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16/12/2021 | FRANCE | N°21LY01001

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 16 décembre 2021, 21LY01001


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... C... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2020 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2002886 du 11 mars 2021, le tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté du 22 septembre 2020 du préfet de la Côte-d'Or et lui a enjoint de procéder au réexamen de la demande d

e titre de séjour de Mme C... A... et d'y statuer par une nouvelle décision dans les deux ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... C... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2020 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2002886 du 11 mars 2021, le tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté du 22 septembre 2020 du préfet de la Côte-d'Or et lui a enjoint de procéder au réexamen de la demande de titre de séjour de Mme C... A... et d'y statuer par une nouvelle décision dans les deux mois suivant la notification du jugement.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 1er avril 2021, le préfet de la Côte-d'Or, représenté par Me Claisse, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme C... A... devant le tribunal administratif de Dijon.

Il soutient que :

- Mme C... A... ne peut se prévaloir du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que la reconnaissance de paternité de l'enfant est frauduleuse ;

- la fraude est établie ;

- il s'en remet à ses écritures de première instance.

Par un mémoire, enregistré le 29 avril 2021, Mme C... A..., représentée par Me Clemang, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la fraude n'est pas établie ;

- le refus de délivrance d'un titre de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français sera annulée par la voie de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnait l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Mme C... A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 avril 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Caraës ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... C... A..., ressortissante comorienne née le 15 août 1981, est entrée en France irrégulièrement le 2 mai 2016 selon ses déclarations. Le 26 août 2019, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 22 septembre 2020, le préfet de la Côte-d'Or a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement du 11 mars 2021, dont le préfet de la Côte-d'Or relève appel, le tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté du 22 septembre 2020 du préfet de la Côte-d'Or et lui a enjoint de procéder au réexamen de la demande de titre de séjour de Mme C... A... et d'y statuer par une nouvelle décision dans les deux mois suivant la notification du jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ; / Lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent, en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, justifie que ce dernier contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du même code, ou produit une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant ; ". Il résulte de ces dispositions que la délivrance d'un titre de séjour est subordonnée à ce que l'auteur de la reconnaissance, lorsqu'il n'est pas le postulant au séjour, contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant.

3. Si la reconnaissance d'un enfant est opposable aux tiers, en tant qu'elle établit un lien de filiation et, le cas échéant, en tant qu'elle permet l'acquisition par l'enfant de la nationalité française, dès lors que cette reconnaissance a été effectuée conformément aux conditions prévues par le code civil, et s'impose donc en principe à l'administration tant qu'une action en contestation de filiation n'a pas abouti, il appartient néanmoins au préfet, s'il est établi, lors de l'examen d'une demande de titre de séjour présentée sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que la reconnaissance de paternité a été souscrite dans le but de faciliter l'obtention de la nationalité française ou d'un titre de séjour, de faire échec à cette fraude et de refuser, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, tant que la prescription prévue par les articles 21 et 335 du code civil n'est pas acquise, la délivrance de la carte de séjour temporaire sollicitée par la personne se présentant comme père ou mère d'un enfant français ou de procéder, le cas échéant, à son retrait.

4. Pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par Mme C... A... en qualité de mère d'un enfant français, le préfet de la Côte-d'Or a estimé que la reconnaissance de paternité de l'enfant Aphradim B... par M. E... B... a été établie frauduleusement dans le seul but de permettre à Mme C... A..., mère de l'enfant, de se maintenir sur le territoire français en obtenant un titre de séjour en qualité de " parent d'enfant français " en relevant l'existence de doutes sérieux quant à la sincérité de la reconnaissance de paternité de M. E... B... compte tenu de ce que l'enfant avait été reconnu le 5 novembre 2018, que l'existence d'une communauté de vie ou d'une relation entre la requérante et M. B... avant, durant et après la conception de l'enfant n'était pas établie et que Mme C... A... ne justifiait pas que le père déclaré de l'enfant, né le 28 janvier 2019, contribuait effectivement à l'entretien et à l'éducation de celui-ci dans les conditions prévues à l'article 371-2 du code civil.

5. Toutefois, ces seules circonstances ne permettent pas, à elles seules, d'établir le caractère frauduleux de la reconnaissance de paternité en cause et de considérer qu'elle n'aurait été souscrite que dans le but de faciliter l'obtention d'un titre de séjour par la requérante, en l'absence, notamment, de tout indice de rétribution ou d'une déclaration discordante de l'un ou l'autre parent ou encore d'un tiers quant à la filiation biologique réelle de l'enfant.

6. Par suite, le préfet de la Côté d'Or ne pouvait, pour ce motif, refuser de délivrer à Mme C... A... le titre de séjour sollicité sans méconnaître le 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En conséquence, le refus de titre de séjour en litige et l'obligation de quitter le territoire français qui l'accompagne sont entachés d'illégalité et le préfet de la Côte d'Or n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté du 22 septembre 2020.

Sur les frais liés au litige :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à Me Clemang en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que celui-ci renonce à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Côte-d'Or est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à Me Clemang en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que celui-ci renonce à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... A..., à Me Dominique Clemang et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.

Délibéré après l'audience du 18 novembre 2021, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Evrard, présidente-assesseure,

Mme Caraës, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 décembre 2021.

5

N° 21LY01001


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Rozenn CARAËS
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : CENTAURE AVOCATS

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Date de la décision : 16/12/2021
Date de l'import : 28/12/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 21LY01001
Numéro NOR : CETATEXT000044553100 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-12-16;21ly01001 ?
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