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26/01/2022 | FRANCE | N°21LY00336

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 26 janvier 2022, 21LY00336


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 1er janvier 2021 par lesquelles le préfet de la Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Par un jugement n° 2100001 du 5 janvier 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribu

nal administratif de Lyon a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour

P...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 1er janvier 2021 par lesquelles le préfet de la Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Par un jugement n° 2100001 du 5 janvier 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 2 février 2021, la préfète de la Loire, représentée par Me Tomasi Me Dumoulin et le Cabinet Mathieu et Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon du 5 janvier 2021 ;

2°) de rejeter la demande de première instance de M. A....

Elle soutient que :

- M. A..., ne peut être regardé comme ayant présenté une demande d'asile contrairement à ce que le premier juge a considéré ;

- les moyens de première instance sont infondés.

La requête a été communiquée à M. A..., qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.

Considérant ce qui suit :

1. La préfète de la Loire relève appel du jugement du 5 janvier 2021 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 1er janvier 2021 faisant obligation à M. B... A..., ressortissant tunisien, de quitter le territoire français, refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement et prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande (...) / Lorsque l'enregistrement de sa demande d'asile a été effectué, l'étranger se voit remettre une attestation de demande d'asile (...) / La délivrance de cette attestation ne peut être refusée au motif que l'étranger est démuni des documents et visas mentionnés à l'article L. 211-1. Elle ne peut être refusée que dans les cas prévus aux 5° et 6° de l'article L. 743-2. (...) ". Aux termes de ce dernier article : " (...) sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (...), le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : (...) / 5° L'étranger présente une nouvelle demande de réexamen après le rejet définitif d'une première demande de réexamen ; / 6° L'étranger fait l'objet d'une décision définitive d'extradition vers un Etat autre que son pays d'origine ou d'une décision de remise sur le fondement d'un mandat d'arrêt européen ou d'une demande de remise par une cour pénale internationale (...) ".

3. Les dispositions précitées ont pour effet d'obliger l'autorité de police à transmettre au préfet compétent, et celui-ci à enregistrer, une première demande d'asile formulée par un étranger à l'occasion de son interpellation. Par voie de conséquence, elles font légalement obstacle à ce que le préfet fasse usage des pouvoirs que lui confèrent les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en matière d'éloignement des étrangers en situation irrégulière avant qu'il ait été statué sur cette demande. Ce n'est que dans les hypothèses limitativement énumérées à l'article L. 743-2, et notamment les 5° et 6° de cet article, que la délivrance d'une attestation de demande d'asile peut être refusée et que le préfet peut prendre une mesure d'éloignement à l'encontre du demandeur d'asile.

4. Il ressort des pièces du dossier et, notamment, du procès-verbal de l'audition par les services de police de M. A... le 31 décembre 2020 à la suite de son interpellation, que ce dernier a indiqué être entré en France depuis trois ans environ, n'avoir effectué aucune démarche auprès des autorités françaises pour obtenir un titre de séjour, mais a précisé, de manière non équivoque, vouloir demander l'asile. Il a notamment indiqué avoir quitté son pays d'origine car il était militaire en Tunisie et avait eu des soucis et vouloir demander l'asile. Il a ajouté ultérieurement " je pourrais craindre à ma vie si je suis expulsé ". M. A... a ainsi clairement manifesté sa volonté de demander le bénéfice de l'asile politique aux autorités françaises lors de son audition par les services de police. Il n'est pas soutenu et il ne ressort d'ailleurs pas des pièces du dossier que la demande de l'intéressé entrait dans les cas de refus de délivrance de l'attestation d'enregistrement limitativement prévus par l'article L. 741-1 précité. En dépit du caractère très général des déclarations de M. A... sur ses craintes, il n'appartient pas au préfet d'apprécier le bien-fondé de cette demande d'asile, quand bien même elle présenterait un caractère abusif alors que M. A... n'avait entamé aucune démarche en ce sens avant son interpellation. La préfète de la Loire ne peut davantage utilement de prévaloir de la circonstance, postérieure à la mesure d'éloignement en litige, que l'intéressé n'aurait pas réitéré sa demande d'asile au cours de sa rétention administrative.

5. Il résulte de ce qui précède que la préfète de la Loire n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le premier juge a annulé ses décisions du 1er janvier 2021.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la préfète de la Loire est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de la Loire.

Délibéré après l'audience du 11 janvier 2022 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 janvier 2022.

2

N° 21LY00336


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00336
Date de la décision : 26/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : TOMASI

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-01-26;21ly00336 ?
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