an. / La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail. / (...). " Aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ". Aux termes de l'article R. 5221-1 de ce code : " (...). / II. - La demande d'autorisation de travail est faite par l'employeur. / (...). " Aux termes de l'article R. 5221-15 du même code : " La demande d'autorisation de travail mentionnée au I de l'article R. 5221-1 est adressée au moyen d'un téléservice au préfet du département dans lequel l'établissement employeur a son siège ou le particulier employeur sa résidence. "

3. Les dispositions précitées du code du travail prévoient que la demande d'autorisation de travail présentée par un étranger déjà présent sur le territoire national doit être adressée au préfet par l'employeur. Le préfet, saisi d'une telle demande, est tenu de la faire instruire et ne peut refuser l'admission au séjour de l'intéressé au motif que ce dernier ne produit pas d'autorisation de travail ou de contrat de travail visé par l'autorité compétente. Toutefois, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au préfet, saisi par un étranger déjà présent sur le territoire national et qui ne dispose pas d'un visa de long séjour, d'examiner la demande d'autorisation de travail ou de la faire instruire par les services compétents du ministère du travail, préalablement à ce qu'il soit statué sur la délivrance du titre de séjour.

4. Il ressort des pièces du dossier, et en particulier des termes mêmes de la décision contestée, que le préfet du Rhône a apprécié, de manière circonstanciée, la demande de titre de séjour en qualité de " salarié " que M. A... a présentée sur le fondement de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il a notamment relevé que si l'intéressé se prévalait d'une promesse d'embauche par contrat à durée indéterminée à temps plein en qualité de commercial dentaire et matériel médical, il ne pouvait bénéficier d'un tel titre faute pour lui d'avoir préalablement obtenu une autorisation de travail dans les conditions prévues par les dispositions des articles L. 5221-2 et suivants du code du travail.

5. M. A... précise à cet égard que, à l'appui de sa demande de titre, il avait saisi le préfet du Rhône d'une demande d'autorisation de travail accompagnée de pièces émanant de son employeur, la société Global Impex Medicateg, faute pour cette dernière d'avoir pu les transmettre elle-même aux services compétents, et, dans ces circonstances, que l'administration devait se prononcer sur sa demande d'autorisation de travail avant de lui refuser le séjour. Toutefois, comme l'a relevé l'administration, l'intéressé se maintenait en situation irrégulière depuis 2016, rien ne faisant a priori obstacle à ce qu'il retourne en Libye pour y demander un visa de long séjour en qualité de salarié, et faute pour lui de posséder un tel visa, elle n'était pas tenue de se prononcer sur sa demande d'autorisation de travail. De surcroît, l'intéressé n'apporte aucun élément susceptible de justifier que la société Global Impex Medicateg aurait été empêchée de déposer une telle demande, alors qu'il lui appartenait de le faire en vertu des dispositions précitées de l'article R. 5221-1 du code du travail et dans les conditions prévues par l'article R. 5221-15 du même code.

6. Le refus de séjour contesté n'est donc entaché d'aucun vice de procédure ni erreur de droit.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / (...). " Aux termes de l'article L. 5221-5 du code du travail : " Un étranger autorisé à séjourner en France ne peut exercer une activité professionnelle salariée en France sans avoir obtenu au préalable l'autorisation de travail mentionnée au 2° de l'article L. 5221-2. / (...). " L'article R. 5221-20 du code du travail, prévoit les critères selon lesquels une autorisation de travail est accordée.

8. Il ressort des pièces du dossier, et en particulier des termes mêmes de la décision contestée, que le préfet du Rhône, qui a instruit la demande dont il était saisi également au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a vérifié si l'intéressé justifiait de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels aussi bien au titre de sa " vie privée et familiale " que de sa qualité de " salarié ". Il a ainsi apprécié la nature de sa vie privée et familiale sur le territoire français et la promesse d'embauche dont il se prévalait. Il a relevé que le métier qu'il souhaitait exercer n'entrait pas dans la liste visée par l'arrêté du 1er avril 2021 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse. De plus le préfet, avant de statuer sur la demande de l'intéressé au titre de l'article L. 435-1, n'était pas tenu d'examiner son admission au travail dans les conditions prévues par les articles L.5221-2, L. 5221-5 et R. 5221-20 du code du travail. Aucun vice de procédure ni erreur de droit ne saurait davantage être retenu ici.

9. En troisième lieu, les moyens, déjà soulevés en première instance, tirés, de ce que le refus de titre de séjour méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et serait entaché d'erreurs manifestes d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle et des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et compte tenu de l'usage par le préfet de son pouvoir de régularisation, doivent, en l'absence d'éléments nouveaux et de critique pertinente en appel, être écartés par les motifs retenus par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter.

10. En quatrième lieu, il résulte de ce qui vient d'être dit que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français en litige serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour contesté, ne peut être retenu, et le moyen tiré de ce qu'elle méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux qui viennent d'être énoncés.

11. En dernier lieu, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, les moyens tirés de ce que les décisions fixant un délai de départ volontaire et le pays de renvoi seraient illégales par voie de conséquence de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français, ne peuvent être admis.

12. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 octobre 2021 du préfet du Rhône. Sa requête doit donc, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.

Délibéré après l'audience du 2 février 2023 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

M. Chassagne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 février 2023.

Le rapporteur,

J. Chassagne

Le président,

V-M. Picard La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY01075

al


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY01075
Date de la décision : 16/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: M. Julien CHASSAGNE
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : SELARL BS2A - BESCOU et SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-02-16;22ly01075 ?
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