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29/09/2022 | FRANCE | N°21LY02010

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 29 septembre 2022, 21LY02010


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de A... l'annulation de l'arrêté du 11 septembre 2020 D... lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi.

D... un jugement n° 2008704 du 2 avril 2021, le tribunal administratif de A... a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

D... une requête enregistrée le 17 juin 2021, M. B...,

représenté D... Me Rodrigues, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement susvisé du 2 avr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de A... l'annulation de l'arrêté du 11 septembre 2020 D... lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi.

D... un jugement n° 2008704 du 2 avril 2021, le tribunal administratif de A... a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

D... une requête enregistrée le 17 juin 2021, M. B..., représenté D... Me Rodrigues, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement susvisé du 2 avril 2021 et l'arrêté du 11 septembre 2020 pris à son encontre ;

2°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 30 euros D... jour de retard, un titre de séjour mention " vie privée et familiale ", à défaut un titre de séjour mention " salarié " et dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt sous la même astreinte ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 30 euros D... jour de retard et dans l'attente, lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision portant refus de séjour est entachée d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen particulier de sa situation individuelle ;

- elle est entachée d'une erreur de fait ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans leur application ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale D... une décision du 19 mai 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère ;

- et les observations de M. Vallecchia, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant malien né le 1er mai 2001, déclare être entré irrégulièrement en France en septembre 2017. Il a été pris en charge D... l'aide sociale à l'enfance à compter du 5 décembre 2017, à la suite d'un jugement en assistance éducative du tribunal pour enfants de A... du même jour. M. B... a sollicité, le 19 mai 2019, son admission au séjour en faisant valoir sa prise en charge D... l'aide sociale à l'enfance après l'âge de seize ans. D... un arrêté du 11 septembre 2020, le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement D... lequel le tribunal administratif de A... a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

2. Aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigé. "

3. Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", présentée sur le fondement de ces dispositions dans le cadre de l'admission exceptionnelle au séjour, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans et qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle. Si ces conditions préalables sont remplies et que l'intéressé relève ainsi du champ d'application de ces dispositions, le préfet doit ensuite, dans le cadre du large pouvoir d'appréciation que lui a laissé le législateur, prendre en compte la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française.

4. Il ressort des pièces du dossier que la présence de M. B... en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans et qu'il justifiait suivre, à la date de sa demande, depuis au moins six mois une formation qualifiante. Il ressort également des pièces versées qu'aucun avis de la structure d'accueil n'a pu être recueilli concernant son insertion dans la société française en raison de la mainlevée, prononcée D... jugement du 25 juillet 2018 du juge des enfants, de la mesure en assistance éducative prise le 5 décembre 2017 à son profit. Toutefois, il ressort des pièces versées que M. B... justifie de l'obtention d'un CAP Cuisine en juin 2020 et d'une embauche en qualité de cuisinier D... la SARL Mogador D... contrat à durée indéterminée signé le 24 juillet 2020. Le gérant de ce restaurant atteste d'ailleurs des qualités professionnelles de M. B... relevant son sérieux, son autonomie, sa force de travail ainsi que ses rapports excellents avec la clientèle. En outre, ainsi que le soutient M. B..., la décision contestée est entachée d'une erreur de fait dès lors que le préfet du Rhône a relevé à tort dans cette décision qu'il " était défavorablement connu des services de police " alors qu'il ressort des pièces du dossier que si M. B... a été poursuivi devant le tribunal correctionnel de A... pour recel de faux documents administratifs et déclaration fausse ou incomplète pour obtenir d'un organisme de protection sociale une allocation ou une prestation indue, cette procédure n'a donné lieu à aucune condamnation de M. B..., la juridiction correctionnelle s'étant estimée incompétente à son égard. L'intéressé soutient ne plus avoir de contact avec sa famille restée dans son pays d'origine. A ce titre, la seule circonstance que son père ait pu déposer une demande à son nom pour obtenir un jugement supplétif daté du 12 février 2018 ne suffit pas à révéler la nature des attaches qu'il aurait conservées avec sa famille. Dans ces circonstances particulières, en refusant de lui délivrer, à titre exceptionnel, un titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Rhône a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

5. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à demander l'annulation de la décision du 11 septembre 2020 D... laquelle le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour à titre exceptionnel et D... voie de conséquence, l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et fixant le pays de destination.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

6. Eu égard au motif qui fonde l'annulation D... le présent arrêt de la décision de refus d'admission au séjour opposée à M. B... D... le préfet du Rhône, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour en qualité de " salarié " dans un délai de deux mois, après lui avoir délivré une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés à l'instance :

7. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que Me Rodrigues, avocate, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2008704 du 2 avril 2021 du tribunal administratif de A... est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 11 septembre 2020 D... lequel le préfet du Rhône a refusé de délivrer un titre de séjour à M. B..., l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de destination est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet du Rhône de délivrer à M. B... un titre de séjour en qualité de " salarié " dans un délai de deux mois, après lui avoir délivré une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours.

Article 4 : L'État versera à Me Rodrigues, avocate de M. B..., une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Article 5 : Le surplus de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., au préfet du Rhône et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au Procureur de la République près le tribunal judiciaire de A... en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative.

Délibéré après l'audience du 8 septembre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Dèche, présidente ;

Mme Le Frapper, première conseillère ;

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public D... mise à disposition au greffe le 29 septembre 2022.

La rapporteure,

V. Rémy-NérisLa présidente,

P. Dèche

La greffière,

A-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

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N° 21LY02010

kc


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme DECHE
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : RODRIGUES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Date de la décision : 29/09/2022
Date de l'import : 09/10/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 21LY02010
Numéro NOR : CETATEXT000046381170 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-09-29;21ly02010 ?
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