La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/12/2022 | FRANCE | N°21LY03624

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 01 décembre 2022, 21LY03624


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 27 mai 2021 par lequel le préfet du Rhône lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et lui a fixé un pays de destination et d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement

n° 2104394 du 11 octobre 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demand...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 27 mai 2021 par lequel le préfet du Rhône lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et lui a fixé un pays de destination et d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 2104394 du 11 octobre 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 novembre 2021, M. D..., représenté par la SELARL BS2A Bescou et Sabatier avocats associés, agissant par Me Bescou, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;

2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours :

- la décision est entachée d'un défaut d'examen préalable réel et sérieux de sa situation ;

- la décision a été prise en méconnaissance du droit d'asile et des dispositions du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2017, et est entachée d'une erreur de droit, le préfet n'ayant pas tenu compte de ce qu'il a déclaré auprès des services de police avoir demandé l'asile en France ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision d'éloignement ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est illégale en raison de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français dans le délai de quatre-vingt-dix jours ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit de mémoire.

M. B... D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 janvier 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Pourny, président, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier que M. D..., ressortissant algérien né le 31 octobre 1964, entré en France le 27 septembre 2019 selon ses déclarations, accompagné de son épouse et de sa fille alors mineure, s'est maintenu sur le territoire français et a fait l'objet d'un arrêté du 27 mai 2021 par lequel préfet du Rhône l'a, sur le fondement du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, obligé à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et lui a fixé un pays de destination. M. D... relève appel du jugement du 11 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tenant à l'annulation de ces décisions.

Sur les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

2. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ". M. D... ne justifie, ni d'une entrée régulière, ni d'un titre de séjour. Il relevait dès lors de l'hypothèse prévue par ces dispositions.

3. En premier lieu, il ne ressort ni de la lecture de l'arrêté contesté, ni d'aucune autre pièce du dossier que l'autorité préfectorale n'aurait pas, préalablement à son édiction, procédé à un examen particulier, réel et sérieux de la situation de M. D... ou omis de tenir compte des informations portées à sa connaissance par l'intéressé. A cet égard, la circonstance que le préfet n'a pas fait mention, dans son arrêté, de la convocation du 6 octobre 2020 aux fins d'enregistrement d'une demande d'asile ne suffit pas à caractériser le défaut d'examen allégué, dès lors que l'autorité administrative n'est pas tenue de faire état, dans les décisions qu'elle édicte, de l'ensemble des éléments caractérisant la situation de l'étranger. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet n'aurait pas procédé à un examen attentif et individuel de la situation qui lui était soumise ne peut qu'être écarté.

4. En deuxième lieu, le requérant soutient avoir été empêché de déposer une demande d'asile au guichet de la préfecture, le 6 octobre 2020. Il ressort, toutefois, des termes mêmes de sa requête, qu'à la date de la décision d'éloignement contestée, le requérant n'avait déposé aucune demande d'asile pour lui-même, et déclare dans sa requête attendre la majorité de sa fille, le 25 octobre 2021, pour régulariser sa situation. S'il allègue avoir déclaré aux services de police, lors de son audition préalablement à l'édiction de la décision contestée, vouloir solliciter l'asile en France, il ressort de la lecture du procès-verbal d'audition du 27 mai 2021, qu'il s'est borné à déclarer être " en train de constituer un dossier afin de régulariser sa situation ", en invoquant uniquement la scolarisation de sa fille, la situation de sa femme et les états de service de son arrière-grand-père. Interrogé spécialement sur le point de savoir s'il avait sollicité l'asile dans un pays européen, il a répondu par la négative et n'a pas indiqué souhaiter faire une telle demande. Dans ces conditions, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision d'éloignement serait entachée d'erreur de droit, ou d'une méconnaissance des stipulations relatives au droit d'asile et des dispositions du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2017. Le moyen ne peut, par suite, qu'être écarté comme manquant en fait.

5. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier, et cela n'est pas contesté, que le requérant s'est maintenu sur le territoire national à l'expiration de son visa de court séjour, en octobre 2019, sans avoir sollicité de certificat de résidence ni de document de séjour. S'il invoque la présence en France de son épouse, Mme A..., elle-même en situation irrégulière, et de sa fille C... née le 25 octobre 2003, désormais majeure et scolarisée, ces éléments ne suffisent pas, à eux seuls, à faire regarder la mesure d'éloignement comme étant entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation qu'a portée le préfet du Rhône sur la situation personnelle et familiale du requérant. Dès lors, M. D..., qui au demeurant n'apporte aucun élément probant de nature à étayer sa situation personnelle et familiale sur le sol français, n'est pas fondé à soutenir que l'autorité administrative aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation. Par suite, ce moyen doit être également écarté.

En ce qui concerne le délai de départ volontaire :

6. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, invoqué par voie d'exception, n'est pas fondé.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

7. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que le requérant n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision d'obligation de quitter le territoire français et, en l'absence de décision portant refus de titre de séjour, il n'est pas davantage fondé à exciper de l'illégalité d'une telle décision.

8. En second lieu, aux termes de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. La mort ne peut être infligée à quiconque intentionnellement (...) ". Aux termes de l'article 3 de cette même convention : " nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". M. D... fait valoir qu'il ne pourrait, en sa qualité d'ancien inspecteur de police, retourner dans son pays d'origine où il serait menacé de mort, mais il n'apporte toutefois aucun élément probant ni étayé au soutien de ses allégations. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 10 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Stillmunkes, président assesseur,

Mme Bentéjac, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er décembre 2022.

Le président-rapporteur

F. Pourny

Le président-assesseur

H. Stillmunkes

La greffière

F. Abdillah

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY03624


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY03624
Date de la décision : 01/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. François POURNY
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : SELARL BS2A - BESCOU et SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-12-01;21ly03624 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award