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18/11/2021 | FRANCE | N°20LY02549

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 18 novembre 2021, 20LY02549


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 20 février 2020 par lequel le préfet du Rhône l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de soixante jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office et d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'au réexamen de sa situation.

Par un jugement n° 2001640 du 18 juin 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa de

mande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 1er septembre 2020, Mm...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 20 février 2020 par lequel le préfet du Rhône l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de soixante jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office et d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'au réexamen de sa situation.

Par un jugement n° 2001640 du 18 juin 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 1er septembre 2020, Mme D... C..., représentée par Me Messaoud, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 18 juin 2020 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler les décisions du 20 février 2020 par lesquelles le préfet du Rhône l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de soixante jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

Mme D... C... soutient que :

- le jugement a omis de statuer sur le moyen tiré de la violation de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre de la mesure d'éloignement contestée ;

- la décision est entachée d'erreur de fait et d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- la décision méconnaît les dispositions de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Le préfet du Rhône, auquel la requête a été communiquée, n'a pas produit de mémoire.

Mme D... C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 août 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Fédi, président-assesseur.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., de nationalité tunisienne, qui est régulièrement entrée en France le 14 juillet 2019 avec ses trois enfants, relève appel du jugement du tribunal administratif de Lyon du 18 juin 2020 qui a rejeté sa demande d'annulation des décisions en date du 20 février 2020 par lesquelles le préfet du Rhône l'a obligée à quitter le territoire français, a fixé un délai de départ volontaire de soixante jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office.

Sur la régularité du jugement :

2. Le jugement du tribunal administratif de Lyon, en ce qu'il précise que Mme C... n'avait pas sollicité l'asile en France à la date de la décision attaquée, est régulier et répond au moyen tiré de l'applicabilité à l'espèce de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

3. Il ressort des termes mêmes de l'arrêté en litige qu'il procède effectivement à l'examen préalable, particulier, réel et sérieux de la situation de Mme C.... Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen de la situation de l'intéressée doit être écarté.

4. Aux termes de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande et procède à la détermination de l'État responsable en application du règlement (UE) no 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ou en application d'engagements identiques à ceux prévus par le même règlement, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État. Tout demandeur reçoit, dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprend, une information sur ses droits et obligations en application dudit règlement, dans les conditions prévues à son article 4 (...) ". Si Mme C... soutient qu'elle avait l'intention de solliciter l'asile en France, il est constant qu'elle n'avait pas présenté une telle demande à la date de la décision attaquée, puisqu'elle se borne à produire une convocation, pour le 11 mars 2020, en vue de l'enregistrement de sa demande d'asile, qui est postérieure à la décision en litige, alors même qu'elle est entrée en France le 14 juillet 2019. En tout état de cause, elle n'avait pas indiqué, lors de sa garde à vue le 20 février 2020, avoir rejoint la France pour demander l'asile. Par suite, l'intéressée ne peut utilement invoquer le bénéfice de ces dispositions, qui ne constituent pas le fondement de sa demande.

5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Il ressort des pièces du dossier que Mme C..., née le 13 novembre 1981, est entrée régulièrement en France, où réside son frère, le 14 juillet 2019. Elle n'établit pas être dépourvue d'attaches dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente-sept ans. De plus, elle ne démontre aucune insertion sociale ou professionnelle particulière en France, où sa présence est récente. Dans ces circonstances, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise et aurait ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes raisons, elle n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces stipulations.

6. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Tout d'abord, en se bornant à soutenir que les enfants ne pourraient pas bénéficier d'une scolarité en Tunisie, compte tenu du fait que leur père leur interdirait toute scolarité, ce qu'elle ne démontre pas, l'appelante n'établit pas que l'administration aurait méconnu les stipulations précitées. Ensuite, si Mme C... soutient que le placement par l'autorité judiciaire de ses enfants interdirait leur retour dans leur pays d'origine, la Tunisie, et briserait de ce fait la cellule familiale, elle n'apporte aucun élément relatif aux suites qui ont été données par le juge des enfants lors de son rendez-vous du 11 mars 2020, au demeurant postérieur à la décision attaquée. En l'état des pièces produites en appel et en l'absence d'informations précises et certaines sur la nature et la portée d'un éventuel placement, aucun élément ne permet de caractériser une méconnaissance des stipulations précitées. Par suite, c'est à bon droit et sans erreur manifeste d'appréciation que le tribunal administratif de Lyon a écarté le moyen tiré de l'absence de prise en compte par le préfet du Rhône de l'intérêt supérieur des enfants de A... C....

7. Il résulte de ce qui précède que Mme D... C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 2 novembre 2021, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 novembre 2021.

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N° 20LY02549


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY02549
Date de la décision : 18/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Gilles FEDI
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : MESSAOUD

Origine de la décision
Date de l'import : 30/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-11-18;20ly02549 ?
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