La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/05/2022 | FRANCE | N°21LY01250

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 03 mai 2022, 21LY01250


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du 29 avril 2020 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office et d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de résidence temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le dé

lai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du 29 avril 2020 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office et d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de résidence temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions.

Par un jugement n° 2003405 du 26 mars 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 19 avril 2021, M. A..., représenté par Me Sabatier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 26 mars 2021 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler les décisions du 29 avril 2020 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de résidence temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision de refus d'admission au séjour a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et est entachée pour ce motif d'une erreur manifeste d'appréciation ; elle méconnaît les stipulations de l'article 6§5 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en portant une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale en conséquence de l'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français.

La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'écritures en défense.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Conesa-Terrade, première conseillère.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant algérien né le 27 avril 1978, est entré en France le 4 mars 2018, accompagné de son épouse et de leurs enfants, sous couvert d'un visa court-séjour. Il a sollicité, le 22 mars 2019, un titre de séjour sur le fondement des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien en invoquant l'état de santé de ses deux fils nés en 2010. Par arrêté du 29 avril 2020, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne la légalité du refus d'admission au séjour :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) / 5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...). ".

3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

4. Enfin, aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

5. Au soutien de son moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant par la décision de refus d'admission au séjour prise par le préfet du Rhône en réponse à sa demande de délivrance d'un certificat de résident sur le fondement des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien, le requérant se prévaut de l'état de santé de ses deux fils mineurs, jumeaux âgés de 9 ans à la date de la décision attaquée, atteints d'autisme, qui bénéficient en France d'un suivi pluridisciplinaire adapté et sont scolarisés dans un institut médico-éducatif spécialisé. Toutefois, il ressort de la lecture de la décision attaquée que pour refuser de délivrer le certificat de résidence sollicité par M. A..., le préfet du Rhône s'est fondé sur le sens de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, selon lequel si l'état de santé des deux jeunes enfants nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ceux-ci, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé algérien, peuvent y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Si le requérant produit un article de presse faisant état de carences dans la prise en charge de l'autisme en Algérie et un compte-rendu médical en date du 16 juin 2020, établi par un médecin pédopsychiatre à Alger, qui estime que la prise en charge des enfants " serait meilleure en France ", il ressort de ce compte-rendu médical que les enfants de M. A... ont été régulièrement suivis en Algérie, depuis 2014, et ont bénéficié d'une prise en charge psycho-éducative personnalisée et globale en partenariat avec leurs parents. Par suite, en l'absence d'élément de nature à démontrer l'impossibilité pour les enfants du requérant de bénéficier effectivement d'un traitement adapté en cas de retour dans leur pays d'origine, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision serait contraire à l'intérêt supérieur des enfants et serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur leur situation.

6. D'autre part, M. A..., qui se borne à faire état de la présence à ses côtés de son épouse, au demeurant également en situation irrégulière, et de leur implication dans le suivi médical de leurs enfants, résidait en France depuis seulement deux ans à la date de la décision attaquée, sans justifier de liens anciens intenses et stables sur le territoire français, ni de son insertion. Il n'établit ni même n'allègue de l'existence d'obstacle à la reconstitution de sa cellule familiale en Algérie, où il a conservé des attaches familiales. Dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France et dans la mesure où il n'est pas établi que la décision contestée porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations du § 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés. En l'absence d'autre élément, le préfet n'a pas davantage entaché sa décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne la légalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français :

7. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant refus d'admission au séjour à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Le moyen doit, par suite, être écarté.

8. En l'absence de tout élément particulier invoqué, et même en tenant compte des conséquences spécifiques à la mesure d'éloignement, les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés pour les motifs énoncés au point 5 s'agissant du refus d'admission au séjour.

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :

9. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité des décisions portant refus d'admission au séjour et obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office. Le moyen ne peut, par suite, qu'être écarté.

10. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, que les conclusions à fin d'annulation doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte.

Sur les frais liés à l'instance :

11. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, le versement au requérant, de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2022, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Gayrard, président-assesseur,

Mme Conesa-Terrade, première conseillère.

Lu en audience publique le 3 mai 2022.

La rapporteure,

E. Conesa-Terrade

Le président,

F. Pourny

La greffière,

F. Abdillah

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY01250


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY01250
Date de la décision : 03/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle CONESA-TERRADE
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : SELARL BS2A - BESCOU et SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 17/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-05-03;21ly01250 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award